Pomme de senteur

bijou en métal comprenant des parfums

Une pomme de senteur[1], également nommée pomme d'ambre[2], pomander[3], pomandre[4] ou pommandre[5] est une boule en forme de pomme composée de produits odoriférants à visée prophylactique tels que l'ambre gris, la civette ou le musc. Plus tard, il devient un bijou en métal précieux ciselé, contenant les mêmes parfums[6].

Portrait de Jan Gerritz van Egmond van de Dijenborgh, bourgmestre d'Alkmaar, détail, v. 1518 par Jacob Cornelisz Van Ootsanen (1472, 1533)

Histoire modifier

 
Esquisse d'un pomander basée sur un dessin d'Albrecht Dürer

L'histoire des pommes de senteur court du XIIe siècle au XVIIIe siècle.

La première mention de pomme d'ambre, ou pomander, désigne une pépite d'ambre gris enchâssée dans une boule de senteurs[7]. On lui prêtait des vertus curatives mais aussi aphrodisiaques. Le premier pomander est cité en 1174 dans un texte décrivant le présent offert à l'Empereur Frédéric Barberousse par le roi Baudouin de Jérusalem. Il le remerciait ainsi de son aide dans la lutte contre les infidèles[réf. souhaitée].

À partir du XIVe siècle, le terme de « pomander » désigne l'objet où prend place la boule odorante. Elle est constituée d'une petite cage sphérique s'ouvrant à l'équateur par une charnière et un ressort. Elle a un usage essentiellement prophylactique ou thérapeutique et est très utilisée pendant les épidémies de peste, les recettes du mélange de substances aromatiques étant adaptées en fonction du niveau de vie des utilisateurs[6]. Elle sert également à parfumer le linge de corps qui n'est pas renouvelé régulièrement, même dans les milieux de la Cour[8].

Au temps de la Renaissance, les pomanders deviennent pièces d'orfèvrerie, ciselées en or, argent ou vermeil.

Au tournant du XVIe siècle, ils s'ornent d'incrustations de perles, émaux ou pierres précieuses, grenat, rubis, topaze, émeraude ou diamant. Munis d'un pied, ils s'ouvrent en quartiers sur de petits réceptacles pouvant réunir plusieurs parfums sous forme de pâte ou de poudre.

La fin du XVIIe siècle voit leur supposés pouvoir ésotériques tournés en dérision. Ils ne sont plus portés que par coquetterie et leurs senteurs lourdes et entêtantes sont supposées servir l'art de la séduction.

Ils passent de mode au milieu du XVIIIe siècle.

Symbolique modifier

Les pomanders adoptèrent des formes très variées : crânes, crucifix, escargots, pommes, œufs, noix ou fleurs, chacune ayant une signification symbolique et ésotérique particulière. Les monogrammes, inscription ou motifs allégoriques dont ils étaient ornés, étaient supposés renforcer leur pouvoir. Transmis de génération en génération, les pomanders étaient en effet bien plus que des objets à parfumer : on leur prêtait des vertus magiques protégeant des forces du mal et de la maladie. Les princes et les nobles en faisaient grand usage, comme les prêtres et les médecins qui comptaient sur leur présence pour se préserver de la contagion.

Usage modifier

 
Dessins de pomander et boîte à parfum (1896)

Les grands pomanders se portent accrochés à la ceinture ou en pendentif autour du cou.

Les plus petits, parfois pas plus grands qu'un dé à coudre et reliés par une chaînette à une bague, se tiennent en permanence au creux de la main.

D'autres se fixent en breloque à un bracelet, un collier ou servent de bouton à une cape.

Version végétale modifier

 
Une « pomme d'ambre » : orange plantée de clous de girofle

L'orange, ou autre agrume, piquée de clous de girofle et enrobée de poudre d'épices est la version végétale du bijou en métal précieux. En ameublement, elle sert aujourd'hui à parfumer et décorer la maison ou, placée dans les armoires, à protéger le linge contre les mites[7].

Annexes modifier

Iconographie modifier

Bibliographie modifier

Notes et références modifier

  1. De la « pomme de senteur » à la « pomme d'ambre », p. 83 Le Parfum et la chair, Annick Le Guérer, in Odeurs, Isabelle Balsamo (dir), Terrain : carnets du patrimoine ethnologique n° 47, Paris, Éditions MSH, 2006, 164 p. (ISBN 9782735111305)
  2. (en) De la pomme d'ambre à la pomandre p. 44 Tudor costume and fashion, Herbert Norris, Courier Dover Publications, 1997, 832 p. (ISBN 9780486298450)
  3. Le pomander à la renaissance, pp. 107-108 Le parfum des origines à nos jours, Annick Le Guérer, Paris, Odile Jacob, 2005, 406 p. (ISBN 9782738116703)
  4. La pomandre dans les chapelets et autres bijoux, pp. 160-162 Flore au paradis : emblématique et vie religieuse aux XVIe et XVIIe siècles, volume 9, Paulette Choné, Bénédicte Gaulard, Glasgow, Department of French, University of Glasgow, 2004, 230 p. (ISBN 9780852618097)
  5. La pommandre de La Guirlande de lauriers, John Skelton, p. 815 in Patrimoine littéraire européen : anthologie en langue française, volume 6 : Prémices de l'humanisme, 1400-1515, Jean-Claude Polet (dir.), Bruxelles, De Boeck Université, 1995, 940 p. (ISBN 9782804120788)
  6. a et b Julien Pierre, « Les pommes de senteur ou pommes d'ambre : Renate Smollich, Der Bisamapfel in Kunst und Wissenschaft [compte-rendu] », sur Persée, Revue d'Histoire de la Pharmacie, .
  7. a et b « Dix objets du passé écoresponsables : pomme d’ambre, panier de fermentation, fuseau de lavande… », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. Anne-Marie Mommessin, Femme à sa toilette. Beauté et soins du corps à travers les âges, Altipresse, , p. 185.