Massacre de Bamenda

massacre au Cameroun

Massacre de Bamenda
Date
Lieu Bamenda (région du Nord-Ouest, Cameroun)
Victimes Civils
Type Fusillade de masse
Morts 10
Blessés 2
Auteurs présumés Rebelles séparatistes
Guerre Crise anglophone au Cameroun
Coordonnées 5° 57′ 46″ nord, 10° 09′ 22″ est
Géolocalisation sur la carte : région du Nord-Ouest
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Massacre de Bamenda
Géolocalisation sur la carte : Cameroun
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Massacre de Bamenda

Le massacre de Bamenda a lieu le lors de la crise anglophone au Cameroun.

Contexte modifier

La région du Nord-Ouest est l’une des deux régions du Cameroun, avec le Sud-Ouest, peuplées principalement par la minorité anglophone, dont une partie s’estime marginalisée par la majorité francophone de ce pays dirigé par le président Paul Biya depuis 1982.

Les deux régions sont le théâtre depuis fin 2017 d’un conflit meurtrier entre les rebelles séparatistes d’un côté, l’armée et la police de l’autre, les deux camps étant régulièrement accusés par des ONG et l’ONU de crimes contre les civils. Le conflit fait plus de 6 000 morts et force plus d’un million de personnes à se déplacer, selon le centre de réflexion International Crisis Group (ICG)[1].

Le , un journaliste de 26 ans, Anye Nde Nsoh, est tué par des rebelles séparatistes dans un bar de Bamenda[2]. Le , des soldats tuent cinq civils dans un quartier de la ville[3].

Déroulement modifier

Selon un premier témoin, les assaillants en uniforme militaire sont arrivés à bord de véhicules vers 19 h 30 et prennent d'assaut un carrefour de la ville où se trouvent des restaurants, des bars et des magasins. Ils ordonnent aux gens de se mettre à terre, les accusant de ne pas soutenir les séparatistes locaux, et ouvrent le feu alors que certains obéissaient et que d'autres s'enfuyaient. Selon le témoin, les assaillants tirent sur les gens « sans discernement » avant de s'enfuir[4].

Selon un second témoin, les hommes armés sont arrivés avec une voiture, se sont déplacés dans la rue et sont partis à la recherche de personnes originaires de la région de l'Ouest qu'ils accusent d'avoir montré la cachette de leurs collègues aux forces de sécurité qui les ont tués[5].

Selon un troisième témoin qui se trouvait au carrefour révèle qu'il n'y a pas eu de tirs aveugles, mais que seules huit des dix victimes sont spécifiquement visées et tuées. Il ajoute que deux des dix victimes sont les seules à avoir été touchées par des balles perdues[6].

Selon le colonel Cyrille Atonfack, chargé de communication du ministère de la Défense, à 19 h 30, près d’un débit de boissons, une dizaine de sécessionnistes vêtus d’uniformes semblables aux tenues militaires et munis d’armes automatiques rassemblent plusieurs citoyens avant d’ouvrir un feu nourri et aveugle sur ceux-ci touchant aussi mortellement quelques clients attablés[1].

Selon des informations recueillies auprès de sources fiables à Ntahsah, un quartier de Bamenda I d'où sont originaires huit des dix victimes, celles-ci sont sorties de chez elles par des hommes armés soupçonnés d'être des combattants séparatistes et emmenées au carrefour, où elles sont tuées[6].

Victimes modifier

Dix personnes sont tuées et deux sont blessées[7] dont trois femmes et sept hommes âgés de 24 à 56 ans[8], parmi lesquels un couple de jeunes mariés[9]. Sept des dix victimes sont originaires de la région de l'Ouest[10].

Enquête modifier

Le ministre de la Défense annonce qu'une enquête est ouverte par les autorités administratives et judiciaires[1]. Le gouverneur de la région du Nord-Ouest, Adolphe Lele Lafrique, déclare à Reuters qu'une chasse à l'homme est lancée pour retrouver les « terroristes » à l'origine du massacre[11]. Le , l'armée affirme avoir arrêté des dizaines de séparatistes soupçonnés d'être à l'origine du massacre[12].

Réactions modifier

Nationales modifier

À la suite du massacre, entre 400 et 500 personnes descendent dans les rues appelant à la fin du conflit dans les régions anglophones. En marge de la manifestation, l'archevêque de Bamenda, Andrew Nkea Fuanya, dépose des bougies sur les lieux de l'attaque, entouré de fidèles de la paroisse[13].

L'Ambassade des États-Unis au Cameroun estime que le massacre « souligne le prix tragique que les civils paient en raison de la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest » et affirme que le gouvernement américain réitère à toutes les parties la nécessité de rechercher une solution pacifique par la discussion plutôt que par la violence[14].

Maurice Kamto, président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) déclare que son parti regrette que de nombreux Camerounais continuent à périr sous les balles de leurs « propres frères ». Le parti d'opposition affirme que le conflit aurait pris une nouvelle tournure, les sécessionnistes anglophones s'attaquant désormais aux francophones sous prétexte que ces derniers ne sont pas sensibles à leurs souffrances[15]. En outre, le parti appelle le gouvernement du Cameroun à « faire la lumière sur le crime odieux de Nancho Junction » et de « punir sans faiblesse » les auteurs de la tuerie[16].

Le , le président Paul Biya indique dans une lettre adressée au gouverneur de la région du Nord-Ouest avoir « pris connaissance du bilan humain élevé causé par un groupe d'assaillants armés, qui ont pris pour cible de paisibles et innocent citoyens », assurant qu'« il s'agit d'un nouvel acte terroriste lâche et barbare, perpétré par les adeptes de la division et du chaos ». Le chef d'État présente ses condoléances « aux familles meurtries » et associe la compassion émue de son épouse. En outre, il demande au gouverneur de la région du Nord-Ouest de rassurer les populations de la région sur « la totale détermination de l'État à préserver la paix et à garantir la sécurité des hommes et des biens sur toute l'étendue du territoire »[17].

Le , lors d'une cérémonie d'hommage aux victimes, le gouverneur de la région du Nord-Ouest, Adolphe Lele Lafrique, dépose une gerbe de fleurs au nom du président Paul Biya et de la première dame Chantal Biya. Elle est également suivie d'un allumage symbolique de bougies[18]. Des dizaines de personnes vêtues de noir se rassemblent à Bafoussam pour dénoncer la tuerie. La cérémonie est présidée par le gouverneur de la région de l'Ouest, Augustine Awa Fonka, en présence de chefs religieux, de chefs traditionnels et de représentants de la société civile. Les participants condamnent le massacre et expriment leur colère face à la violence qui sévit dans la région. Le gouverneur de la région de l'Ouest appelle les auteurs des violences à déposer les armes et à revenir à la table des négociations[19].

Internationales modifier

Le , l’Ambassade du Cameroun en France tient une cérémonie d'hommage aux victimes[20].

Notes et références modifier

  1. a b et c « Au Cameroun, dix civils tués dans une attaque de séparatistes armés », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. « Au Cameroun, un journaliste tué par des séparatistes anglophones », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. (en-US) « Anglophone Crisis: Government Forces Kill Five Civilians In Bamenda », sur Mimi Mefo Info, (consulté le )
  4. (en) « Gunmen Kill 10 in Northwest Cameroon », sur VOA, (consulté le )
  5. (en-US) « Investigation: How Nacho killings unfolded, ADF alleged involvement », sur Cameroon News Agency (consulté le )
  6. a et b (en-US) « Investigation: How Nacho killings unfolded, ADF alleged involvement », sur Cameroon News Agency (consulté le )
  7. Belga -, « Dix civils tués dans une attaque de séparatistes armés au Cameroun », sur La Libre.be, (consulté le )
  8. (en) « Cameroon Military, Separatists Trade Accusations of Civilian Killings », sur VOA, (consulté le )
  9. (en) AfricaNews, « Newlywed couple shot dead in Cameroon attack », sur Africanews, 2023-07-17cest14:23:14+02:00 (consulté le )
  10. (en-US) « Bamboutos SDO raises alert on imminent amba attack », sur Cameroon News Agency (consulté le )
  11. AfricaNews, « Cameroun : des hommes armés tuent 10 personnes à Bamenda », sur Africanews, 2023-07-17cest16:47:50+02:00 (consulté le )
  12. (en) « Cameroon Military, Separatists Trade Accusations of Civilian Killings », sur VOA, (consulté le )
  13. « Cameroun: une manifestation pour dénoncer le meurtre de dix personnes à Bamenda », sur RFI, (consulté le )
  14. (en) « The events of the past week in #Bamenda underscore the tragic price civilians are paying as a result of the crisis in the Northwest and Southwest regions. The U.S. government reiterates to all parties the need to seek a peaceful resolution through discussion rather than violence. », sur Twitter (consulté le )
  15. Christian Happi, « Crise anglophone : les sécessionnistes anglophones s’en prendraient désormais aux francophones, selon le MRC », Actu Cameroun,‎ (lire en ligne  )
  16. Christian Happi, « Le MRC demande au gouvernement de punir « sans faiblesse » les auteurs de la turie de Bamenda », Actu Cameroun,‎ (lire en ligne  )
  17. « Message de condoléances du Chef de l’Etat au Gouverneur de la région du Nord-Ouest, suite bilan humain élevé causé par un groupe d'assaillants armés dans l’arrondissement de Bamenda II, le 16 juillet 2023 », sur www.prc.cm (consulté le )
  18. (en-US) « President Paul Biya and wife lay wreaths, console victims of Nacho Massacre. », sur Mimi Mefo Info, (consulté le )
  19. (en-GB) « Inhabitants of Bafoussam Denounce Recent Killings in Bamenda. », sur Mimi Mefo Info, (consulté le )
  20. Alexandre L., « Tuerie de Nacho à Bamenda: la communauté camerounaise de France rend hommage aux victimes », Actu Cameroun,‎ (lire en ligne  )