Kankuamos
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Atánquez, une des communautés de la réserve amérindienne des Kankuamos

Populations importantes par région
Drapeau de la Colombie Colombie (dans la Sierra Nevada de Santa Marta) 16 986 (2018)[1]
Autres
Langues kankuí, espagnol[2]
Religions christianisme
Ethnies liées Kogi, Arhuacos
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Carte de répartition

Les Kankuamos sont une ethnie indigène de la Colombie. Ils sont dénommés « gardiens de l'équilibre du monde ». Ce peuple amérindien, de la famille des Chibchas, vit principalement dans le département de Cesar situé dans le nord-est de la Colombie, dans la Sierra Nevada de Santa Marta, massif montagneux de la cordillère des Andes.

46,6 % des Kankuamos vivent dans une réserve indigène. Le kankuí, leur langue ethnique, est en voie de disparition. Ils communiquent généralement en espagnol.

Cette communauté précolombienne est décimée par les colons espagnols au XVIe siècle, mais elle parvient à survivre par sa force de résistance pacifique et son attachement à sa culture ethnique. L'existence des Kankuamos est à nouveau mise en danger, au XXe siècle, par les conflits sanglants de groupes armés. Au XXIe siècle, une réserve indigène est créée sur les contreforts de la Sierra Nevada de Santa Marta, puis des villages sont construits autour du massif montagneux. Cependant, cette zone attire l'intérêt de nombreux investisseurs.

Autres dénominations modifier

Les Kankuamos sont aussi appelés : Kankuaka, Kankui, ou Kankuané.

Population modifier

Les Kankuamos, un des quatre principaux peuples indigènes habitant la Sierra Nevada de Santa Marta, dont les Arhuacos, les Wiwa et les Kogui, atteignent, selon le recensement de 2018 du DANE, 19,8 % de la population de ces quatre peuples vivant majoritairement sur la chaîne côtière[1].

Ce recensement dénombre 7 652 Kankuamos habitant dans un siège municipal (« cabacera municipal ») et 7 915 dans une réserve indigène, soit au total 16 986 personnes[1].

Répartition géographique modifier

En 2018, 95 % des Kankuamos vivent dans le département du Cesar, dans la Sierra Nevada de Santa Marta, dont 88,5 % se concentrent à Valledupar, la capitale du Cesar, et 1,5 % dans La Guajira, autre département de ces massifs montagneux. 1,6 % vit à Bogota (« Bogotá D.C. ») et 1,9 % dans d'autres départements[1].

53,4 % des Kankuamos habitent hors d'une réserve indigène, soit 4 784 femmes et 4 287 hommes. 46,6 % vivent dans une réserve, soit 3 836 femmes et 4 079 hommes[1].

Langues modifier

La langue ethnique de ce peuple est le kankuí, qui appartient à la filiation des langues chibchanes de la famille des langues amérindiennes. Toutefois, bien que le gouvernement colombien ait fait des efforts afin de le maintenir vivant, cet idiome est en voie d'extinction[3],[2]. 95,6 % des Kankuamos ne parle pas le kankuí ; ils communiquent principalement en espagnol[1],[2].

Histoire modifier

Les colons espagnols, au XVIe siècle, arrivent sur le territoire où vivent des tribus indigènes, dont les Kankuamos, de la famille des Chibchas (ou Muiscas), et les Tayronas. Ces communautés précolombiennes sont décimées et conquises. Les Espagnols implantent sur ce territoire diverses colonies. Le mode de vie et les coutumes des Kankuamos subissent alors un affaiblissement considérable. Toutefois, soutenus par les autres peuples autochtones de la Sierra Nevada de Santa Marta et grâce à des aides institutionnelles, ils entament un processus exemplaire de revendication ethnique, de survie culturelle et de résistance pacifique[4].

Le peuple des Kankuamos, communauté autochtone, a adopté en tant que stratégie de survie l'isolement, ce qui lui permet d'avoir très peu de contacts avec d'autres populations[2]. Cependant, les Kankuamos sont très affectés par le conflit armé de « La Violencia », qui sévit en Colombie de 1948 à 1957[5]. Dans les années 1990, la Sierra Nevada de Santa Marta devient le théâtre de batailles sanglantes entre guérilleros, narcotrafiquants et paramilitaires[6]. Les Kankuamos sont durement touchés par les affrontements de ces groupes armés. Ils subissent des assassinats, des enrôlements forcés de jeunes et sont contraints à des déplacements. La survie physique et culturelle du peuple est alors gravement mise en danger[6].

Le territoire des Kankuamos est légalement reconnu, en 2003, par la résolution no 12 de l'ancien Institut colombien de réforme agraire (INCORA) créant une réserve indigène sur les contreforts de la Sierra Nevada de Santa Marta d'une superficie de 24 500 hectares et octroyant un terrain dans la plaine, proche de Valledupar[7].

La Sierra Nevada de Santa Marta étant une zone prioritaire dans le cadre de la sécurité démocratique, le président Álvaro Uribe Vélez lance, en 2007, le programme « Ceinture environnementale et traditionnelle de la Sierra Nevada de Santa Marta » (« Cordón ambiental y tradicional de la Sierra Nevada de Santa Marta »), soit la construction d'une dizaine de villages indigènes autour du massif montagneux. Son objectif est « de fournir les services publics élémentaires de l'État aux populations indigènes de la région, tout en assurant la permanence culturelle de ces groupes et en veillant à la préservation de leur environnement et de leurs richesses naturelles ». De nouvelles terres sont octroyées préalablement aux communautés pour la construction de ces villages[6].

« Cette zone occupe une position trop stratégique du point de vue du développement économique pour que la majeure partie de son territoire soit confiée aux Indiens »[6]. En 2010, à « l'arrivée du président Juan Manuel Santos à la tête du gouvernement, les annonces se multiplient pour fomenter le potentiel touristique et agro-industriel de la région ». Les Kankuamos sont les plus durement touchés par les conflits qu'engendrent « les intérêts économiques qui s'affrontent pour le contrôle du territoire »[6]. La reprise des territoires aux guérilleros et aux narcotrafiquants ainsi que la sécurisation de la zone par l'État colombien sont tout d'abord favorables aux indigènes ; toutefois, de nombreux investisseurs s'intéressent particulièrement à « des projets d'ampleur considérable, barrages hydroélectriques, exploitations minières à ciel ouvert, organisation du tourisme... »[8].

Situation politique modifier

Organisation politique et autorités indigènes modifier

Les Kankuamos se sont organisés, avec trois autres peuples apparentés vivant également sur les versants de la Sierra Nevada de Santa Marta, les Arhuacos, les Kogis et les Wiwas, soit une population totale de plus de 30 000 personnes[9], en mouvements politiques importants pour défendre leurs droits.

Lors de la Conférence internationale sur « la discrimination des populations autochtones d'Amérique », tenue à Genève en 1977, les indigènes non seulement dénoncent la violation de leurs droits mais revendiquent « la qualité de peuples et de nations et non de minorités ethniques »[10].

L'organisation indigène Kamkwamo (OIK) représente le peuple Kankuamo[3].

Culture, croyances et rituels modifier

Quatre peuples autochtones de la Sierra Nevada de Santa Marta : les Arhuacos, les Kankuamos, les Kogi et les Wiwa, voient leur système ancestral de connaissances inscrit en 2022 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO. « Ce système définit les missions sacrées concernant l'harmonie des quatre peuples avec l'univers physique et spirituel. » Pendant de nombreuses années, des hommes (Mamos) et des femmes (Sagas) s'efforcent d'acquérir les compétences et la sensibilité nécessaires « pour communiquer avec les sommets enneigés, se connecter au savoir des rivières et décrypter les messages de la nature. »[11].

Ce système ancestral de connaissances, né de la Loi des origines, est basé sur une philosophie protégeant les relations entre les Hommes, la Nature et l'Univers. Ce savoir, transmis par les aïeux, prône la préservation des sites sacrés, des rites de baptême et de mariage, perpétue les danses et chants traditionnels et pérennise les offrandes aux puissances spirituelles[11].

Les Kankuamos sont appelés « gardiens de l'équilibre du monde » (« guardianos del equilibrio del mundo »)[4].

Notes et références modifier

(es)/(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu des articles intitulés en espagnol « Kankuamos » (voir la liste des auteurs) et en anglais « Kankuamo people » (voir la liste des auteurs).
  1. a b c d e et f (es) « Población Indigena de Colombia - Censo 2018 », sur dane.gov.co, DANE, (consulté le ).
  2. a b c et d (en) « Kankuamos in Colombia », sur Minorityrights.org, Minority Rights Group, (consulté le ).
  3. a et b (es) ONIC, « 43 años de Lucha y resistencia », sur onic.org.co, ONIC, (consulté le ).
  4. a et b (es) Ministerio de Cultura, « Kankuamos, guardianes del equilibrio del mundo », sur mincultura.gov.co, Ministerio de Cultura, (consulté le ).
  5. Fédération internationale pour les droits humains, « Colombie : la construction de la paix et les peuples Wiva et Kankuamo de la Sierra Nevada de Santa Marta », sur fidh.org, FIDH, (consulté le ).
  6. a b c d et e Clélie Parriche, « Les Pueblos culturales de la Sierra Nevada de Santa Marta : volet social d'une stratégie de développement économique ? », sur journals.openedition.org, OpenEdition Journals. Journal de la Société des américanistes, (consulté le ).
  7. Constanza Vieira, « Colombie. Kankuamos : la communauté assiégée », sur prensarural.org, Agencia prensa rural, (consulté le ).
  8. Quentin Dechezlepretre, « Dossier d'Éthique Économique. Les communautés indigènes de la Sierra Nevada de Santa Marta en Colombie », sur ethique-economique.fr, Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines, (consulté le ).
  9. « Les Indiens de la Sierra Nevada », sur survivalinternational.fr, Survival International, (consulté le ).
  10. Françoise Martinat, La reconnaissance des peuples indigènes entre droit et politique, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, , 278 p. (ISBN 978-2-85939-887-3).
  11. a et b William Diaz, « Le système ancestral de connaissances des quatre peuples autochtones arhuaco, kankuamo, kogi et wiwa de la Sierra Nevada de Santa Marta », sur ich.unesco.org, UNESCO, (consulté le ).

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