Jean Vincent (résistant)

résistant français
Jean Vincent
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 74 ans)
NiceVoir et modifier les données sur Wikidata
Pseudonyme
Colonel VényVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activité
Enfant
Pierre Vincent (général) Alain Vincent (Colonel)
Autres informations
Conflit
Grade
Distinctions
Archives conservées par

Jean Vincent, né le à Saint-Émilion (Gironde) et mort le à Nice, est un général et résistant français.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est, sous le pseudonyme de « colonel Vény », le fondateur, l'organisateur et le commandant des groupes Vény, actifs jusqu’à la libération dans plusieurs régions de la zone sud.

Biographie modifier

Famille modifier

Jean Charles Marie Alexandre Vincent naît le à Saint-Émilion (Gironde).

Il est le fils de Louis-Alexandre Vincent, Médecin en chef de la Marine, et de Mélicie Fourcaud-Laussac, fille aînée de Jean Fourcaud-Laussac propriétaire du château Cheval Blanc. Il est le père du général Pierre Vincent (1914-2015) et du colonel Alain Vincent (1920 - 1995)

Premières années modifier

Il est saint-cyrien de la promotion centenaire d'Austerlitz (1904-1906).

En 1936, au début de la guerre civile, il part en Espagne se mettre au service du gouvernement républicain. Avec le grade de colonel, il participe à la défense de Madrid face aux troupes franquistes[2].

Guerre de 1914-1918 modifier

Lieutenant au début du conflit, il est gazé et fait prisonnier à Langemark (Belgique) le 22 avril 1915. Prisonnier de guerre en Allemagne à Bischofwerda, puis à Wisa à la suite d'une tentative d'évasion.

Guerre de 1940 modifier

Il termine la guerre de 1939-1940 comme colonel, commandant le 108e régiment d'infanterie alpine.

Rendu à la vie civile à la date du , il se retire à Nice [3].

Résistance modifier

D'août 1940 à novembre 1942 modifier

Le colonel Jean Vincent essaye de regrouper les anciens officiers, sous-officiers et combattants républicains disséminés au sein de la Légion, prétendue française, des combattants. Il échoue. Avec un ancien camarade qu'il retrouve, le lieutenant-colonel Boiseaux, commandant la légion de gardes mobiles de Nice, il se met en rapport avec Monsieur Blanchard, chancelier du consulat des États-Unis à Nice. Ensemble ils essayent de grouper des résistants. Se joignent à eux le père Jenatton, capitaine de chasseurs alpins, qui a fait à ce moment-là un travail sur les terrains d'atterrissage et les plans d'eau utilisables par les avions anglais. Ils sont en liaison avec les chefs locaux de plusieurs mouvements (Combat, Libération-Sud et Franc-Tireur).

Au cours du premier semestre 1942, le lieutenant-colonel Boiseaux, relevé de son commandement par le gouvernement Pétain et mis à la retraite, se retire à Marseille. Là, il entre en relation avec le groupement Froment, organisé par ordre du général de Gaulle pour correspondre directement avec son état-major et lui fournir des renseignements que l'AS ne parvenait pas à obtenir. Froment aîné, alors à Londres, est représenté par son frère Froment jeune et par maître Boyer [4]. Le groupement Froment vient de recevoir l'ordre de former des groupes paramilitaires et, sur proposition du lieutenant-colonel Boiseaux, le colonel Vény est chargé d'organiser et de commander ces groupes à Marseille. Le colonel Vincent est mis en relation avec Thomas, député socialiste [4], chargé de la prospection avec l'aide des responsables locaux du parti socialiste SFIO reconstitué. Le , le colonel Vincent a, sous le nom de Vény, terminé l’organisation des départements des régions de Lyon (chef Sylvestre), Toulouse (chef commandant Delmas), Limoges (chef commandant d'aviation Ledos [5]). La région de Marseille est en cours d'organisation. Seuls, les départements des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes possèdent des groupes complets et organisés, avec les formations suivantes :

— À la base, l'équipe : 1 chef et 3 hommes. Total = 4.
— Puis, le groupe : 1 chef et 3 équipes. Total = 13.
— Au-dessus, la section : 1 chef et 3 groupes. Total = 40.
— Des unités supérieures à la section, compagnies, zones, groupements, étaient prévues, mais non encore formées. Les sections sont provisoirement groupées par localités, ou par quartiers dans les grandes villes.
— Au-dessus, des chefs départementaux et régionaux sont en place.

De novembre 1942 à fin 1943 modifier

L'occupation de la zone libre par les Allemands n'empêche pas le travail entrepris de se continuer. Dans le courant de novembre, le groupement Froment reçoit du général de Gaulle l'ordre d'intégrer ses groupes paramilitaires dans l'Armée Secrète, en constitution dans la Zone sud, sous les ordres du général Vidal (Delestraint). Le , à Lyon, une réunion présidée par Régis, à laquelle assistent une personne parachutée de Londres, maître Boyer, Thomas, Danvers (Defferre) et le colonel Vincent règle les détails de l'intégration des groupes Vény dans l'AS. Le colonel Vincent est chargé de se mettre en rapport avec le général Vidal : il le rencontre le . Malgré de nombreuses difficultés, la fusion est terminée au début de , à la suite d'une entrevue entre le colonel Vincent et Frenay, remplaçant provisoirement le général Vidal, en présence de Forestier [6], chef d'état-major de l'AS, et du colonel Lanoyerie [7], adjoint du colonel Vincent [8]. L'arrestation du général Vidal et de son état-major fait tomber l'AS en décrépitude. Avec l'aide de Boyer et de Danvers, le colonel Vincent reconstitue ses troupes qui, d'elles-mêmes, prennent le nom de groupes Vény. Cependant, à la suite de dénonciations, de nombreuses arrestations sont opérées. En , Boyer et Defferre partent en avion à Londres et à Alger, où ils obtiennent que l'ensemble du groupement Froment [9] soit reconnu comme mouvement de Résistance sous le nom de « France au Combat » (FAC). En , Boyer, revenu de Londres, organise une réunion [10] à Lyon où il expose les résultats de son voyage, les difficultés rencontrées car aucun groupement politique n’avait été constitué : « nous nous étions bornés à obéir aux ordres du général de Gaulle et à servir en fournissant des renseignements (réseau Brutus) et en organisant des troupes (groupes Vény) ». Mais, la « France au Combat », officiellement reconnue, doit prendre sa place dans les MUR et publier un journal.

Courant , Jean Verlhac, le chef d’état major des groupes Vény, organise une rencontre décisive à Brive-la-Gaillarde (chez Maurice Arnouil, à l’usine « Gazo »), entre le colonel Vincent et Harry Peulevé, le chef d’un réseau britannique Buckmaster (réseau AUTHOR du SOE section F). Ils se mettent d’accord sur un protocole de collaboration militaire : d’un côté, le SOE mettra à la disposition des groupes Vény 3 réseaux (un pour Toulouse, un pour Marseille et un pour Limoges), qui les approvisionneront en armes ; de l’autre, les groupes Vény s’engagent à exécuter les missions qui leur seront fixées par les alliés.

Dans la deuxième quinzaine de , Petit, arrêté, dénonce le groupe de Lyon. Vingt-six personnes, dont Boyer, sont arrêtées. Le colonel Vény échappe de justesse à la Gestapo, mais sa fille, résistante et dont le logement servait de « boîte aux lettres », est arrêtée à sa place. Le colonel Vincent se replie dans le Lot, d’où il dirige les groupes Vény jusqu’à la libération.

1944 modifier

Avant le débarquement de Normandie

Début janvier les premiers agents du SOE promis sont parachutés. Au cours du premier trimestre, les trois équipes, FOOTMAN, FIREMAN et GARDENER, seront à pied d’œuvre grâce à quatre parachutages, tous effectués dans le Lot, selon le tableau suivant :

Parachutages d’agents du SOE au premier trimestre 1944 dans le Lot,
Mission : soutien aux groupes Vény.
Parachutages Agents SOE parachutés
Réseau FOOTMAN
Mission : dans la région de Toulouse
Action : basé dans le Lot
Réseau FIREMAN
Mission : région de Limoges
Action : basé à Limoges, puis dans la Creuse
Réseau GARDENER
Mission et activités : Marseille
Nuit du 7/
à Carennac
(C) George Hiller « Maxime »
(R) Cyril Watney « Eustache » (et Michel)
Nuit du 6/
près de Figeac
(C) Robert Boiteux « Firmin »
(I) Benjamin Aptaker « Alaric »
Nuit du 7/
à Loubressac
(I) Richard Francis Pinder « Willy » (C) Percy Mayer « Barthélémy »
(2d) Edmund Mayer « Maurice »
(R) Gaston Cohen « Horace »
Nuit du 22/
(R) Maureen Patricia O'Sullivan « Josette »
Légende : (C) = chef de réseau ; (2d) = Adjoint ; (R) = opérateur radio ; (I) = instructeur en armement.
À partir du débarquement de Normandie

Durant l’été 1944, les groupes Vény, regroupés dans le cadre des FFI, participent aux combats de la Libération. Le tableau suivant donne quelques éléments de l’organisation en rapport avec le Lot :

Niveau Chef Principaux subordonnés
National Jean Vincent (Vény) Jean Verlhac, chef d’état-major
Étienne Verlhac, conseiller politique
Région de Toulouse Henri Collignon Netter, adjoint et 2e bureau
Quilien, 1er bureau
Paul Granet, 3e bureau
Robert Escalier, renseignements
Mouysset et Durand, intendants
Marie Verlhac, service de santé
Département du Lot Raymond Picard Georges Bru « Gilbert »
Pierre Mangé, 1er bureau
Marcel Fauran « Marcel », 2e bureau
Michel Buzan « Brutus », 3e bureau
Adolphe Cambon, commandant de Cie.
Lucien Laurent, off. de liaison secteur nord
J. Chaussade, off. de liaison secteur sud.
Secteur I. — Saint-Céré L. Lavaysse R. Dufour, E. Goursat
Secteur I bis. — Bretenoux J. Frégeac B. Chambaud, M. Issoulhé
Secteur II. — Cazals L. Brouel J. Brouel
Secteur III. — Souillac/Gourdon G. Martin G. Grégory, M. Bauru, G. Bénech
Secteur IV. — Cahors Delmas E. Talou, L. Parazines
Secteur V. — Figeac E. Marcel R. Barbot, Satgé, R. Sol
Secteur V bis. — Cajarc M. Buzan

Après la guerre modifier

Jean Vincent est nommé général de brigade le [11].

En 1946, il adhère au PCF et devient vice-président de l'AVER, l'association des anciens volontaires de l'Espagne républicaine. Il en sera écarté en 1953 lorsqu'il refuse d'approuver l'exclusion d'André Marty, exigée par la direction du PCF[12].


Mémoires modifier

Jean Vincent raconte son activité de résistant dans le livre de Raymond Picard et Jean Chaussade p. 43-47.

Reconnaissance modifier

Distinctions modifier

Monuments modifier

  • Carennac (Lot) :
    • une stèle commémore le parachutage de George Hiller et de Cyril Watney, le .
    • à Magnagues, une plaque commémorative est fixée sur la maison qui servit d’hôpital de campagne pour soigner et opérer George Hiller le .

Archives modifier

Dossier personnel au Service historique de la Défense, à Vincennes : cote 13Yd1278.

Annexes modifier

Notes modifier

  1. « https://francearchives.fr/fr/file/ad46ac22be9df6a4d1dae40326de46d8a5cbd19d/FRSHD_PUB_00000355.pdf »
  2. « Maitron », sur maitron.fr (consulté le ).
  3. Il écrira qu’il était « convaincu, ayant commandé l'arrière garde de la IVe Armée, que notre défaite ne provenait que de la trahison de certains groupements politiques à la tête desquels se trouvait Monsieur Pétain. »
  4. a et b Il sera déporté en Allemagne.
  5. Il sera fusillé.
  6. Il sera arrêté plus tard.
  7. Il sera tué le 10 août 1944.
  8. Conformément aux intentions du général Vidal, le colonel Vincent avait été nommé par Frenay, inspecteur général de l'AS pour la Zone sud.
  9. Réseau Brutus pour le renseignement, groupes Vény pour l’action et la prospection.
  10. Y assistent les chefs de régions des groupes Vény et leurs adjoints : Petit (pour Lyon), le commandant Ledos et Charles Bach (pour Limoges), le commandant Collignon et Bourthoumieux (pour Toulouse), le commandant Pithion et Dussart (pour Marseille).
  11. Décret du 5 novembre 1945.
  12. « Jean Vincent », sur maitron.fr (consulté le ).
  13. Assemblée nationale, « Questions posées (archives) - M. Alain Marsaud - Français établis hors de France (10e circonscription) », sur Assemblée nationale (consulté le ).
  14. « Officier général d’une haute valeur morale. Engagé aux Forces françaises combattantes dès janvier 1942, a assuré avec le plus grand succès l’entraînement, l’encadrement et l’administration des Groupes de la France au Combat dans 28 départements. D’un courage, d’une initiative et d’une énergie admirables, a su mener au succès les troupes de combat qu’il avait formées tant au cours de la période de lutte clandestine, que pendant les opérations de libération. Assurant le commandement de 25 000 hommes, a su pleinement faire face à ses responsabilités, maintenant le plus haut niveau moral et la plus grande discipline dans les unités sous son commandement qui ont, en particulier, eu l’honneur de libérer les premières, les villes d’Agen, Carmaux et Langon ».

Sources et liens externes modifier

  • André Deforges, Les Illustres de Bordeaux : catalogue, vol. 2, Bordeaux, Dossiers d'Aquitaine, , 80 p. (ISBN 978-2-84622-255-6, présentation en ligne).
  • Michael R. D. Foot, Des Anglais dans la Résistance. Le Service Secret Britannique d'Action (SOE) en France 1940-1944, annot. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Tallandier, 2008, (ISBN 978-2-84734-329-8). Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) SOE in France. An account of the Work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London, Her Majesty's Stationery Office, 1966, 1968 ; Whitehall History Publishing, in association with Frank Cass, 2004.
    Ce livre présente la version officielle britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence essentielle sur le sujet du SOE en France.
    Rémi Skoutelsky, notice VINCENT Jean, Charles, Marie, Alexandre [alias VENY, pseudonyme de Résistance],https://maitron.fr/spip.php?article134814.
  • Lt. Col. E.G. Boxshall, Chronology of SOE operations with the resistance in France during world war II, 1960, document dactylographié (exemplaire en provenance de la bibliothèque de Pearl Witherington-Cornioley, consultable à la bibliothèque de Valençay). Voir sheet 26, FOOTMAN CIRCUIT.
  • Jean Lacouture, André Malraux, une vie dans le siècle, Seuil, 1973.
  • Jacques R. E. Poirier, La Girafe a un long cou…, Fanlac, 1992 (ISBN 2-86577-156-3).
  • Raymond Picard et Jean Chaussade, Ombres et espérances en Quercy 1940-1945. Les groupes Armée Secrète Vény dans leurs secteurs du Lot, Éditions Privat (et Association des Anciens de l’Armée secrète et des groupes Vény du Lot), 1980 ; (ISBN 2-7089-9001-2)
  • La Lettre de la Fondation de la Résistance no 32 - , article de l'Association pour des Études sur la Résistance Intérieure (AERI) Les Groupes Vény, p. 10-11.
  • Jean-Marc Binot et Bernard Boyer, Nom de code : Brutus. Histoire d’un réseau de la France libre, Fayard, 2007, (ISBN 9782-213-631127)