Europe (fille d'Agénor)

personnage de la mythologie grecque, fille d'Agénor
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Dans la mythologie grecque, Europe (en grec ancien : Εὐρώπη / Eurṓpē) est une princesse phénicienne, fille d'Agénor[1], roi de Tyr, et de Téléphassa, et sœur notamment de Cadmos[1].

Europe
Biographie
Naissance
Père
Mère
Téléphassa ou Alphésiboé (d) ou Périmédé (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Conjoint
Enfants
Minos
Sarpédon (d)
Alagonie (d)
Dodon (d)
Rhadamanthe
Carnus (d)
Hydarnis (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Vénérée par

Les institutions de l'Union européenne favorisent le nom de cette figure mythologique comme étymologie du nom du continent européen[2],[3],[4].

Étymologie

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L'étymologie couramment admise de ce nom y voit un composé de εὐρύς / eurús, « large » et ὤψ / ṓps, « œil, vue »[5],[6]. La terre « à l'aspect large » constitue une vieille épithète de la Terre que l'on retrouve dans plusieurs traditions indo-européennes : « la large terre » en grec, « la large terre » ou simplement « la large » en sanskrit, et de même dans les langues germaniques. Europe serait ainsi l'une des figures de la déesse Terre, renouvelée[7],[8]. Pour le linguiste Jean Haudry, ni cette héroïne, ni ses homonymes, ne personnifient une terre. Ce serait un qualificatif de la vache « au large regard » qui s'unit au « taureau » Zeus, le désignateur de la terre « où le regard porte au loin » provenant de la même racine[9].

Selon des ouvrages plus anciens, cette étymologie ne tient pas compte de l'origine phénicienne d'Europe, pour laquelle on a proposé une racine dans une langue sémitique. Ainsi, la première mention connue du mot proviendrait d'une stèle assyrienne, qui distingue les rivages de la mer Égée par deux mots phéniciens : ereb « couchant, soir » → « occident », et assou « levant » → « pays du levant »[6]. L'origine des noms grecs Eurôpê et Asia se trouverait dans ces deux termes sémitiques par lesquels les marins phéniciens désignaient les rives opposées de la Grèce actuelle et de l'Anatolie[10]. La mythologie grecque perpétuerait l'origine sémitique du mot, en en faisant le nom de la princesse phénicienne.

Néanmoins, cette étymologie sémitique est « à peine encore défendue[11] », voire « abandonnée[8] ». Martin Litchfield West fait ainsi observer que « phonologiquement, la correspondance entre le nom de l'Europe et toute forme de mot sémitique est très mauvaise[12] »[13]. Cependant, le Dictionnaire historique de la langue française soutient encore que l'hypothèse phénicienne est « sémantiquement plus satisfaisante »[6].

Selon une version du mythe, Europe, fille d'Agénor, roi de Tyr, une ville de Phénicie (actuel Liban) fit un rêve[14]. Le jour même, Zeus la rencontra sur une plage de Sidon, se métamorphosa en taureau blanc, afin de l'approcher sans l'apeurer et d'échapper à la jalousie de son épouse Héra. Europe s'approche de lui. Chevauchant l'animal, elle est enlevée sur l'île de Crète à Gortyne (ou, au nord du Bosphore, selon certaines versions). À Gortyne[15], sous un platane, qui depuis lors est toujours vert, Europe s'accouple avec Zeus, sous forme humaine cette fois. De leur union naissent Minos, Rhadamanthe, et Sarpédon[16], qui s'exila en Anatolie, à Milet. Plus tard, Europe est donnée par Zeus, comme épouse au roi de Crète, Astérion.

Interprétations

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Ce mythe garderait la mémoire des pillages menés par les Doriens sur les côtes de Phénicie qui pouvaient s'accompagner du rapt de femmes dans la Grèce préhellénique[17].

Pour Françoise Gange l'enlèvement et le viol d'Europe marqueraient le passage de l'ère de la Déesse mère à celui d'une toute-puissance masculine[18].

Représentations après l'Antiquité

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L'enlèvement d'Europe a inspiré de nombreux artistes à travers les siècles : les peintres Paul Véronèse, le Titien (copié par Rubens), Rembrandt, Giambattista Tiepolo[19], les musiciens tel Darius Milhaud ou des sculpteurs comme Fernando Botero. Dans la représentation des artistes « l’enlèvement d’Europe apparaîtra suivant les cas comme un rapt violent ou comme un cortège nuptial auquel prennent part de nombreuses divinités[20]. »

En littérature, Moschos[21], André Chénier, Rimbaud et d'autres poètes ont écrit des textes sur le thème du mythe d'Europe. Elle est la neuvième femme de renom dont l'histoire a été contée par l'auteur florentin Boccace dans son œuvre De mulieribus claris publiée en 1374.

Au cinéma, Europe est le personnage principal du film de Christophe Honoré intitulé Métamorphoses.

En astronomie, la constellation du Taureau fait référence à l'enlèvement d'Europe.

Depuis le 2 mai 2013, le visage d'Europe se trouve sur les billets de 5, 10 et 20 , nouvelle édition. Le visage d’Europe choisi provient d’un vase antique en céramique du IVe siècle avant notre ère qui fait partie de la collection du musée du Louvre à Paris. Europe est également représentée sur les pièces de cinquante centimes de livres chypriotes avant 2008 ainsi que sur les pièces grecques de deux euros.

Bibliographie

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Sources anciennes

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L'Enlèvement d'Europe, V. A. Serov, XIXe siècle.

Bibliographie contemporaine

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  • Émile Chambry, Émeline Marquis, Alain Billault et Dominique Goust (trad. du grec ancien par Émile Chambry), Lucien de Samosate : Œuvres complètes, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1248 p. (ISBN 978-2-221-10902-1), « La déesse syrienne », p. 637.  
  • Odile Wattel-de Croizant, Les mosaïques représentant le mythe d'Europe, Paris, De Boccard, 1995.
  • D'Europe à l'Europe, I. Le mythe d'Europe dans l'art et la culture de l'antiquité au XVIIIe (colloque de Paris, ENS – Ulm, 24-26 avril 1997), éd. R. Poignault et O. Wattel - de Croizant, coll. Caesarodunum, nº XXXI bis, 1998.
  • D'Europe à l'Europe, II. Mythe et identité du XIXe siècle à nos jours (colloque de Caen, 30.09-02.10.1999), éd. R. Poignault, F. Lecocq et O. Wattel – de Croizant, coll. Caesarodunum, nº XXXIII bis, 2000.
  • D’Europe à l’Europe, III. La dimension politique et religieuse du mythe d’Europe de l‘Antiquité à nos jours (colloque de Paris, ENS-Ulm, 29-30.11.2001), éd. O. Wattel - De Croizant, coll. Caesarodunum, nº hors-série, 2002.
  • D’Europe à l’Europe, IV. Entre Orient et Occident, du mythe à la géopolitique (colloque de Paris, ENS-Ulm, 18-20.05.2006), dir. O. Wattel - de Croizant & G. de Montifroy, Éditions de l’Âge d’Homme, Lausanne – Paris, 2007.
  • D’Europe à l’Europe, V. État des connaissances (colloque de Bruxelles, 21-22.10.2010), dir. O. Wattel - de Croizant & A. Roba, Bruxelles, éd. Métamorphoses d’Europe asbl, 2011.
  • Stella Ghervas (dir.) et François Rosset (dir.), Lieux d'Europe : mythes et limites, Paris, Éd. de la Maison des sciences de l'homme, , 248 p. (ISBN 978-2-7351-1182-4, OCLC 470573621, BNF 41382508, lire en ligne)
  • (de) Europa - Stier und Sternenkranz. Von der Union mit Zeus zum Staatenverbund[23], dir. A.-B. Renger & R. Issler, Gottingue, 2009. (ISBN 978-3-899-71566-8)
  • Robert Bedon, « L'Arrivée d'Europe en Crète chez Solin (Polyhistor, 11, 9) : fin de parcours en eau douce », Bernadette Morin (éd.), Polumathès, Mélanges offerts à Jean-Pierre Levet, Presses Universitaires de Limoges, 2012, p. 183-199.
  • Jean-Louis Clergerie, L'Europe des artistes et des écrivains De l'Europe légende à l'Europe politique, La Sirène aux Yeux Verts Éditions, 2022.

Notes et références

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  1. a et b Lucien de Samosate 2015, p. 637.
  2. « La princesse Europe », Centre d'information sur les institutions européennes.
  3. « Les billets en euros. Le mythe d'Europe », Banque centrale européenne.
  4. Albert Deman, « L'Euro et l'Antiquité européenne, grecque et romaine », L'antiquité classique, vol. 72,‎ , p. 245-260 (DOI 10.3406/antiq.2003.2526, lire en ligne).
  5. The New International Encyclopaedia (1905)/Europa
  6. a b et c Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction d’Alain Rey, éditions Le Robert, 2012 (4e édition), p. 1267.
  7. (en) M. L. West, Indo-European poetry and myth, Oxford, 2007, p. 185.
  8. a et b Denis de Rougemont, « Les Origines de l’Europe : d’Hésiode à Charlemagne ou du mythe à l’histoire », 1959, Université de Genève (lire en ligne) [1]
  9. Jean Haudry, Vues nouvelles sur la tradition indo-européenne dans la Grèce ancienne, etudesindoeuropeennes.fr, 2009
  10. (en) Hérodote et George Rawlinson, Sir Henry Rawlinson, Sir John Gardner Wilkinson, éds., The History of Herodotus : A new English version, ed. with copious notes and appendices, illustrating the history and geography of Herodotus, from the most recent sources of information; and embodying the chief results, historical and ethnographical, which have been obtained in the progress of cuneiform and hieroglyphical discovery, t. 3, New York, D. Appleton, , 4 vol. 23 cm (OCLC 3632778, lire en ligne), p. 33.
  11. Odile Wattel de Croizant et Gérard A. Montifroy, Du mythe à la géopolitique : Europe entre Orient et Occident, Paris, L'Âge d'Homme (lire en ligne).
  12. (en) M. L. West, The East face of Helicon : West Asiatic elements in Greek poetry and myth, Oxford, Clarendon Press, , 662 p. (ISBN 0-19-815221-3), p. 451.
  13. (en) Klein, Etymological Dictionary of the English Language (Barking: Elsevier) vol. I A-K, 1966 ; L'étymologie Klein de l'Europe se singularise parmi ses conclusions « optimistes » selon P. G. W. Friedrichsen passant en revue le « Dictionnaire » dans The Review of English Studies New Series, 18.71 (August 1967:295.
  14. « Le Mythe d’Europe dans la littérature », sur odysseum (consulté le ).
  15. « Europe, princesse phénicienne séduite et enlevée par Zeus », sur odysseum (consulté le ).
  16. Selon Homère, Sarpédon est fils de Laodamie.
  17. Antonio Gonzales, « Mythes d'Europe et constructions d'un paysage culturel antagonique », dans Des formes et des mots chez les Anciens, Besançon, Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité, coll. « ISTA, 1120 », , 223-242 p. (lire en ligne).
  18. Le viol d'Europe, ou le féminin bafoué. 2007
  19. AKG images
  20. https://books.google.com/books?id=pLlZEAAAQBAJ&pg=PA1 consulté le 1er août 2021.
  21. Lucien de Samosate 2015, p. 637
  22. Dimore Storiche
  23. (de) « Vandenhoeck & Ruprecht Verlage », sur Vandenhoeck & Ruprecht Verlage (consulté le ).

Liens externes

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