Cathartes

genre d'oiseaux

Cathartes est un genre d'oiseaux regroupant trois espèces actuelles de vautours néarctiques, rapaces diurnes charognards, connus sous le nom d'urubus et appartenant à la famille des Cathartidae. Tous sont noirs, avec la tête nue laissant apparaître une peau vivement colorée. La plus grande des espèces est l'Urubu à tête rouge (C. aura) qui se distingue à la peau nue rouge de sa tête ; les deux autres : l'Urubu à tête jaune (C. burrovianus) et le Grand Urubu (C. melambrotus), sont assez semblables, et diffèrent en moyenne par leur taille, et par leur coloration. Tous se nourrissent principalement de carcasses, bien que certains oiseaux puissent occasionnellement chasser de petites proies. Ces urubus ne construisent pas de nid et pondent généralement à même le sol ; la ponte compte classiquement deux œufs, et les petits sont nourris au nid par les deux parents, avant de prendre leur envol au bout de deux ou trois mois.

Ces trois urubus vivent sur le continent américain et notamment l'Amérique latine, bien qu'une espèce se répande vers le nord, durant la belle saison, jusqu'au sud du Canada. L'Urubu à tête rouge compte quatre sous-espèces, selon la classification du Congrès ornithologique international. Les autres espèces, l'Urubu à tête jaune et le Grand Urubu, sont toutes deux monotypiques et n'ont été distinguées qu'en 1964, par Alexander Wetmore. Une espèce fossile, C. fossilis, a également été décrite. En raison de leurs aires de répartition vastes et de leurs effectifs importants, les trois espèces actuelles du genre Cathartes sont toutes considérées comme de « préoccupation mineure » par l'Union internationale pour la conservation de la nature.

Description modifier

Mensurations et plumage modifier

 
Un Urubu à tête jaune perché sur le piquet d'une clôture, dans le Pantanal.

Les urubus du genre Cathartes sont des oiseaux de grande taille, mais parmi les plus petits de leur famille, celle des « vautours du Nouveau Monde ». La plus grande des trois espèces est l'Urubu à tête rouge (C. aura) et la plus petite l'Urubu à tête jaune (C. burrovianus).

Mensurations des trois espèces
Espèce Urubu à tête rouge[1] Urubu à tête jaune[2] Grand Urubu[2],[3]
Longueur 66-81 cm 53-66 cm 64-75 cm
Envergure 173-183 cm 150-165 cm 166-178 cm
Poids 1,4 kg en moyenne 0,95-1,55 kg 1,65 kg en moyenne

Toutes les espèces du genre Cathartes ont un plumage globalement noir, et le cou et la tête déplumés, arborant une peau de couleur vive allant du jaune à l'orange pour l'Urubu à tête jaune et le Grand Urubu, rouge pour l'Urubu à tête rouge. Le bec, couleur ivoire, est épais, arrondi et crochu. Comme tous les vautours du Nouveau Monde, ces urubus n'ont pas de syrinx, et sont donc incapables de produire d'autres bruits que des grognements ou de faibles sifflements[4].

Identification spécifique modifier

L'Urubu à tête rouge se distingue plutôt aisément des deux autres, du fait de la peau nue rouge de sa face, et est l'unique espèce du genre trouvée en Amérique du Nord. L'Urubu à tête jaune et le Grand Urubu sont assez semblables, et n'étaient d'ailleurs pas distingués avant 1964. L'Urubu à tête jaune est plus petit que le Grand Urubu, avec une queue plus courte et moins large. Le plumage du Grand Urubu est sombre, noir brillant, contrairement au plumage plus brun de l'Urubu à tête jaune. Les pattes du Grand Urubu sont de couleur plus foncée et sa tête est plus jaune et moins orange-rose ; ses ailes sont plus larges et son vol est également plus stable[2]. Il a également la particularité d'avoir les rémiges primaires internes relativement sombres, qui contrastent un peu avec les secondaires et les primaires externes plus pâles, formant une large bande légèrement plus sombre parcourant verticalement le dessous des ailes. À l'inverse, les pennes blanches de l'Urubu à tête jaune contrastent fortement sur le dessous de l'aile[3]. Le Grand Urubu préfère les forêts alors que l'Urubu à tête jaune préfère les savanes[5]. Il se distingue de cette espèce par la coloration de la tête différente, qui ne peut toutefois se voir qu'à une distance relativement proche. Les couvertures sous-alaires ont une coloration similaire chez l'Urubu à tête rouge, mais n'ont pas la bande sombre formée par les rémiges primaires internes[6].

Écologie et comportement modifier

 
Urubu à tête jaune.

Les oiseaux du genre Cathartes volent avec leurs ailes maintenues légèrement au-dessus de l'horizontale, formant un dièdre positif. Ils emploient le vol à voile statique, en utilisant les courants thermiques ascendants pour maintenir leur altitude sans avoir besoin de battre des ailes[7]. Les trois espèces pratiquent l'urohidrose, et défèquent sur leurs pattes afin de les refroidir par évaporation. Ce comportement se retrouve chez les vautours du Nouveau Monde et chez les cigognes[8].

Alimentation modifier

Les membres du genre Cathartes se nourrissent principalement de charognes et notamment d'animaux écrasés par les véhicules. Ils s'aident de leur vue perçante pour repérer les charognes, mais utilisent aussi leur odorat, une capacité qui est rarement développée chez les espèces aviaires. Les charognes sont localisées grâce à l'odeur du mercaptan éthylique, un gaz produit par la décomposition des animaux morts. La zone du cerveau associée à l'odorat est particulièrement développée comparativement aux autres espèces[9]. Cette caractéristique des vautours du Nouveau Monde a même été utilisée par l'Homme : les ingénieurs à la recherche de fuites injectent du mercaptan éthylique dans les pipelines, puis suivent les vautours[10]. L'Urubu à tête rouge agrémente son régime alimentaire de lapins et de jeunes oiseaux (hérons, ibis[11] par exemple), des insectes et d'autres invertébrés[12], mais tue rarement ses proies[13]. L'Urubu à tête jaune (C. burrovianus) est connu comme un excellent oiseau de proie dans les milieux humides.

Le Sarcoramphe roi (Sarcoramphus papa) ne possède pas les habiletés olfactives de l'Urubu à tête jaune et suit ce dernier jusqu'aux charognes. Le gros rapace déchiquette la peau que le petit n'aurait pu déchirer, et ce dernier peut alors se nourrir. Il s'agit d'un exemple de symbiose entre espèces[14]. L'Urubu à tête jaune est généralement chassé des carcasses par l'Urubu à tête rouge (C. aura) et le Sarcoramphe roi, tous deux plus gros que lui[15].

Reproduction modifier

 
Oisillon d'Urubu à tête rouge et œufs au nid.

Les trois espèces du genre ne construisent pas de nids, mais pondent à même le sol, sur les falaises, sur le sol des grottes, ou dans le creux d'une souche. Les œufs sont de couleur crème avec des taches sombres, en particulier autour de la plus grande extrémité[1]. La ponte compte généralement deux œufs[7]. Chez l'Urubu à tête rouge, les adultes peuvent se sauver, régurgiter sur les intrus ou feindre la mort en cas de menace sur leur couvée[16]. Si les jeunes sont menacés au nid, ils se défendront en sifflant et en régurgitant[12]. Les poussins sont nidicoles, aveugles, nus et relativement immobiles après l'éclosion, et leurs plumes poussent plus tard. Les parents nourrissent leurs petits en régurgitant de la nourriture prédigérée dans leur bec, où les poussins viennent puiser[7]. Les jeunes quittent le nid au bout de deux à trois mois[17].

Répartition et habitat modifier

 
Distribution du genre Cathartes.
  • Territoire occupé par une à trois espèces.
  • Territoire occupé en été par l'Urubu à tête rouge.

L'Urubu à tête rouge a la plus vaste aire de répartition des trois espèces, et se trouve aussi bien en Amérique du Nord, depuis le sud du Canada, jusqu'à l'extrémité méridionale de l'Amérique du Sud, notamment en Terre de Feu[18]. Les deux autres espèces peuplent l'Amérique latine : l'Urubu à tête jaune vit depuis le centre du Mexique à travers toute l'Amérique centrale, jusqu'en Amérique du Sud, ne dépassant pas, vers le sud, le nord de l'Argentine[19] ; le Grand Urubu vit quant à lui dans le bassin amazonien, le centre de la Bolivie marquant le sud de son aire de distribution[20].

Taxinomie modifier

Le nom générique Cathartes est décrit en 1811 par le zoologiste allemand Johann Karl Wilhelm Illiger. Le nom Cathartes est la forme latine du grec καθαρτης (kathartēs), signifiant « purificateur »[21] et rappelle le rôle écologique de ces oiseaux. La position taxinomique exacte de ce genre au sein des vautours du Nouveau Monde demeure incertaine[22]. Les vautours du Nouveau Monde et de l'Ancien Monde sont physiquement similaires et remplissent les mêmes niches écologiques. Cependant, ils ont évolué à partir de différents ancêtres et de différents endroits du globe. Les différences entre les deux groupes de vautours est présentement débattue, certains auteurs suggérant que le groupe du Nouveau Monde est proche parent des cigognes[23]. Plus récemment, certains placent les deux groupes de vautours dans l'ordre des Falconiformes[8] tandis que d'autres placent le groupe du Nouveau Monde dans son propre ordre, les Cathartiformes[24]. Le South American Classification Committee a retiré les vautours du Nouveau Monde de l'ordre Ciconiiformes et les a plutôt catégorisés comme incertae sedis. Ce comité note cependant qu'une recatégorisation de Falconiformes à Cathartiformes est possible[22].

D'après la classification du Congrès ornithologique international, trois espèces sont reconnues, l'une d'elles comptant quatre sous-espèces[25] :

Une espèce fossile a également été décrite dans le genre :

Menaces et conservation modifier

Les trois espèces bénéficient d'aires de répartition vastes et d'effectifs importants ; elles sont donc toutes considérées comme de « préoccupation mineure » par l'Union internationale pour la conservation de la nature[28],[29],[30].

Annexes modifier

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Références taxonomiques modifier

Liens externes modifier

Notes et références modifier

  1. a et b (en) Stephen L. Hilty, A Guide to the Birds of Colombia, Princeton University Press, (ISBN 0-691-08372-X, lire en ligne), p. 88
  2. a b et c (en) James Ferguson-Lees et David A. Christie, Raptors of the World, Houghton Mifflin Field Guides, , 992 p. (ISBN 0-618-12762-3, lire en ligne)
  3. a et b (fr) Nicole Bouglouan, « Grand urubu Cathartes melambrotus », sur oiseaux-birds.com (consulté le )
  4. (en) J. Alan Feduccia, The Origin and Evolution of Birds, Chicago/London, Yale University Press, (ISBN 0-226-05641-4, lire en ligne), p. 300
  5. (en) Dean Amadon, « Notes on the Taxonomy of Vultures », Condor, vol. 79, no 4,‎ , p. 413–416 (DOI 10.2307/1367720, JSTOR 1367720, lire en ligne)
  6. (en) Robert S. Ridgely et Paul Greenfield, The Birds of Ecuador, Cornell University Press, , 1648 p. (ISBN 978-0-8014-8722-4)
  7. a b et c (en) John Kenneth Terres, The Audubon Society Encyclopedia of North American Birds, New York, Knopf, (ISBN 0-394-46651-9), p. 957
  8. a et b (en) Charles Gald Sibley et Jon Edward Ahlquist, Phylogeny and Classification of Birds : A Study in Molecular Evolution, Yale University Press, (ISBN 0-300-04085-7)
  9. (en) Noel F. R. Snyder et Helen Snyder, Raptors of North America : Natural History and Conservation, Voyageur Press, (ISBN 0-7603-2582-0), p. 40
  10. (en) « Avian Olfaction », Université Cornell (consulté le )
  11. (fr) Référence Oiseaux.net : Cathartes aura (+ répartition) (consulté le )
  12. a et b (en) Kenn Kaufman, Lives of North American Birds, Houghton Mifflin Field Guides, , 675 p. (ISBN 0-618-15988-6, lire en ligne), p. 112
  13. (en) John C. Kritcher, A Neotropical Companion : An Introduction to the Animals, Plants, and Ecosystems of the New World Tropics, Princeton University Press, , 451 p. (ISBN 0-691-00974-0, lire en ligne)
  14. (en) Dietland Muller-Schwarze, Chemical Ecology of Vertebrates, Cambridge University Press, (ISBN 0-521-36377-2, lire en ligne), p. 350
  15. (en) Luis G. Gomez, David C. Houston, Peter Cotton et Alan Tye, « The role of greater yellow-headed vultures Cathartes melambrotus as scavengers in neotropical forest », Ibis, vol. 136, no 2,‎ , p. 193–196 (DOI 10.1111/j.1474-919X.1994.tb01084.x, lire en ligne)
  16. (en) Charles Fergus, Wildlife of Virginia and Maryland Washington D.C., Stackpole Books, , 474 p. (ISBN 0-8117-2821-8, lire en ligne), p. 171
  17. (en) Steve N.G. Howell et Sophie Webb, A Guide to the Birds of Mexico and Northern Central America, New York, Oxford University Press, , 851 p. (ISBN 0-19-854012-4, lire en ligne), p. 174
  18. (en) « Lesser Yellow-headed Vulture - BirdLife Species Factsheet », BirdLife International (consulté le )
  19. (en) « Lesser Yellow-headed Vulture - BirdLife Species Factsheet », BirdLife International (consulté le )
  20. (en) « Greater Yellow-headed Vulture - BirdLife Species Factsheet », BirdLife International (consulté le )
  21. (en) Henry George Liddell et Robert Scott, Greek-English Lexicon, Abridged Edition, Oxford, Oxford University Press, (ISBN 0-19-910207-4)
  22. a et b (en) J.V. Remsen, Jr., C.D. Cadena, A. Jaramillo, M. Nores, J.F. Pacheco, M.B. Robbins, T.S. Schulenberg, F.G. Stiles, D.F. Stotz et K.J. Zimmer, A classification of the bird species of South America, South American Classification Committee, (lire en ligne)
  23. (en) Charles Gald Sibley et Burt L. Monroe, Distribution and Taxonomy of the Birds of the World, New Haven/London, Yale University Press, , 1111 p. (ISBN 0-300-04969-2)
  24. (en) Per G.P. Ericson, Cajsa L. Anderson, Tom Britton, Andrzej Elżanowski, Ulf S. Johansson, Mari Kallersjö, Jan I. Ohlson, Thomas J. Parsons, Dario Zuccon et Gerald Mayr, « Diversification of Neoaves: integration of molecular sequence data and fossils », Biology Letters,‎ (DOI 10.1098/rsbl.2006.0523)
  25. Congrès ornithologique international
  26. (es) Francisco Pascasio Moreno et Alcides Mercerat, « Catálogo de los pájaros fósiles de la República Argentina conservados en el Museo de La Plata », Anales del Museo de la Plata, vol. 1,‎ , p. 1-71
  27. (es) Florentino Ameghino, « Enumeración de las aves fósiles de la República Argentina », dans Obras completas y correspondencia cientifica, vol. X, La Plata, , 870 p. (lire en ligne), chap. LXXV, p. 387
  28. (en) Référence UICN : espèce Cathartes aura (Linnaeus, 1758) (consulté le )
  29. (en) Référence UICN : espèce Cathartes burrovianus Cassin, 1845 (consulté le )
  30. (en) Référence UICN : espèce Cathartes melambrotus Wetmore, 1964 (consulté le )
 
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