Andreas Bach Buch

manuscrit compilé par Johann Christoph Bach III

L’Andreas Bach Buch (le livre d’Andreas Bach, du nom d'un de ses possesseurs — conservé à la Musikbibliothek de la Stadtbibliothek de Leipzig, III.8.4) est un recueil manuscrit de 57 pièces pour clavier, compilé par Johann Christoph Bach († 1721), d'Ohrdruf, frère aîné de Jean-Sébastien Bach. La collection date probablement des années 1704 à 1713[1],[2], mais comprend des pièces plus anciennes.

Andreas Bach Buch
(Manuscrit)
Genre Musique instrumentale
Musique Bach, Böhm, Buxtehude, Pachelbel, Reincken, Ritter
Effectif Clavecin et orgue
Dates de composition Fin XVIIe et début XVIIIe siècle
Partition autographe Musikbibliothek, Leipzig
(ref. III.8.4)

Cette copie constitue l'une des sources importantes pour de nombreux compositeurs d'Allemagne du nord, par exemple J.A. Reincken, Buxtehude et Böhm qui sont les grands maîtres dans la formation de Bach[3]. Johann Christoph laisse un autre recueil, appelé Manuscrit Möller [Möllersche Handschrift] (Berlin, Staatsbibliothek, Mus. Ms. 40644) du nom de son possesseur, Johann Godfried Möller (1774–1833) – né à Ohrdruf[4] – et qui comprend presque autant de pièces, copiées entre 1704 et 1707. Ces manuscrits sont ensemble, les deux sources principales pour les premières compositions de Bach[5],[6] et contiennent des unica (seule source connue d'une œuvre), dont six de Buxtehude.

Histoire

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Le manuscrit de Johann Christoph a été hérité par son fils cadet Johann Andreas (1713–1779). C'est lui qui lui donne son nom, en raison de sa signature en dernière page : « Johann Andreas Bach, 1754 ». Il a été transmis ensuite à l'organiste Christian Friedrich Michaelis (1770–1834) puis à Carl Ferdinand Becker (1804–1877) – l'un des éditeurs de la Bach-Gesellschaft –, pour finalement être acquis par la bibliothèque de Leipzig (Musikbibliothek) en 1856. Il s'y trouve actuellement, au sein de la collection Beker, sous la cote III.8.4 et est disponible en ligne.

C'est l'un des plus grands spécialistes de Bach, Hans-Joachim Schulze (* 1934) qui a identifié l'écriture de Johann Christoph[7], seulement à la fin des années 1970[8] lorsqu'il travaillait aux archives Bach de Leipzig, par une étude publiée dans le cadre de sa thèse de doctorat.

Manuscrit

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La compilation de Johann Christoph contient sur 118 pages, 57 œuvres de 16 auteurs différents. L'origine des pièces est très variée : auteurs français, italiens, allemands de la fin du XVIIe et du début du XVIIIe siècle. À l'époque de la copie un seul compositeur est mort : Bruhns. Il est courant que les compositeurs « se communiquent les œuvres qu'ils veulent jouer... »[2], c'est sans doute pourquoi les partitions à partir desquelles Johann Christoph a travaillé, sont de grande qualité, ce qui confère au recueil « une importance unique pour notre connaissance de la musique allemande pour clavier[5] » de l'époque.

 
Buxtehude (1674) peint par Johannes Voorhout (détail).

Jean-Sébastien a pu rapporter de son voyage d'un trimestre à Hambourg (1705 – deux ans après le passage d'Haendel), certaines des œuvres de Buxtehude ou Reinken[7], ainsi que les pièces de Marin Marais où l'opéra a pu être donné[7] (en revanche on ignore l'origine de cet arrangement pour clavier). Carlo Francesco Pollarolo est un vénitien connu pour ses opéras et quelques pièces de clavecin dont deux capricci se retrouvent bien énigmatiquement dans le recueil.

Les sept œuvres de Buxtehude, comme les autres, sont notées en « tablature à l'italienne », c'est-à-dire équivalent à notre notation moderne qui s'est généralisée au XVIIIe siècle. Or les partitions originales ont sans doute été écrites en tablature allemande. Ainsi il s'agit pour une petite part d'une transcription : les tablatures allemandes n'indiquent ni mesure, ni pédale. Le titre du Prélude BuxWV 137 précise l'usage du pédalier, mais le manuscrit, comme d'usage à l'époque de Bach, présente seulement deux portées – la troisième, dévolue à la pédale, n'étant courante seulement qu'avec l'édition romantique.

Le manuscrit a été l'objet de l'attention et de l'admiration des musicologues dès Spitta au milieu du XIXe siècle, pour son contenu exceptionnel : la présence des unicae de Buxtehude et des œuvres de jeunesse de Bach. Durant la période antérieure aux découvertes de Hans-Joachim Schulze, certaines faisaient polémique sur leur attribution en raison de la diversité des styles qu'exploite le jeune musicien, curieux de tous les genres et des provenances diverses, tant française, italienne qu'allemande. Les pièces de Bach s'étalent sur une période de dix ans. Du Bach de 18 ans, bientôt en poste à Arnstadt[7] (à quelques kilomètres d'Ohrdruf), jusqu'au style plus abouti[7] de la Toccata BWV 911 d'un compositeur de 25 ans. Les BWV 921 et BWV 1121 seraient parmi les plus anciennes compositions pour clavier connues de Bach, (avec le prélude en sol mineur BWV 535a et les chorals pour orgue « Wie schön leuchtet der Morgenstern », BWV 739 et 764, tous composés avant 1706–1707).

De nos jours les manuscrits et les copies par le jeune Bach, sujet d'une anecdote très connue[9], n'ont pas été retrouvés. Une pièce comme la Chaconne en mineur de Pachelbel, ou des pièces du même genre, pouvait en faire partie, Johann Christoph étant l'élève de Pachelbel.

Détails des pièces

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Pièces du manuscrit
no  folio auteur titre/tonalité catalogue note et incipit
11 Anonyme Courante en si-bémol majeur
41 Anonyme Choral Auf meinen lieben Gott Variations
48 Anonyme Fugue en sol majeur
57 Anonyme Fugue en mi mineur Attribution antérieure à Bach, BWV 960
52 Bach Fantasia & Imitatio en si mineur Bwv 563 L'imitation dont il s'agit est celle de la Clavier-Übung (fin années 1690) de Johann Kuhnau[10]
45 Bach Fantaisie en ut majeur Bwv 570
50 Bach Fugue sur un thème de Giovanni Legrenzi en ut mineur Bwv 574b D'après une sonate en trio.
28 Bach Fugue en sol mineur Bwv 578
 
24 Bach Passacaglia et fugue, pour orgue en ut mineur BWV 582
 
Composition : 1707/08. Les musicologues ont rapproché le thème de la Passacaille en sol mineur du Second livre de messe de André Raison, ainsi que la Passacaille en mineur de Buxtehude et avec sa Chaconne en mi mineur ce qui correspondrait à la date de la mort du musicien de Lübeck. Piet Kee, organiste, a été le premier à établir la source possible de la construction (numérique et symbolique) : Andreas Werckmeister « Paradoxal-Discourse » de 1706, publiée l'année suivante.
30 Bach Prélude de choral Gottes Sohn ist kommen Bwv 724 Gott, durch deine Güte
13 Bach Ouverture en fa majeur Bwv 820 Ouverture, Entrée, Menuet/Trio, Bourrée, Gigue.
20 Bach Toccata en fa-dièse mineur Bwv 910
25 Bach Toccata en ut mineur Bwv 911
27 Bach Toccata en sol majeur Bwv 916
32 Bach Prélude en ut mineur Bwv 921 Jean-Sébastien ajoute lui-même trois mesures pour terminer la pièce. « Le jeune Bach essaie par différents moyens d'exécuter de simples progressions d'accords d'une manière élaborée et virtuose[11]. »
56 Bach Fantaisie et fugue en la mineur Bwv 944 « La brève fantaisie, seulement une succession d'accords marquée arpège, n’apparaît pas régulièrement dans les diverses sources, suggérant que Bach pourrait l'avoir ensuite rejetée[12]. »
19 Bach Fugue en la majeur Bwv 949 Il s'agit d'une des quatre adaptations conservées d'Albinoni. Bach y traite l'opus 1 no 7, second et quatrième mouvements, mais de manière très lâche[13] par rapport à l'original. C'est peut-être pourquoi le manuscrit n'indique pas le lien.
36 Bach Aria Variata alla maniera italiana Bwv 989 Dix variations
33 Bach Fantaisie en ut mineur Bwv 1121 (anciennement BWV Anhang 205)
6 Böhm Prélude, fugue et postlude en sol mineur
8 Böhm Ouverture en majeur Suite
16 Böhm Ouverture en mi-bémol majeur Suite : Ouverture, Air, Rigodon, Trio, Rondo, Menuet, Chaconne.
17 Böhm Suite en ut mineur
18 Böhm Suite en la mineur
40 Buttstett Fugue en mi mineur Cette fugue est nommée « Trémolo » par Dietrich Bartel[14], mais ce procédé semble une caractéristique de style du compositeur[15]. Buttstett est élève de Pachelbel en même temps que Johann Christoph[16] et organiste à la Predigerkirche d'Erfurt, poste qu'avait occupé Johann Bach (frère du grand-père de Jean-Sébastien).
54 Buttstett Prélude en sol majeur Extrait du Musicalische Clavier-Kunst und Vorraths-Kammer IV, publié en à Leipzig en 1713[17].
23 8r/53a Buxtehude[18] Prélude et fugue en sol mineur BuxWV 150
9 33v Buxtehude Chaconne en ut mineur BuxWV 159 unicum
26 61v Buxtehude Fuge en ut majeur BuxWV 174 unicum. La parenté avec le thème du BWV 577 a été notée par les musicologues[19]
42 91r Buxtehude Chaconne en mi mineur BuxWV 160
 
unicum
51 107v Buxtehude Passacaglia en mineur BuxWV 161
 
unicum
53 110r Buxtehude O Lux beata Trinitas col Pedali, Præludium en sol majeur BuxWV 216 unicum (fragment)
55 111v Buxtehude Praeludium in C Pedaliter di D Buxtehude BuxWV 137
 
unicum. Les éditions modernes indiquent la structure : Prélude, Fugue et Chaconne
47 Fischer Præludium & Ciaconne Extrait des Pièces de Clavecin, 1696.
49 Kuchenthal Cambercweau en ut majeur Chant berceau
1 Kuhnau Sonate Biblique no 1 en ut majeur Le recueil Musicalischer Vorstellung einiger Biblischer Historien, comprenant six sonates, est publié en 1700.
2 Kuhnau Sonate Biblique no 2 en sol mineur
3 Kuhnau Sonate Biblique no 3 en sol majeur
4 Kuhnau Sonate Biblique no 4 en fa majeur
Sonate Biblique no 4
5 Kuhnau Sonate Biblique no 5 en mi-bémol majeur
39 Marchand Suite en mineur Extrait des Pièces de Clavecin, Livre Premier, 1702.
38 Marais Suite d'Alcide (1693) L'opéra original a été composé avec Louis Lully (fils)[20]
21 4v-5v Pachelbel Toccata en ut majeur
22 7v-8r Pachelbel Toccata [pour orgue (no 3)]
25 Pachelbel Toccata en mineur voir no 31
29 67v-69r Pachelbel Chaconne en mineur T.204
Chaconne en mineur
31 70v-71r Pachelbel Fugue voir no 25
12 Pestel Suite en majeur Entrée, Menuet, Bourrée, Passepied, Menuet, Gavotte, Sarabande[21].
10 Pollarolo Capriccio en majeur
44 Pollarolo Capriccio en ut majeur
14 Reinken Variation en mi mineur
15 Reinken Toccata en sol majeur
46 Reinken Variations Schweiget mir vom Weibernehmen en sol majeur Thème et 11 variations.
35 Ritter Sonatina en mineur Pour orgue.
43 Ritter Suite en fa mineur
7 Telemann Ouverture en mi-bémol majeur Extrait d'une suite pour clavecin : Ouverture, Entrée, Menuet, Loure, Gigue, Bourrée, Polonaise, Aria, Passepied[22].
34 Witt Prélude
37 - Table d'ornementation

Fichier audio
Pachelbel : Chaconne en ré mineur pour orgue
noicon
Interprété par Tibor Pinter sur orgue Gottfried Silbermann (1722) à Rötha, Allemagne.
 
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Discographie

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Voir aussi

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Édition

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  • Robert Hill (éd.), Introduction to Keyboard Music from the Andreas Bach Book and the Möller Manuscript, Cambridge Massachisetts, Harvard University Press 1991, coll. Harvard Publications in Music 16, 258 p. (ISBN 9780674588943), (OCLC 23839483)
  • Johann Heinrich Buttstett, Sämtliche Orgelwerk. (Klaus Beckmann éd.) Édition Schott, ED 9923, 2006.

Bibliographie

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Thèses

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  • (en) Robert Stephen Hill, The Möller Manuscript and the Andreas Bach Book : Two keyboard anthologies from the circle of the young Johann Sebastian Bach, Cambridge, Harvard University, coll. « Publications in Music » (no 16), , 1508 p. (OCLC 18857225)
  • (en) Scott M. Elsholz, Opening a forgotten cabinet : Johann Heinrich Buttstett’s musicalische clavier=kunst und vorraths=kammer (1713), Indiana University, Jacobs School of Music, , 116 p. (OCLC 828126957, lire en ligne)

Compositeurs

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Études

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Articles

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Notes discographiques

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  • (fr) Jean-Claude Zehnder (trad. Geneviève Bégou), « Andreas Bach Buch (par Benjamin Alard) », p. 3-10, Éditions Hortus (045), 2005 .
  • (fr) Robert Hill, « Complete Bach works, vol. 102-117, keyboard works », p. passim, Hänssler, 2010 (Lire en ligne) .

Notes et références

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  1. Jones 2006, p. 6
  2. a et b Cantagrel 2008 commence à 1705.
  3. Apel 1972, p. 5
  4. Snyder 1987, p. 323
  5. a et b Hill 2010, p. 17
  6. Williams 1985, p. 163
  7. a b c d et e Zehnder 2005, p. 4
  8. Schulze 1984, p. 30-56
  9. Cantagrel 2008. Comme on le sait grâce à Carl Philipp Emmanuel Bach, ces manuscrits contenaient des pièces de Froberger, Kerll et Pachelbel. Gilles Cantagrel, De Schütz à Bach.
  10. Hill 2010, p. 42
  11. (fr) Yo Tomita (trad. Arlette Lemieux-Chené), « Fantasia & Fugues (Masaaki Suzuki, clavecin) », p. 18, Bis (CD-1037), 2000 .
  12. Tomita 2000, p. 18-19.
  13. Hill 2010, p. 44
  14. (en) Dietrich Bartel, Musica Poetica: Musical-Rhetorical Figures in German Baroque Music. University of Nebraska Press, Lincoln 1997, p. 427.
  15. Apel 1972, p. 675
  16. Elsholz 2013, p. 7
  17. Elsholz 2013, p. 76
  18. Snyder 1987, p. 439
  19. (en) Peter Williams, The Organ Music of J. S. Bach : Preludes, toccatas, fantasias, fugues, sonatas, concertos and miscellaneous pieces (BWV 525-598, 802-805 etc.), Cambridge University Press, coll. « Cambridge studies in music », , 365 p. (ISBN 0-521-21723-7, OCLC 769120144, lire en ligne), p. 246
  20. Jones 2006, p. 17.
  21. Apel 1972, p. 19.
  22. Jones 2006, p. 19.
  23. (en) « review de Christopher Nickol sur Gramophone », sur www.gramophone.co.uk, (consulté le )

Articles connexes

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Liens externes

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