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Vue de l'hôtel de ville

L'hôtel de ville du Locle est édifié entre 1913 et 1918, pendant la Première Guerre Mondiale, sur les plans de l'architecte Charles Gunthert de Vevey (1878-1918), choisi sur concours. Ce "nouvel hôtel de ville" remplace l'ancien, situé près du temple, Grande-Rue 11, devenu trop exigu en raison de l'expansion et de la modernisation de la ville au 19e siècle.

Les anciens hôtels de ville

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Quatre maisons de commune ont précédé le "nouvel hôtel de ville". La plus ancienne connue est attestée en 1640 par des textes mentionnant la volonté d'y installer une salle de classe. On y trouvait aussi des boutiques, un corps de garde, une boucherie, un grenier, une auberge. Détruite par un incendie en 1683, en même temps que 22 autres maisons, elle fut remplacée par une deuxième, édifiée sur le même emplacement en 1684-1686. Sa grande taille (171 pieds sur 28, soit environ 50,15 x 8,20 mètres) lui permet d'abriter les mêmes locaux que la maison de commune précédente, ainsi qu'une salle de justice et un four à pain. Un incendie se déclare malheureusement une fois encore en 1833 : 45 maisons sont ravagées, mais la partie orientale de la maison de commune a été protégée par un mur mitoyen qui a arrêté le feu.

On reconstruit 6 ans plus tard un troisième hôtel de ville à la place des vestiges du deuxième. On connaît bien cet édifice, car il existe encore : c’est l’actuel hôtel judiciaire, Grande-Rue 11, où l’on trouve aujourd’hui la police et le guichet social régional des Montagnes neuchâteloises. Les architectes Frédéric Meuron et James Colin ont érigé un bâtiment de 17,25 x 14,85 mètres, haut de deux niveaux sur rez-de-chaussée dans un style néorenaissance. La construction est double, avec un bâtiment principal à l’est et un autre plus modeste à l’ouest, mais elle devient malgré tout rapidement trop petite pour la ville alors en pleine expansion.

L’hôtel de ville actuel, baptisé Nouvel hôtel de ville

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A la fin du 19e siècle, la commune décide de construire un hôtel de ville. Le projet est conséquent et il faut plusieurs années pour assurer le financement nécessaire. Le concours lancé en 1912 auprès d’architectes suisses ou domiciliés en Suisse a pour condition que « Le caractère principal des façades doit être d’une grande simplicité. L’effet d’ensemble doit être obtenu par l’harmonie des lignes et non par une décoration coûteuse ou peu en rapport avec le climat du Locle » (Baillod 1919 : 66). Parmi les 83 projets reçus, quatre - dont on peut noter l’allusion à la nature dans les titres - sont récompensés :

1er prix : « La Truite » de Charles Gunthert (Vevey)

2e prix : « Soleil » d’Albert Gyssler (Bâle)

3e prix : ex æquo « Montagne » de Romildo Méroni (Peseux) et « Fontaine » de Frantz Trachsel (Berne).

« Béton armé » du jeune architecte Charles-Edouard Jeanneret (Le Corbusier) est rejeté en raison de son modernisme. Dans le projet primé, le jury apprécie en revanche « l’originalité dans prétention », l’usage de matériaux du pays et donc pas très coûteux, un pignon au-dessus de la porte d’entrée qui permet d’éviter les avalanches de neige tombant du toit, une fresque esthétique (« surtout en hiver » !). S’y trouvent des sujets d’inspiration régionaux comme le berceau d’avant-toit, courant dans l’architecture des Montagnes neuchâteloise à partir du 18e siècle, ou les fenêtres à meneaux échelonnés et la tourelle d’escalier avec une flèche effilée qui rappellent l’architecture viticole du Littoral.

La direction et le suivi du chantier sont confiés au bureau d’architectes du Locle Oesch & Rossier. Commencés en 1913, les travaux seront interrompus pendant quelques mois au début de la Première Guerre mondiale, puis reprendront pour plusieurs années. Les premiers bureaux sont installés dans le bâtiment en automne 1917 (voir la date sur la porte nord de l’édifice), mais le chantier se terminera un an plus tard. L’architecte Charles Gunthert, décédé le 7 juillet 1918 pendant la pandémie de grippe espagnole, n’en verra pas la fin, mais il aura le temps de favoriser l’engagement d’Ernest Bieler pour la réalisation de la fresque sous le berceau situé au-dessus de l’entrée principale. « La Ronde des heures » sera signée par l’artiste en 1922. Deux astrologues orientaux y subdivisent le cours du soleil en heures, personnifiées par des figures féminines qui défilent dans le sens inverse des aiguilles d’une montre au fur et à mesure des passages de la vie. On voit aussi un ouvrier horloger, une pendule, des dentelières. Dix ans plus tard, Ernest Bieler décorera le pignon opposé d’une allégorie de la paix en mosaïque.

L’hôtel de ville se dresse isolé au milieu d’une aire dégagée. Il est implanté entre la zone d’habitation, à l’est, et la zone industrielle, le nouveau quartier du Marais, à l’ouest. Un socle de 1244 pilotis pris dans le béton lui sert d’assise. Son aspect est imposant, sous son ample toiture et avec ses murs d’épais moellons rustiques soutenus par des contreforts, ainsi que son porche d’entrée derrière trois grandes arcades portées par des colonnes. Une tourelle avec une flèche effilée et les rangées de fenêtres à meneaux et croisillons rappellent les anciennes époques de l’architecture du Littoral.

L’intérieur est organisé autour d’un hall éclairé par un puits de lumière sous une voûte de briques en verre, dont la construction a dû être un défi. Derrière les arcades, similaires à celles du porche, des galeries latérales distribuent les locaux. L’artiste Alfred Blailé a peint des arabesques de couleur vives sur les murs, ainsi que les scènes « Le vieux Locle » et « Le Locle, d’après une gravure de Girardet (1795) » au-dessus des arcades du 2e étage. Les ornements en fer forgé représentent une chimère à la gueule béante, un leitmotiv revenant à l’intérieur comme à l’extérieur.

La fonction des salles apparaît dans les linteaux des portes, au milieu d’ornementations fleuries en arabesques. Le rez-de-chaussée abrite la salle des mariages et des offices publics (état civil, police des habitants, comptabilité etc.), tandis que les étages accueillent les bureaux des services communaux et les salles du Conseil général et du Conseil communal. Le décor de ces dernières se caractérise par des plafonds à caissons, et des boiseries montées sur les deux tiers de la hauteur des parois, allusion probable à la Renaissance.

L’hôtel de ville du Locle appartient au courant régional du Heimatstil, qui s’est manifesté en Suisse entre 1896 et 1914, quand des matériaux et des procédés constructifs nouveaux ont commencé de s’imposer. A la modernité de ces techniques, les tenants du Heimatstil ont opposé une apparence architecturale qui se voulait rassurante par ses références au passé et aux traditions locales. De fait, ces dernières ont généralement été réinterprétées. C’est à cette tendance que s’opposait le projet, malheureusement disparu, de Charles-Edouard Jeanneret, qui affirmait la modernité des matériaux et des techniques dans la structure et dans l’apparence du bâtiment qu’il avait imaginé.

Depuis sa construction, l’hôtel de ville du Locle a subi deux campagnes de conservation-restauration. La première, de 1983 à 1987, a concerné l’extérieur : elle a consisté à restaurer les façades et les décors peints des avant-toits et des berceaux par des spécialistes. Lors de la seconde, en 1991 et 1992, ce sont les peintures du porche oriental et celles de l’intérieur qui ont été traitées.

Almanach du Montagnard : véritable messager pour les Montagnes neuchâteloises et bernoises pour l'an de grâce 1919, p.

Anonyme, L'Hôtel de ville du Locle, dans Bulletin technique de la Suisse romande 46 (3), 1920, p. 26-30, 2 pl.

Baillod, William, Etude historique sur les hôtels de ville du Locle, Lausanne : Impr. La Concorde (publ. par le Conseil communal du Locle à l'occasion de l'inauguration du nouvel Hôtel de Ville), 1919, 166 p., (photogr. Boissonas à Genève

Baillod, William, « L’hôtel de ville du Locle », dans Le véritable messager boîteux de Neuchâtel pour l’an de grâce 1921, p. 52-53, disponible sur Internet : http://doc.rero.ch/record/12444/files/BPUN_QZ617-1921.pdf

Baillod, William, « La fresque de l’hôtel de ville du Locle », dans Le véritable messager boîteux de Neuchâtel pour l’an de grâce 1924, p. 74-76, disponible sur Internet : http://doc.rero.ch/record/12444/files/BPUN_QZ617-1924.pdf

Barbey Gilles et Hauser Andreas, Inventaire Suisse d’Architecture 1850-1920 INSA : Le Locle, 1991, p. 121-203 (histoire de la ville : p. 130-159 ; hôtels de ville : p. 186 (ancien) et 187 (actuel)

Chopard, Marcel, Notice sur les fresques de l'Hôtel de Ville du Locle, Genève : Atar, [1923], 15 p.

Chopard, Marcel, Notice sur les fresques de l'Hôtel de Ville du Locle, Le Locle : [Chancellerie communale], 1991, 22 p. (contributeurs : Egloff, Michel, Hasler, Ernest, Staehli, Marc, Debieux, Charly)

Crettaz-Stürzel Elisabeth (dir.), Heimatstil : Reformarchitektur in der Schweiz 1896-1914, 2 vol., Frauenfeld, Stuttgart, Viene, Huber, 2005: voir en particulier l’article de Piguet Claire « Renouveau et « saveur locale » en architecture: le Heimatstil à Neuchâtel », vol. 2, p. 192-197.

Guex, Stéphanie; Lüthi, Dave; Langer, Laurent; Perrin-Marti, Florence, L'Hôtel de Ville du Locle, 1912-1922, Le Locle : Ed. G d'Encre, 2007, 70 p., (ouvrage paru à la suite de l'exposition "De l'Art nouveau au Heimatstil: l'Hôtel de Ville du Locle" au Musée des beaux-arts du Locle, du 22 avril au 27 août 2006, organisé à l'occasion des manifestations "Art nouveau, La Chaux-de-Fonds, 2005-2006")

Hasler, Ernest, Inspection de la Maison de ville : (Hôtel de ville, 1703) : 1841-1918, actuel Hôtel judiciaire, [Le Locle] : Groupe "Histoire locloise", 1979

Piguet, Albert, Une page d'histoire locloise : discours prononcé par M. A. Piguet, président du Conseil communal, au début de la première séance du Conseil général tenue dans le Nouvel Hôtel de Ville, le vendredi 11 octobre 1918, [Le Locle] : [s.n.], 1918, 8 p.

L’Art Nouveau dans le canton de Neuchâtel, Revue historique neuchâteloise 1-2, 2006, 140 p.