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L’ABÎME

Dans le mysticisme thélémite, l’Abîme est l’immense gouffre ou vide séparant le monde phénoménal de la manifestation de sa source nouménale.


Contenu

° 1 Théorie et pratique

° 2 Le Livre des Mensonges

° 3 Notes


° 1 Théorie et pratique

Le fondateur de Thelema, l’auteur britannique Aleister Crowley (1875-1947), dit de l’Abîme, dans ses Petits Essais du Côté de la Vérité :

“ Cette doctrine est extrêmement difficile à expliquer ; mais elle correspond plus ou moins à la lacune dans la pensée entre le Réel, qui est idéel, et l’Irréel, qui est actuel. Dans l’Abîme, toutes les choses existent, en effet, au moins virtuellement, mais elles sont sans signification possible ; car il leur manque le substrat de la Réalité spirituelle. Ce sont des apparences sans la Loi. Il s’agit d’illusions Démentes.

“ Or, l’Abîme étant le grand magasin des Phénomènes, il est l’origine de toutes les impressions. ” [1]

Sur un plan pratique, les instructions publiées de Crowley, relatives à l’Abîme, enjoignent le lecteur de considérer certains problèmes philosophiques sans user de la magie ou de l’intuition, jusqu’à ce que le mental se concentre sur ce problème de son plein gré : “ Puis, tous les phénomènes qui se présentent à lui lui sembleront dénués de sens et décousus, et son propre Ego se désagrégera en une série d’impressions n’ayant aucune relation entre elles, ni avec quoi que ce soit d’autre. ” [2] Cela prépare l’étudiant à l’expérience mystique que Crowley nomme ailleurs Shivadarshana. Crowley rédigea ces instructions sur la base de ses propres expériences vécues au cours de l’année 1905. [3] La Vision et la Voix décrit deux méthodes supplémentaires permettant de pénétrer l’Abîme. La première d’entre elles “ concerne des choses dont il est illicite de parler ouvertement sous peine d’un châtiment des plus effroyables ”, [4] à savoir un rapport homosexuel passif sous le soleil du désert qui était en opposition à sa conduite sociale habituelle ou à l’image qu’il avait consciemment de lui-même. [5] La seconde implique la magie cérémonielle et se centre davantage sur la théorie derrière le concept d’Abîme.

Dans le système qabalistique de Crowley, l’Abîme contient la 11ème séphirah (cachée), Daäth, qui sépare les séphiroth inférieures des séphiroth supérieures, dites “ Supernelles ”. Ce concept provient de l’Ordre Hermétique de l’Aube Dorée et de sa vision de la Genèse, [6] où Daäth symbolise la chute de l’homme, hors de la conscience unifiée, dans la dualité séparant l’ego de la nature divine. [7] L’Abîme est gardé par le démon Choronzon qui se manifeste lors de la troisième méthode, cérémonielle, permettant de franchir ce gouffre. Il symbolise ces parties de notre conscient et de notre inconscient — “ une Unité passagère capable de sensation et d’expression ”, pour reprendre les termes de Crowley [8] — qui ne veulent ou ne peuvent rentrer dans le Divin.

Crowley affirme encore à son sujet dans “ La Vision et la Voix ” (dixième Ether) : “ L’Habitant de l’Abîme se nomme Choronzon, mais il ne s’agit pas réellement d’un individu. L’Abîme est vide d’être ; il est rempli de toutes les formes possibles, chacune d’entre elles étant également inepte, et donc chacune étant également maléfique dans l’unique véritable acception du mot — c’est-à-dire dénuée de sens mais malfaisante, dans la mesure où elle est avide de devenir réelle. Ces formes tournoient stupidement comme des masses hasardeuses semblables à des tempêtes de sable, et chaque agrégation fortuite de ce genre revendique le titre d’individu, et hurle ‘Je suis Je’, tout en ne cessant de savoir que ses éléments ne sont pas véritablement liés ; de sorte que la plus légère perturbation dissipe l’illusion de même qu’un cavalier rencontrant une tempête de sable la renvoie à la terre sous forme d’averses de sable. ” [9]

“ Franchir l’Abîme ” est considéré comme une opération périlleuse, et c’est l’œuvre la plus importante dans la vie d’un magicien. Y réussir donne accès au grade de Magister Templi, ou “ Maître du Temple ”.

° 2 Le Livre des Mensonges

Crowley publia en 1912 ou 1913 (des incertitudes demeurent quant à l’année exacte) Le Livre des Mensonges, “ publication officielle pour le Grade d’Enfant de l’Abîme ”.

Son dixième chapitre, “ Vieux Tas d’Herbes ”, est spécifiquement consacré à l’Abîme. [10]

° 3 Notes

  1. Crowley, Aleister. “ Little Essays Toward Truth. ” Las Vegas, NV : New Falcon Publications, 1991. (ISBN 978-1561840007).
  2. Crowley, Aleister. “ Liber OS Abysmi vel Daath ”. Première publication in "The Equinox", Vol. I, n°7 (Londres, 1910).
  3. Crowley, Aleister. Confessions, Chap. 58. Penguin, 1989. (ISBN 978-0140191899). Sutin, Lawrence. “Do What Thou Wilt: A Life of Aleister Crowley”. New York : St. Martin's Griffin, 2002. (ISBN 978-0312288976). Page 160.
  4. Crowley, Aleister. Confessions, Chap. 66.
  5. Sutin, idid., p. 202.
  6. Voir le Rituel 4° = 7° de l’Aube Dorée où Daäth est mentionnée comme “ la Huitième Tête du Dragon Courbé ”, in Regardie, Israel : “ The Golden Dawn: The Original Account of the Teachings, Rites & Ceremonies of the Hermetic Order ” St Paul, MN : Llewellyn Publications ; 6ème édition, 2002. (ISBN 978-0875426631).
  7. Regardie, Israel, ibid.
  8. Crowley, Aleister. “ The Vision and the Voice ”. Dixième Ether. “ The Vision and the Voice with Commentary and other papers ”. York Beach, ME : Red Wheel/Weiser, 1997. (ISBN 978-0877288879).
  9. Crowley, Aleister. “ The Vision and the Voice ”. Dixième Ether. “ The Vision and the Voice with Commentary and other papers ”. York Beach, ME : Red Wheel/Weiser, 1997. (ISBN 978-0877288879).
  10. Crowley, Aleister. “ The Book of Lies ”. Traduction française sous le titre “ Le Livre des Mensonges ” : Bruxelles : ESH-Editions, 2013. (ISBN 978-2805300110). Page 34.