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Celinte est un roman de Madeleine de Scudéry publié en 1661, l'année de l'arrivée au pouvoir de Louix XIV.

Toutes les références sont tirées de l'unique édition existante pour Celinte : SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, 172p.

Quelques remarques sur la publication et le style[style à revoir] de Celinte

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Publié en 1661, Celinte est un roman de Madeleine de Scudéry qui amorce un changement de forme et de style dans le traitement du romanesque par la célèbre écrivaine. En effet, à partir de 1661, la mode veut que l'on passe des grands romans dont LAstrée d'Honoré d'Urfé, ou encore Clélie de Madeleine de Scudéry sont certainement les meilleurs exemples, à de plus courts, nommés "nouvelles". Mlle de Scudéry n'a donc pas manqué de tenter de s'adapter aux goûts des lecteurs du moment.

Pour plus d'informations concernant la nouvelle mode romanesque de cette époque et la place de Celinte dans ce mouvement encore peu mis en évidence dans l'Histoire littéraire française, on peut lire[style à revoir] deux ouvrage de Camille Esmein, déjà citée un peu plus haut, et un autre d'Henri Lafon. Dans le premier ouvrage de C. Esmein, Celinte est cité six fois, dans le second il ne figure pas mais Matilde, roman de Mlle de Scudéry publié en 1667 répondant aux mêmes modifications, figure. Quant à Henri Lafon, il cite lui aussi Celinte, aux côtés de Clélie, La Promenade de Versailles (1699), ou encore Ibrahim ou l'illustre Basse (1641) :
− Sous la direction de Camille Esmein, L'Essor du roman : discours théorique et constitution d'un genre littéraire au XVIIème siècle, Paris, Ed. Honoré Champion, 2008, 587p.
− Sous la direction de Camille Esmein, Poétiques du roman : Scudéry, Huet, Du Plaisir, et autres textes théoriques et critiques du XVIIème siècle sur le genre romanesque, Paris, Ed. Honoré Champion, 2004, 943p.

– Lafon, Henri, Espaces romanesques du XVIIIè siècle - de Madame de Villedieu à Nodier, Paris, Ed. Presses Universitaires de France (PUF), 1997, 216p.

Résumé

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L’œuvre est composée de deux parties : un prologue, et la nouvelle à proprement parler.

  • Le prologue :

Il sert à introduire avec une "apparente nonchalance" ([1]) la nouvelle, en présentant la conversation d'un groupe de jeunes gens se promenant au bois de Vincennes quelques jours après l'entrée de Louis XIV et de son épouse à Paris, le 26 août 1660. La conversation traite du thème de la curiosité (conversation galante et philosophique à l'image de celles que l'on tenait dans les salons). Or il s'avère qu'Artelice a reçu une histoire quelques jours auparavant, qui passe pour véritable, et elle serait très curieuse de la lire avec ses amis afin de découvrir qui se cache derrière les personnages.

  • La nouvelle :

Le narrateur ne nous dit pas où s'est déroulée cette histoire, mais nous assure dès le début qu'il s'agit là d'une histoire contemporaine, illustrant donc très bien les mœurs de l'époque. Célinte est une jeune femme noble et parfaite, vertueuse en toutes qualités, orpheline depuis son enfance et qui vit de ce fait auprès de sa tante, Lisiane, veuve.

De la recherche d'un amour idéal

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La jeune demoiselle met un point d'honneur à viser l'amour idéal, fruit d'une « inclination » (terme récurrent, retrouver la conversation). Elle se montre ainsi quelque peu ingrate à l'égard de ses deux prétendants – Ariston et Méliandre, amis de toujours et rivaux désormais par cet amour qui pourrait bien les séparer. (Remarquez au passage que Madeleine de Scudéry trouve l'occasion de cette intrigue pour s'interroger sur un des thèmes à la mode de l'époque, celui de l'amour et de l'amitié, en posant diverses questions : l'amour est-il préférable à l'amitié ? L'amitié est-elle un lien plus fort que l'amour ? Un amour peut-il venir à bout d'une fidèle amitié ?) Célinte n'aime ni l'un ni l'autre, et ne cesse de rappeler aux deux jeunes galants de ne rien espérer. Entre temps, un ami de son frère Cléonte vient chez sa tante, ami que son frère lui a recommandé en la priant de lui donner toute l'affection possible afin de lui rendre le séjour plus agréable. Il s'agit de Poliante, homme de cour, galant, parfait en tous points et égal à ceux qui poursuivent déjà leur séduction auprès de Célinte. Mais cette fois, la jeune femme ressent immédiatement de l'attirance. Ami de Meliandre, Poliante dans un premier temps essaie de juger des sentiments de la jeune femme afin de savoir s'il y a lieu d'espérer pour son ami un amour à venir, et éventuellement jouer les entremetteurs. Mais il s'aperçoit vite que Célinte est très honnête en propos, et qu'elle ne cherche nullement à cacher – par une pudeur qu'on pourrait attendre – des sentiments qu'elle n'a ni pour Méliandre, ni pour son rival. Poliante se déclare alors à Célinte, qui tente de cacher ses sentiments jusqu'au jour où elle écrit quelques vers sur des tablettes, que Poliante surprend ([2]). Heureux de se prendre, et à juste titre, pour Daphnis, il se déclare avec bonheur, persuadée d'être aimé en retour, mais la belle Célinte ne le voit pas du même œil : elle voit dans cette identification un empressement orgueilleux. Une conversation est entamée où Célinte cherche à savoir quand Poliante a commencé de l'aimer. La réponse la déçoit, puisque Poliante n'a pas ressenti immédiatement de l'amour pour elle, ou du moins ne s'en est pas rendu compte. Elle ne voit donc pas dans son amour une véritable « inclination » fruit de sentiments idéaux.

De l'union au tombeau

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Pendant ce temps, Méliandre et Ariston font en sorte d'oublier Célinte, conscients de ne rien devoir attendre d'elle. Mais Clarice et Artésie, leurs sœurs respectives, cherchent à venger leurs frères de leurs amours déçus. Clarice séduit donc Cléonte, et Artésie s'arrange pour rendre jalouse Célinte en séduisant Poliante. Célinte cherche alors à éprouver une dernière fois les sentiments de Poliante, et voyant qu'ils sont sincères, les deux jeunes gens finissent par se marier malgré tout. Evidemment, les choses ne sont cependant pas si simples. Dans leur vengeance, le groupe des deux prétendants déçus de Célinte est parvenu à rendre Poliante « suspect à la Cour » (p. 106). Celui-ci projette donc de s'exiler à nouveau. Il écrit à des amis afin de trouver un accueil, mais par malheur, il écrit à des gens « engagez dans une faction dangereuse, et criminelle, si bien que ses lettres estant prises, et le crime de ceux à qui il escrivit prouvé, il se trouva engagé dans leur crime » ([3]. NB : la note 118 assortie, p. 162 de notre édition remarque à juste propos que cette épisode semble tout à fait prophétique de ce qui est arrivé à Foucquet et ceux qui lui entretenaient avec lui correspondance, dont Pellisson, ami cher à Mlle de Scudéry). Poliante est de ce pas arrêté, et conduit en un château comparable à la Bastille. C'est le début d'un grand désespoir pour les deux amants. Malgré les requêtes de Célinte après de ses amis, tous sont aveuglés par leur vengeance. « Ne sachant plus que faire, elle imagina un dessein, qui dans sa bizarrerie, avoit beaucoup d'amour […]. » ([4]) Elle va par l'intermédiaire de son amie Melise se faire passer pour malade, puis morte, et se cachera pour rejoindre un couvent de femmes voilées alors que les autres assisteront à son pseudo enterrement. Ce projet est censé rendre la vengeance de Meliandre et Ariston vaine, et permettre à Poliante de retrouver la liberté. Elle s'arrange également pour faire parvenir à Meliandre une lettre contenant ses derniers souhaits, consistant à insister sur l'innocence de son époux afin de culpabiliser Meliandre et de le pousser à revenir sur sa position. Mais tout ne se déroule pas comme prévu, Meliandre négocie la sortie de Poliante en la conditionnant à son union avec sa sœur Clarice, ce que refuse l'époux éploré, de sorte qu'il reste en prison. L'écuyer qui a servi Célinte meurt à ses côtés, Melise meurt à son tour, et finalement Célinte apprendre l'exil du médecin qui l'avait aidée ([5]). Personne n'est désormais au courant de son existence.

De longues années de séparation avant d'heureuses retrouvailles

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Poliante est parvenu à suborner un de ses gardes, et est libéré contre de l'argent. Il se rend sur la tombe de Célinte dans le souhait d'y trouver un apaisement dans la mort et la proximité avec sa bien-aimée. Mais pénétrant dans la tombe, il se rend compte que le cercueil est rempli de pierres soigneusement emballées ([6]). Il croît que le sort s'est acharné sur lui au point de le priver même du corps de épouse, quitte la tombe, et disparaît. C'est le début de son exil. Célinte de son côté apprend que Poliante est sorti de prison. Mais comme un corps a été retrouvé à proximité du château et que chacun pense qu'il s'agit de celui de Poliante, elle ne se remet pas de ce deuil, et constamment espère trouver la mort. Elle essaie d'ailleurs de se faire mordre par un serpent mortel, dessein contrecarré par l'arrivée opportune de la mère du couvent, Clarinte ([7]). Six années s'écoulent ([8]), au cours desquelles Célinte a demandé à Clarinte, seule à connaître le secret de sa véritable identité, de bien vouloir faire bâtir un tombeau anonyme en hommage à son bien-aimé disparu. Et durant ces années, aux frontières du royaume où elle se trouve, des guerres n'ont cessé d'être entreprises. Les deux armées ennemies sont désormais à une demie journée du couvent. Si Célinte espère bien qu'elle pourra enfin trouver la mort, Clarinte, elle, est pleine d'angoisse pour son frère sur le front. Elle organise la fuite des femmes du couvent, mais Célinte refusant de s'éloigner du tombeau, elle se résigne à rester auprès d'elle. Une trêve dans les combats permet au frère de Clarinte, du nom de Philionte, de lui rendre visite. Il rencontre Célinte, que la beauté mêlée de mélancolie lui rendent extraordinaire. Meliandre, à la tête de l'armée et ayant appris par Philionte l'existence d'une mystérieuse nonne voilà, se rend au couvent afin de la rencontrer. Il y découvre Célinte, qui le couvre de reproches, le croyant coupable d'avoir comploté et manigancé la mort de Poliante. Il est contraint par l'urgence des combats de partir sans avoir dévoilé la vérité à Célinte. Philionte est blessé au combat et se réfugie chez sa sœur, où un officier vient le voir expressément. Il lui fait le récit des combats, dans lesquels tandis qu'Ariston a péri, Meliandre a été mortellement blessé et se trouve désormais entre la vie et la mort. C'est donc un chevalier anonyme qui est venu secourir cette armée de toute évidence vouée à l'échec, et à laquelle il a permis miraculeusement de vaincre. Le roi fait rechercher ce mystérieux chevalier, dont la mélancolie étonne, puisqu'il refuse tout remerciement. L'officier est parvenu à le retrouver, mais celui-ci a pris la fuite, ne lui laissant que son écuyer, qui ne connaît rien de lui, si ce n'est son nom, en réalité un nom d'emprunt, Lysimarte. Célinte est immédiatement attiré par ce mystérieux homme, qui semble seul être capable comme elle de nourrir une mélancolie éternelle, dont il tient la source secrète. Elle demande à faire venir l'écuyer, afin d'en connaître plus sur lui, en vain : elle n'apprend que le récit d'un homme visiblement de qualité, voué à l'exil et à la mélancolie, qui cherche sans cesse la mort, et qui est allé jusqu'à se refuser aux propositions de mariage d'une grande princesse. « Le récit de cét Escuyer redoubla la curiosité de toute la Compagnie, au lieu de la contenter, et fit soupirer la belle Celinte, qui murmura presques en secret, de ce qu'il y avoit une aute douleur que la sienne, qui peust resister au Temps, et à la raison. » ([9]). Comme nous l'indique la note assortie n°+ 231, voici donc un épisode du « beau romanesque », où les deux amants se reconnaissent à leur fidélité inébranlable. Finalement le jeune homme est arrêté, et devant être conduit devant le roi qui est venu visiter la mystérieuse Célinte, un dernier quiproquo l'amène non dans la pièce où se situe le roi, mais dans la chambre de Célinte. Les deux amants se reconnaissent avec bonheur. Le roi leur accorde le droit de vivre en paix, oubliant les crimes dans lesquels a été impliqué Poliante face à la grandeur de ses actes guerriers. Meliandre n'est donc pas parvenu à infléchir les décisions du souverain, et s'éteint quelques jours suivant ces retrouvailles.


  1. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 9
  2. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 100-101
  3. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 106-107
  4. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 110
  5. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 118
  6. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 120
  7. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 126-127
  8. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 128
  9. SCUDERY, Madeleine (de), Célinte – Nouvelle Première, Paris, Ed. A-G. Nizet, 1979, p. 143