Utilisateur:Mourad Touzani/Brouillon

Boubaker Ben Yahia est le premier enseignant universitaire tunisien (1946). C'était un chercheur avec l'âme d'un pionnier[1].

Biographie modifier

Boubaker Ben Yahia est né à Gabès le 7 juin 1914. Son père, Amine du Souk el Laffa (marché des tissus) de Gabès, ville du sud tunisien, animait des majlis où se réunissaient les érudits de la ville tels que feu Salem Harzallah et Radhwen Cherif nommés à Gabès en tant que juges. Se réunissaient avec eux des savants et des commerçants d’autres pays dont les caravanes faisaient une halte aux portes du Sahara comme les frères Haj Ahmed et Mohamed Allèn disciples de Mohamed Abduh.

Boubaker Ben Yahia a un parcours scolaire atypique. Souffrant d’insuffisance respiratoire, il n’intègre l’école primaire que tardivement en raison de ses crises d’asthme à répétition. C’est grâce à l’enseignement des amis de son père, qu’il réussit à obtenir son certificat d’études en 1929 puis son brevet en 1933 ce qui lui permet d’intégrer le lycée Carnot et d’obtenir son baccalauréat en 1938. Il revient alors à Gabès pour y enseigner à l’école primaire d’El Hamma pendant une année.

Ayant compris que sa vocation était ailleurs, il reprend ses études en septembre 1939 en intégrant l’Université d’Alger où il obtient son diplôme de pharmacien en juin 1944. Étudiant brillant, son professeur Le docteur Monnet lui propose d’assurer les travaux pratiques de chimie végétale.

C’est au cours de ces années algéroises qu’il trouvera sa voie comme enseignant et chercheur. Durant la guerre, il est appelé à trouver dans la pharmacopée traditionnelle des remèdes pour les grands brulés des bombardements en raison de la pénurie de médicaments à l’Hôpital d’Alger. C’est pour lui l’occasion d’apprécier l’efficacité des plantes médicinales dont il avait lui-même préparé des cataplasmes et réussi à soulager ces grands brulés.

De retour en Tunisie, il intègre l’Institut des Hautes Études de Tunis, créé par décret le 1er octobre 1945. Il y enseignera pendant 27ans[2]. Il y crée le laboratoire de chimie végétale où il dirige des travaux sur les plantes médicinales tunisiennes en collaboration avec les laboratoires de biologie physicochimique d’Orsay, de chimie biologique de Paris et l’Institut Rockfeller de Paris en vue de leur culture en Tunisie.

Ses recherches sur les plantes le mènent les figures emblématiques de la médecine arabo-islamique[3], notamment vers les écrits anciens d’Avicenne, d’Ibn Al Jazzar, d’Issaac Ibn Souleimen El Israily. Il adopte une approche historique et s’investit en particulier dans l’histoire des sciences en tout en interpelant des concepts sociaux, religieux et philosophiques[4]. Ses études sont axées en particulier sur la contribution tunisienne au progrès de la science islamique, elle-même considérée comme un chainon de la science mondiale pour démontrer que ce qui jusque-là était considéré par l’Europe comme une période de stagnation du savoir correspondait en fait à une transition essentielle de la médecine grecque vers la médecine moderne et c’est ce qu’il appellera « La période arabe et islamique des sciences ».

Cette notion lui vaut d’être invité au Palais de la découverte en 1952 pour présenter une conférence sur le sujet ; Eugene-Humbert Guitard (1955)[5], père de l’histoire de la pharmacie confirmera la valeur des travaux de B. Ben Yahia dans un article paru dans la revue d’histoire de la pharmacie. La notion de « période arabe des sciences » est définitivement établie par le fait de sa parution dans l’encyclopédie de l’Histoire générale des sciences dont Boubaker Ben Yahia est co-auteur.

Il est le premier arabe et africain à être entré à l’Académie internationale d’histoire des sciences en 1950[6] et à la Société d’histoire de la pharmacie en 1951[7]. Il participa à plusieurs congrès internationaux.

Boubaker Ben Yahia était également le pharmacien de Radès, il faisait partie de la première cuvée de pharmaciens tunisiens avec Ali Bouhajeb, Nourredine Zaouche, Jeloul Ben Cherifa, Khlil Materi et Abderahman Dziri et en 1944, il est réquisitionné pour prendre en charge l’officine abandonnée par sa propriétaire italienne expulsée. C'est à Radès qu'il exercera tout au long de ses 57 années d'activité.

Il est décédé à Radès le 13 mars 2001.

Publications modifier

  • « Les écrivains arabes dans les domaines pharmaceutiques », Revue de la pharmacie arabe, n°1, 1981.
  • « La médecine des pauvres », Actes du XVIIième Congrès international d’histoire des sciences, Bucarest 1981.
  • « Dix siècles de Médecine en Tunisie », Conférences France-Culture, 1967.
  • « Le renouveau scientifique dans les pays musulmans », Encyclopédie de l’Histoire générale des sciences, Tome III, La science contemporaine Volume II, Le XXème siècle, Presses Universitaires de France, 1964.
  • « La science dans les pays musulmans à partir de 1450 », Encyclopédie de l’Histoire Générale des sciences, Tome IV, 1964.
  • « Renaissance tardive de la science arabe », Conférence de l’Institut des Hautes études de Belgique, Bruxelles 1963.
  • « Avicenne médecin : sa vie son œuvre », Revue d’Histoires des Sciences et leurs applications, volume 5, n°4, 1962.
  • « Ashaikh at Tûnusi et son dictionnaire médical », 9ième Congrès international d’histoire des sciences, Ithaca, Philadelphie. 1962.
  • Le Continent de Rhazès : Une étude, ISIS Washington, (Seatle), 1959
  • « L’autorité des Anciens Grecs chez les médecins de la période arabe », Actes du Congrès international d’histoires de la médecine, Montpellier, 1958.
  • « La science au XVIe siècle », Conférence Colloque international de Royaumont, 1957.
  • « Constantin l’Africain et l’école de Salerne », Cahiers de Tunisie, Revue des Sciences Humaines, 1er trimestre 1955, n°9.
  • « Les origines arabes du « de malancholia » de Constantin l’Africain », Revue de l’histoire des Sciences et leurs applications, vol 7, n°2, 1954.
  • « Essai de classifications de la littérature pharmaceutique arabe », Congrès international d’histoire de la pharmacie, Rome 1954.
  • « Falsification et contrôle des médicaments pendant la période islamique », Actes du septième Congrès d’Histoires des Sciences, Jérusalem, 1953.
  • « Aperçu sur la période arabe de l’histoire », Conférences du Palais de la Découverte, 8/11/1952- Série D n° 19.
  • « Ibrahim ibn Abi Said et ses Tableaux synoptiques », Congrès de l’AFAS, Tunis 1951.
  • « Contribution des médecins arabes au progrès des sciences pharmacologiques », Actes du Congrès de l’AFAS, 1951.

Notes et références modifier

  1. Radhi Jazi, « Boubaker Ben Yahia, pharmacien avec l'âme d'un pionnier », Essaydali, n°79, juin 2001, pages 35-39
  2. Ridha Hamdane et Rana Ben Azzouna, Histoire de la Pharmacie en Tunisie (VIIIè siècle-1976), L'Harmattan, , 274 p.
  3. Driss Cherif et Rana Ben Azzouna, Les Petites Histoires de la Médecine, Société des Écrivains, , 138 p.
  4. Samy Hamarneh, Health Sciences in Early Islam, vol. 1, Noor Health Foundation/Zahra Publications, , 363 p.
  5. Eugène-Humbert Guitard, « Boubaker Ben Yahia : Aperçu sur la « période arabe » de l'histoire de la médecine », in La période arabe de la science médicale, volume 43, numéro 144, p. 30-32
  6. Driss Cherif et Rana Ben Azzouna, Les Petites Histoires de la Médecine, Société des Écrivains, , 138 p.
  7. Index Géographique, Revue d’histoire de la Pharmacie, vol. 49, p. 33-40, 1961