Utilisateur:Maximecha/Brouillon

Livre culte publié en septembre 1990, un mois avant la réunification de l'Allemagne, Berlin dernière est le premier livre de Kits Hilaire. Sous le titre Berlin - letzte Vorstellung, abschied von kreuzberg, il sortira en allemand, aux Editions Hans Erpf, dès 1991. Premier roman écrit, toutes langues confondues, sur la chute du mur de Berlin, il marque le début du Wenderoman[1] [2] [3] [4].

Dans Berlin dernière, Kits Hilaire donne la parole à une jeunesse qui, ne se reconnaissant pas dans les rapports de force qui régissent la société, a décidé de se situer en marge du système et de se réfugier dans une poche oubliée, au détour du Mur de Berlin, dans le quartier de Kreuzberg. L'histoire du roman est indissociable de ce quartier de l'Ouest collé au Mur : Kreuzberg, havre de la culture alternative, l'utopie[5] pour ceux qui refusent de faire partie du courant dominant[6], le paradis, qui dans la conscience des habitants a toujours été là et, dans leur imagination, le sera toujours[7].

Pendant 5 ans, Kits Hilaire a vécu à l’ombre du mur de Berlin et, comme tous les enfants de Kreuzberg, elle se sentait protégée par lui, exempte de passage à l’âge adulte. Quand il a été ouvert, elle s’est enfuie à Paris et a écrit, encore sous le choc, un roman en partie autobiographique. Sous la forme d’un roman-journal, Berlin dernière raconte les immeubles menaçant ruine, les rues où flotte l’odeur du charbon et des kébabs, et le Mur. Tout ce qui appartient au " Mythe Kreuzberg "[8].

L’histoire commence quelque part dans les années 80. Kreuzberg est une île. K, la narratrice, découvre Berlin et ce quartier si particulier à l'âge de 15 ans. Elle vit dans un squat de l'Adalbertstrasse pendant quelques mois, avec ses amis Andy et Schikse, avant d’être contrainte de retourner en France. Six ans plus tard, elle revient, et retrouve son refuge de Kreuzberg.

Berlin, dernière nous plonge dans cette enclave en-dehors de tout espace-temps et de lieu, un monde à la fois immobile et mouvant où chacun vit sa vie comme il l’entend[9]. Les lois sont autres, à l’abri du Mur, là règne la liberté de faire ce qu’on veut, d’être ce qu’on veut, de rêver ce qu’on veut[10]. Kreuzberg est, d’une certaine manière, le principal protagoniste du livre de Kits Hilaire. Pour la narratrice, il est au cœur de la formation de son identité[11]. Ses héros, jeunes Allemands, artistes ou hors-normes, jeune Française en recherche d’idéal, l’ont élu à l’unanimité, parce qu’il incarne un lieu privilégié : où ne régne pas la loi du plus fort, mais celle du plus faible, où l’artificialité de la situation exacerbe à l’extrême une certaine frange d’humanité, la rendant paradoxalement plus humaine que la moyenne[12]. Le paradoxe étant que ceux qui n’ont que le mur à quoi s’adosser [13] enferment leur liberté pour lui éviter d’être contaminée par l’intolérance.

Kreuzberg est ce "quartier peuplé d’anges noirs" venus se perdre dans le gris, la crasse, le néant d'un Berlin âpre au "romantisme exacerbé", où la jeune femme et ses amis assistent à l’événement le plus extraordinaire de la fin du vingtième siècle en Europe: la chute du Mur de Berlin. Un coup de tonnerre qui bouleverse l’existence de la narratrice et de ses compagnons qui perdent leur royaume, cette protection de pierres haïe de tous[14]. L’histoire se termine en 1990, quand les « chaoten », ceux qui sèment le désordre, se retrouvent malgré eux propulsés dans la grande histoire[15]. La réunification des deux Berlin les disperse[16]. Kreuzberg, quartier périphérique de Berlin Ouest qui n’intéressait personne s’est retrouvé, du jour au lendemain, au centre ville et est devenu la proie des spéculateurs et des banquiers[17] [18].

Le premier roman de Kits Hilaire tourne le dos à l’histoire et à l’euphorie générale de l'époque, pour offrir une vision rare des évènements de 1989[19] [20]. Berlin, dernière n’est toutefois pas un document, un témoignage ou une chronique. Dans ce livre, Kits Hilaire, au-delà du courage narratif[21], fait œuvre de romancière, utilisant la technique des courts tableaux. La phrase est rapide, frappante, incisive[22]. Berlin, dernière se construit ou plutôt se déconstruit, sur le modèle du mur qui se désagrège, pièce par pièce, le mur comme abri et nid, frappé, cassé, anéanti, vendu « graffité et certifié »[23]. Le fond s’allie à la forme dans un récit par bribes, morcelé, comme si l'auteure arrachait au Mur des morceaux de béton pour former un amoncellement symbolique à la mémoire d’une époque disparue[24].

Chef d’œuvre et livre punk pour les uns[25], Hymne d’amour à cette ville différente qui a permis toutes les différences pour les autres[26], Berlin, dernière est régulièrement revendiqué par une jeunesse qui n’adhère pas aux modèles dominants.

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  1. [http-//www.rfi.fr/europe/20141109-chute-mur-25-ans-wenderoman-wendekino-jean-marie-valentin-matthias-steinle]
  2. [The Palgrave Handbook of Literature and the City, Author:Jeremy Tambling, 2017]
  3. [ZeitGeschichten: die Berliner Übergangsjahre : zur Verortung der Stadt nach der Mauer, Author: Ulrike Zitzlsperger, 2007]
  4. [Berlin - Wiedergeburt einer Stadt Mauerfall, Ringen um die Hauptstadt, Aufstieg zur Metropole, Author:Hermann Rudolph,2014]
  5. [<berlin de fin du monde, Le Monde, Author: Josyane Savigneau, 07-09-1990]
  6. [Mythos Kreuzberg: Ethnographie eines Stadtteils (1961-1995), Author: Barbara Lang, 1998]
  7. [1]
  8. [Abschied von Kreuzberg, Zeitmagazin, Author: Gisela Dachs, décembre 1990]
  9. [Mythos Kreuzberg: Ethnographie eines Stadtteils (1961-1995), Author: Barbara Lang, 1998]
  10. [Berlin dernière, Les oubliés du Mur, La Wallonie, Author: Emmanuelle Pinson, 3-10-1990]
  11. [Mythos Kreuzberg: Ethnographie eines Stadtteils (1961-1995), Author: Barbara Lang, 1998]
  12. [Au bon temps de Kreuzberg, Journal de Genêve, Author: Michel Danthe, 13-10-1990]
  13. [Kits Hilaire - Le ghetto des anges, Le nouvel Observateur, 4-10-1990]
  14. [Berlin, dernière, Elle, Author: F.D., 17-09-1990]
  15. [Kits Hilaire - Berlin, dernière, Libération, 27-09-1990]
  16. [Prix littéraires - Les dames des lettres abattent leurs cartes, MarieFrance, octobre 1990]
  17. [Abschied von Kreuzberg, Zeitmagazin, Author: Gisela Dachs, décembre 1990]
  18. [Mythos Kreuzberg: Ethnographie eines Stadtteils (1961-1995), Author: Barbara Lang, 1998]
  19. [Berlin, dernière, Elle, Author: F.D., 17-09-1990]
  20. [Kits Hilaire, Berlin, dernière, Humanité Dimanche, 21-10-1990]
  21. [Kreuzberg mon amour, l'Humanité, Author: Claude Prévost, 26-10-1990]
  22. [Mes murs; mais mur, Révolution, Author: François Mathieu, septembre 1990]
  23. [Berlin dernière, Les oubliés du Mur, La Wallonie, Author: Emmanuelle Pinson, 3-10-1990]
  24. [Au bon temps de Kreuzberg, Journal de Genêve, Author: Michel Danthe, 13-10-1990]
  25. [Berlin, dernière de Kits Hilaire : Un livre punk culte épuisé, Author: Jérome Enez-Vriad, 13-06-2013, https://www.unidivers.fr/berlin-derniere-kits-hilaire-punk-rda-rfa/]
  26. [Berlin dernière, Les oubliés du Mur, La Wallonie, Author: Emmanuelle Pinson, 3-10-1990]