Utilisateur:Frenesius/Brouillon

Les dynamiques adaptatives

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Historique [1]

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Avant les dynamiques adaptives

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En 1859, Charles Darwin décrit le principe de l’évolution dans sa publication « De l’origine des espèces ». Cette notion s’installe dans le monde scientifique et remplace la théorie du transformisme exposé par Jean-Baptiste Lamarck. Il décrit que la sélection naturelle permettrait la sélection d’individus différents au sein d’une même population qui sont les mieux adaptés à la "lutte pour la vie", c'est-à-dire à la compétition pour l'appropriation des ressources rares. Ces individus les mieux "adaptés" seraient plus à même de survivre et de coloniser leur environnement.

En 1798, Thomas Robert Malthus décrit les fondements de la dynamique des populations qui sont l’étude de l’évolution de la démographie d’une population. Les études de dynamique des populations ont pour but de prévoir et de comprendre le lien entre écologie et démographie.

Depuis l'émergence de la théorie de l'algorithme évolutionniste qui s'inspire de la théorie de l'évolution pour résoudre des problèmes divers dont la grande majorité sont des problèmes d'optimisation d’un trait de vie d’une population. Grâce à cela, en 1932, Sewall Wright développe la notion de paysage adaptatif.

C’est la représentation graphique d’un trait d’histoire de vie en fonction de la valeur sélective (ou fitness). Cette représentation permet de mettre en évidence les différents points d’optimisations, appelés aussi points d’équilibres.


 
Paysage adaptatif d'un trait

Nous observons sur ce graphique un paysage adaptatif avec 3 points d’équilibres (A, B, C). Le point d’équilibre B, est le point avec la meilleure valeur sélective pour une variation du trait. L’évolution va tendre à se rapprocher vers ce point d’équilibre B.

Les dynamiques adaptatives de la théorie des jeux de John Forbes Nash. Cela a permis à John Maynard Smith et d’autre chercheurs, en 1970, de comprendre l’évolution des comportements d’une population face aux variations de leur environnement. C’est la théorie des jeux évolutionnistes. John Maynard Smith émet la notion de Stratégie évolutivement stable (SES ou ESS en Anglais pour Evolutionarily stable strategy ) dans son essai portant sur la théorie des jeux et l’évolution de la lutte.


Le commencement des dynamiques adaptatives

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La théorie des dynamiques adaptatives s'est établie de manière empirique dans les années 90. [2] Les dynamiques adaptatives s'inspirent de la théorie des jeux évolutionnistes tout en prenant compte la génétique des populations, la génétique quantitative et la dynamique des population, cela dans le but d’obtenir une dynamique écologique plus réaliste. C’est différents domaines soulignent les nombreux aspects des processus évolutionnaires d’une population. Par exemple, la génétique des populations prend en compte les mécanismes biologiques afin d’étudier les changements de fréquence d’allèle. Cependant celle-ci ne prend pas en compte ou simplifie les paramètres écologiques et stochastisques, ce que ne fait pas la théorie des jeux évolutionnistes. Les dynamiques adaptatives permettent donc de visualiser et de comprendre la conséquence à long terme de petite mutation d'un trait au sein d'une population.


Elle devient un outil puissant pour la modélisation de scénarios évolutifs ou du devenir d'intéractions : competition proies/Prédateurs, spéciation, diversification, l’évolution de coopération, l’épidémiologie, etc.


Approche mathématique et méthodes

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La théorie des dynamiques adaptatives repose sur les modèles de dynamiques de populations fondamentaux proposés par Thomas Malthus et Pierre François Verhulst[3] :

 

Où :

  • N(t) correspond à la population au temps t,
  •   correspond à la variation de la population au cours du temps de manière continu,
  • r correspond au taux d’accroissement intrinsèque de l’espèce,
  • K correspond à la capacité de charge de l’environnement (c'est-à-dire le maximum d’individu que peut supporter l’environnement).

Les hypothèses en dynamiques adaptatives

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En dynamique adaptative on se place dans une population monospécifique à l’équilibre et isolée, c’est la population résidente N. Les phénotypes sont les traits quantitatifs individuels héritables, les naissances et les morts sont déterminées par le phénotype et par l’environnement (celui-ci étant constitué par le reste de la population ainsi que par les facteurs externes). Les individus sont considérés haploïdes, i.e. se reproduisant de façon clonale. On suppose un taux de mutation non nul entrainant l’apparition d’un mutant N’avec un trait phénotypique x’ mutant qui diffère légèrement du trait x de la population résidente N. Ces différents traits phénotypiques sont quantifiables et observables au cours du temps (taille des individus, temps de gestations/différenciations, etc.…). L’hypothèse « majeure » est que les échelles de temps écologiques et évolutives sont distinctes. Autrement dit, quand on étudie l’évolution d’une population, on suppose toujours qu’elle est à l’équilibre écologique ce qui a pour conséquence qu’on a besoin que du phénotype dominant pour les décrire (la dynamique avant l’équilibre n’est pas utile !). De plus, on a une séparation temporelle des mutations. Deux mutants ne peuvent exister en même temps ni au même endroit : c’est le principe de l’exclusion mutuelle.

Le but est d’observer le devenir de ce mutant rare dans la population. Soit il disparait, soit il envahit le milieu. En envahissant le milieu le mutant devient le nouveau résident en changeant la valeur de ce trait phénotypique, c'est-à-dire en augmentant sa fitness par rapport au résident.

Première approche

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Historiquement la diversité des phénotypes reflète la diversité des pressions de sélections. La variations (∆x) d’un trait dans la population dépend de son héritabilité (hx), qui est la proportion du trait qui est héritable, du différentiel de sélection qui est la valeur du trait avant et après sélection.

Soit :

 [4]

Il vient

 

Si on applique cette equation au dynamique adaptative on a :  

avec

  • σ qui est la variance additive
  •   le gradient de selection de fitness (w) par rapport au trait x.

En dynamique adaptative on observe une mutation d’un trait conduisant a une fitness invasive (fonction d'invasion) évoluant dans la population donnée par l’équation canonique :

 

Avec

 

Avec

  • k(x) le produit du taux de mutation
  • µ(x) et l’effet des mutations (σ² la variance additive)
  • N(x) la taille de la population ayant pour trait phénotypique x
  •   le gradient de sélection qui indique dans quel sens et avec quelle amplitude le trait x varie suite à des mutations de petite amplitude.

En dynamiques adaptatives, la dynamique du trait phénotypique x est donné par :

  vitesse des mutations X effet des mutations X taille de la population X facteur de sélection d’un mutant x’ proche du résident x.

C’est la réponse adaptative d’un phénotype résident x a une pression de sélection qui est le mutant x’. La réponse adaptative d’un trait devient une dynamique adaptative de 2 traits.

Approche mathématique

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On doit déterminer les paramètres caractérisant le résident et ceux caractérisant le mutant, écrire les équations de la dynamique de la sous-population résidente N et de la population mutante N’. On a pour le résident :

dN(t)/dt = rN(t) (1-(N(t) + N(t)) /K(x)) (1) 

Variation de N au cours du temps ett pour le mutant :

dN’(t)/dt = rN’(t) (1-(N’(t) + N(t))/K(x’))   (2) 

Variation de N’ au cours du temps.Nous avons (N’(t)+ N(t))/K car le mutant N’ et le résident N vivent dans le même milieu de capacité K  Trouver la condition d’équilibre de la sous-population résidente En dynamique adaptative on se place dans une population monospécifique à l’équilibre et isolée, c’est la population résidente N. On suppose un taux de mutation non nul entrainant l’apparition d’un mutant N’ avec un trait phénotypique x’ mutant qui diffère légèrement du trait x de la population résidente N. Ces différents traits phénotypiques sont quantifiables et observables au cours du temps ( taille des individus, temps de gestations/différenciations, etc.…). Le but est d’observer le devenir de ce mutant rare dans la population. Soit il disparait, soit il envahit le milieu. En envahissant le milieu le mutant devient le nouveau résident en changeant la valeur de ce trait phénotypique, c'est-à-dire en augmentant sa fitness par rapport au résident. On suppose aussi que les trait x et x’ ne peuvent coexister de manière indéfini, aussi bien temporellement que spatialement. C’est l’exclusion mutuelle. Et on à une séparation temporelle des mutations. Deux mutants ne peuvent exister en même temps.


On doit déterminer les paramètres caractérisant le résident et ceux caractérisant le mutant : On a pour le résident :

dN(t)/dt = rN(t) (1-(N(t) + N(t)) /K(x)) (1) => Variation de N au cours du temps

Et pour le mutant :

dN’(t)/dt = rN’(t) (1-(N’(t) + N(t))/K(x’))    (2) => Variation de N’ au cours du temps

Nous avons

(N’(t)+ N(t))/K car le mutant N’ et le résident N vivent dans le même milieu de capacité K 


Hypothèses supplémentaires : N et N’ coexistent dans le même milieu fermé donc N’<<N car le mutant est rare. On a donc

N(t) + N’(t) = N(t) 

Et on remplace dans (1) et (2) Pour le résident on a :

rN(t)(1-(N(t) + N’(t))/K(x)) = rN(t)(1- N(t)/K(x))

Et pour le mutant :

rN’(t) (1-(N’(t) + N(t))/K(x’)) = rN’(t)(1-N(t)/K(x’))  


On se place à l’équilibre de population soit : dN*(t)/dt = 0 (la population n’évolue plus)

Dans (1) =>

rN*(t)(1-N*(t)/K(x)) = 0, or  N*(t) + N(t) = N*(t) 

Donc

rN*(t)(1-(N*(t) /K(x)) = 0     pour N*(t) = K(x)

Et dans (2) on remplace avec N*(t) = K(x) :

dN’(t)/dt = rN’(t)(1- N*(t))/K(x’)) 

 calculer le taux d’accroissement d’un mutant rare

dN’(t)/dt = rN’(t)(1- K(x) /K(x’))  
dN’/N’dt = r (1- K(x) /K(x’)) = s ( x ; x’)  (3). 

Cette formule est le taux d’accroissement de la sous population mutante N’ et permet d’exprimer la fitness (s) du mutant N’ dans la population résidente N. calculer le gradient de sélection La dérivée partielle de la fitness par rapport au trait x’ permet de déterminer un gradient de sélection. C'est-à-dire vers quel équilibre va tendre la population en fonction de la mutation x’

δ s ( x ; x’) / δ x’ |x=x’ = [rK(x) ( - K’(x) / K²(x)) ] = - r ( K’(x)/K(x)) 

Si -r ( K’(x)/K(x)) > 0 x’ augmente. On observe une invasion de x’ Si -r ( K’(x)/K(x)) < 0 x’ diminue. Le mutant x’ va disparaitre Si -r ( K’(x)/K(x)) = 0 On est a la stratégie évolutivement stable (Evolutionary Stable Strategy). x’ ne disparait pas et n’envahit pas le milieu Si la population est monomorphique, alors sa dynamique est donnée par :

K(x)= x-x² 		et 		K’(x)= 1-2x 

Donc (x-x²)/(1-2x) = 0 => pour x* = ½. On retrouve la valeur x* = ½ dans le diagramme binaire d’invasions (cf figure 2).

 
Figure 2 : Représentation d'un PIP

En connaissant la fonction de fitness et les paramètres la caractérisant on peut résoudre graphiquement les problèmes de dynamique adaptative par un diagramme binaire d’invasions (Pairwise Invasibility Plot ou PIP en anglais). Sur ces diagrammes on représente en abscisse la valeur du trait x et en ordonnée la valeur du trait x’. On fait apparaitre sur ce diagramme la droite pour x = x’, appelée bissectrice, et la fonction du gradient de sélection appelé isocline.[5]

Comment lire un PIP ? [6]

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Les régions positive représente la combinaison de trait (x ; x’) pour laquelle le mutant avec le trait x’ peut envahir la population résidente qui possède le trait x. A l’inverse les régions négative représente la combinaison de trait pour laquelle un mutant avec le trait x’, apparaissant spontanément dans la population résidente de trait x, ne peut pas envahir le milieu et ainsi disparait.

 
Figure 3 : PIP avec apparition d'un trait mutant x'

On part d’un résident X0 et on regarde l’apparition d’un mutant plus petit (X’ < X0) ou plus grand ( X’ > X0), dans la région positive. Si le mutant envahit, il remplace le résident et on répète l’opération avec une valeur X1 comme résident. Ici on voit que dans les deux cas (X’ > Xn et X’ < Xn) la population de mutant x’ converge vers l’équilibre x* = ½ (dans cette exemple). Dans ce cas on parle d’équilibre attractif ou convergent. A contrario on parle d’équilibre répulsif ou non convergent

On retrouve différent type de graphique PIP, chacun ayant sa particularité, explicant les differente possibilité


 
Figure 4 : PIP d'un Jardin d'Eden

Dans un scénario évolutif de type Jardin d'Eden, un mutant ne peut pas envahir le milieu sauf s’il tombe exactement sur le point d’équilibre, la population de ce mutant n’augmentera pas et ne disparaitra pas. 

 
Figure 5 : PIP d'un branchement évolutif

Dans un scénario évolutif de type branchement évolutif, un mutant apparaissant dans une zone positive va s’éloigner de l’équilibre (Non – convergent) mais va envahir le milieu, le trait x’ va alors radicalement changer au fur et a mesure qu’il s’éloigne de l’équilibre. Créant au final une branchement évolutif pouvant conduire a une spéciation de type allopatrique. [7]


Stabilité d'un équilibre

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Une fois à l’équilibre, on peut avoir plusieurs cas de figure : soit n’importe quel mutant peut envahir le milieu, on parle alors de branchement évolutif, soit aucun autre mutant ne peut envahir le milieu et on se situe à l’équilibre évolutivement stable (SES ou ESS).


La portée mathématiques des dynamiques adaptatives permet de prendre en compte la fitness des individus interagissant entre eux dans un système évolutif. De par son aspect mathématique les dynamiques adaptatives sont un outil très puissant pour la compréhension de phénomènes évolutifs passés, présents ou futurs.

Approche en modélisation

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Afin de formaliser un modèle de dynamique adaptative, la communauté scientifique a souvent recours à des logiciels de formalisation mathématique comme Mathematica, des logiciels de traitement de données et d’analyses statistiques comme le Logiciel R. Ces logiciels permettent à la fois d’écrire les modèles et de les confronter à la réalité biologiques afin d’établir des prédictions quant à la dynamique des populations étudiées.

 
Figure 6 : représentation d'un équilibre dans le champ des gradients
 
Figure 7 : Matrices Jacobienne et Hessienne

La formalisation d’un modèle en dynamique adaptative suit plusieurs étapes. Tout d’abord définir les paramètres du modèle (par exemple r la résistance aux pertubations, c le taux de colonisation) la fonction d’invasion (fitness du mutant rare) et tester sa compatibilité biologique, calculer les gradients de sélection afin de visualiser le champ des gradients de sélection dans l’espace (ici {r,c} (Figure 6) si on garde cette exemple), et bien comprendre l’interprétation biologique des paramètres. Ensuite on peut tracer les PIP (: Pairwise Invasibility Plot), un StreamPlot ( afin de visualiser le champ des gradients dans l’espace), voir où se trouvent les équilibres (dégager {r,c} à l’équilibre pour un jeu de paramètres donnés), vérifier le caractère convergence stable ou non des équilibres, leur caractère évolutivement stable ou non. On peut ensuite identifier les différents régimes possibles (combien d’équilibres évolutifs ? de quels types ?), dégager les paramètres critiques qui déterminent le passage d’un régime à l’autre (par exemple, quand passe-t-on d’un équilibre ESS à un point de branchement ?), pour des situations de branchement, simuler l’évolution du système pour voir où va l’évolution (travail de programmation et simulations).

Concrètement : une fois la fonction d’invasion (fitness du mutant rare) définie, on calcule les gradients de sélection sur les paramètres qui définissent la fitness (dérivées partielles…), qui donnent la matrice Jacobienne et la Matrice Hessienne. Selon le signe de la plus grande valeur propre, on peut interpréter quelle stratégie va suivre l’équilibre : si celle-ci est négative pour la matrice Jacobienne, alors l’équilibre est convergent stable (si positive il s’agit d’un repoussoir (repeller en anglais)), et si celle de la matrice Hessienne est négative alors il s’agit d’une ESS (positive : point de branchement) (Figure 7).

Subtilités

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Définir la fitness en population structurée, subdivisée, la fitness diploïde, l’évolution de plusieurs traits ou les régimes de sélection et les cycles de vie apparaissent comme étant des difficultés majeures en formalisation mathématique. L’idée serait donc de calculer la fitness en tenant compte du temps passé dans chaque stade de vie, de l’espérance de vie, de la fécondité à chaque stade de vie.

Pour des populations subdivisées ou métapopulations, il faut utiliser un critère de fitness s’appuyant sur la dispersion (au lieu de la fécondité), tenir compte des traits d’histoire de vie des individus et des mutants, de la production de mutants dispersants en fonction du nombre de mutants, tout en tenant compte de l’apparentement (règle d’Hamilton). En métapopulation, le critère de persistance Rm correspondant au “succès de dispersion pendant le temps de vie” d’un patch dans une métapopulation peu occupée. De plus représenter la rareté d’une espèce est plus difficile dans un système structuré spatialement à cause de la définition même de la rareté d’une espèce : on peut avoir peu d’individus dans plusieurs patchs ou plus d’individus dans un unique patch. La dynamique des patchs peut être aussi différente entre patchs : croissance dans l’un et décroissance dans l’autre, et peut être fonction du passé de ces patchs. [8]

Travaux en cours Il faut tenir compte de mutants hétérozygotes et homozygotes, et le choix d’un ordre entre les événements (de reproduction, émigration, immigration, changement environnemental) n’est pas neutre. Un ordre différent peut impliquer une prédiction différente. [9]

Deux types de modèles

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La grande majorité des modèle en dynamiques adaptatives sont des modèles stochastiques individu-centrés. Ce type de modèle raisonne sur l'évolution d'un trait sur un individu qui se reproduit de façon clonale. Cependant ce modèle possède certaines limites. Par exemple lorque la population est grande, on a une dilution du phénotype mutant, d'autant plus que cette mutation est considérée très petite dans ce modèle. De plus il rencontre les mêmes difficultés de modélisation à savoir la prise en compte de la reproduction sexuée, d'une dérive génétique, etc.

Modèles en population monomorphique[10]

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Une population est dite monomorphique lorsque tous les individus d'une population possèdent un même trait phénotypique mesurable. Lorsqu'un mutant apparaît, son trait ne diffère que de très peu. C'est la situation initiale de tout modèle de dynamique adaptative, et les exemples traités dans cet article sont en configuration monomorphique. Il peut y avoir plusieurs futurs possibles : remplacement (Figure 8) ou non du résident par le mutant.


Modèles en population polymorphique et conséquences[11]

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Figure 9 : Exemple d'un branchement évolutif

Lorsqu'un mutant parvient a envahir la population residente mais qu'il y a coexistence des deux traits phénotypiques, alors la population est considérée comme polymorphique. C'est une suite possible des scénarios de dynamiques adaptives d'une population monomorphique. Concrètement, les deux trait ont la meme valeur selective, ce qui permet une équirépartition des deux traits au sein de la population .

Branchements évolutifs[12]
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A l’origine le branchement évolutif a été décrit et observé dans une grande variété de modèles cependant le critère qui détermine l’apparition d’un tel scénario n’a été proposé que par Metz et al (1996). Le lien avec la spéciation a été examiné dans différents contextes mais reste discuté. Le phénomène de branchement évolutif correspond au passage d'une population concentrée autour d'un seul trait dominant à plusieurs traits dominants qui coexistent du fait de leurs intéractions écologiques (Figure 9).

Exemple : Evolution du temps d’arrivée des oiseaux[13]

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Ce modèle décrit comment appliquer les dynamiques adaptatives sur des modèles en temps discret Il décrit l’évolution du temps d’arrivée des oiseaux dans leurs sites de nichées. Une arrivée précoce réduit la valeur reproductive des individus adultes en les soumettant à des conditions sévères encore proches de celles de l’hiver. A l’inverse, une arrivée retardée, les oiseaux risquent de manquer le pic d’abondance de larves d’insectes pour leurs jeunes. On pourrait penser que l’évolution provoquerait l’arrivée de tous les oiseaux au temps optimal pour la population mais ce modèle montre que la compétition pour les sites de nichées entraine l’arrivée de certains oiseaux plus tôt malgré le fait que les conditions soient dures. La question est donc quand est ce que les oiseaux doivent ils arriver pour maximiser leur valeur reproductive (c’est à dire leur fitness d’une manière plus générale)?

Tout d’abord on définit la dynamique pour la population résidente :  

Avec

  • x : le temps d’arrivée d’une population résidente d’oiseaux migratoires
  • K : le nombre de site de nichées disponible tel que   sinon il n’existe pas de compétition. Celle-ci est supposée intense puisque rater l’occasion d’avoir un site de nichée signifie ne pas se reproduire cette année pour ces oiseaux.
  • R(x): le nombre de descendants par individus (qui traduit la capacité reproductive de l’individu)
  • p : la probabilité d’un individu de survivre d’une année sur l’autre.

On trouve donc à l’équilibre (quand   donc à  . C’est un équilibre stable sachant que le temps pour lequel on maximise la taille de la population est   On considère maintenant une invasion par un mutant dont la taille de population est donnée par n’t (mais initialement rare dans la population) et avec un temps d’arrivée x’. Ce qui nous donne :

 

 

Avec C(x): la capacité de compétition d’un individu (dans ce cas on regarde la capacité de l’individu à protéger son territoire) Comme on peut le voir dans ces équations une compétition s’est mise en place entre les individus résidents et les individus mutants puisqu’il y a une différence de fitness concernant le trait ou plutôt la stratégie « temps d’arrivée » ce qui n’était pas le cas dans la population uniquement constituée de résident puisqu’ils avaient tous la même valeur pour ce trait.

Pour reprendre les observations faites sur la population d’oiseaux, on supposera que la fonction C(x)décrivant la capacité de compétition en fonction du temps d’arrivée diminue de façon exponentielle. De la même manière la fonction R(x) suit une fonction gaussienne avec un nombre de descendants maximal au   (ou plutôt un nombre maximal élevés dans de meilleures conditions et donc avec de meilleures chances de survie)


Etant donné que l’on travaille en temps discret, on notera   la fonction de fitness comme le taux de croissance annuel (taux de croissance géométrique) d’un mutant initialement rare. On notera que la fonction de fitness en temps discret est sans dimension contrairement à s en temps continu ; Les deux sont d’ailleurs reliées tel que

 

avec Δt : l’intervalle de temps sur lequel le modèle en temps discret est basé.

On refait donc les mêmes hypothèses des dynamiques adaptatives à savoir que les résidents sont largement majoritaires et que le mutant est initialement si rare qu’il a une influence négligeable sur le taux de croissance par individu. On a donc :

 

Comme on a l’a vu avec les modèles en temps continu, ceci n’est valable que si on considère la population résidente comme étant à l’équilibre ce qui en temps discret correspond à   On détermine ensuite le gradient de sélection via la dérivée partielle de la fonction de fitness par rapport au trait x', et on obtient :   Une arrivée tardive est donc favorisée lorsque la décroissance de la capacité de compétition   est petite par rapport à la décroissance du succès reproducteur  . On voit ainsi que la sélection entraîne un compromis entre la nécessité de sécuriser un territoire et la volonté de maximiser son nombre de descendants.

Pour la suite des calculs on pose   qui correspondent respectivement à des fonctions exponentielles décroissantes et gaussiennes. Le gradient de sélection et linéaire et décroît. Il y a donc une seule stratégie évolutive qui doit être convergente et stable. On résout donc l’inéquation   ce qui nous donne  . De plus on peut voir par calcul que   donc x* est bien une stratégie évolutivement stable (ESS). On peut donc conclure qu’en raison de l’avantage individuel d’arriver plus tôt, relativement au reste de la population, la stratégie évolutivement stable se situe un peu avant la date d’arrivée   qui maximise la taille de la population. C’est un exemple de la Tragédie des biens communs en évolution. Les intérêts du groupe (avoir une population maximale) sont en conflit avec les intérêts de l’individu que traduit l’ESS.

Références

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  1. The Hitchhiker’s Guide to Adaptive Dynamics, Ake Brännström, Jacob Johansson, Niels von Festenberg
  2. Adaptive dynamics : Darwin’s divergence principle - S Génieys, V Volpert, P Auger
  3. Dieckmann and Doebili - Letters to Nature -Nature 400, 354-357 (22 July 1999)- Methods
  4. http://en.wikipedia.org/wiki/Heritability
  5. Adaptive Dynamics of Speciation: Ecological Underpinnings Stefan A.H. Geritz Éva Kisdi Géza Meszéna Johan A.J. Metz - page 2
  6. A beginner’s guide to adaptative dynamic - Odo Diekmann – p 64-65
  7. http://fr.wikipedia.org/wiki/Sp%C3%A9ciation
  8. The metapopulation fitness criterion: Proof and perspectives by François Massol, Vincent Calcagno, Julien Massol
  9. Éva Kisdi | Mats Gyllenberg On Some Misconceptions About Adaptive Dynamics
  10. A microscopic interpretation for adaptive dynamics trait substitution sequence models - Nicolas Champagnat
  11. Adaptation in a stochastic multi-resources chemostat model Nicolas Champagnat, Pierre-Emmanuel Jabin, Sylvie Méléard
  12. Evolutionarily singular strategies and the adaptive growth and branching of the evolutionary tree – S.A.H Geritz, E. Kisdi, G. Meszea, J. A. J. Metz
  13. The Hitchhiker’s Guide to Adaptive Dynamics, Ake Brännström, Jacob Johansson, Niels von Festenberg - p314 - 316