Tribune est une revue littéraire belge fondée en 1933 par l'écrivain Jean Groffier sous le nom La momie chante. Cette revue devient Tribune 34, à partir du numéro 8 de janvier-février [1], puis Tribune[2] après 1934.

L'écrivain Jean Groffier, fondateur de la revue Tribune.

Historique modifier

Jean Groffier, à la tête de la revue Tribune, est l'animateur de tout un cercle littéraire et artistique qui gravite autour de lui. La fille de Jean Groffier, Éthel Groffier, née en 1935, professeure à l'université McGill de Montréal, épouse du philosophe canadien Raymond Klibansky, écrit dans ses souvenirs : « Mon père, l’écrivain Jean Groffier, dirigeait à Bruxelles une jeune revue littéraire, Tribune, courtisée par Marinetti désireux de revigorer un futurisme en perte de vitesse. La maison où j’ai grandi bruissait d’amis romanciers, poètes, dessinateurs, belges et étrangers. Ils étaient enthousiastes, idéalistes, anti bourgeois et avaient promis, dans le manifeste de la revue, de « rester purs ». Ma première poupée me fut donnée par un poète italien injustement oublié, Lionello Fiumi. Les revues littéraires sont des êtres fragiles. Celle de mon père dura sept ans, puis fut emportée par les bouleversements de l’époque[3]. »

Auteurs participant à la revue modifier

 
L'architecte Léon van Dievoet, à gauche, en compagnie de Jean Groffier au Parc Josaphat à Schaerbeek, le 23 juillet 1933.
 
Le peintre-écrivain-compositeur Jean de Bremaeker, rédacteur en chef de La Revue musicale belge, (à gauche) en compagnie de Jean Groffier, 1933.

Parmi tout ce cercle littéraire, artistique et musical qui gravite autour de la revue Tribune, on rencontre le peintre Lismonde[4], auquel Jean Groffier consacre un article élogieux et prometteur dans la Tribune[5] de septembre 1934, la peintre Marguerite Antoine[6],

 
De gauche à droite, le peintre Lismonde, Marguerite Antoine et Fernand Cannoot, à Nieuport le .

Fernand Cannoot, fondateur en 1941 du réseau de résistance Athos[7], la romancière Marie de Vivier, autrice de L'Homme pointu (allusion à André Baillon), la poétesse, graveuse sur bois et tisserande Féridah Guarini[8],

 
La poétesse, tisserande et graveuse sur bois Féridah Guarini, le 29 avril 1934.

le sculpteur Carlo Lambert, qui sera le premier soldat belge tué sur le front[9] le 10 mai 1940, époux de la grande Résistante Éva Fontaine[10],

 
Le sculpteur namurois Carlo Lambert, premier soldat belge tombé au champ d'honneur le 10 mai 1940.

le peintre et compositeur Jean De Bremaeker[11], rédacteur en chef de La Revue musicale belge, l'architecte Léon van Dievoet[12], son frère le sculpteur René van Dievoet, l'avocat Raoul Vandendriessche, promoteur de la paix par le droit, les compositeurs Willy Dortu et Gaston Knosp, l'avocat Jean Mallinger qui y publie une série d'articles sur le « Culte du Soleil en Orient[13] », Iwan Paul Collette, auteur d'articles sur l'héraldique[14], le poète Pierre Vandendries, les peintres Didier Groffier, Marcel Hastir[15] et Raoul Labarre, le romancier René Charles Oppitz[16] dit J. J. Marine, le poète italien Lionello Fiumi et d'autres hommes de lettres et artistes de l'entre-deux-guerres.

 
Lismonde peignant en compagnie des peintres Rachel De Bièvre et, à l'avant plan, Goda Isgour, sœur de l'architecte Isia Isgour, à Dilbeek, le .

Cette revue joue un rôle important dans la vie littéraire et artistique belge d'avant-guerre.

Références modifier

  1. Paul Aron et Pierre-Yves Soucy, Les Revues littéraires belges de langue française de 1830 à nos jours, Bruxelles, 1998 (édition revue, corrigée et augmentée), p. 150 : "684. La Momie chante. R. Jean Groffier. Devient Tribune 34 à partir du numéro 8, 15 janvier/15 février 1934", et p. 188 : "1020. TRIBUNE 1934. Organe de la Tribune 34 et de la ligue asiatique. R : Jean Groffier. Suite de La Momie chante (1933); Devient Tribune après 1934".
  2. D'après un fascicule publicitaire : "La revue 'TRIBUNE', a été créée par Jean Groffier, en 1933. Elle a posé des problèmes émouvants auxquels ont répondu les autorités les plus diverses. Elle s'est efforcée de vous présenter les mouvements intellectuels les plus importants"
  3. Éléments biographiques sur Jean Groffier par Éthel Groffier.
  4. Serge Goyens de Heusch, Échanges. Lismonde et ses amis artistes. Jiri Anderle, Marguerite Antoine, André Blank, Zéphir Busine, Jean Coquelet, Gilbert Decocq, Paul Delvaux, Jean-Paul Laenen, LI CHI-Mao, Pol Mara, Giorgio Morandi, Paul Schrobiltgen, Léon van Dievoet, André Willequet, Paul Wunderlich, Linkebeek, 2021.
  5. Jean Groffier, « Le paysagiste Lismonde », dans Tribune 1934, n° 15, Bruxelles, .
  6. La revue Tribune, n° 22, d', p. 8, a publié deux reproductions photographiques d'œuvres de Marguerite Antoine : Jeune Danseuse et Mère et Enfant.
  7. « Free Belgians, 1939-1945 un combat pour la liberté »
  8. Article sur Féridah Guarini par Jean Groffier, « Annotations », dans : La momie chante, n° 5, octobre 1933, p. 2.
  9. Alain Guérin, La Résistance: Chronique illustrée 1930-1950, Paris : Livre club Diderot, 1973, vol. III, p. 205 : « Dans cette maison, ajoute-t-elle, il y avait des peintures de James Ensor et Constantin Meunier, une belle statue faite par Carlo Lambert, le mari d'Eva, un sculpteur qui était mort, en mai 1940, sur le front » ; ainsi que : Alain Guérin, Chronique de la Résistance, préface de Marie-Madeleine Fourcade et de Henri Rol-Tanguy, 2010, p. 616 : « ...une belle statue faite par Carlo Lambert, le mari d'Eva, un sculpteur qui était mort, en mai 1940, sur le front ».
  10. Alain Guérin, Chronique de la Résistance, préface de Marie-Madeleine Fourcade et de Henri Rol-Tanguy, 2010, pp. 616-618 : «Comme Marinette Laurent, déjà citée, Eva Fontaine était une agent de liaison de Clément [N.B. = pseudonyme d'Eugen Fried.]. Elle est décédée en 1955. Mais sa soeur, Augusta, vivait toujours dans les années soixante-dix. Selon elle, ce sont deux appartements qu'Eva avait loués rue Ten-Bosch [N.B. au 129]. Elle s'était elle-même installée dans l'appartement du rez-de-chaussée tandis qu'au premier étage habitaient Clément, sa compagne Aurore, le fils d'Aurore, Maurice Thorez junior qu'on appelait Jacques, et la fille de Clément et de la future ministre roumaine Anna Pauker, la petite Marie, qu'on appelait alors Rosette. "Dans cette maison, ajoute-t-elle, il y avait des peintures de James Ensor et Constantin Meunier, une belle statue faite par Carlo Lambert, le mari d'Eva, un sculpteur qui était mort, en mai 1940, sur le front. Cette statue a été retrouvée après la guerre. Il y avait aussi d'autres peintures qui n'ont pas été retrouvées... Le jour qui nous intéresse, Clément était seul à la maison. Aurore et les deux enfants s'étaient absentés. Eva était partie depuis le matin en mission dans la région de Namur et elle m'avait même dit que, si elle en avait le temps, elle irait dire bonjour à notre mère, à Namur. Moi, toujours ce jour-là, j'ai dû me rendre chez le teinturier qui se trouvait en face de la maison. Une teinturerie qui, aujourd'hui, n'existe plus. Aussitôt qu'il m'a vue, le teinturier m'a dit : "Oh, madame, tout à l'heure, il s'est passé une chose affreuse en face. On a tiré... Votre sœur doit être tuée !" Moi, je savais qu'Eva était partie, mais j'ai couru prendre le premier train pour Namur afin de prévenir ma sœur de ne pas rentrer rue Tenbosch. ".(.....) La maison était cernée de tous côtés. A partir de là, Eva et sa sœur ont supposé que Clément, se voyant coincé, a tiré pour ne pas se faire prendre. Les Allemands ont riposté au fusil-mitrailleur. C'est ainsi que Clément a été tué, selon elles, mais après avoir abattu deux Allemands. La statue sauvée de Carlo Lambert portait d'ailleurs, quand on la retrouva, plusieurs traces de balles. .(.....) Après la catastrophe, Eva Fontaine .(....) a continué de combattre dans la Résistance belge en entrant dans les partisans armés».
  11. Jean Groffier lui consacra un article dans Tribune, n° 26, janvier-février 1936 : « Il y a cinq ans d'ici, Jean de Bremaeker expérimentait divers engins et méthodes de navigation dans les bassins d'Ostende. C'est en cette ville et à cette époque que je fis sa connaissance. Ses allures étranges m'avaient intéressé, je m'étais présenté à lui et le lendemain soir, à 21 heures, au bout de l'estacade, nos pensées, nos connaissances établirent des points de contact. Nous parlâmes longtemps au son de la mer alors que, derrière nous, la bêtise humaine, sous ses aspects les plus divers, se promenait le long de la digue ».
  12. Jean Groffier, « Un interview. L'Architecte Léon Van Dievoet », dans : La momie chante, Bruxelles, juillet 1933, p. 2, ainsi que Serge Goyens de Heusch, Léon van Dievoet, architecte. La Maison Lismonde et autres paysages, Linkebeek, 2023, p. 9 : « Durant ces années 1930, Léon van Dievoet fréquenta assidûment le monde littéraire bruxellois, principalement l'écrivain Jean Groffier qui créa en 1933 la revue Tribune ».
  13. Jean Mallinger, « Le Culte du Soleil en Orient », dans : La momie chante, à partir du n° 5, octobre 1933, p. 2.
  14. La momie chante, n° 6, novembre 1933, et aliis locis.
  15. Marcel Hastir a collaboré à la revue Tribune, dans le numéro 10, 15 mars - 15 avril 1934, p. 1, il a écrit « Une source de beauté ».
  16. L'architecte Philippe Dumont évoque son souvenir dans son livre La Panne. Chronique d'un temps perdu, Bruxelles : Louis Musin éditeur, 1981, p. 17 : « C'était ma jolie cousine Colette et son fiancé René Oppitz formant une image de grâce et d'amour, un couple de cygnes glissant sur les sables. »

Bibliographie modifier

  • Paul Aron et Pierre-Yves Soucy, Les Revues littéraires belges de langue française de 1830 à nos jours, Bruxelles, , p. 150
    (édition revue, corrigée et augmentée)
  • Serge Goyens de HeuschLismonde et l'architecture, Linkebeek, 2018.
  • Serge Goyens de Heusch, Échanges. Lismonde et ses amis artistes, Linkebeek, 2021.
  • Serge Goyens de Heusch, Léon van Dievoet, architecte. La Maison Lismonde et autres paysages, Linkebeek, 2023, p. 9 (concernant le revue Tribune).

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