Philoctète (Sophocle)

tragédie grecque de Sophocle

Philoctète (en grec ancien Φιλοκτήτης / Philoktḗtēs) est une tragédie grecque de Sophocle, inspirée des malheurs du Philoctète mythologique. C'est l'une des rares tragédies de Sophocle dont la date de création est connue : elle a été donnée pour la première fois au printemps à Athènes, durant la guerre du Péloponnèse (431-404)[1].

Philoctète (1886), sculpture d'Adolf von Hildebrand, Nouvelle Pinacothèque de Munich.

Résumé modifier

Philoctète est un guerrier très puissant, en raison de ses armes, qui lui ont été offertes par Héraclès. Lorsque la tragédie commence, il se trouve sur l'île de Lemnos, où il vit seul depuis dix ans (l'île est décrite comme déserte, alors qu'à l'époque où Sophocle écrit, les Athéniens la connaissent comme riche et fertile).

C'est Ulysse qui, sur le chemin de Troie, l'a abandonné là, parce que Philoctète a une blessure au pied qui suppure, et il pousse des cris qui perturbent l'armée (notamment les libations, nous dit Ulysse). Cette blessure lui serait venue de Chrysé, parce qu'il aurait, selon les versions, dormi, ou fait l'amour avec sa prêtresse dans son temple. Il se trouve donc abandonné et sans ressources depuis dix ans lorsque, ayant capturé le devin troyen Hélénos, les Grecs apprennent que sans les flèches d'Héraclès, qui sont en la possession de Philoctète, ils ne prendront jamais Troie.

Ulysse va alors recourir à la ruse pour tenter de prendre les armes de Philoctète, ou de l'emmener à Troie. Il envoie donc Néoptolème, fils d'Achille, parler avec Philoctète et gagner sa confiance. En effet, Néoptolème est trop jeune pour avoir participé à l'humiliation qu'a subie Philoctète, et, fils d'Achille, il a toutes les qualités pour se faire apprécier de lui, d'autant plus que Néoptolème se fait passer pour un héros humilié par Ulysse et les Atrides, tout comme Philoctète. Bien qu'il juge contestable la ruse d'Ulysse, non conforme aux traditions héroïques héritées de son père, il s'exécute et réussit à amadouer Philoctète, qui ira même jusqu'à l'appeler « mon enfant » à plusieurs reprises.

Ayant totalement confiance en Néoptolème, Philoctète lui confie ses armes pendant son sommeil. Néoptolème, gagné par le remords, renonce à le tromper et lui avoue ses mensonges et la prédiction d'Hélénos. Ulysse, ne pouvant rien faire sans les armes de Philoctète, tente alors de le forcer à embarquer pour Troie, mais Néoptolème s'y oppose, et les deux héros sont sur le point d'en découdre.

Pour rétablir l'ordre brisé, Sophocle a recours à un deus ex machina : c'est Héraclès qui va intervenir et obliger Philoctète à se rendre à Troie.

Nous apprenons par d'autres sources que c'est d'une de ses flèches que mourra Pâris et qu'il regagnera sa patrie à la fin de la guerre de Troie.

Analyse modifier

C'est une tragédie où personne ne meurt et qui de plus compte trois personnages principaux, sans héros véritable (si ce n'est que l'un des trois est éponyme). On a pourtant dit qu'il s'agissait d'une des pièces les plus tragiques de Sophocle. Le tragique de la pièce réside en effet dans le fait que Philoctète est expulsé de la société humaine et retourne à un état primitif, à la frontière de l'homme et de l'animal (il ne peut par exemple se tenir debout à cause de sa blessure et est obligé de ramper). Et alors qu'il croit renouer avec l'humanité grâce à Néoptolème, il se rend compte que l'amitié du jeune homme est feinte et qu'il a été trompé par une parole qu'il croyait salvatrice. Le jeune Grec symbolise le passage de l’état d’enfance à l’état d’adulte, c’est-à-dire de guerrier. L’éphèbe s’oppose à l’hoplite à la fois par la localisation spatiale des activités guerrières et par la nature même du combat.

Adaptations et mises en scène notables modifier

Bibliographie modifier

  • Vidal-Naquet, Pierre. Le "Philocète" de Sophocle et l'éphébie. X. VII; Mythe et tragédie en Grèce ancienne-I. 2005. 184 pages.

Notes et références modifier

  1. Philoctète (introduction par Raphaël Dreyfus), éditions Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », (ISBN 2-07-010567-9), p. 793

Voir aussi modifier

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