Ordre de domination

En mathématiques discrètes, l’ordre de domination (en anglais dominance order, appelé aussi dominance ordering, majorization order, natural ordering[1]) est un ordre partiel sur l'ensemble des partitions d'un entier naturel qui joue un rôle important en combinatoire algébrique et en théorie des représentations, spécialement dans le contexte des fonctions symétriques et des représentations du groupe symétrique.

Ordre de domination sur les partitions de l'entier 6. Les sommets du graphe sont les partitions ; un arc indique que la partition supérieure domine la partition inférieure.

Définition

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Soient   et   deux partitions d'un entier  , avec   et  . Alors   est inférieur ou égal à   dans l'ordre de domination, et on écrit   si, pour tout  , la somme des   parties les plus grandes de   est inférieure ou égale à la somme des   plus grandes parties de  . Formellement :   si et seulement si, pour tout  ,  

Dans cette définition, les partitions sont allongées si nécessaire en les complétant de parties nulles. Par exemple, et comme indiqué dans la figure, on a  .

Propriétés de l'ordre de domination[1]

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  • Parmi les partitions d'un entier  , la partition   est la plus petite, et   la plus grande.
  • L'ordre de domination implique l'ordre lexicographique. En d'autres termes, si   domine  , alors   est supérieur à   dans l'ordre lexicographique, mais la réciproque n'est pas vraie : par exemple   et   sont incomparables pour l'ordre de domination alors que la première est lexicographiquement plus grande que la deuxième.
  • L'ensemble partiellement ordonné des partitions de   est totalement ordonné (et l'ordre de domination et l'ordre lexicographique sont égaux) si et seulement si  . C'est un ensemble partiellement ordonné gradué (possédant une fonction de rang) si et seulement si  .
  • Une partition   couvre une partition   (c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'élémentre entre ces deux, formellement   et   implique   ou  ) si et seulement il existe deux indices   tels que   pour  , et  ; et soit  , soit  [2].
  • Toute partition   possède une partition duale   dont le diagramme de Ferrers est le transposé du diagramme de  . Cette opération inverse le sens de l'ordre de domination :   si et seulement si  

Structure de treillis

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Les partitions d'un entier   forment un treillis pour l'ordre de domination. L'opération de conjugaison est un antiautomorphisme de ce treillis. On peut décrire les opérations de treillis comme suit :

À une partition  , complétée éventuellement par des parties nulles, on associe la suite

 

On retrouve   à partir de   par  . Par exemple, pour (3,1,1,1) et (2,2,2) les suites associées sont (0,3,4,5,6,6,6) et (0,2,4,6,6,6,6). Les suites associées aux partitions sont caractérisées, parmi les suites à   termes, par les trois propriétés suivantes. Elles sont :

  • croissantes au sens large :  
  • concaves :  
  • et le premier terme est 0 et le dernier terme est   :  

Par la définition de l'ordre de domination, une partition   précède une partition   (  ) si et seulement si la suite   est terme par terme inférieure ou égale à  . Il en résulte que la borne inférieure   de deux partitions   et   est la partition dont la suite associée est  . Ainsi, pour les partitions (3,1,1,1) et (2,2,2), la suite associée à leur borne inférieure est (0,2,4,5,6,6,6), et donc  .

Une formule aussi simple n'existe pas pour la borne supérieure parce que le maximum, pris composante par composante, de deux suites concaves n'est plus nécessairement concave: ainsi pour les partitions (3,1,1,1) et (2,2,2) les suites associées sont (0,3,4,5,6,6,6) et (0,2,4,6,6,6,6) et leur maximum, pris terme à terme, est (0,3,4,6,6,6,6) qui n'est pas concave (parce que 2\cdot4<3+6). La construction de la borne supérieure passe par la conjugaison en utilisant l'antiautomorphisme : la borne supérieure   de   et   est la partition conjuguée de la borne inférieure des conjuguées   et   :

 

Pour les deux partitions   et   de l'exemple précédent, leurs partitions conjuguées sont (4,1,1) et (3,3), et leur borne inférieure est (3,2,1). Cette partition est sa propre conjuguée, et la borne supérieure de   et   est donc (3,2,1). Thomas Brylawski[3] a établi d'autres propriétés du treillis des partitions pour l'ordre de domination. Ainsi, le treillis n'est pas distributif dès que  . En revanche, certaines propriétés des treillis distributifs restent valables dans ce treillis : par exemple, sa fonction de Möbius ne prend que les valeurs 0, 1, et –1.

Voir aussi

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  1. a et b Macdonald 1979, Section I.1, p. 5-7.
  2. Brylawski 1973, Prop. 2.3.
  3. Brylawski 1973.