Le Sac de Lyon par les calvinistes en 1562

tableau
Le Sac de Lyon par les calvinistes en 1562
Artiste
peintre actif à Lyon ?
Date
vers 1565
Type
Peinture à l'huile sur bois
Dimensions (H × L × l)
98,5 × 131 × ép. max. 1,5 cm cmVoir et modifier les données sur Wikidata
Propriétaire
No d’inventaire
N 3819
Localisation

Le Sac de Lyon par les calvinistes en 1562 aussi appelé Le Sac de Lyon par les réformés ou Sac du baron des Adrets, est un tableau à l'huile sur bois peint vers 1565, peu après l'événement représenté : les actions iconoclastes des protestants à Lyon, au printemps 1562. Il est exposé au musée Gadagne, à Lyon.

Description modifier

Contexte : début des Guerres de Religion modifier

 
François de Beaumont, le baron des Adrets, gravure extraite de Le Baron des Adrets, éd. par Firmin-Didot et Cie, 1930

Au XVIe siècle, les idées humanistes de la Renaissance imprègnent profondément Lyon, cité cosmopolite du commerce et des imprimeurs, et en 1560 un tiers de la population est converti au protestantisme. Le François de Guise, chef catholique, découvre que les protestants de la ville de Wassy (Haute-Marne) célèbrent leur culte dans leur ville et non en dehors, comme le veut l'édit de janvier 1562. Il ordonne alors à ses troupes de massacrer les réformés réfugiés dans une grange. À son retour à Paris, Guise est accueilli en héros et le peuple réclame une croisade contre les huguenots. Le massacre de Wassy déclenche une première « Saint-Barthélemy ». Des protestants sont massacrés à Sens, à Tours, dans le Maine et en Anjou. Ils prennent alors les armes sous la direction du prince Louis de Condé, qui prend alors Orléans. C'est le début des Guerres de Religion en France. Les protestants s'emparent par surprise de plusieurs grandes villes, et notamment de Lyon dans la nuit du 29 au , sous le commandement du François de Beaumont, dit le baron des Adrets[1].

Lyon 1562, capitale protestante modifier

Les troupes du baron des Adrets et de ses alliés locaux occupent la place du Change et la rue Saint-Jean. Le , sous la pression de la soldatesque et des nécessités financières elles se livrent à des destructions iconoclastes : les statues de la façade de la primatiale Saint-Jean sont jetées à terre, les reliques brulées. La clôture du cloître de Saint-Jean et de l'église Saint-Just sont rasées. Les images de Saint-Nizier sont détruites, de même que celles de l'abbaye d'Ainay. Les trésors du clergé sont saisis et vendus aux enchères, les cloches sont démontées pour être fondues pour fabriquer de la monnaie destinée à la solde de la garnison. Le château de Pierre Scize, possession de l'archevêque de Lyon, est pris le .

Depuis Genève, Jean Calvin dénonce vigoureusement les débordements, et le le baron des Adrets est remplacé par Jean V de Parthenay, prince de Soubise. Les violences cessent. Les ordres religieux ayant fui leurs couvents, on en profite pour réaménager l'espace urbain, percements de nouvelles rues, création des places des Cordeliers et de Confort.

En , l'édit d'Amboise clôt la première guerre de religion et instaure une paix précaire. L'occupation protestante s'achève le avec la nomination d'un nouveau gouverneur, François de Scépeaux, maréchal de Vieilleville, un modéré qui désarme les huguenots. S'ouvre alors un temps de coexistence marquée par l'entrée royale de Charles IX en 1564 et l'édification du temple de Paradis. La reprise de la controverse, favorisé par la puissance des presses lyonnaises amène à la reprise de persécutions catholiques en 1567 et les grands massacre de la Saint-Barthélemy de l'été 1572.

Représentation symbolique d'un épisode historique modifier

Le tableau illustre les actions iconoclastes protestante : pour lutter contre l'"idolâtrie catholique" - le culte des reliques et des images religieuses - les images du divin sont détruites. Ainsi, au premier plan, des soldats parodient une procession catholique. Au deuxième plan, les objets précieux sont vendus au prix des matières premières. Derrière sont brûlés des objets sacrés. La croix de l'église est démontée[2].

Les questions en débat modifier

La vision allégorique de Lyon modifier

 
Détail. La colline de Fourvière.

La mise en scène du tableau, avec sa perspective centrale, est classique de la Renaissance, et ne témoigne pas de la topographie exacte de l'époque. La colline de l'arrière plan pourrait correspondre à celle de Fourvière. L'église rotonde, elle, évoque l'église de Saint-Nizier, qui à cette époque ne possède cependant qu'une tour clocher. Les inscriptions latines localisent en revanche précisément l'action à Lyon.

L'identité du peintre modifier

En 1566, le peintre Antoine Caron effectue un tableau à la disposition et au sujet proche, Les massacres du Triumvirat, représentant l'accord politique entre Octave Auguste, Marc Antoine et Lépide en 43 avant J.-C. Le , le connétable de Montmorency, Jacques d'Albon et le Duc de Guise cèlent un "triumvirat catholique". Le Prince de Condé, protestant, achète alors une représentation du tableau d'Antoine Caron pour dénoncer la violence qu'annonce cette alliance. Malgré la référence évidente à ce tableau, les historiens de l'art doutent aujourd'hui que Le Sac de Lyon par les Calviniste en 1562 soit de la main d'Antoine Caron.

 
Le massacre du Triumvirat, Antoine Caron, 1566

Une interprétation contradictoire modifier

 
Détail. Soldats protestants lisant la Bible.

Le sujet et violence des inscriptions latine pourrait faire penser tout d'abord que le tableau des un outil de propagande du camp catholique. Pourtant, la violences contre des personnes n'est pas représenté, le sang ne coule pas, et seul contre les objets du culte sont détruits. La violence est maîtrisée, on voit des soldats protestants lisant la Bible, écoutant le prêche du pasteur, prier à genoux. Un groupe prête serment devant une bannière où est écrit "Pour servir Dieu et le Roi". En fait, la virulence des inscriptions latines contrastent avec la représentation idéalisé de l'événement. Les historiens de l'art s'interrogent, ont-elles été ajouté plus tard ou sont-elles une dénonciation des calomnies colportés par les libelles catholiques entre 1563 et 1567[3],[4] ?

Traduction des inscriptions latines
 
“La destruction de Lyon dépeinte [ici] démontre que les dogmes impies de Calvin se fondent sur le vol et le sang.”
 
“Telle était l'apparence des églises et de la ville de Lyon lorsque Calvin en détruisit les droits sacrés.”

Histoire du tableau modifier

Le tableau appartient au musée des Beaux-Arts de Lyon, qui l'a acquis en 1896 à un particulier, M. Groboz. Il est exposé depuis 1935 au musée Gadagne, le musée municipal de l'histoire de Lyon.

Notes et références modifier

  1. Ludmila Virassamynaïken (direction), Lyon Renaissance : Arts et Humanisme, Lyon, Musée des Beaux-Arts - Somogy Editions d'art, , 359 p. (ISBN 978-2-7572-0991-2), p.34
  2. Le Sac de Lyon par les calvinistes en 1562, Musée Gadagne
  3. D. Miège / P. Bosquet / P. Gausset, « LE SAC DE LYON PAR LES CALVINISTES EN 1562 », sur www.gadagne.musees.lyon.fr, (consulté le )
  4. (en) Ecole Normale Supérieure de Lyon, « L'Atelier numérique de l'Histoire | Episodes », sur atelier-histoire.ens-lyon.fr (consulté le )

Bibliographie modifier

  • Olivier Christin, ""Une ville située sur une montagne ne peut être cachée" (Mt, V,14) Lyon, capitale religieuse", dans Ludmila Virassamynaïken (dir.), Arts et Humanisme, Lyon Renaissance, Paris, musée des Beaux-Arts de Lyon - Somogy Éditions d'art, 2015, 359 p.  (ISBN 978-2-7572-0991-2)
  • Olivier Christin, "Coexister malgré tout : humanisme, amitiés, parités", dans Yves Krumanacher (dir.), Lyon 1562, capitale protestante.Une histoire religieuse de Lyon à la Renaissance, Lyon, Édition Olivétan, 2009, 336 p. (ISBN 978-2-3547-9094-3)