Justice reproductive

Enjeu de justice sociale

La justice reproductive est « le droit humain de conserver son autonomie corporelle personnelle, d'avoir des enfants, de ne pas en avoir et d'élever les enfants que nous avons dans des communautés sécuritaires et durables », selon SisterSong Women of Color Reproductive Justice Collective , la première organisation fondée pour construire un mouvement de justice reproductive[1]. En 1997, 16 organisations dirigées par des femmes de couleur représentant quatre communautés de couleur - autochtone, latino-américaine, afro-américaine et asiatique - ont lancé l'association à but non lucratif SisterSong pour créer un mouvement national de justice reproductive[2]. D'autres organisations ont commencé à se former ou à se réorganiser en tant qu'organisations de justice reproductive à partir du début des années 2000[3].

Affiche de droits à l'avortement : Gardons les avortements sécuritaires, légaux et accessibles.

La justice reproductive, distincte des mouvements des droits reproductifs des années 1970, a émergé en tant que mouvement parce que les femmes à faible revenu, les femmes de couleur, les femmes en situation de handicap et les personnes LGBTQ+ se sentaient marginalisées dans le mouvement des droits reproductifs. Les femmes ont estimé que le mouvement des droits reproductifs se concentrait principalement sur les débats pro-choix contre pro-vie. En revanche, le mouvement pour la justice reproductive reconnaît la manière dont des facteurs croisés, tels que la race et la classe sociale, limitent la liberté des femmes marginalisées de faire des choix éclairés au sujet de la grossesse en imposant des circonstances oppressives ou en restreignant l'accès aux services, y compris, mais sans s'y limiter, l'avortement, les pilules Plan B et de service de garde et une éducation abordables[4]. La justice reproductive se concentre sur l'accès pratique à l'avortement plutôt que sur le droit à l'avortement, affirmant que le droit légal à l'avortement n'a pas de sens pour les femmes qui ne peuvent pas y accéder en raison du coût, de la distance jusqu'au prestataire le plus proche ou d'autres obstacles de ce type.

Le cadre de la justice reproductive englobe un large éventail de questions affectant la vie reproductive des femmes marginalisées, y compris l'accès à : la contraception, une éducation sexuelle complète, la prévention et les soins des infections sexuellement transmissibles, des options de naissance alternatives, des soins prénataux et de grossesse adéquats, une assistance en cas de violence domestique, des salaires adéquats pour subvenir aux besoins des familles et des foyers sécuritaires. La justice reproductive est basée sur le cadre international des droits humains, qui considère les droits reproductifs comme des droits humains.

Cadre modifier

Origine modifier

Le terme justice reproductive combine les droits reproductifs et la justice sociale . Il a été inventé et formulé comme un cadre d'organisation par un groupe de femmes noires qui se sont réunies à cette fin en 1994 et se sont appelées Women of African Descent for Reproductive Justice (Femmes d'ascendance africaine pour la justice reproductive)[5]. Elles se sont réunise à Chicago pour une conférence parrainée par l'Illinois Pro-Choice Alliance et la Ms. Foundation for Women avec l'intention de créer une déclaration en réponse au plan proposé par l'administration Clinton pour les soins de santé universels. La conférence a été intentionnellement planifiée juste avant que les participant.e.s ne se rendent à la Conférence internationale sur la population et le développement au Caire, où il a été décidé que le droit individuel de planifier sa propre famille doit être au cœur du développement mondial. Les fondatrices du Women of African Descent for Reproductive Justice ont lancé le cadre en publiant une déclaration d'une page entière intitulée « Black Women on Universal Health Care Reform[6] » avec plus de 800 signatures dans le Washington Post et Roll Call abordant la justice reproductive dans une critique du plan de soins de santé de Clinton . [5] Les femmes qui ont créé le cadre de justice reproductive étaient : Toni M. Bond Leonard, révérende Alma Crawford, Evelyn S. Field, Terri James, Bisola Marignay, Cassandra McConnell, Cynthia Newbille, Loretta Ross, Elizabeth Terry, « Able » Mable Thomas, Winnette P. Willis et Kim Youngblood[7].

Définition modifier

Loretta Ross, cofondatrice et coordinatrice nationale du SisterSong Women of Color Reproductive Justice Collective de 2005 à 2012, définit la justice reproductive comme un cadre créé par des militantes de couleur pour aborder les façons dont la race, le sexe, la classe sociale, les capacités, la nationalité et la sexualité s'entrecroisent[8]. Le concept de justice reproductive a été créé par ces militantes de couleur en raison de frustrations avec le paradigme dominant « pro-choix ». Ces femmes ont estimé que malgré l'accès légal à des options telles que l'avortement, elles n'étaient pas en mesure d'exercer leurs choix en matière de procréation aussi facilement que leurs homologues plus privilégiées. Pour eux, la politique reproductive n'était pas une question de choix, mais de justice[8].

Le discours sur l'avortement aux États-Unis est souvent expliqué en termes de « pro-choix », c'est-à-dire en faveur du droit à l'avortement, ou de « pro-vie », c'est-à-dire favorisant le développement du fœtus et la protection de la vie de l'« enfant à naître » et s'opposant l'avortement. La justice reproductive remet en question la dichotomie pro-choix/pro-vie. La justice reproductive comprend le « choix » comme quelque chose qui divise les femmes dans la politique et la pratique, car elle suppose que toutes les femmes ont une capacité égale à faire les mêmes choix. Par conséquent, le « choix » ignore les facteurs structurels tels que le statut économique, la race, l'état d'immigration, etc[9]. Certaines chercheuses en études féministes comme Greta Gaard affirment que le « choix » est un « schéma d'omission », ce qui signifie qu'il exclut de nombreuses femmes de la conversation, en particulier les femmes de couleur, les femmes immigrantes, les femmes queer, les femmes transgenres, etc. Structurellement, ces identités n'ont pas les mêmes degrés de choix lorsqu'il s'agit d'accéder aux soins de reproduction. Gaard soutient que cela divise davantage les femmes selon la classe et la race[10]. Cela crée le besoin d'un nouveau cadre plus inclusif, et la justice reproductive a été créée pour être ce cadre.

La justice reproductive est un cadre théorique critique qui a été inventé en réponse à la politique reproductive des États-Unis. Les trois valeurs fondamentales de la justice reproductive sont le droit d'avoir un enfant, le droit de ne pas avoir d'enfant et le droit d'élever un enfant ou des enfants dans des environnements sécuritaires et sains[8]. Le cadre fait passer les droits reproductifs des femmes au-delà d'un débat juridique et politique pour intégrer les facteurs économiques, sociaux et sanitaires qui ont un impact sur les choix reproductifs des femmes et leur capacité de prise de décision.

Notes et références modifier

  1. « Reproductive Justice », SisterSong (consulté le )
  2. « SisterSong », SisterSong (consulté le )
  3. « Understanding Reproductive Justice », SisterSong Women of Color Reproductive Health Collective,‎ , p. 7 (lire en ligne)
  4. Smith 2005, p. 119–140
  5. a et b « Reproductive Justice », SisterSong (consulté le )
  6. « Black Women on Universal Health Care Reform », Black Women for Reproductive Justice, (consulté le )
  7. « RJ Founding Mothers », Black Women for Reproductive Justice, (consulté le )
  8. a b et c Radical Reproductive Justice : Foundation, Theory, Practice, Critique, New York, NY, Feminist Press, (ISBN 978-1-55861-437-6)
  9. Reproductive Justice Briefing Book : A Primer on Reproductive Justice and Social Change, Atlanta, GA, Pro-Choice Public Education Project (PEP) and SisterSong Women of Color Reproductive Justice Collective, , 39 p.
  10. « Reproductive Technology, or Reproductive Justice?An Ecofeminist, Environmental Justice Perspective on the Rhetoric of Choice », Ethics and the Environment, vol. 15, no 2,‎ , p. 103–129 (DOI 10.2979/ete.2010.15.2.103, S2CID 144393726)