Initiative populaire « concernant la protection des locataires et des consommateurs »

Initiative populaire fédérale
Concernant la protection des locataires et des consommateurs

Déposée le
Déposée par Union syndicale suisse

Contre-projet Refusé[NB 1]
Votée le
Participation 55,52 %
Résultat : rejetée[NB 2]
Par le peuple oui (par 50,2 %)
Par les cantons non (par 13 4/2)[NB 3]

L'initiative populaire « concernant la protection des locataires et des consommateurs » est une initiative populaire fédérale suisse, acceptée par le peuple mais rejetée par les cantons le . C'est la seule votation fédérale organisée dans le pays cette année-là.

Elle est une des deux seules initiatives à avoir été acceptée par le peuple sans obtenir la double majorité (l'autre étant l'initiative populaire « entreprises responsables » en 2020).

Contenu modifier

L'initiative propose d'insérer 10 articles dans la Constitution fédérale afin de « sauvegarder le pouvoir d'achat et prévenir la hausse du coût de la vie » entre 1955 et 1960 via plusieurs mesures touchant à la surveillance des prix et à la limitation des augmentations de loyers.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement modifier

Contexte historique modifier

Si un contrôle des prix quasi absolu avait été maintenu pendant toute la période de la Seconde Guerre mondiale et la décennie suivante, ce contrôle, dès 1949, est progressivement réduit pour passer à une simple surveillance, en conservant toutefois certains obligations, telle que celle d'afficher les prix au détail. Le contrôle strict des prix ne concerne plus, en 1952, que les carburants, le charbon, le bois de sapin, ainsi que plusieurs produits d'alimentation tels que le pain, la farine, le lait, les fruits et légumes et les œufs[2]. Dès 1953 cependant, la Confédération est autorisée à prescrire des prix maximas sur les loyers et les fermages, ainsi que sur les « prix pour les marchandises destinées au marché intérieur lorsque la formation du prix de ces marchandises est influencée par des mesures de protection ».

L'initiative propose de proroger et d'étendre les mesures prises en 1953 et qui, selon l'arrêté fédéral, doivent être progressivement abandonnés jusqu'au .

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative modifier

La récolte des 50 000 signatures a débuté le . L'initiative a été déposée le de l'année suivante à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [3].

Discussions et recommandations des autorités modifier

Le parlement[4] et le Conseil fédéral[5] recommandent le rejet de cette initiative. Dans son rapport aux chambres fédérales, le gouvernement s'oppose à l'obligation d'exercer une surveillance complète des prix ainsi que l'automatisation de prescriptions sur les prix maximums comme moyen de protection, préférant privilégier une plus grande souplesse dans les interventions de l'administration fédérale dans le domaine économique.

Par contre, le gouvernement propose, sous forme de contre-projet, de prolonger l'arrêté fédéral de 1953 sur le maintien temporaire d'un contrôle réduit sur les prix jusqu'à la fin de l'année 1960 au plus tard.

Votation modifier

Soumise à la votation le , l'initiative est acceptée par 50,2 % des suffrages exprimés, mais refusée par 13 4/2 cantons[NB 3] ; la double majorité étant nécessaire, l'initiative est donc rejetée[6] ; il s'agit donc de l'un des très rares cas où une initiative est refusée tout en obtenant la majorité absolue des voix en sa faveur. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons[7] :

Le contre-projet du gouvernement est, également rejeté par 12 3/2 cantons et 57,5 % des suffrages exprimés[6]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons pour ce contre-projet[7] :

Effets modifier

Malgré ce refus populaire, plusieurs additifs constitutionnels sont adoptés dans les années suivantes (, et ) pour prolonger ce régime spécial en l'adoucissant progressivement et tout en conservant comme objectif finale « l'incorporation du secteur du logement à l'économie de marché ». Le dernier additif du [8] donne comme date butoir pour remplacer le contrôle des loyers par une simple surveillance la fin de l'année 1966 pour les villes de Zurich, Berne, Bâle, Lausanne et Genève et le pour les autres communes ; la suppression de toutes les prescriptions en matière de loyers est, quant à elle, prévue pour la fin de l'année 1969[9]. En 1967, afin de contrer cette date de fin, une initiative populaire « pour le droit au logement et le développement de la protection de la famille » est lancée afin d'inscrire dans la Constitution le droit au logement. Rejetée le [10], cette initiative n'empêchera pas la libération du marché de l'immobilier comme prévu.

La protection des locataires, auparavant assurée par les prescriptions, est fixée dès le dans la loi fédérale ; cette protection, insuffisante, est doublée d'un nouvel article constitutionnel adopté sous la forme d'un arrêté fédéral urgent le et d'une ordonnance du met en place des mesures contre les abus dans le secteur locatif. Devant la fin prévue de l'arrêté fédéral en 1977, une initiative populaire « pour une protection efficace des locataires » est lancée pour demander le contrôle des loyers par la Confédération et l'extension de la protection contre les résiliations[11]. Cette initiative, tout comme son contre-projet proposé par le gouvernement, est rejetée en votation populaire le [12].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Jusqu'au 24 septembre 2000, le double oui à l'initiative populaire et au contre-projet est interdit et entraîne la nullité du vote ainsi exprimé. Depuis cette date, en cas de double-oui, c'est le projet qui récolte le plus de voix à la question subsidiaire qui entre en vigueur comme indiqué sur http://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/procedure.html .
  2. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  3. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».

Références modifier

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. « Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien temporaire du contrôle des prix »  (15 mai 1952) de la Feuille fédérale référence FF 1952 II 61, pages 71-75
  3. « Initiative populaire 'concernant la protection des locataires et des consommateurs' » (consulté le )
  4. « Arrêté fédéral »  (30 décembre 1954) de la Feuille fédérale référence FF 1954 II 1321
  5. « Message du Conseil fédéral »  (29 juillet 1954) de la Feuille fédérale référence FF 1954 II 149
  6. a et b « Votation no 174 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  7. a et b « Votation no 174 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  8. « Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur le maintien de mesures temporaires en matière de contrôle des prix »  (9 avril 1964) de la Feuille fédérale référence FF 1964 I 733
  9. « Rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur l'initiative populaire pour le droit au logement et le développement de la protection de la famille »  (19 septembre 1969) de la Feuille fédérale référence FF 1969 II 895
  10. « Votation no 222 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  11. « Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'initiative populaire «pour une protection efficace des locataires» et un contreprojet »  (9 août 1976) de la Feuille fédérale référence FF 1976 II 1321
  12. « Votation no 270 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )