Françoise Mignot (parfois prénommée Claudine Françoise ou Marie, ou sous diverses combinaisons de deux ou trois de ces prénoms), née à Grenoble ou près de Grenoble (province du Dauphiné) le , morte à Paris le (à 87 ans), est une femme du peuple mariée successivement avec un conseiller du roi trésorier du Dauphiné, puis un duc maréchal de France, et enfin avec un ancien roi élu de Pologne[1],[2].

Françoise Mignot
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 87 ans)
ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Conjoints

Biographie modifier

Elle est baptisée, et vraisemblablement née[N 1], en janvier 1624, dans la paroisse Saint-Hugues et Saint-Jean de Grenoble, de Humbert Mignot, marchand mercier à Grenoble, et de Hélène Simonet, herbière[3],[4].

Premier mariage modifier

En 1640, alors qu'elle travaille comme lingère dans la boutique de ses parents, elle est remarquée par le valet et secrétaire de Pierre de Portes, seigneur d'Amblérieu, quinquagénaire, trésorier et conseiller du roi (Louis XIII), lequel valet la demande en mariage, avant de se raviser. La mère et la fille vont chercher recours auprès du trésorier, qui propose alors de se substituer à son secrétaire[5]. Le mariage est célébré le en la chapelle Notre-Dame de l'église des pères capucins de Grenoble[6],[N 2]. Le couple, en raison de l'écart d'âge et de rang social, est l'objet de diverses railleries. Son époux prend soin néanmoins de parfaire son éducation, notamment en bonnes manières, en écriture et en géographie[7]. Au moins un fils, prénommé Louis, naît le de cette union[8], mais il ne vit pas longtemps[9]. Pierre de Portes meurt à Grenoble le [10],[2]. Son testament, très favorable envers son épouse, étant attaqué par ses deux frères, Françoise Mignot décide, sur le conseil et munie d'une lettre de recommandation d'un ecclésiastique ami, de monter à Paris défendre sa cause.

Deuxième mariage modifier

Dans ce but, on lui propose alors un mariage avec l'intendant du maréchal de France François de L'Hospital duc de Rosnay[11]. L'intendant fait savoir son accord, et présente sa future à son seigneur le maréchal, qui la trouve digne d'être sa propre épouse. Ce septuagénaire, veuf depuis 1651 de Charlotte des Essarts, une des favorites du roi Henri IV, hâte le pas et le Françoise Mignot devient Madame la Maréchale de L'Hospital[12]. Un fils leur naît neuf mois après, mais il meurt en bas âge. Grâce aux libéralités de son époux, la Maréchale mène grand train, à Paris et à Versailles, ce qui provoque les quolibets des billettistes et des envieux[13].

Après la mort de son époux le à l'âge de 77 ans, elle reste à Paris. On lui prête alors de nombreux amants, et elle attire de nouveau sur elle les railleries. Étant entrée en contact avec le juriste Denis Talon pour défendre ses affaires, et pensant peut-être lui rendre service[14], elle entreprend de s'introduire dans l'instruction du procès lancé contre Fouquet par Louis XIV à l'instigation de Mazarin puis Colbert, et dont Denis Talon est le procureur général. Elle lui fournit, ainsi qu'à Colbert, des informations qu'elle tenait probablement de son défunt mari, jusqu'à ce que Louis XIV lui commande de se retirer de cette affaire[15].

Troisième mariage modifier

Louis XIV et son conseil tenaient à ce que le roi élu de Pologne soit un ami de la France[N 3], de façon à cerner les états autrichiens. Cependant, lorsque le roi Jean II Casimir Vasa, veuf et lassé du pouvoir[N 4], abdique en 1668, c'est un partisan de la maison d'Autriche qui est élu. Pour préparer l'élection suivante, Colbert décide d'accueillir Jean II Casimir en France, où il est nommé abbé commendataire de plusieurs abbayes, dont l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés de Paris. Cette fonction n'obligeant pas au célibat, on lui présente de nombreuses femmes, dont Madame la Maréchale de L'Hospital, veuve depuis plusieurs années, qui a sa préférence. Selon un généalogiste polonais, ils auraient eu une fille, Marie Catherine Vasa (en), née en 1670 hors mariage, mais reconnue par son père dans son testament du [16]. Le mariage, tenu secret quoique célébré dans les règles, a lieu le à Paris : les époux ont alors respectivement 63 et 48 ans. Mais Françoise Mignot n'aura été reine morganatique de Pologne[N 5] que trois mois, puisque son troisième mari meurt à Nevers le [17],[2].

Fin de vie modifier

En 1674, elle fait un don aux Carmélites de Paris en échange d'un logement à vie dans leur couvent. Puis elle reprend une vie mondaine, mais fait face à des difficultés financières qui la contraignent à vendre des éléments de son patrimoine, et à demander du secours auprès du contrôleur général des finances Desmarets.

Elle meurt à Paris, aux Petites-Carmélites, le [18],[2].

Postérité modifier

De nombreux chroniqueurs et historiens ont rapporté la vie aventureuse de Françoise Mignot : le père Anselme (1625-1694), Pierre Bayle (1647-1706), Saint-Simon (1675-1755), Borel d'Hauterive (1812-1896)...

Un vaudeville intitulé Marie Mignot, écrit par Jean-François Bayard et Paul Duport, est créé en 1829 à Paris[19].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Selon Borel d'Hauterive, Françoise serait née à Meylan, hameau du Bachet (Bachais), village proche de Grenoble.
  2. Pour la circonstance, elle est désignée « damoyselle » dans son acte de mariage, qu'elle signe, d'une écriture soignée, fait assez rare à l'époque pour une jeune femme non noble.
  3. De 1569 à 1795, la Pologne forme avec la Lituanie la république des Deux Nations, monarchie élective.
  4. Son épouse, Louise-Marie de Gonzague était française.
  5. Peut-on la qualifier ainsi, vu que Jean II Casimir avait abdiqué ?

Références modifier

  1. Borel 1846, p. 17-27.
  2. a b c et d Base généalogique Roglo, « Ascendants de Françoise Marie Mignot », sur roglo5.roglo.eu (consulté le ).
  3. Archives de l'Isère, « État civil – Grenoble Saint-Hugues et Saint-Jean – Coll. com. : Baptêmes 1622-1625 », Acte de baptême de Françoise Mignot (avec mention marginale « Madame la Mareschalle de L'Hospital »), 9NUM/AC185/15, sur archivesenligne.archives-isere.fr (consulté le ), p. 67.
  4. Borel 1846, p. 17, 19.
  5. Fonvieille 1975, p. 80-82.
  6. Archives de l'Isère, « État civil – Grenoble Saint-Hugues et Saint-Jean – Coll. com. : Mariages 1640-1645 », Acte de mariage de « noble Pierre de Portes » avec « damoyselle Françoyse Mignot », 9NUM/AC185/23, sur archivesenligne.archives-isere.fr (consulté le ), p. 29.
  7. Fonvieille 1975, p. 83.
  8. Archives de l'Isère, « État civil – Grenoble Saint-Hugues et Saint-Jean – Coll. com. : Baptêmes 1637-1643 », Acte de baptême de Louis de Portes fils de noble Pierre de Portes, 9NUM/AC185/22, sur archivesenligne.archives-isere.fr (consulté le ), p. 363.
  9. Borel 1846, p. 19.
  10. Archives de l'Isère, « État civil – Grenoble Saint-Hugues et Saint-Jean – Coll. com. : Sépultures 1650-1667 », Acte de sépulture de noble Pierre de Portes, 9NUM/AC185/35, sur archivesenligne.archives-isere.fr (consulté le ), p. 31.
  11. Correspondance de Pierre Bayle : janvier 1699 –décembre 1702. Lettres 1406-1590, t. XII, Oxford, Voltaire Foundation, (ISBN 9780729410281, lire en ligne [PDF]), p. 186 (Lettre 1477).
  12. Fonvieille 1975, p. 85-88.
  13. Fonvieille 1975, p. 89-92.
  14. Correspondance de Pierre Bayle : janvier 1699 –décembre 1702. Lettres 1406-1590, t. XII, Oxford, Voltaire Foundation, (ISBN 9780729410281, lire en ligne [PDF]), p. 195 (Lettre 1481).
  15. Fonvieille 1975, p. 94-97.
  16. (pl) Zygmunt Wdowiszewski, Genealogia Jagiellonów i Domu Wazów w Polsce [« Généalogie de la dynastie Jagellon et de la maison Vasa en Pologne »], Kraków, Avalon, (ISBN 9788391849729, OCLC 69468579).
  17. Fonvieille 1975, p. 97-99.
  18. Fonvieille 1975, p. 101.
  19. Jean-François Bayard et Paul Duport, « Marie Mignot », Pièce de Théâtre (Livret (1838)), sur gallica.bnf.fr, (consulté le ).

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article. Son parcours de vie a fait l'objet de nombreux ouvrages :

Articles connexes modifier

Liens externes modifier