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Woww 24 oct 2004 à 21:28 (CEST)

Salut,

Il y a cette ébauche qui traine depuis un moment et que tu es invité à développer si tu es sensibilisé au problème. Il n'y a pas lieu d'évoquer ces incidents dans l'article Politique de l'Inde car celui-ci est un article sur l'organisation institutionnelle de la république indienne en revanche l'article Violences au Gujarat en 2002 est dans la catégorie catégorie:Politique de l'Inde - où tu peux le retrouver - qui collecte les articles qui concernent la politique de l'Inde dans le sens large.

En fait, il devait être lié aux articles sur l'Hindutva et le BJP, ce que je viens de faire à l'instant.

Ceci étant dit, je te rappelle que WP est un work in progress et une encyclopédie coopérative et que tu serais le bienvenue pour développer ou entamer les articles Violences au Gujarat en 2002 et Conflits inter-communautaires en Inde qui seraient d'un grand intérêt.

Cordialement

Shiva-Nataraja 25 mar 2005 à 14:38 (CET)

Comme tu sembles t'intéresser à ce domaine, tu devrais peut-être t'inscrire comme participants sur le portail. Cela n'a rien de contraignant, cela permet par contre d'éventuellement se contacter en cas de nécessité.

J'ai vu aussi que tu avais ajouté Hirapur, l'Hirapur du temple des Yoginis en Orissa je suppose, il y en a d'autres je crois en Inde, au Madhya Pradesh sauf erreur au moins. Y es-tu allé ? Parce qu'il n'y a là-bas qu'un petit village, j'y étais en janvier 2001 et autant le temple est remarquable et mérite un article que je ferais un jour, si tu es tenté à le commencer, j'en serais très heureux, autant le village ne me semble pas mériter un article comme le laisse supposer ton ajout dans la liste des villes de l'Inde, en tous cas bien moins que nombre de villages que j'ai visité en Inde, en tous cas en comparaison des villages Bishnois par exemple qui ont une vrai identité culturelle.

Au cas où tu ne connaîtrais pas, deux liens externes incontournables sur l'excellent site de la Fondation Berger et qu'il faudra mettre dans l'article :

J'ai quelques photos persos qui pourraient servir d'illustrations.

Bonne continuation. Shiva-Nataraja 19 avr 2005 à 13:30 (CEST)

des photos des temples de Bhubaneshwar (il manque terriblement d'un article sur la ville des temples) et des grottes d'Udaigiri, ce serait formidable. Il faudrait plus de photos du Temple de Sûrya (Konârak), j'en ai mis quelques-unes, mais lorsque j'y étais la lumière n'était plus très bonne (je pense en particulier aux tirants de fer et aux statues d'éléphants que je n'ai pas photographiés et qui feront écho à l'article sur le pilier de fer de Delhi, à quelques érotiques pour illustrer un article Maithuna, etc...) Si d'autres idées me viennent je les ajouterai ici. Shiva-Nataraja 19 avr 2005 à 15:18 (CEST)

Avertissement renommage modifier

Bonjour, tu es inscrit(e) dans le Wikipédia:Projet, Monde indien ; afin de donner une cohérence aux noms, nous allons prochainement procéder aux renommages, le projet sera désormais titré ainsi : Projet:Monde indien. Ta liste de suivi sera automatiquement mise à jour.

Attention : nous allons aussi renommer les sous-pages, mais n'hésite pas à vérifier qu'aucune sous-page n'a été oubliée. Si c'était le cas, tu peux me le signaler ou procéder au renommage par toi-même.

Plus de détails sur cette page.

Cordialement,le Korrigan bla 23 octobre 2005 à 21:16 (CEST)Répondre

A propos du soutien de JPII à Pinochet modifier

Salut, j'ai lu les liens que tu m'as cité à ce sujet (et dont l'un n'a aucun rapport), et ils sont très vagues, voire interprétatifs. Aurais-tu le texte original de la déclaration? Werewindle 10 avril 2006 à 09:12 (CEST)Répondre

Une petite recherche sur google m'a mené ici, où il semblerait que son intervention aie été alignée sur celle du gouvernement chilien, à savoir que les crimes commis au Chili devaient être jugés au Chili. Il me semble qu'il vaut toujours mieux se baser sur les textes originaux que sur les interprétations... Werewindle 10 avril 2006 à 09:26 (CEST)Répondre

Projet:Monde indien modifier

Bonjour, Je contribue à l'article yoga et des bandeaux d'évaluation s'ajoutent sur la page de discussion… 1 - Pourrait-on savoir qui évalue 2 - et ce qui pourrait être fait de façon utile ?
Merci. Amicalement. Joseph.R 3 septembre 2007 à 13:44 (CEST)répondre Répondre

Franchement, je n'ai pas tout à fait saisi de ce concept. Il y existe des pages de discussions (a priori tout le monde peut y participer) afin d'évaluer l'etat d'avancement d'un article ou son importance (je ne vois pas l'intérêt d'ailleurs). Cela fait d'ailleur plus ou moins doublon avec la notion d'article de qualité... Petit 1à septembre 2007 à 11h19

à lire... en entier. modifier

Le modèle hindou, Guy Deleury, civilisation et société, éditions Kailash

Il y a quatre varna dans l'hindouisme ; ces varna représentent l'homme dans la société (et non hors de la société), par ordre d'importance : le brâhmane (le clerc, l'enseignant), le Kshatriya (le roi/guerrier, chargé de protéger - de manière violente s'il le faut -, le brâhmane qui est non-violent), le Vaïshya (le commerçant, l'artisan et le paysan), et le Shoudra (le serviteur) ; néanmoins, l'être humain qui a le plus de poids, c'est celui qui voit hors de la société : l'ascète, le renonçant. Le Kshatriya a un position ambiguë : s'il oublie de protéger le brâhmane, ou pire, s'il persécute les brâhmanes par son appêtit de pouvoir, le brâhmane est en droit de se révolter et d'être violent pour se protéger et rétablir la non-violence comme forme suprême de la civilisation brâhmanique : c'est ce qu'illustre le mythe de Parashourama, avatar de Vishnou, qui extermine la varna des Kshatrya car un roi avait tué son père ; si un Kshatriya est violent pour défendre la violence (et non l'ahimsâ brâhmanique), ce Kshatriya doit être abattu sans remord, serait-ce par un brâhmane qui a pourtant le devoir d'être non-violent ; mais sa non-violence s'arrête si la hiérarchie des valeurs ne considère plus la non-violence - l'ahimsâ - comme la première des vertu.

Car c'est bien vers l'ascèse que tend cette réalisation des varna : à mesure que l'on s'élève du shoudra au brâhmane, on rencontre une qualité d'homme qui dispose de possibilités supérieures d'ascèse et donc de Libération. Le brâhmane est au sommet de la hiérarchie sociale (tout en devant vivre avec le strict nécessaire), mais lui-même est prisonnier de tous les actes qui l'attachent au monde du malheur : pour s'en délivrer il doit renoncer au monde et basculer vers celui de l'ascèse dont il aura à parcourir les degrés. Aussi se trouve-t-il au point de jonction et de rupture entre deux univers antinomiques, celui du dharma, c'est-à-dire des fonctions sociales, et celui du moksha, c'est-à-dire de la Libération. Les échelons des fonctions socioreligieuses font accéder aux paliers de l'ascension ascétique, et l'on comprend mieux ainsi l'unité du système des quatre varna.

La théorie des varnas est née d'une conception profondément pessimiste de la société humaine considérée comme un lieu de souffrance et de malheur, mais ce pessimisme est pourtant positif. C'est la vision d'un "brâhmane" qui a renoncé au monde (n'étant plus par conséquent "bramhmane") et qui le regarde impitoyablement de l'autre côté du point de non-retour ; la société telle quelle apparaît est un enfer ; le système des varna n'est pas ressenti comme un bien ou un idéal par les hindous ; pour le shoudra comme pour le brâhmane, le monde dans la société est un enfer qui grâce à ce système prend un sens.

Il ne faudrait pas croire, comme le font explicitement ou implicitement tant d'Occidentaux, que le système des quatre varna ait jamais recouvert une réalité sociologique. Autrement dit, il n'y a jamais eu en Inde une société organisée en quatre "castes". La seule qui ait jamais existé, à la limite, est celle des brâhmanes. La fonction du système des varna était, semble-t-il tout autre.

Il s'agissait d'abord d'introduire dans la société malheureuse de ses injustices une échelle de valeurs éthiques, de telle sorte que les rapports entre les groupes humains existants ne soient pas des rapports de domination mais de participation à l'oeuvre globale de la Libératiion de l'Homme. le système des varnas proposait à tous un idéal en fonction duquel chaque groupe devait se situer et que la BhagavadGuîta décrit ainsi :

"L'intrépidité, l'intégrité, la fermeté à acquérir, la science, la générosité, la maîtrise de soi, la pitié, l'humilité, l'ascèse et la droiture, la non-violence, la véracité, la patience, le renoncement, la sérénité et la sincérité, la bonté pour tous les êtres, le désintéressement, la tendresse, la pudeur et la tranquilité, l'énergie, l'endurance, la volonté, la pureté, l'indulgence et la modestie, tels sont les traits de l'homme en marche vers le divin."

C'est évidemment le portrait du brâhmane idéal. Mais que l'on y regarde de plus près : ce qui est proposé à l'émulation et au respect de tous, c'est un ensemble de valeurs précises et qui vont à contre-courant non seulement des mentalités indiennes de ce temps là (IVè-I siècle av JC), mais de toute société concrète humaine ; la pauvreté et non la richesse, la non-violence et non la violence, l'ouverture à tous et non le chauvinisme, etc. Une de ses qualités, pourtant, va vicier tout le système en étant pervertie dans son interprétation : la pureté ; interprétée comme pureté légale et non plus comme pureté du coeur, elle va empoisonner les rapports entre les groupes et justifier l'intouchabilité.

Le DR Ambedkar, né d'une famille intouchable, ignoré de l'Occident, fut sans doute l'un des plus grands hommes de l'Inde : grâce à lui, trois millions d'hommes ont recouvré la dignité humaine. Il avait fort bien diagnostiqué les causes du mal dont sa jâti avait été, pendant des siècles, la victime. Le Dr Ambedkar, bien que converti au bouddhisme, resta profondément hindou, car ce qu'il chercha d'abord, c'était de donner à sa jâti une place honorable dans l'échelle varnique. Les Mahâr (intouchables du Maharastra, et qui ont sans doute donné leur nom à cette zone liguistique, étant donné qu'un Shoudra "devenu" Kshatriya/roi fut le premier hindou à battre l'armée moghole) devenus bouddhistes ne se contentèrent pas de lutter par la grève et l'agitation pour la reconnaissance de leurs droits, ils entreprirent de changer leur style de vie : encourager leurs enfants à aller à l'école et dans les universités, demander aux familles d'observer une plus grande propreté corporelle et domestique, refuser de manger les cadavres de bêtes abandonnées, cesser de se nourrir de boeuf et tendre vers le végétarisme. Toutes ces décisions, prises en groupe, relèvent moins d'une idéologie politique que de ce phénomène très général de brâhmanisation qui n'est pas l'un des aspects les moins étonnants du régime des jâti.

COMMENT ON S'ELEVE SOCIALEMENT EN INDE ?

La spécificité de ce phénomène, qui, dans le cas des Mahâr devenus bouddhistes est en train de réussir, reçoit une contre-confirmation de la petite minorité des Mahâr non convertis. Quelques milliers d'entre eux avaient été, dans les années qui précèdent le mouvement déclenché par le Dr Ambedkar, touchés par l'action évangilisatrice de plusieurs missionnaires chrétiens. Au prix d'un travail long et difficile, ils avaient réussi à créer un certain nombre de communautés mahârs chrétiennes. Mais leur méconnaissance de la réalité sociale indienne fut fatale pour les nouveaux convertis.

La société indienne accepte, en effet, avec réticence certes, mais elle accepte finalement qu'une jâti change de religion, à condition d'une part que la décision vienne de la jâti dans son ensemble et implique une transformation de la vie, et que, d'autre part, elle se produise dans la lignée de la brâhmanisation. Or les missionnaires chrétiens étaient étrangers pour la plupart et non-Indiens : même si la décision de se convertir avait été prise par une famille ou un groupe de familles, ce n'était pas la décision de la jâti dans son ensemble, et l'appel à la conversion était extérieur. De plus, sitôt convertis, les Mahâr étaient la plupart du temps retirés du village et installés dans des compound confessionnels - retour anachronique aux anciennes réserves du Paraguay. D'intouchables (l'expression est occidentale) qu'ils avaient été, ils étaient devenus étrangers : leur situation était devenue sans avenir dans une Inde qui avait acquis entre-temps son indépendance.

Le phénomène de brâhmanisation, fort ancien et fort répandu, qui permet à une jâti toute entière de s'élever dans l'échelle varnique, ne fut cependant découvert par les indianistes que fort récemment, ce qui explique qu'ils aient tant insisté sur la fixité du régime. Il fallut qu'un Indien se spécialise en sociologie pour que le phénomène soit mis en lumière : il semble que le professeur Srinivas ait été le premier à utiliser le terme de brâhmanisation dans sa célèbre étude sur la religion des Corugs (1952) qui fit date dans l'histoire de la sociologie indienne. On peut énoncer la loi suivante : chaque fois qu'une jâti améliore sa situation économique, elle cherche à acquérir une considération plus grande et donc à s'élever dans l'échelle varnique. Pour opérer cette montée, la jâti doit consentir à certains modes de vie dans trois domaines principaux :

A)tendre vers une nourriture plus végétarienne ; B)adopter les coutumes brâhmaniques du mariage ; C)éviter les actes réputés impurs et s'adonner aux études.

La danse classique indienne fait appel à une symbolique pour représenter le régime des jâti. Deux des termes technniques utilisés par la danseuse sont les deux mots clés de jâti et de varna, où jâti se situe au moment de la mise en train d'un mouvement qui ne prendra son sens qu'avec la danse enfin parfaite du varna. Ainsi nous apparaît le modèle hindou de société ; au niveau des jâti multiples, comme les rayons de la roue du dharma, le mouvement s'enroule sur lui-même dans une giration circulaire et absurde. Mais tout prend son sens dans la tension de chaque rayon vers l'axe immobile, de chaque jâti vers la réalisation d'une varna unique, celle du brâhmane idéal et non tel qu'il est encore dans les jâti brâhmanes, celle de l'homme parfait, non-violent, libéré de l'ambition du pouvoir et du désir des richesses. C'est bien là le vieil idéal de l'Inde qu'elle tenta de faire passer maladroitement dans sa hiérarchisation des jâti, affirmant avec obstination que tant que son rêve n'est pas réalisé avec la brâhmanisation utopique de toutes les espèces d'hommes, la société doit les respecter toutes et en admettre les identités culturelles multiples, quitte à s'efforcer de les harmoniser dans un pluralisme bancal.

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On a souvent pensé que si l'Inde moderne se développait aussi lentement, la faute en était à la trop grande spiritualité de ses habitants ; pourtant, nulle part comme dans ce pays, l'argent et l'or n'ont été adorés avec moins de vergogne. Quand le commerçant offre des fleurs et de l'encens à ses livres de compte, c'est son compte en banque et son or qu'il adore, et c'est bien plutôt cette avidité matérielle déifiée du profit rapide qui aujourd'hui peut ralentir les progrès économiques du pays et la répartition des richesses : certainement pas le système des castes.

Voici un exemple remarquable et non moins précieux pour l'historien des religions : celui des Parsi. Ces Iraniens (Perses !) arrivèrent en Inde au VIIe ou au VIIIe siècle de notre ère, minuscule communauté de rescapés des grands massacres que les conquérants musulmans faisaient alors en Perse ; ils y sont toujours, à peine une centaine de mille, en tant que que jâti commerçante où ils sont à la tête de nombreuses banques et de puissants groupes industriels comme celui des Tata. Sans l'Inde et son système des jâti, la religion de Zarathoustra qui fut l'une des plus belles réussites religieuses du monde, ne serait pour nous qu'une momie de musée. Il est important pour le monde que la religion du grand poète prophète iranien n'ait pas été dévorée comme tant d'autres par nos civilisations cannibales.

En vérité, le nombre de ces graines sacrées, qui transplantées en terre indienne, continuent d'y fleurir, est immense. les musulmans sunnites y vénèrent leurs saints à côté des saints chiites, des derviches soufi, des prophètes wahhabite, des joailliers ismaéliens et des armuriers duodécimans - coexistence presque impossible dans les terres d'islam ! Et eux-mêmes voisinent dans les villes hindoues, avec toutes les dominations chrétiennes...

En vérité, le régime des jâti a fait de l'Inde une terre d'asile pour toutes les minorités persécutées du monde : ce n'est pas là, quand on considère le sanglant spectacle de notre histoire religieuse depuis un certain nombre de siècles, avec ses guerres de religion, ses massacres d'hérétiques et ses bûchers de sorcières, un mince mérite. L'histoire des religions (et des idéologies athées) nous confronte donc à cet état de fait : le système des castes fondé sur l'inégalité des hommes engendra infiniment moins de cruauté et de haine que des religions ou des doctrines fondés sur l'égalité, c'est-à-dire, le non-droit à la différence.

Car pour l'Indien, sa seule et vraie "patrie", c'est sa jâti, dont tôt ou tard, à mesure qu'il y grandit, il connaîtra tous les membres et qui sera derrière lui en cas de nécessité. Au prix donc d'une moindre liberté individuelle, le modèle indien a réussi à organiser et à faire vivre pendant plus de deux millénaires une société plus fraternelles que toutes celles qui furent inventées ailleurs : parce que fondée sur le pluralisme des fraternités. Et s'il fallait trouver une traduction au mot jâti, ce n'est pas celui de caste qu'il faudrait choisir, mais ceux de communautés ou de fraternités ; ce simple changement de terme ferait sans doute tomber bien des incompréhensions sur la nature vraie du "système des castes".

Mais les brâhmanes, en inventant le système des varna et la hiérarchie des valeurs qui l'accompagnent, avaient un objectif plus immédiat et plus concret : celui de protéger leur primauté toujours menacée par la société du profit qui existe depuis la fin de la préhistoire en Inde. Au pouvoir grandissant de la classe commerçante dont la richesse assurait la puissance économique et parfois la domination politique avec parfois le concours de troupes mercenaires, il fallait opposer un contre-pouvoir dont les brâhmanes seraient les animateurs. Or, une autre chose, sécrétée précisément par la nouvelle société mercantile, couvait : la contestation religieuse. Les brâhmanes s'efforcèrent d'en prendre la tête et il y réussirent mieux qu'un Jean-Paul Sartre en mai 1968, car ils n'hésitèrent pas à vivre les premiers selon un style de vie voulu comme le meilleur et le plus exemplaire au sein de la société. En particulier, ils étaient végétariens et se vouaient à une vie d'ascétisme, d'étude et de pauvreté. Partout ils créèrent des écoles philosophiques qui entreprirent un immense et courageux travail de réinterprétation fondamentale des textes et croyances précedentes ; c'est à ce travail que nous sommes redevables des plus beaux morceaux peut-être de la riche littérature sacrée de l'Inde, les Oupanishad. Quand ils institutionnalisèrent le système des varna, c'est en toute vérité qu'ils purent s'accorder la première place au sommet de la hiérarchie puisque les critères y étaient d'ordre spirituel et moral. Et du même coup, en déniant à la richesse une valeur éthique, ils interdisaient aux riches de prétendre constituer l'élite de la société. la classe des "prêtres" devenait ainsi la varna des lettrés incarnant toutes les valeurs de référence : austérité, non-violence, intégrité, pureté, etc.

Ainsi, l'institution "invisible" des quatre varna ne devait pas diviser la société en quatre classes sociales mais permettre une hiérarchisation des nombreuses jâti qui la composaient au niveau local. Elle servait de système de référence éthique à l'intérieur duquel chaque jâti pouvait conserver son identité culturelle, ses traditions diététiques et culinaires, sa forme de religion et ses rites domestiques, ses secrets professionnels. Elle permettait aussi, en raison même de ses caractères spécifiques, de se situer par rapport aux autres jâti et selon la proximité ou l'éloignement du modèle idéal représenté par les jâti de brâhmanes.

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Etonnant Malraux ! Il passa moins de temps en Inde et y alla plus rarement que beaucoup qui en rapportèrent de gros livres ; pourtant, le peu qu'il en dit dans son oeuvre va directement à l'essentiel que ceux-là souvent manquèrent : ils continuent de circuler dans les rues et les bidonvilles de Bombay ou de Calcutta, remplissant leurs caméras de photos émouvantes ou insoutenables ; et le soir, réfugiés dans leur chambre à air conditionné des hôtels quatre étoiles, ils écrivent des pages définitives sur les malheurs d'un continent évidemment ingouvernable. "Calcutta" de Louis Malle, "Bombay" de Jean-Emile Jeannesson, le même film toujours recommencé pour nourrir un peu plus la mauvaise conscience de l'Occident et justifier son mépris pour ce peuple qui préfère nourrir ses vaches plutôt que ses bébés !

Certes Calcutta et Bombay sont des chancres purulents, mais n'ont-ils pas proliféré à la suite d'accouplements monstrueux et infâmes ? Si ces grouillements continuent d'infecter le grand corps de l'Inde, c'est à sojn corps défendant qu'ils se sont formés sur ses flancs. L'Angleterre créa Calcutta du jute et de l'argent, Bombay, du coton et de l'argent ; c'est en suçant les plaies béantes le sang du géant humilié que les commerçants de Wall Street irriguèrent leur capitalisme naissant, nourrissant les usines de Manchester ou de Birmingham et permettre à la première démocratie parlementaire du monde de se créer. Plusieurs millions d'hommes et d'enfants y furent sacrifiés, plusieurs millions d'autres continuèrent à transmettre l'hérédité empoissonée. Comment peut-on encore se complaire à projeter sur les écrans des visions d'horreur, fut-ce comme alibi à des campagnes mondiales contre la faim dans le monde, sans même mentionner le nom des coupables de ces crimes contre l'humanité qu'aucun Nuremberg n'a jamais sanctionnés ?

Il fallait être un Malraux pour traverser l'hallucinant décor et accéder à la vérité du village. L'Inde refusa toujours d'inventer la ville ; celles qui aujourd'hui s'inscrivent sur son sol furent importées d'abord par les musulmans pour y loger leurs armées, la cour, leurs bureaux, leurs harems. Ils construisirent des greniers de marbre enluminés d'immortelles sourates pour y engranger leurs pillages. Les Anglais prirent leur succession et créèrent de nouvelles agglomérations pour y installer leurs entrepôts, leurs comptoirs, leurs banques et les palais néogothiques de leurs marchands qui creusèrent des ports et construisirent des kilomètres de quais, d'où le flot des matières premières produites à bas prix par un peuple d'exploités, une civilisation hindoue qui ne fit que survivre pour ne pas disparaître, - le village fut son principal allié.

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Durant toute sa vie politique, les villageois indiens reconnurent en Gandhi le saint non-violent de leur tradition, mais plus encore le sauveur de leur idéal villageois qu'il partageait, au grand scandale des technocrates en puissance de son parti et de ses biographes futurs. Oui, Gandhi était un ardent partisan du "système des castes" et c'est pour cela qu'il était déterminé à faire disparaître les pratique d'intouchabilité qui en souillaient le visage. Oui, il voulait redonner au village son rôle moteur et créateur dans la société indienne, et le protéger du capitalisme industriel. Et il pensa avec conviction que la démocratie permettrait au village indien de retrouver son prestige. Mais quelle démocratie ?

On a souvent dit, et les meilleurs observateurs s'y sont parfois trompés, que la constitution de l'Inde nouvelle avait supprimé le système des castes : ainsi Bettelheim écrivait en 1962 : "il est important de souligner que si le système des castes existe toujours en Inde dans les "faits", il n'existe plus légalement depuis la promulgation de la constitution". Et Jean Varenne reprenait, en 1974 : "A l'indépendance, le parlement indien a voté une constitution qui interdit formellement les castes : celles-ci subsistent dans la conscience religieuse de la majorité des Hindous". C'est une intéressante erreur d'interprétation car la constitution (écrite par un intouchable, le Dr Ambedkar) n'a jamais rien fait de tel. Tout ce qu'elle interdit ce sont quelques déviances notoirement injustes du système ; en particulier, l'"intouchabilité". Elle a en outre institué le mariage légal entre partenaires de castes (jâti) différentes (ce qui du point de vue religieux n'est guère perturbant, étant donné que la femme prend la varna de son mari lors du mariage, les jâti n'ayant pas de validité religieuse dans l'orthodoxie hindoue) ; ce qui revient à dire que deux personnes qui se voient refuser le mariage par le curé, en vertu d'un empêchement de caste, peuvent contracter une union légale devant monsieur le maire. Comment Nehrou - mauvais diciple de Gandhi mais disciple tout de même - et la constitution auraient-ils pu interdire le système des castes puisque Gandhi en était un partisan convaincu ?

Car si Gandhi apparaît non pas d'abord comme un héros de la résistance à l'Anglais ni même comme l'apôtre de la non-violence, mais comme un serviteur de l'idéal de l'ascète, revêtu de ce pouvoir proprement formidable qu'ont les saddhous (ascètes itinérants hindous).Chaque fois que Gandhi jeûnait, a-t-on dit, c'est l'Inde entière qui avait faim. Dans les mythes hindous, la simple malédictions de l'ascète entraîne des conséquences inéluctables qui atteignent même les dieux, fussent-ils les dieux des blancs. Quand Gandhi partait avec quelques disciples pour les plages de la mer d'Oman recueillir le sel laissé par évaporation des marées, l'Empire britannique tremblait sur ses bases. L'immense portée d'un geste aussi dérisoire tirait sa puissance de tout un peuple qui rejouait le mythe intemporel. Quand Gandhi décida de faire du rouet l'instrument de son ascèse, toute l'Inde se mit à filer, et l'équilibre économique de l'Empire vacilla. Or Gandhi n'était pas brâhmane ; il appartenait à une des jâti de commerçants dont la religion était à la fois la bhakti (dévotion) des jâti artisanes et la croyance magique à l'unité des lois cosmiques. Quand Gandhi priait, c'est le nom de Râm qui tout naturellement lui venait à l'esprit, et il entrait lui-même, aux yeux d'un peuple immense et sans espoir, dans le mouvement de l'avatâr qui descend sur Terre pour sauver les désespérés ; comme Râm ou comme Vithobâ, il apparaissait comme anâth-nâth, le seigneur des sans-seigneur. Sa lutte s'identifia à celle des exploités, ces intouchables à qui il redonna, avec le beau nom de Harijan (fils de Hari-Vishnou), la dignité humaine, ces travailleurs agricoles, ces sans-terre qui n'avaient découvert comme instrument de survie qu'une natalité galopante. Gandhi, c'était le village réinvesti de sa dignité première contre la ville, le khadi contre le tissu industriel, le paysan contre l'argent.

Le Congrès que recréa et inspira Gandhi ne fut jamais pour lui un parti politique au sens strict, occidental, du terme : il ne visait pas la prise du pouvoir ni la constitution d'un contre-pouvoir d'opposition. C'était une énorme entreprise de réanimation du corps social indien qu'un siècle d'occupation angaise avait castré. Quiconque, à quelque jâti qu'il appartienne, quelles que soient sa religion ou ses options politiques personnelles, dès lors qu'il était prêt à participer à cette entreprise de prise de conscience du peuple indien selon les techniques de désobéissance civiles non-violentes, était le bienvenu dans ce rassemblement difficilement concevable pour un Occidental, - surtout de l'époque. Le non-désir de maltraiter, le jeûne, le désir d'équanimité devant la menace d'incarcération, sont bien des vertus qui relèvent directement de l'arsenal des niyâma de tous les yogas. Elles visaient à accumuler chez le militant et dans le peuple une puissance (shakti) qui seule obtiendrait, en la justifiant moralement, la libération intérieure et extérieure. On peut certes penser que si l'Anglais fut forcer de quitter l'Inde, ce fut plus l'effet de la conjecture (économie exténuée par la guerre nazie) que celui de l'efficacité politique des techniques non-violentes. Mais ce serait se méprendre sur la pensée de Gandhi : le départ des occupants n'était pas son objectif premier, s'il arriva qu'il devint, même pour lui, une tentation. Ce qu'il voulait, c'est que chacun , en Inde, retrouve d'abord sa dignité, sa foi, son courage personnel indomptable ; le pays deviendrait alors ingouvernable pour un pouvoir qui ne s'appuyait que sur la résignation passive de ses sujets : la libération du territoire viendrait comme un fruit mûr. En fait, le fruit tomba avant d'avoir mûri, et il était déjà pourri.

Car l'Inde, aux yeux de l'Empire britannique, était devenue une mauvaise affaire, qu'il fallait liquider au plus vite : Lord Mountbatten en fut chargé. Contrairement à l'image aberrante que Lapierre et Collins ont dessiné de lui, ce marin aristocrate, excellent sans doute dans les salons et sur le pont de son navire de luxe, n'avait pas la tête politique d'un homme d'Etat que lui prêtent si gracieusement ses deux apologistes ; ce n'est pas non plus un machiavel, comme l'en soupçonnèrent plusieurs historiens indiens. il avait un certain charme, et malgré sa totale ignorance des problèmes indiens, une immense confiance en lui-même. On lui demandait de brader l'Empire parce que, arrière-petit-fils de la reine Victoria, sacrée première impératrice "des Indes" pendant que le peuple indien vivait la plus terrible famine qu'il n'ait jamais connu dans sa longue histoire, le prestige de son nom adoucirait l'amertume de sa tâche aux yeux du peuple britannique. Il braderait donc, au meilleur prix, et au plus vite.

Et peu d'hommes ont joué dans l'histoire un rôle si néfaste et avec tant de grâce. Intoxiqué par la cautèle de Mohammed Ali Jinnah qui se présenta à lui comme le porte-parole de tous les musulmans de l'Inde, Mountbatten réussit à persuader les leaders du Congrès et Nehrou lui-même de consentir à la "vivisection" de leur pays en deux Indes, l'une indienne, l'autre officiellement islamique, pour prix d'une rapide indépendance. Gandhi, isolé, résista jusqu'au 4 juin 1947. Finalement, la mort dans l'âme, il donna son placet (ce qui fut une grave erreur) et se retira de la vie politique. Il connaissait son peuple et savait que la précipitation incroyable avec laquelle cette décision avait été prise, et l'incertitude des frontières entre les deux Indes, soigneusement entretenue par le Lord bradeur jusqu'à la dernière minute de la signature de l'accord, provoqueraient une immense panique et sans doute des massacres. Il parti à l'Est, au Bengale, pour y parer, et il réussit, mais pendant ce temps là, à l'Ouest, le Penjâb s'enflammait ; et les massacres entre Musulmans et Indous prirent fin, finalement, grâce à Gandhi, qui du Bengale s'était précipité au Penjâb pour y conjurer la haine religieuse qui naquit de ce chaos politique : et le descendant de la reine Victoria ajouta au nombreux millions de victimes que la domination anglaise avait coûtés à l'Inde, un nouveau millions de cadavres comme prix de son départ.

L'ironie du sort veut qu'avant l'indépendance, ni le peuple du Bengale ni ceux des autres régions du Pakistan n'avaient été consultés pour savoir s'ils voulaient vraiment l'indépendance dans un pays strictement islamique. Les leaders musulmans qui militèrent pour la création du Pakistan étaient tous originaires d'autres régions que celles qui allaient former le Pakistan oriental (futur Bengladesh) et occidental. En fait, c'étaient les militants de Bombay qui avaient réussi à imposer leur ambition au Lord Moutbatten. Autre ironie du sort : au Pakistan, le régime présidentiel de Jinnah ne survécut pas à sa mort ; dès 1958, comme dans tant d'autres pays du tiers-monde "décolonisés", le pouvoir passa au main des militaires. Et quand enfin, en 1970, vingt-trois ans après l'indépendance, le Bengale put faire entendre sa voix, à la quasi-unanimité il refusa le Pakistan. Malgré le massacre de plus d'un million de Bengalis, le Bengale résista et devint le Bengla-Desh : dix millions d'hommes se réfugièrent en Inde pour échapper au carnage des militaires pakistanais. La perte de sa province orientale, la plus peuplée de l'Etat, porta un premier coup à la crédibilité de l'existence du Pakistan. Et que reste-t-il, aujourd'hui, de la crédibilité du Pakistan ?

Mais après Gandhi, vint Nehrou, le nouveu premier ministre de l'Inde indépendante, qui n'avait jamais été gandhien. Il avait suivi Gandhi envers et contre tout, et contre lui d'abord. Il avait souri au rouet, s'était inquiété avec une certaine irritation à chaque nouveau jeûne. Gandhi était l'homme de l'expérience et du bon sens villageois ; Nehrou resta toujours le citadin, attentif à l'idée efficace d'un point de vue "britannique", bref, un brâhmane qui ne l'était plus que par ses origines.

C'est la science des brâhmanes qui avait jadis conçu et créé le village hindou ; les villageois acceptaient leur valeur et leur suprématie parce que, même s'ils revendiquaient le premier rang, ils n'en étaient pas moins des leurs, et leur vie simple authentifiait leurs prétentions. En 1947, de nombreux brâhmanes vivaient toujours au village où ils remplissaient, dans la pauvreté qui était leur privilège au regard de leur savoir, leur fonction traditionnelle. Mais certains avaient succombé à la tentation de l'argent et rejoint les nouvelles classes d'usuriers, tandis que beaucoup d'autres peuplaient la bureaucratie anglaise, la nouvelle Université, l'encadrement de la nouvelle industrie. Les Nehrou appartenaient à cette classe de "brâhmanes" anglais dont les lectures sacrées n'étaient plus les Véda ou les Oupanishad, mais les grands auteurs du libéralisme et du travaillisme britanniques. Et, pendant 17 ans, Nehrou va s'acharner à reproduire en Inde le modèle idéal qu'il avait appris de ses maîtres d'Oxford : l'Inde devait devenir une démocratie parlementaire à tendance planificatrice et à optique socialiste. Mais ce père autoritaire ne put obtenir de ses quatre cents millions d'enfants qu'une apparence de jeu démocratique dont toutes les règles étaient détournées de leur propos. L'antique système des jâti y trouva du reste son compte et y puisa un nouveau dynamisme, car jamais, depuis des siècles et des siècles, le système des castes n'a été aussi présents en Inde, et ce, paradoxalement, par l'injonction du parlementarisme dans le modèle indien ; néanmoins, le système des jâti n'étant plus accompagné de système des varna (il l'est encore, mais de manière officieuse... et salutaire), qui fait tendre vers un idéal d'harmonie et de non-violence, il n'est plus qu'une vénération du gain financier par ceux qui pourront et voudront posséder et amasser un maximum : l'opposé par excellence de l'idéal brâhmanique du renoncement !

En effet, jusque là, le lieu privilégié du système des jâti avait été le village ; désormais, grâce au jeu démocratique parlementaire où chaque caste - s'identifiant à tel ou tel parti politique (pour peu que la parti obtienne la clientèle d'une jâti pendant une assez longue période ; l'idéologie politique au sens occidental du terme est inexistante en Inde) - joue un rôle politique (indissociable d'un rôle économique), son champ d'action s'étend sur toute une région, parfois sur tout un Etat : grâce à ses luttes, une jâti tout entière, sur la totalité du territoire qu'elle occupe, prend conscience des liens de solidarité qui unissent tous les membres entre eux. Cette réflexion désabusée montre à quel point les élections en Inde se jouent sur des rivalités de castes et non pas sur des options idéologiques. En fait, même la religion n'est pas un élément déterminant dans les choix politiques : les jâtis musulmanes votent régulièrement pour leur propre parti, la Ligue musulmane, mais cette dernière entre dans les coalitions les plus variées et les plus improbables ; ce phénomène confirme bien que la religion en Inde est une affaire de caste ; chaque jâti suit sa propre religion. Quand elle doit agir en tant que groupe, c'est toujours l'intérêt de la jâti qui détermine son choix. LIndien ne vote pas pour une idéologie, mais selon le choix de sa jâti sur laquelle lui et sa famille pourront toujours compter, non pas dans les rapports d'amitiés qui leur sont personnels et intimes, mais au niveau du tissu social, professionnel.

Une autre conséquence néfaste (après la course vertigineuse du gain) de la démocratie parlementaire fut de développer dans des communautés minoritaires un très nouveau sentiment de frustation, qui existe en Occident par ailleurs. Tant que le village indien avait fonctionné selon la répartition des pouvoirs par les jâti, les jâti minoritaires étaient intégrées au système global et relativement protégées soit de l'exploitation des jâti dominantes, soit de l'arbitraire de l'Etat. Mais dans la nouvelle répartition des pouvoirs, les minorités sont devenus totalement impuissantes vis-à-vis du pouvoir où elles ne peuvent jamais avoir de représentants : d'où une nouvelle maladie de la vie sociale indienne pour laquelle on inventa un nouveau nom, celui de "communalisme". Pour compenser leur impuissance, les petites jâti vont s'efforcer de créer des contre-pouvoirs nébuleux qui s'exprimeront de multiples façons.

La plus dramatique sera l'émeute religieuse. Nous avons signalé que chaque jâti avait droit à se religion propre : les hasards de l'histoire ont ainsi fait adopter par certaines d'entre elles des religions de type occidental, donc traditionnellement intolérantes, comme l'islam ou le christianisme. Or, sauf quelques exceptions, ces jâtis sont numériquement faibles. Totalement invisibles du fait du scrutin majoritaire. Au cours des années et des élections, plus ces jâtis étaient marginalisées, plus les émeutes inter-religieuses devenaient fréquentes et meurtrières. Plus politiséees, plus nombreuses aussi, ce furent les jâti musulmanes qui furent le plus souvent les auteurs et les victimes de ces désordres tragiques. Quand à la communauté chrétienne, ainsi mise sur la touche des compétitions politiques, elle se replia sur elle-même et se renferma dans ses ghettos volontaires, où elle trouva une certaine délectation morose à cultiver ses différences en se réfugiant dans un occidentalisme affecté et mal dirigé (car mal interprété), compensant sa marginalisation en dansant sur des musiques pop et en proclamanant sa fierté de consommer de la viande de boeuf, - symbole tonitruant de non-hindouïté. La démocratie développa en vingt-cinq ans ce que deux mille ans de système de castes avaient épargné à l'Inde (si on ne tient pas compte de l'oppression moghole, centralisée) : les mini-guerres de religion.

N'était-ce pas là que le résultat d'un mauvais fonctionnement du régime parlementaire ? On pourrait au contraire se demander si ce n'est pas un de ses vices congénitaux, car il semble bien qu'aucune démocratie occidentale n'a réussi à résoudre le problème de ses minorités condamnés au silence par l'intolérance de la majorité.

Néanmoins, on doit reconnaître que l'Inde est un des rares (pour ne pas dire le seul) des ex-pays colonisés qui n'ait pas sombré dans un quelconque régime militaire ou une guerre civile généralisée synonyme de génocide ; mais n'est-ce-pas, parce qu'au fond, cette nouvelle force d'intégration et d'unité n'est rien d'autre que le très ancien dynamisme du système des jâti, profondément rénové puisque désormais les jâti intouchables sont devenus des partenaires à part entière de la société des jâti. Gandhi rêvait du "panchâyat raj" (royaume du conseil des castes), non d'une démocratie parlementaire.

Mais, accedant à l'Indépendance, l'Inde, ou plutôt "l'Union Indienne" devait être, selon la nouvelle constitution, une confédération d'Etats et de territoires, dont les frontières respectives reconduisaient purement et simplement celles qu'avaient tracées, au hasard des conquêtes, l'administration britannique, une fois accomplie l'intégration de la poussière de principautés princières dont l'occupant anglais avait assuré la survie anachronique. La disparition de ces Etats d'opérette fut menée tambour battant par Vallabhai Patel, le leader de la droite nationaliste au Congrès. qui mourut bientôt, laissant Nehrou la totalité du pouvoir réel.

Or Nehrou ne voulait pas rétablir les anciennes frontières intérieures qui morcelaient les ethnies, craignant que celles-ci, rassemblées en Etats linguistiquement cohérents, ne prennent trop d'autonomie par rapport au pouvoir central. Mais Nehrou continuait à penser toujours selon l'éducation qu'il reçut, en indo-britannique agnostique qu'il était, oubliant que pour la majorité des Indiens, en particulier Hindous, leur immense pays tient son unité par les mythes et les ascètes qui la parcourent, les multiples villes saintes qui l'honorent. en Afrique, les nouveaux chefs d'Etat des anciennes colonies libérées réagiront de même ; les frontières, tracées par les Empires européens dans la chair de la terre africaine étaient elles aussi absolument arbitraires, brisant les unités de peuples au gré des opérations militaires et des intérêts commerciaux des métropoles ; il était tellement plus facile de jouer des antagonismes tribaux que d'affronter une socité homogène. Et sans doute est-ce la crainte d'une possible balkanisation de l'Inde qui inspira à Nehrou sa décision. Toujours est-il qu'il refusa avec obstination de redessiner la carte du continent indien.

L'Inde profonde, elle, voulait retrouver son identité, et cela passait par un retour aux frontières linguistiques qui étaient aussi celles des systèmes des jâti et des traditions culturelles. L'indépendance avait provoqué presque immédiatement une renaissance explosive des langues maternelles que les Anglais appelaient vernaculaires et qu'ils avaient fort négligées en voulant imposer la leur. Bien que moins de 2% de la polpulation le parlât, l'anglais était la langue officielle de l'administration, de la justice, de l'Université. Or chacune des treize langues avait, déjà avant la conquête britannique, un riche passé littéraire : la première encyclopédie au monde fut composée en Inde, en Kannada, une langue du Sud-Ouest du sous-continent. Chaque Indien attendait donc du gouvernement de son Etat qu'il s'exprimât enfin dans la langue de ses poètes et de ses saints.

L'opposition à la politique de Nehrou se déclencha dans le territoire où l'on parlait le télougou et qui avait été dépecé par l'administration britannique. Un des grands leaders régionaux, Potti Sriramoulou, en disciple conséquent de Gandhi, entreprit, en 1952, une grève de la faim. Nehrou refusa de céder, et l'homme mourut. La nation, entière, frémit, et Nehrou dut s'incliner. Cette première concession déclencha un processus irrésistible ; en quelques années, tous les autres Etats retrouvaient leurs frontières linguistiques. Désormais, la carte politique correspondait enfin à la carte culturelle ; l'Union n'en fut pas affectée, mais bien au contraire renforcée. Le "brâhmane" anglais s'était trompé de continent, sa fille, Indira Gandhi, en fit autant ; cela n'a pas empêché à la civilisation indienne de continuer d'exister.

Finalisation du compte global modifier

Bonjour,

Le compte global est en cours de finalisation, tous les bureaucrates perdent le droit de renommage local d'ici le 15 septembre et les comptes en conflit devraient être renommés d'ici fin 2014 - début 2015. Pour permettre au processus de se dérouler dans les meilleures conditions, aussi bien sur la wikipédia francophone que sur les autres projets de la WMF, il serait judicieux d'unifier vos comptes et de vérifier que tous vos comptes sont bien rattachés à un compte global, en cliquant sur Spécial:Fusionner le compte.

Pour des détails sur le processus de finalisation de l'identifiant unique, vous pouvez consulter Aide:Identifiant unique/Finalisation. Cordialement, Esprit Fugace (discuter) 7 septembre 2014 à 21:24 (CEST)Répondre