Emesal

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L'émesal ou ême-sal (en sumérien : 𒅴𒊩 EME.SAL) est l'une des deux variétés (ou sociolectes) connues du sumérien avec l'émegir et qui était utilisé exclusivement par des femmes, à l'exception des kalou, prêtres de sexe masculin mais qui néanmoins adoptaient des comportements féminins.

Le nom de cette variété, ême-sal, signifie littéralement « langue fine » ou « voix aiguë »[1], bien que souvent traduite par « la langue des femmes ». L'émesal est utilisé exclusivement par des personnages féminins dans certains textes littéraires (cela peut être comparé aux langues féminines ou aux variétés linguistiques qui existent ou ont existé dans certaines cultures, comme chez les Tchouktches et les Garifuna).

L'émesal domine également dans certains types de chansons rituelles. Ses caractéristiques particulières sont pour la plupart phonologiques (par exemple /m/ remplace souvent /g/), mais également lexicales (par exemple « dame » se dit ga-ša-an plutôt que nin en émegir).

L'émesal est considéré comme le dialecte de départ du sumérien tandis que l'émegir est considéré comme le dialecte d'arrivée et la langue expliquante[2].

Spécificités modifier

Le vocabulaire émesal s'amorce par les noms de divinités et se termine par les noms d'esclaves[3],[4], principe qui se retrouve aussi en Égypte ancienne dans l'Onomasticon d'Amenemopet.

Tous les textes littéraires dans lesquels l'émesal était utilisé ont des contenus religieux ou sont associés à un contexte mythologique. L'émesal est aussi associé au discours des kalu, prêtres qui n'étaient pas des femmes mais des hommes, eunuques, qui devaient adopter des comportements féminins[5] et porter des tenues féminines. Thomsen explique : « The occurrence of Emesal in cult songs is thus explained as due to the fact that the kalu priests who recited these songs were eunuchs, and not being regarded as men, they had to use women's language. »[6],[5]

Il se pourrait que la prononciation de la forme standard eme.gir ait été tabou pour les femmes sumériennes[7].

Références modifier

  1. Rubio, 2007, p. 1369.
  2. BOULANGER, Jean-Claude (2000). « Quelques causes de l’apparition des dictionnaires bilingues. Un retour vers les civilisations lointaines », dans Approches contrastives en lexicographie bilingue, Paris, Honoré Champion éditeur, coll. « Bibliothèque de l’Inalf. Études de lexicologie, lexicographie et dictionnairique », no 2, p. 89-105. [article]
  3. Jean-Claude Boulanger, Les inventeurs de dictionnaires : de l'eduba des scribes mésopotamiens au scriptorium des moines médiévaux, University of Ottawa Press, , 545 p. (ISBN 978-2-7603-0548-9, lire en ligne)
  4. Goody 1979 : 174
  5. a et b (en) Harald Haarmann, Foundations of culture : knowledge-construction, belief systems and worldview in their dynamic interplay, Francfort-sur-le-Main, Peter Lang, , 311 p. (ISBN 978-3-631-56685-5, lire en ligne)
  6. Thomsen 1984 : 292
  7. (en) George L. Campbell et Gareth King, Compendium of the World's Languages, Routledge, , 1984 p. (ISBN 978-1-136-25845-9, lire en ligne)