Wikipédia:Lumière sur/Lies et passeries

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Stèle commémorant les 500 ans de l’accord du plan d'Arrem.
Stèle commémorant les 500 ans de l’accord du plan d'Arrem.

Les lies et passeries (/li e pasəʁi/) sont des accords conclus de vallée à vallée sur l’ensemble de la chaîne des Pyrénées. Elles sont établies entre communautés montagnardes du même versant ou vivant de part et d’autre de la frontière franco-espagnole.

Les premières conventions écrites connues datent du XIIe siècle. Avant la formation des deux royaumes français et espagnol et l’instauration d’une frontière militaire et politique, c’est-à-dire avant le début du XVIe siècle, les lies et passeries sont des accords qui assurent en premier lieu la paix entre communautés, puis la jouissance indivise des pâturages d’altitude. Ces conventions pastorales déterminent les limites de territoires ainsi que les conditions d’utilisation des ressources et de circulation des troupeaux. Elles définissent également un ensemble de règles de police et de justice, garantissant l’application d’un seul et même droit des personnes sur le territoire considéré et engageant la responsabilité et la solidarité de la vallée. Ces conventions sont régulièrement renouvelées.

À partir du XVIe siècle, les lies et passeries se transforment et s’adaptent pour résister aux atteintes extérieures mettant en péril la paix des communautés et leur indépendance économique et politique. Ainsi, de nouvelles clauses viennent garantir la liberté de commerce et la solidarité face aux exactions de troupes de brigands ou de miquelets. Plus tard, alors que les guerres entre la France et l’Espagne utilisent la frontière comme terrain de confrontation, les vallées s’emploient à défendre leur neutralité dans des conflits qui ne les concernent pas, ou à en limiter les conséquences. La guerre de Succession d’Espagne, entre autres conflits troublant la zone pyrénéenne, donne l’occasion aux montagnards de démontrer leur opiniâtreté à demeurer en dehors du conflit et à revitaliser les antiques accords qui leur avaient, jusque là, garanti un état de paix et un équilibre économique, malgré les ingérences centralisatrices des deux monarchies.

Les accords de lies et passeries sont toujours vivants. On en compte à la fin du XXe siècle une centaine dans les régions montagneuses de Navarre. De même, deux faceries perpétuelles ont été consacrées par le traité des limites de 1856, entre l’Espagne et la France. Ce traité des limites a donné une assise juridique aux lies et passeries transfrontalières ; il définit leur portée et donne un nouvel outil aux communautés frontalières, qui leur permet d’évoluer en établissant des relations privilégiées hors du cadre des activités pastorales. Des exemples récents montrent le dynamisme potentiel du cadre fixé par le traité. Les États, incluant la principauté d’Andorre, se sont donné la faculté d’intervenir directement dans les processus de rapprochement des communautés frontalières soit au sein de l’ancienne commission internationale des Pyrénées datant de 1875, ou de la plus récente communauté de travail des Pyrénées de 1983.