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Présentation des blasons dans une reconstitution de tournoi

L’héraldique est la science qui a pour objet l'étude des armoiries (ou armes) [1]. C'est aussi un champ d'expression artistique, un élément du droit médiéval et du droit d’Ancien Régime. Plus récemment, elle a été admise parmi les sciences auxiliaires de l'histoire au même titre que la sigillographie, la vexillologie, la phaléristique, la diplomatique...

L'héraldique s'est développée au Moyen Âge dans toute l'Europe comme un système cohérent d'identification non seulement des personnes, mais aussi en partie des lignées (les armoiries pouvant être transmises et différenciées par héritage) et des collectivités humaines, ce qui en fait un système emblématique unique en un temps où la reconnaissance et l'identification passaient rarement par l'écrit.

Les termes d'Héraldique, d'armoiries (ou armes), de blason, d'écu et de blasonnement paraissant à d'aucuns comme des termes peu ou prou synonymes, il est nécessaire de rappeler ici quelques définitions :

Quelques définitions modifier

 
Reproduction moderne d'un bouclier armorié (empereur, de la maison d'Autriche)

Les définitions ci-dessous sont précises, mais cette précision est loin de refléter l'usage réel, et reste donc très théorique. En pratique, les termes « blason », « armes », « écu »... sont souvent employés les uns pour les autres, aussi bien dans des ouvrages de vulgarisation, que dans les travaux d'auteurs faisant autorité. Toutefois, dans son Traité d'héraldique (1979), [[[Michel Pastoureau]] a nettement différencié ces termes, ce qui se reflète également par l'emploi de termes distincts dans d'autres langues (notamment l'anglais, l'allemand, l'italien) [2] :

  • Les mots armoiries et armes (mots toujours au pluriel) sont parfaitement synonymes [3] : en anglais : coat of arms ; en allemand : wappen). Elles sont des emblèmes peints sur un écu, qui doivent pouvoir être décrites dans la langue du blason, et qui désignent quelqu'un ou quelque chose. Elles ont le même rôle qu'une marque ou un logotype, ou un nom propre : elles sont la manière héraldique d'identifier, de représenter ou d'évoquer une personne, physique ou morale (maison ou famille, ville, corporation…). Les armes sont généralement considérées comme la propriété (intellectuelle) de cette personne, qui en est titulaire. C'est à tort qu'on veut parfois distinguer les « armes » des « armoiries », réduisant ces dernières à une simple représentation graphique ou gravée (comme sur un objet armorié par exemple). Les armoiries comprennent en outre l'ensemble de la panoplie formée par l'écu, qui désigne le sujet, et ses ornements extérieurs éventuels (support, couronne, collier d'ordre…), qui disent quelque chose sur ce sujet. Certains ornements extérieurs (cimiers, tenants) font partie des armes (et leur sont systématiquement associés), certains sont arbitraires ou fantaisistes (lambrequins, symboles allégoriques ou votifs), mais la plupart sont la représentation héraldique de titres, de charges ou de dignités : ils sont attribués officiellement, et peuvent varier suivant l'état du titulaire à un instant donné.
  • Le Blason est le système de description de tout ce qui est significatif dans des armoiries, et plus spécifiquement sur l'écu. C'est un ensemble de règles élaborées pour permettre la description (ou blasonnement) de ce qui figure sur l'écu d'armes. Ces règles touchent à la fois à l'emploi des couleurs (émaux et métaux) que des formes, des figures, et de leur placement sur l'écu.
  • Les * L’écu est l'élément central et principal des armoiries. C'est le support privilégié sur lequel sont représentées les armes. Il provient des boucliers utilisés à l'époque de l'apparition des armoiries. Cependant, dans un écu héraldique, plusieurs armes peuvent être représentées sur un même écu, sans nécessairement représenter une personne unique : ce peut être l'union de deux armes représentant un mariage, ou la superposition de nombreuses armes. On dit qu'elles sont composées. Un écu délimite donc graphiquement le sujet dont parle la composition, et est suffisant pour identifier des armes ou une alliance.

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  • Blasonner signifie décrire des armoiries. La correspondance entre un blasonnement et sa représentation est au centre de l'héraldique : la donnée écrite d'un blasonnement doit permettre de représenter correctement des armoiries, et la lecture correcte d'armoiries doit conduire à un blasonnement qui rend compte de tous ses traits significatifs. Deux représentations (ou armoiries) sont équivalentes si elles répondent au même blason, ce sont alors les mêmes armes (mais il peut y avoir plusieurs manières équivalentes de blasonner des armes).

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Racines historiques de l'héraldique modifier

Chevaliers, écuyers et batailles modifier

 
Des soldats Normands portant des boucliers pré-héraldiques sur la Tapisserie de Bayeux
Chevalier

L'usage des armoiries vient de l'évolution de l'équipement militaire entre le XIe siècle et le XIIe siècle, qui rend progressivement impossible de reconnaître le visage d'un chevalier. Le casque des chevaliers (qui figure encore dans les ornements extérieurs) enveloppait progressivement la face: le nez devient protégé par un nasal, la coiffe du haubert (qui protège la tête et le cou) tend à couvrir le bas du visage, puis le casque est fermé par une vantaille (grille), puis définitivement clos par un mézail (visière mobile). Pour se faire reconnaître dans les mêlées des batailles et des tournois, les chevaliers prennent alors l'habitude de peindre des figures distinctives sur leurs boucliers (meubles et pièces, ou figures géométriques).

Écuyer

L'écuyer est un gentilhomme qui accompagnait un chevalier et portait son écu. À partir du moment où l’écu porte des figures distinctives, l’écuyer qui porte l’écu peut représenter le chevalier, même en son absence. L'écuyer est probablement à l'origine de la représentation des tenants, dans les ornements extérieurs.

Tournois modifier

 
Scène de tournoi - Codex Manesse
Tournois et batailles

La raison d’être du chevalier est d'ordre militaire (miles) et c'est de livrer bataille. La bataille lui permet d'être prêt, de prouver sa valeur à travers ses faits d’armes. Les rançons prélevées sur les vaincus viennent augmenter ses biens matériels. Là encore, le besoin de reconnaissance visuel des participants se fait sentir, et les armoiries sont portées non seulement sur le bouclier, mais sur la tunique qui recouvre la cotte de maille, comme sur la robe du destrier.

Héraut modifier

 
Godefroy de Bouillon portant un tabard

Pour les grands seigneurs, le rôle de l’écuyer prend progressivement une dimension diplomatique, et se spécialise dans la fonction de héraut. Désarmés, sans valeur de rançon, ils bénéficient d'une immunité diplomatique avant la lettre, et peuvent se déplacer librement pour assurer leur mission, y compris dans les camps et pays ennemis. Ils sont par conséquent tenus à une impartialité et une discrétion strictes. L’activité des hérauts est régie par tout un code de droits et d'obligations.

Les hérauts d'armes portent une tunique, le tabar, qui les rend immédiatement identifiables. Elle est épaisse et descend jusqu'aux genoux, armoriée aux armes de leur seigneur devant, derrière, et sur les manches. C'est un vêtement qui indique que son porteur bénéficie des privilèges d'immunité des hérauts. Le tabar transforme le héraut en symbole vivant des armes et de l'honneur de son seigneur.

Au Moyen Âge, le héraut devient un officier public au service d'un prince ou d'un seigneur. Dans le déroulement de la guerre, il est chargé de porter les déclarations de guerre, les sommations. Pour les chevaliers qui participent à une mêlée (que ce soit bataille ou tournoi), il peut recevoir des testaments ou des dépôts sacrés, et il assure de dignes funérailles en cas de besoin. Son rôle s’étend finalement sur tout ce qui a trait à l'honneur : il reconnaît les armes nobles et surveille les blasons, il règle les cérémonies et les jeux et témoigne des actes de valeur.

Création de l’héraldique modifier

Dans les tournois et joutes, les hérauts annonçaient le chevalier en énonçant son blason, c’est-à-dire la description des figures couvrant son bouclier, avant de nommer son titulaire. Cette pratique est à l'origine de la langue héraldique, à l'origine naturelle et comprise de tout le public. C'est cette pratique qui fonde et stabilise l'héraldique.

  • D'une part, elle fixe le lien entre un titulaire et ses armes, ce qui impose comme première règle de ne pas prendre les armes portées par autrui.
  • D'autre part, elle implique l'équivalence héraldique entre la représentation graphique (armoriée) et la description orale (le blason), qui n'en retient que les éléments significatifs.

À partir du XIVe siècle, les hérauts sont devenus les spécialistes de l'héraldique, ou science des armoiries et blasons. Ils en codifient la composition et la description, en formulant notamment les règles du blason, voyagent et établissent des armoriaux pour peindre et retenir celles qu'ils rencontrent. Le juge d'armes est celui qui est établi pour juger des armoiries (et des titres de noblesse).

Représenter une identité

Les figures peintes sur l'écu, stabilisées et énoncées par des hérauts, donnent naissance à l'héraldique. L'héraldique est essentiellement la science des hérauts, et son origine ne peut se comprendre qu'à travers leur rôle.

Le premier élément à avoir été armorié, dans un but militaire, a donc été l'écu du chevalier. Puis ces éléments ont été repris sur tout son équipement, pour permettre de reconnaître le titulaire (sur la cotte d'armes) mais aussi le représenter (bannière) ou marquer sa propriété (caparaçons, housse ou flanchières des chevaux)…

Ce lien entre des armes et leur titulaire a ensuite été repris dans la composition des sceaux. Les armoiries sont ainsi devenues l'image de la personnalité juridique. La pratique des sceaux armoriés a étendu l'usage des armoiries à toutes les entités capables d'avoir un sceau. Cette pratique est encore vivante dans l'usage de chevalières armoriées, qui sont en principe destinées à servir de sceaux (c'est pourquoi elles sont gravées en creux).

L'héraldique dans la société modifier

Développement historique modifier

D'abord utilisées par les chefs de guerre qui les figurent sur leur bouclier (fin du XIe siècle), l'usage des armoiries s'étend progressivement aux chevaliers, puis à la noblesse adoubée ou non (XIIIe). À travers l'identification de la personne par les armoiries, notamment dans le sceau, l'usage s'étend aux femmes et prélats nobles (fin XIIe), et des prélats aux bourgeois, aux artisans et échevins, chapitres et corporations (début XIIIe), communautés urbaines (début XIIIe), communautés ecclésiastiques et ordres religieux (), seigneuries, fiefs, provinces, universités et administrations civiles. Les armoiries ne sont en rien un privilège de la noblesse, dans certaines régions comme la Normandie, les paysans en font parfois usage[4].

Par ailleurs, dès le XIVe siècle, des armoiries sont attribuées à des personnages ayant existé avant la création de l'héraldique voire à des personnages mythiques ou mythologiques[5]. Ces armoiries imaginaires relèvent de l'Héraldique imaginaire.

Devenues un signe d'identité sociale, les armes deviennent héréditaires, et désignent des maisons, c’est-à-dire des familles et des liens de parenté (XIVe), puis plus généralement des liens sociaux, ce qui amène progressivement à les composer de plus en plus.

Jusqu'au XVIe siècle, les figures employées sont principalement des figures animales (voir à ce chapitre), en nombre assez restreint (une quinzaine d'usage courant), ainsi que quelques meubles inanimés (souvent abstraits), et surtout des figures géométriques. Par la suite, le répertoire s'élargit aux objets, armes, parties du corps, bâtiments, …

Les temps des sceaux modifier

Les temps des armoriaux modifier

 
Blasons dans un armorial du XVe siècle

Héraldique et la généalogie nobiliaire modifier

Héraldique moderne modifier

 
Un héraut contemporain (Anglais)

Étude des objets armoriés modifier

Armorier un objet y ajoute un élément décoratif, et affirme un lien avec le titulaire, lisible y compris par ceux qui ne savaient pas lire. Les armoiries se rencontrent ainsi sur tous les témoignages du passé : documents, livres (sur la couverture ou à l'intérieur : l'ex libris), tapisseries, monuments, plaques de cheminées, meubles, bijoux, véhicules… L'identification des armoiries (quand elles ne sont pas fantaisistes) permet de replacer leur support dans le temps et dans l'espace social, et d'en retracer en partie l'histoire ou la provenance géographique. L'identification du titulaire est facilitée par les ornements extérieurs, notamment les ordres de chevalerie représentés. Elle peut conduire à une très grande précision (de l'ordre de l'année), quand celui-ci a fréquemment modifié la composition de ses armes, et la conjonction d'armes sur un même support peut conduire à des conclusions encore plus précises.

Bibliographie modifier

Une bibliographie raisonnée de l'héraldique mériterait un chapitre à elle seule, tant les références sont nombreuses.

  1. Michel Pastoureau, Traité d'héraldique, Paris : Picard, 5e édition 2008, p. 11.
  2. Michel Pastoureau, Traité d'héraldique, Paris : Picard, 5e édition 2008, p. 13-14.
  3. Michel Pastoureau, Traité d'héraldique, Paris : Picard, 5e édition 2008, p. 13, en particulier la note 3.
  4. Michel Pastoureau, L'art héraldique au Moyen Âge, Éditions du Seuil, octobre 2008, (ISBN 978-2-02-098984-8), page 192.
  5. Michel Pastoureau, L'art héraldique au Moyen Âge, Éditions du Seuil, octobre 2008, (ISBN 978-2-02-098984-8), page 42.