Six de Sharpeville

groupe de 6 personnes condamnées à mort puis relâchées, en Afrique du sud

Les six de Sharpeville sont six manifestants Sud-africains condamnés à mort en 1985 sous l'apartheid pour le meurtre d'un adjoint au maire de Sharpeville lapidé par la foule, malgré l'absence de preuves de leur participation, puis relâchés sous la pression internationale entre 1991 et 1992.

Histoire modifier

Le , une marche de protestation à Sharpeville tourne à la violence. Des pierres sont lancées sur la maison d'un adjoint au maire, Kuzwayo Dlamimi, qui répond par des coups de fusil, provoquant une émeute, et l'adjoint au maire est assassiné. Dans les mois qui suivent, Mojalefa Sefatsa, Theresa Ramashamola, Reid Mokoena, Oupa Diniso, Duma Kumalo et Francis Don Mokhesi sont arrêtés. En l'absence de preuve de leur participation au meurtre, ils sont reconnus coupables selon la doctrine du Common purpose (en)[1],[2] et condamnés à mort par pendaison le [3]. Deux autres personnes présentes à la manifestation, Christian Mokubung et Gédéon Mokone, sont également  condamnés à huit ans de prison. Tous sont représentés par l'avocat Prakash Diar[4]. Le juge considère en effet que bien qu'ils n'aient pas « contribué causalement » au meurtre, ils partageaient un but commun avec la foule en colère, parmi laquelle certains ont lapidé l'édile puis brûlé son corps[5].

Le jugement fut largement condamné par la communauté internationale, comme illégal et raciste, en particulier par les résolutions 610 et 615 (en) du Conseil de sécurité des Nations unies. Deux juristes ayant analysé l'affaire déclarèrent qu'il s'agissait d'un "crime contre l'humanité"[6]. La communauté juridique sud-africaine montra une position plus mitigée. Sur onze professeurs de droit interrogés par le journal The Star, cinq étaient en faveur de l'exécution, et six y étaient opposés, dont quatre qui évoquèrent la possibilité de réformes juridiques, les deux autres faisant remarquer que le cas "ressemblait à une simple vengeance"[7]. Un professeur fut envoyé à Londres pour défendre la position du gouvernement Sud-Africain sur la question. Cependant, lors d'une conférence de presse, il déclara n'avoir pas lu le dossier du procès, mais insista sur le fait qu'il n'y avait pas eu de déni de justice et que "tous les arguments avaient été entendus"[8].

Le lendemain après que le Conseil de sécurité des Nations unies eut adopté la résolution 610 (en), un tribunal Sud-Africain accorda un mois de sursis à exécution. Des six accusés, seuls quatre firent appel, les deux autres indiquèrent qu'ils préféraient être exécutés[9]. L'appel fut rejeté en , ce que le Conseil de Sécurité condamna dans la Résolution 615; cependant, la pression internationale fut telle que le Président Pieter Willem Botha commua finalement le les peines des 6  condamnés en peines de prison s'étalant entre 18 et 25 ans[10]

Avec la chute de l'apartheid, les condamnés furent peu à peu libérés : Diniso et Khumalo le , suivis par Ramashamola et Mokoena, le et enfin  Mokhesi and Sefatsa le [11].

Bibliographie modifier

  • (en) Prakash Diar, The Sharpeville Six Toronto, McClelland & Stewart Inc., 1990
  • (en) Peter Parker et Joyce Mokhesi-Parker, In the Shadow of Sharpeville : Apartheid and Criminal Justice, Springer, (lire en ligne)

Voir aussi modifier

Références modifier

  1. « 23 novembre - 7 décembre 1988 - Afrique du Sud. Clémence pour les « six de Sharpeville » et pour Nelson Mandela », sur universalis.fr
  2. (en) « The Liberation Struggle in South Africa », sur sahistory.org.za via Wikiwix (consulté le ).
  3. Karen Wellens et T.M.C. Asser Instituut, Resolutions and statements of the United Nations Security Council (1946-1989) : a thematic guide, BRILL, , 691 p. (ISBN 978-0-7923-0796-9, lire en ligne), p. 172
  4. M. Cherif Bassiouni, et Motala, Ziyad, The protection of human rights in African criminal proceedings, Martinus Nijhoff Publishers, , 222–225 p. (ISBN 978-0-7923-2888-9, lire en ligne)
  5. « Sharpeville Journal; Black and Poor, Her Daughter Faces the Gallows », sur nytimes.com,
  6. Peter Parker et Mokhesi-Parker, Joyce, In the shadow of Sharpeville : apartheid and criminal justice, NYU Press, , 2 p. (ISBN 978-0-8147-6659-0, lire en ligne)
  7. The Star, 25 avril 1988
  8. Business Day, 14 juillet 1988
  9. Prakash Diar, The Sharpeville Six, McClelland & Stewart, , 321 p. (ISBN 978-0-7710-2717-8), p. 289
  10. "Sharpeville Six plea is rejected". The Guardian, 14 juin 1988.
  11. Patrick Noonan, They're Burning the Churches : The Final Dramatic Events that Scuttled Apartheid, Jacana Media, , 285 p. (ISBN 978-1-919931-46-3, lire en ligne), p. 49