Serenissimi

parti politique italien

Pour les médias italiens, l'expression Serenissimi désigne le groupe indépendantiste Veneto Serenissimo Governo[1],[2]. Dans la nuit du 8 au , neuf personnes prennent d'assaut la Place Saint-Marc et le Campanile de Saint-Marc pour hisser le drapeau de la République de Venise. Cet événement est notamment marqué par l'utilisation d'un char artisanal construit à partir de véhicules agricoles.

Tank utilisé lors de l'assaut de la place Saint-Marc et exposé lors de la Festa dei Veneti le 3 septembre 2006.

L'action vise à empêcher l'anniversaire du bicentenaire de la chute de la République sérénissime de Venise le par les troupes napoléoniennes[3]. Pour les indépendantistes, il s'agit autant de revenir sur le traité de Campo-Formio que sur le plébiscite de Venise de 1866[4].

Déroulement des événements modifier

La nuit du 8 au 9 mai modifier

Partis de Padoue le à 22 heures, les huit hommes prennent la route de Venise. Arrivés à destination aux alentours de minuit, ils embarquent sur un traghetto ACTV pour rejoindre la place Saint-Marc. Armés de Berretta Mab 38, ils prennent possession de la place et quatre membres s'installent dans les étages supérieurs du campanile avec un émetteur radio déjà utilisé pour diffuser des messages sur la RAI. Les membres des Serenissimi appellent alors les Vénitiens à l'insurrection[5]. L'objectif était de garder la position jusqu'à l'anniversaire de l'abdication du dernier doge de venise Ludovico Manin, le .

Le maire de Venise, Massimo Cacciari, tente de mettre fin à l'entreprise indépendentiste avec des pourparlers. N'ayant aucun effet, à 8h15 les membres du Gruppo di intervento speciale sont dépêchés sur place pour mettre fin à la situation.

Le procès modifier

Les personnes arrêtées lors de l'intervention des carabiniers sont Gilberto Buson (46 ans), Cristian et Flavio Contin (23 et 55 ans), Antonio Barison , Luca Peroni (28 ans), Moreno Menini (20 ans), Fausto Faccia (30 ans) et Andrea Viviani (25 ans)[5]. Un neuvième membre est arrêté par la suite, il s'agit de Giuseppe « Bepin » Segato, considéré comme l'ambassadeur du groupe et ayant trouvé des documents invalidant la prise de position de 1866[6],[7].

 
Place Saint-Marc de nuit.

Lors du procès, les accusés parlent de leurs actions comme d'une initiative dénuée de violences[8]. Les chefs d'accusations sont notamment entreprise terroriste, et perturbation de l'ordre démocratique et des services publics (notamment les lignes d'Azienda Consorzio Trasporti Veneziano). Les peines sont les suivantes :

  • Luigi Faccia : non présent lors de l'occupation de la place, il est considéré comme le président de Veneto Serenissimo Governo et est condamné à 5 ans et 3 mois de prison.
  • Giuseppe « Bepin » Segato est condamné à 3 ans et 7 mois de prison[5].
  • Flavio Contin, Fausto Faccia et Gilberto Buson sont condamnés à six ans de prison[9].
  • Moreno Menini est relâché[9].
  • Christian Contin, Luca Peroni et Andréa Viviani sont condamnés à quatre ans et neuf mois de résidence surveillée[9].

Dès 1999, la femme de Luigi Faccia demande une grâce pour son mari qui n'est pas validée[5].

En 2011, la Cour de Cassation italienne casse les accusations les plus lourdes concernant l'entreprise terroriste, la perturbation de l'ordre démocratique et l'union nationale. Cette décision est prise parce que les moyens utilisés (tracteurs transformés en char et armes de la seconde guerre mondiale) ne constituaient pas un réel danger pour la démocratie italienne[2],[1].

Implication politique modifier

Alors que les membres des Serenessimi revendiquent une indépendance et une autodétermination des habitants de la Vénétie, cet événement n'est pas issu d'un parti politique pour une indépendance du nord de l'Italie (notamment la Ligue du Nord qui, le organisa un référendum sur l'indépendance de la Padanie)[3].

Influences postérieures modifier

Dans les années 2000, le tank est utilisé pour des fêtes régionales montrant un intérêt pour le nationalisme vénitien comme lors de la Festa dei Veneti (Fête des Vénitiens) à Cittadella en 2006[10].

En 2014, la police italienne arrête, à la suite d'écoutes téléphoniques, 22 personnes planifiant une attaque violente à l'aide de chars artisanaux et d'armes légères en provenance d'Albanie. Cette manifestation devait, comme en 1997 déclarer l'indépendance de la Vénétie. Parmi les personnes arrêtées, deux membres de l'équipe de 1997 et deux anciens parlementaires de la Lega Nord[11],[12],[13].

En , le référendum de la Lega Nord est perçu par Flavio Contin comme le « fils du Campanile[14] ». De même, le président de la région Vénétie parle d'un fil reliant dans l'Histoire l'événement de 1997 et le scrutin de 2017[15]. Concernant le même référendum, plusieurs Serenissimi se sont exprimés en faveur de l'indépendance[16].

Référence culturelle modifier

Dans le manga japonais Gunslinger Girl, une scène fait référence à l'épisode des Serenissimi avec une prise armée du Campanile[17].

Notes et références modifier

  1. a et b « «I "tanki" non erano mezzi eversivi», i Serenissimi assolti dalla Cassazione - Corriere del Veneto », sur corrieredelveneto.corriere.it (consulté le )
  2. a et b (it) « DPC | Caso dei ‘Serenissimi' (occupazione del campanile di S. Marco ... », Diritto Penale Contemporaneo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. a et b Lynda Dematteo, L' Idiotie en politique : Subversion et néo-populisme en Italie, Les Editions de la MSH, , 256 p. (ISBN 978-2-7351-1385-9, lire en ligne)
  4. (it) « Referendum del Veneto risveglia i Serenissimi che sfidarono col tanko il governo in piazza San Marco », Rainews,‎ (lire en ligne, consulté le )
  5. a b c et d « Ecco chi erano gli 8 Serenissimi dell'assalto al campanile », Il gazzettino,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. « Morto Segato, ispirò l’assalto dei Serenissimi a San Marco », ilGiornale.it,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. (it) « Vita e Pensiero di Giuseppe Segato “l’Ambasciatore Veneto” »
  8. (it) « 'SI', ABBIAMO SBAGLIATO' I SERENISSIMI SI PENTONO - la Repubblica.it », Archivio - la Repubblica.it,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. a b et c (it) « ASSALTO AL CAMPANILE CONDANNATI I 'PIRATI' - la Repubblica.it », Archivio - la Repubblica.it,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. (it) « Una pacifica invasione di ventimila «patrioti» - il mattino di Padova », Archivio - il mattino di Padova,‎ (lire en ligne, consulté le )
  11. Philippe Ridet (Rome correspondant), « L'invraisemblable projet des indépendantistes de Vénétie », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  12. « Des indépendantistes vénitiens préparaient un assaut contre la place Saint-Marc - France 24 », France 24,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. « ITALIE. Indépendantistes de Vénétie : terroristes ou illuminés ? », Courrier international,‎ (lire en ligne, consulté le )
  14. (it) « Il Serenissimo: «Il voto di domenica figlio del nostro blitz sul Campanile» », Il Gazzettino,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. (it) Marco Bonet, « L’assalto a San Marco Che cosa resta 20 anni dopo », Corriere del Veneto,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. (it) « I Serenissimi del tanko a Venezia. “Votiamo sì anche se sarà inutile” », LaStampa.it,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. « Gunslinger Girl Omnibus Collection 5 (Vol. 11-12) | Seven Seas Entertainment », sur www.sevenseasentertainment.com (consulté le )