Pont des Filles de Jacob (site paléolithique)

site paléolithique en Israël

Pont des Filles de Jacob
Image illustrative de l’article Pont des Filles de Jacob (site paléolithique)
Le pont des Filles de Jacob sur le Jourdain
Localisation
Pays Drapeau d’Israël Israël
District Nord
Régions Galilée
Golan
Coordonnées 33° 00′ 28″ nord, 35° 37′ 45″ est
Altitude 70 m
Géolocalisation sur la carte : Israël
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Pont des Filles de Jacob
Pont des Filles de Jacob
Géolocalisation sur la carte : Liban
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Pont des Filles de Jacob
Pont des Filles de Jacob
Histoire
Époque Paléolithique inférieur

Le site paléolithique du Pont des Filles de Jacob est un site préhistorique situé dans la vallée du Jourdain, au nord du lac de Tibériade, en Israël. Il a livré la plus ancienne trace de domestication du feu connue dans le monde, datée d'environ 790 000 ans, associée à des outils lithiques acheuléens.

Situation modifier

Le site se trouve sur les deux rives du Jourdain, au nord du lac de Tibériade, 300 m au sud d'un passage à gué qui reliait traditionnellement la Galilée au plateau du Golan et où a ensuite été construit un pont dénommé Pont des Filles de Jacob.

Historique modifier

Le site est connu depuis les années 1930. Il a été fouillé méthodiquement à partir de 1989 sous la direction de l'archéologue israélien Naama Goren-Inbar.

L'une des premières découvertes importantes a été en 1989 le crâne d'un éléphant à défenses droites (Palaeoloxodon antiquus), dont les os présentaient des marques de découpe. Ils montrent que les hommes de l'époque découpaient déjà de gros animaux[1]. Plus tard, des traces de l'abattage répété de daims (Dama dama) ont également été trouvées[2]. De nombreux outils lithiques de formes différentes ont été découverts[3].

En 2000, le site a été gravement endommagé à la suite des travaux d’approfondissement du Jourdain effectués par l’Autorité de drainage du lac de Tibériade.

Datation modifier

La datation du site basée sur le rapport des isotopes 16O et 18O de l'oxygène a conduit à l'attribuer au stade isotopique de l'oxygène 18 (SIO 18), qui correspond à un âge d'environ 750 000 ans[4]. Une datation paléomagnétique du site a donné un âge maximum de 790 000 ans. Le site s'échelonne sur une période de 100 000 ans, allant de 790 000 à 690 000 ans[5].

Vestiges modifier

Seuls deux fragments d'os humain de la hanche ont été découverts à ce jour, ce qui ne permet pas d'identifier l'espèce humaine qui vivait sur le site.

Restes animaux et végétaux modifier

Le gisement archéologique étant en milieu humide et anaérobie, la matière organique (bois, écorces, fruits et graines) laissée par les occupants du site a été préservée.

Ces derniers pratiquaient la pêche au poisson-chat et la collecte de crabes dans l’ancien lac Hula, en bordure du site. De nombreux fossiles de mammifères ont également été trouvés sur le site, certains avec des marques de découpe ou de percussion, notamment des rhinocéros, hippopotames, bovidés, ânes, cerfs, et chevaux.

Une étude publiée en 2016 a identifié près de 21 000 restes végétaux jusqu'au niveau du genre ou même de l'espèce. Un total de 117 taxons (78 espèces et 39 genres supplémentaires) ont été documentés, dont plus de 9 000 macrorestes d'au moins 55 espèces comestibles[6],[7]. Les chercheurs en ont déduit qu'il existait déjà à cette époque une connaissance approfondie des plantes comestibles utilisées comme nourriture.

Artéfacts modifier

Les outils lithiques, constitués notamment de bifaces en silex ou en basalte, appartiennent à l'Acheuléen.

En 1991, un morceau de bois de 25 cm de long a été collecté sur le site, dont la surface avait été polie sur un côté. Une datation par le potassium-argon de la couche sous-jacente a donné un âge maximum de 750 000 ans, et les données biostratigraphiques ont livré un âge minimum de 240 000 ans[8]. La découverte est considérée comme la plus ancienne trace connue de la production d'une planche[9].

Domestication du feu modifier

Une étude publiée dans la revue Science en 2004 a fait état de restes de graines brulées vieux de 790 000 ans (orge sauvage, Hordeum spontaneum), de bois brulé (olivier, Olea europaea, et vigne sauvage, Vitis sylvestris), ainsi que de pierres fortement chauffées. Ces découvertes ont été interprétées comme des restes de foyers[5]. En 2008 et 2017, d'autres études ont montré que l'utilisation du feu n'était pas un cas isolé à cet endroit. Sur la base de vestiges de pierres chauffées, il a été possible de prouver que cela s'était produit à plusieurs reprises et à des moments différents[10],[11],[12],[13]. Ces vestiges de foyers sont les plus anciennes traces consensuelles de domestication du feu connues dans le monde.

Références modifier

  1. (en) Naama Goren-Inbar et al., A butchered elephant skull and associated artifacts from the Acheulian site of Gesher Benot Ya'aqov, Israel, Paléorient, volume 20, n° 1, 1994, p.99–112, doi:10.3406/paleo.1994.4604
  2. (en) Rivka Rabinovich, Sabine Gaudzinski-Windheuser, Naama Goren-Inbar, Systematic butchering of fallow deer (Dama) at the early middle Pleistocene Acheulian site of Gesher Benot Ya‘aqov (Israel), Journal of Human Evolution, volume 54, n° 1, 2008, p.134–149, doi:10.1016/j.jhevol.2007.07.007
  3. (en) Naama Goren-Inbar, Culture and cognition in the Acheulian industry: a case study from Gesher Benot Yaʿaqov, Philosophical Transactions of the Royal Society B: Biological Sciences, volume 366, n° 1567, 2011, p.1038–1049, doi:10.1098/rstb.2010.0365
  4. (en) Naama Goren-Inba et al., Pleistocene Milestones on the Out-of-Africa Corridor at Gesher Benot Ya'aqov, Israel, Science, volume 289, n° 5481, 2000, p.944–947, doi:10.1126/science.289.5481.944
  5. a et b (en) Naama Goren-Inbar et al., Evidence of Hominin Control of Fire at Gesher Benot Ya`aqov, Israel, Science, volume 304, n° 5671, 2004, p.725–727, doi:10.1126/science.1095443
  6. (en) Yoel Melamed et al., The plant component of an Acheulian diet at Gesher Benot Ya'aqov, Israel, PNAS, volume 113, n° 51, 2016, p.14674–14679, doi:10.1073/pnas.1607872113
  7. (en) The real Paleo diet. Archaeologists find 780,000-year-old remains of prehistoric man's meal., haaretz.com, 5 dézembre 2016
  8. (en) Shmuel Belitzky, Naama Goren-Inbar, Ella Werker, A Middle Pleistocene wooden plank with man-made polish, Journal of Human Evolution, volume 20, n° 4, 1991, p.349–353, doi:10.1016/0047-2484(91)90015-N
  9. (en) Mollusc confirms dating of oldest known plank, newscientist.com, 20 juillet 1991
  10. (en) Nira Alperson-Afil, Continual fire-making by Hominins at Gesher Benot Ya‘aqov, Israel, Quaternary Science Reviews, volume 27, n° 17–18, 2008, p.1733–1739, doi:10.1016/j.quascirev.2008.06.009
  11. (en) Fire out of Africa: A key to the migration of prehistoric man, eurekalert.org, 26 octobre 2008
  12. (en) Excavation Sites Show Distinct Living Areas Early in Stone Age, nytimes.com, 21 décembre 2009
  13. (en) Nira Alperson-Afil, Daniel Richter, Naama Goren-Inbar, Evaluating the intensity of fire at the Acheulian site of Gesher Benot Ya'aqov—Spatial and thermoluminescence analyses, PLoS ONE, volume 12, n° 11, e0188091, doi:10.1371/journal.pone.0188091

Bibliographie modifier

  • Naama Goren-Inbar, Ella Werker et Craig S Feibel, Le site acheuléen de Gesher Benot Ya'aqov, Israël, volume I, L'assemblage de bois, Oxbow Books, Oxford, 2002, (ISBN 978-1-84217072-4)
  • Nira Alperson-Afil et Naama Goren-Inbar, Le site acheuléen de Gesher Benot Ya'aqov, volume II, Flammes anciennes et utilisation contrôlée du feu, Springer, Dordrecht, 2010, (ISBN 978-90-481-3764-0)
  • Rivka Rabinovich, Sabine Gaudzinski-Windheuser, Lutz Kindler et Naama Goren-Inbar, Le site acheuléen de Gesher Benot Ya'aqov, volume III, Taphonomie des mammifères. Les assemblages des couches V-5 et V-6, Springer, Dordrecht, 2012, (ISBN 978-94-007-2158-6)
  • Naama Goren-Inbar, Nira Alperson-Afil, Gonen Sharon et Gadi Herzlinger, Le site acheuléen de Gesher Benot Ya'aqov, volume IV, L'assemblage lithique, Springer, Cham, 2018, (ISBN 978-3-319-74050-8)

Voir aussi modifier

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Articles connexes modifier

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