Ouerghemma

confédération tribale tunisienne
Ouerghemma

Populations importantes par région
Autres
Régions d’origine Tunisie
Langues Arabe et berbère
Religions Islam
Ethnies liées Arabes et Berbères
Description de cette image, également commentée ci-après
Carte de répartition

Les Ouerghemma (arabe : ورغمة) sont une confédération tribale du sud-est de la Tunisie. Présentée comme arabe avant le protectorat français en Tunisie[1],[2], elle est définie par Jean Despois comme étant d'origine berbère[3]. Toutefois, Gianni Albergoni, Sonia Ben Meriem et François Pouillon évoquent une origine et une identité revendiquée comme arabe[4].

Les Ouerghemma forment depuis le XVIe siècle une alliance de sécurité pour la majeure partie des populations vivant entre la mer et le désert et qui ont étendu leur influence sur une vaste zone du sud-est de la Tunisie, de l'oued ez-Zess dans la région de Mareth jusqu'à la frontière tuniso-libyenne, représentant la majeure partie de la plaine de la Djeffara.

Histoire modifier

Entre le XVIIe et XVIIIe siècles, une guerre éclate entre les Ouerghemma et les Nouaiel, qui se traduite par une victoire des premiers, et un déplacement des seconds en Libye[5].

Au XVIIIe siècle, durant la guerre qui oppose Ali Pacha et Hussein Bey, ils rejoignent le clan husseinite[5]. Ils sont donc constitués en tribu du makhzen.

Lors de la colonisation française, certaines tribus se réfugient en Tripolitaine, tandis que d'autres font allégeance au protectorat[5].

Historiquement, ils sont réputés comme étant d'excellents cavaliers[5], et sont proches des Hamama[6].

Étymologie modifier

La dénomination de la confédération, Ouerghemma, vient certainement des Beni Ourghma, une branche des Aït Demmer (Beni Demmer). Demmer désigne une montagne de la région de Tripoli formant l'extrémité occidentale de la chaîne qui s'étend au sud de cette ville, jusqu'aux environs de Gabès[7]. On appelle Aït Demmer ou Aïd Demmer les habitants de cette montagne, c'est-à-dire « enfants des Demmer »[7].

Origines modifier

Les Beni Demmer, Aït Demmer, une tribu zénète, fournissent un grand nombre de branches qui habitent les montagnes et les environs de Tripoli. L'une de leurs fractions s'adonne à la vie nomade et fréquente les plaines de l'Ifriqiya occidentale[8].

Les Beni Ourghma, branche des Aït Demmer, habitent les montagnes proches de Tripoli ; les Beni Ournîd forment aussi une branche considérable de la tribu des Demmer et possèdent de nombreuses ramifications, parmi lesquelles les Beni Ourtantîn, les Beni Gharzoul et les Beni Tofourt[8].

Géographie modifier

Selon le commandant François Rebillet (capitaine du 4e régiment d'infanterie) dans son ouvrage Le Sud de la Tunisie (1886), citant les auteurs arabes du Moyen Âge, le terme djebel Demmer s'applique à toute la région montagneuse qui s'étend du djebel Nefoussa jusqu'au sud de Gabès, « sur une longueur de sept jours de marche ». Les cartes modernes divisent cette région entre le plateau des Matmata, le djebel Douiret et le djebel Abiodh : ce sont des divisions exactes et nécessaires mais c'est une restauration utile que celle du seul terme par lequel on puisse désigner l'ensemble des plissements qui forment l'ossature du Sud tunisien[9].

Composition modifier

  • Ouderna (الودارنة) de Tataouine :
    • Oulad Slim (أولاد سليم) : Ch'hida (شهيدة), Dabbeb (دباب), Dghaghra (دغاغرة), Ajerda (عجاردة), Dhibet (ذهيبات), Mekbla (مقابلة), Ghefarra (غفافرة), Mkhalba (مخالبة)
    • Oulad Abdelhamid (أولاد عبد الحميد) : Al Krachoua (الكرشاوة), Oulad al Azreq' (الزرقان), Oulad Mehiri, Oulad Aoun, Al Hemidia (حميدية)
  • Touazine (التوازين) de Ben Gardane : Aouled Hamed (أولاد حامد), Maztoura (مزطورة), Aouled Khelifa (أولاد خليفة), Aouled Bouzid (أولاد بوزيد)
  • Accaras (عكارة) de Zarzis : Aouled Emhamed (أولاد امحمد), Aouled Bou Ali (أولاد بوعلي), Aouled Abd al-Dayem (أولاد عبد الدايم), Al Zaouiyya (الزاوية), Al Mouansa (الموانسة), Al Khalayfiyya (الخلايفية)
  • Khezour et Mhabel de Médenine : Hzara (حرارزة), Tsaoua (تساوة), Khemaylia (خمايلية), Aouled Belgacem (أولاد بالقاسم), Aouled Youssef (أولاد يوسف)
  • Djellidet (جليدات) de Tataouine et Beni Blell : Hamed (حامد), Bouras (بوراس), Aouled Abdejelil (أولاد عبد الجليل), Aouled Mohamed (أولاد محمد), Boujlida (بوجليدة), Outaouta (الوطاوطة)
  • Ghomrassen (غمراسن) de Ghomrassen
  • Hewaya (حواية) : Jebah (جباه), Melala (ملالة), Aouled Atia (أولاد عطية), Kerza (كارزة), Aouled Mehdi (أولاد مهدي)
  • Tribus montagnardes : Douiret (دويرات), Sedra (سدرة), Beni Yekhzer (بني يخزر), Mekdamine (مقدمين), Guetoufa (قطوفة), Guermessa (قرماسة), Bayouli (بيولي)
  • Autres tribus : Hdeda (حدادة), Ghbonten (غبنتن), Jelalta (جلالطة), Rebayaa (ربايع)

La confédération des Ouerghemma (Ouderna de Tataouine et Touazine de Ben Gardane) fournissait des contingents de goumiers au bey de Tunis, moyennant l'exemption de l'impôt de capitation.

Au XIXe siècle, la population de la confédération est estimée entre 20 000 et 25 000 personnes[10].

Dialecte modifier

Le dialecte de ces tribus est majoritairement un arabe similaire à celui parlé par les tribus libyennes voisines. Certaines tribus comme les Ghomrassen et les Douiret utilisent la langue berbère, avec un dialecte similaire à celui de Zaouïa et du djebel Nefoussa (Libye) ou au chaoui (Algérie).

Notes et références modifier

  1. « Bulletin politique », Le Courrier de la Rochelle, no 91,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).
  2. « Bulletin », L'Univers israélite, no 4,‎ , p. 145 (lire en ligne, consulté le ).
  3. Jean Despois, « Djeffara », dans Gabriel Camps (dir.), Encyclopédie berbère, vol. 16 : Djalut – Dougga, Aix-en-Provence, Édisud, (ISBN 2-85744-828-7, lire en ligne), p. 2424-2425.
  4. « Berbères, Arabes, colonisation(s) : notes anthropologiques sur l'extrême-sud tunisien », sur imaf.cnrs.fr (consulté le ).
  5. a b c et d « Ben Guerdane et sa région dans l'histoire : voyage dans le temps au pays des Ouerghemma », sur leaders.com.tn, (consulté le ).
  6. Gabriel Camps et André Martel, « Fraichich », dans Gabriel Camps (dir.), Encyclopédie berbère, vol. 19 : Filage – Gastel, Aix-en-Provence, Édisud, (ISBN 2-85744-994-1, lire en ligne), p. 2930–2933.
  7. a et b Ibn Khaldoun (trad. William Mac Guckin de Slane), Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale, vol. I, Alger, Imprimerie du gouvernement, , p. LXXX.
  8. a et b Ibn Khaldoun (trad. William Mac Guckin de Slane), Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale, vol. III, Alger, Imprimerie du gouvernement, , p. 288.
  9. Paul Blanchet, « Le Djebel Demmer », Annales de géographie, vol. 6, no 27,‎ , p. 239–254 (ISSN 0003-4010, DOI 10.3406/geo.1897.5612, lire en ligne, consulté le ).
  10. Jean Ganiage, « La population de la Tunisie vers 1860 : essai d'évaluation d'après les registres fiscaux », Population, vol. 21, no 5,‎ , p. 881 (ISSN 0032-4663, lire en ligne, consulté le ).

Bibliographie modifier

  • Henri Guillaume et Habiba Nouri, « Sociétés, dynamiques de peuplement et mutations des systèmes de production traditionnels », dans Entre désertification et développement : la Jeffara tunisienne, Tunis, Cérès, (lire en ligne), p. 81-84.
  • André Louis, « Le monde "berbère" de l'extrême sud tunisien », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no 11,‎ , p. 114-119 (lire en ligne, consulté le ).
  • Neila Saadi, Héritages berbères de Tunisie : processus de déconstruction et de construction d'un patrimoine, Tunis, Kalima, , 471 p. (ISBN 978-9938929959).