courbe qui coupe les méridiens d'une sphère sous un angle constant
Une loxodromie (du greclox(o)- et -dromiecourse (δρόμος) oblique (λοξός), en anglais rhumb line), est une courbe qui coupe les méridiens d'une sphère sous un angle constant. C'est la trajectoire suivie par un navire qui suit un cap constant.
Comparaison entre les trajectoires loxodromique (bleue) et orthodromique (rouge) entre Paris et New York, sur une carte en projection de MercatorComparaison entre les trajectoires loxodromique (jaune) et orthodromique (rouge) entre Paris et New York, sur la sphère terrestre.
Une route loxodromique est représentée sur une carte marine ou aéronautique en projection de Mercator par une ligne droite, mais elle ne représente pas la distance la plus courte entre deux points. En effet, la route la plus courte, appelée route orthodromique ou orthodromie, est un arc de grand cercle de la sphère[1].
La loxodromie est une trajectoire à route vraie constante. Elle doit son nom au géomètre portugais Pedro Nunes, le premier à la distinguer d'un cercle (ca. 1537)[2].
Le problème posé est celui de la détermination de la route et de la distance loxodromique entre deux points. Il s'agit donc du problème inverse de la navigation à l'estime.
Par la suite, on note
la route vraie (terme utilisé en aéronautique, appelée route fond, , dans le domaine maritime) ;
la distance parcourue à la route ;
et les coordonnées géographiques (latitude, longitude) des points A et B ;
la latitude moyenne ;
Les unités, si nécessaires, seront indiquées en exposant entre crochets : pour nautique, pour le radian, pour la minute d'arc.
La valeur de la distance en fonction de la route vraie s'exprime par l'égalité
Pour l'évaluation de la route vraie, on peut utiliser une valeur approchée ou une valeur exacte.
Si les deux points A et B sont peu éloignés, on peut se contenter de la formule approchée utilisant la latitude moyenne
cette formule est issue de la confusion entre les distances sur la sphère et les distances sur la carte. Elle s'applique pour des points à distance réduite (inférieure à 300 milles marins) et à des latitudes éloignées des pôles (latitudes inférieures à 60°)[3].
Formule exacte (latitudes croissantes de la projection de Mercator) :
est appelée la latitude croissante[4] et vaut, en radians :
Les formules ne sont pas adaptées pour les proches de 90° et 270° puisqu'elles conduiraient à une division par un nombre proche de zéro. Dans ces cas, il est prévu dans les calculs nautiques d'utiliser le sinus pour calculer la distance. Dès que la route fond par quart est supérieure à 89°, on utilise la formule approchée suivante[5] :
Sur le globe terrestre, les loxodromies correspondent (lorsqu'elles ne sont pas « dégénérées », c'est-à-dire lorsque l'angle initial donné n'est pas nul) à des spirales s'enroulant autour du pôle (le pôle Nord si l'angle initial est dans et le déplacement se fait dans le sens des latitudes croissantes). Au voisinage du pôle, ces spirales sont approximativement planes, de tangente formant un angle fixe avec le rayon vecteur, ce qui est une propriété caractéristique d'une spirale logarithmique.
Plus précisément, on veut déterminer une équation de la loxodromie et calculer la longueur L parcourue depuis l'équateur jusqu'au pôle en fonction de la route vraie (c’est-à-dire l’angle entre la direction suivie et le nord géographique) ; la longitude étant notée et la latitude, il s'agit donc de déterminer la fonction . Le calcul donne finalement et [6].
Calcul détaillé
La loxodromie constitue un arc sur la sphère que l'on suppose défini par une fonction de classe : , et orienté dans le sens des longitudes croissantes. Soit la fonction qui, à la longitude , associe le point courant de la loxodromie de longitude et de latitude .
Un vecteur tangent à la loxodromie est alors . Ce vecteur, qui dirige la tangente à l'arc, forme donc, par hypothèse, un angle avec tout vecteur (non nul) dirigeant le méridien au point considéré. Un vecteur dirigeant le méridien en est , tandis qu'un vecteur dirigeant le parallèle est .
Dans la suite, pour alléger l'écriture, on ne précisera plus le point , auquel sont prises les fonctions et leurs dérivées partielles, et on notera au lieu de , et la dérivée de par rapport à .
En effectuant le produit scalaire d'un vecteur directeur de la tangente à la loxodromie et d'un vecteur directeur du méridien, on obtient le produit des normes de ces vecteurs par le cosinus de l'angle qu'ils forment. Cet angle est précisément le cap vrai lorsque :
, en notant le produit scalaire par .
Comme les parallèles et les méridiens sont perpendiculaires, les vecteurs et sont orthogonaux, et l'expression précédente se simplifie en :
puis en :
En élevant au carré et en utilisant le théorème de Pythagore, on obtient :
D'où, avec
.
On calcule les deux normes intervenant dans cette équation :
On sait, d'après le paramétrage sphérique rapporté aux coordonnées cartésiennes dans la base , étant dirigé selon l'axe terrestre, que , où est le vecteur unitaire radial du plan équatorial défini par : .
On définit comme le vecteur dérivé par rapport à de : .
Alors et . Ainsi, et .
L'équation se réduit à :
Si on suppose qu'on part de l'équateur () à la longitude et qu'on se dirige vers le Nord-Est, alors , et est une fonction croissante de donc (dans les autres cas, on déduit l'arc par une symétrie centrale et/ou une rotation convenable(s), donc on ne perd pas de généralité), par suite :
et , équation différentielle non linéaire à variables séparables en
La longueur L parcourue vaut alors, par définition :
où et et, pour les mêmes raisons de signe, .
En changeant de variable, avec avec
la latitude variant de 0 à quand varie de 0 à :
On a
Il est facile de vérifier le résultat en prenant nul. On voit que l'arc parcouru est le méridien et sa longueur est égale au quart de la circonférence.
Le même calcul mené entre deux points A et B situés sur la loxodromie donnera comme longueur :
↑Un « grand cercle » d'une sphère est l'intersection de la sphère avec un plan qui passe par le centre de la sphère, comme l'Équateur et tous les méridiens.
↑Stevin et Harriot l'ont étudiée (c.1580) : c'est un des premiers cas d'« intégration difficile » connus