Louis Cyr

homme fort québécois

Louis Cyr , baptisé Cyprien-Noé Cyr, né à Saint-Cyprien-de-Napierville le et mort à Montréal le , est un homme fort québécois[2]. Cyr était reconnu pour n'avoir jamais refusé un défi et n'avoir jamais été défait dans son pays ou à l'étranger. Il acquiert sa renommée avant même que l'on tienne des registres sur son sport et avant même que l'haltérophilie ne soit intégrée aux Jeux olympiques.

Louis Cyr
Description de l'image CyrLouis.jpg.
Nom de naissance Cyprien-Noé René Cyr
Alias
Samson canadien
Hercule moderne
Hercule québécois
Naissance
Saint-Cyprien-de-Napierville
Décès (à 49 ans)
Montréal
Nationalité Canadienne
Activité principale
Distinctions
Champion Nord-Américain (1885)
Champion mondial (1892)[1]
Ascendants
Pierre Cyr &
Philomène Berger-Verronneau
Conjoint
Mélina Comtois
Descendants
Émiliana Cyr
1 fils mort en bas âge et Hélène Perron
Famille
17 frères et sœurs (dont 7 morts avant l'âge adulte)[réf. nécessaire]

Biographie

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Jeunesse

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Louis Cyr est né à Saint-Cyprien-de-Napierville au Canada-Est (aujourd'hui le Québec). Ce serait vers l'âge de huit ans que Cyr démontre à ses parents le phénomène qu'il sera tout au long de sa vie. Un été, son père envoie son fils chercher un veau du printemps manquant à l'appel. Cyprien Noé retrouve l'animal embourbé dans un fossé. La bête trop affaiblie, il l'arrache du piège de boue, la hisse sur ses épaules et s'en retourne vers la maison. Il « franchit tout d'une traite l'arpent et demi » et fait une entrée sensationnelle sous les yeux de ses parents ébahis[3].

De 1872 à 1875, Cyr fréquente l'école des garçons du village de Napierville, mais durant ces trois années, sa fréquentation scolaire est d'environ douze mois[4]. À partir de l'âge de douze ans, Cyr travaille dans un camp de bûcherons pendant l'hiver et sur la ferme familiale le restant de l'année. Il impressionne ses compagnons de travail avec ses démonstrations de force brute.

En , la famille Cyr immigre à Lowell, dans le Massachusetts, pour travailler dans l'industrie du textile[4]. Cyr, dont le véritable prénom est Cyprien-Noé, décide dorénavant de se faire appeler Louis ; ce prénom étant plus facile à prononcer en anglais[4]. De nouveau, sa grande force lui assure la célébrité. À l'âge de seize ans, il pèse plus de 200 livres[5]. À 17 ans, il pèse 230 livres[6]. C'est à Lowell que Cyr voit pour la première fois des haltères, ceux qu'utilise Timothy Donovan. Ces haltères pèsent 150 livres, au maximum, et du dire de Louis Cyr, ce fut pour lui un jeu plutôt facile de les manipuler[6]. Donovan reconnaissant en lui le phénomène de la force, lui fait une offre d'affaire. Cyr accepte à condition qu'il ne touche pas aux haltères de Donovan. Dans une fonderie de Lowell, Cyr se fait couler ses trois premiers haltères « le plus lourd à 197 livres, le deuxième à 185 livres et le troisième à 156 livres[7] ».

À Lowell, il rencontre sa future femme, Mélina Comtois, dont la famille vient de Saint-Jean-de-Matha. En 1881, la famille Comtois retourne au Canada et Louis fait de même deux mois plus tard[8].

L'étoile montante

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Affiche de 1898

En 1882, Mélina et Louis se marient le 16 janvier à Saint-Jean-de-Matha [4], puis il travaille dans un camp de bûcherons durant l'hiver.

Au printemps 1883, il décide de retourner à Lowell avec sa femme, espérant profiter de sa renommée là-bas. Un certain MacSohmer l'approche et lui propose une tournée des Provinces maritimes et du Québec. Si cette tournée profite à l'organisateur, Cyr n'y gagne rien et se fait flouer. Il commence alors à faire la tournée du Canada avec sa famille dans un spectacle qu'ils conçoivent eux-mêmes, qu'ils appellent « La Troupe Cyr ». Durant cette tournée, Cyr perd un fils décédé en bas âge (1885-1886)[Note 1]. La tournée ne dure que quelques mois.

Toujours en 1883, Cyr se voit offrir un travail plus sédentaire, celui de policier à la ville de Sainte-Cunégonde, municipalité située sur l'île de Montréal (aujourd'hui partie de l'arrondissement du Sud-Ouest). Il occupe ce poste jusqu’en , puis repart en tournée avec une troupe d’athlètes mise sur pied par le Montréalais Gustave Lambert, lutteur, boxeur et leveur de poids. Sa fille, Émiliana Cyr, naît le [9].

Il s'inscrit dans une compétition d'hommes forts en [Note 2], à Québec, contre le champion canadien des hommes forts, David Michaud. L'évènement se déroule à la salle Jacques-Cartier de Québec et à pour récompense la somme de 500$[10]. Cyr l’emporte facilement en levant d’un bras un haltère de 218 livres (contre 158 livres pour Michaud) et en soulevant avec son dos 2 371 livres (contre 2 071 pour son adversaire). Le titre d’homme le plus fort du Canada revient dès lors à Cyr.

En 1888, il ouvre une taverne sur la rue Notre-Dame à Montréal, où il exécute quelques tours de force pour amuser les clients. Toutefois, c’est sur scène qu’il se sent le plus à l’aise et, après moins d’un an, il reprend ses tournées avec sa propre troupe, dont font partie, entre autres, sa femme et son frère Pierre. Il parcourt le Canada et les États-Unis.

Il triomphe et est honoré à Londres quand, le , il soulève successivement un poids de 559 livres d'un doigt, 4092 livres à l'aide de son dos, et 273 livres au-dessus de sa tête à l'aide d'une seule main[1]. La Société Saint-Jean-Baptiste lui attribue la « ceinture Fortissimo » en 1889[2].

En 1890, il se joint à une troupe américaine et s’impose de plus en plus comme l’homme le plus fort du monde. À l’automne de l’année suivante, il repart pour l’Europe, où il veut mettre ce dernier titre en jeu. Il se produit principalement en Angleterre, mais les grands champions, dont l'allemand Eugène Sandow[11], n’osent l’affronter et lui concèdent son titre.

De retour au pays en , Cyr et l’homme fort Horace Barré signent un contrat d’un an avec le cirque américain des Ringling Brothers. En 1894, les deux hommes mettent sur pied leur propre cirque, composé d’athlètes, de jongleurs, d’acrobates et d’hommes forts. Pendant cinq ans, le cirque se produit sur les scènes canadiennes et américaines.

Les dernières années

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Toutefois, à compter de 1900, la santé de Cyr se détériore à cause de son embonpoint, de ses excès de table et de sa vie trop sédentaire. Atteint de la maladie de Bright, il doit se retirer prématurément de la compétition et de l’exhibition de tours de force. Il s’installe dans une ferme à Saint-Jean-de-Matha, où il reçoit ses amis, raconte ses exploits et, de temps à autre, se mesure à des compétiteurs qui veulent s’emparer de son titre de champion, comme le géant Édouard Beaupré en 1901. Le dernier en liste, Hector Décarie, affronta Cyr en décembre 1904 et fut défait au parc Sohmer à Montréal devant une foule d'environ 3500 personnes. Ce n'est que deux plus tard, en février 1906, que Cyr, qui connaît ses limites et son état de santé précaire, légue lui-même son titre au jeune aspirant Décarie, le tout au parc Sohmer[12].

Cyr meurt d'une néphrite chronique le à Montréal, dans la maison de sa fille et de son gendre, le docteur Zénon Maxime Aumont. Il est enterré le 14 à Saint-Jean-de-Matha, où son corps repose toujours.

Dès le lendemain de sa mort, les journaux diffusent la nouvelle. Le Soleil et La Presse[13], notamment, annoncent son décès à la une et consacrent, tout comme Le Devoir[14] et La Patrie[15], plusieurs colonnes à sa biographie et à l’énumération de ses exploits. Le journaliste du Soleil souligne que « sa glorieuse carrière d’athlète [...] a contribué à jeter sur la race canadienne-française l’éclat d’une réputation de force et de vigueur physique peu commune ». Ses contemporains ont immortalisé leur héros par une statue fort imposante, maintenant propriété du Musée de la civilisation à Québec, et qui permet aux Québécois de ne pas oublier Louis Cyr, dont on dit encore que les exploits sont restés inégalés.

Réputation

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Louis Cyr prêt à retenir les chevaux, 1891

Alors que certains des faits et accomplissements de Cyr ont été exagérés avec le temps, quelques-uns sont documentés et restent impressionnants.

Parmi ceux-ci, on retient :

  • soulever (sur son dos) une plate-forme sur laquelle prennent place dix-huit hommes (1942 kg) ;
  • soulever 484 livres (219 kg) d'un seul doigt (dans les bureaux de la National Police Gazette de New-York) ;
  • pousser un wagon sur un plan incliné ;
  • lever 124 kg au-dessus de sa tête avec sa main droite[1] ;
  • à l'âge de dix-neuf ans, soulever de terre jusqu'aux épaules une pierre pesée officiellement à 514 livres (233 kg) ; cet exploit reste inégalé jusqu'à ce jour[16].

Il accomplit sa plus grande prouesse le  ; on rapporte qu'il est alors parvenu à supporter 1 967 kg sur son dos. Une autre de ses démonstrations très remarquées a lieu le , à Montréal : à cette occasion, il retient quatre chevaux, disposés de telle manière que deux paires de chevaux exercent une traction dans des directions opposées. Il répète cet exploit pour sa rentrée à Londres en 1892, mais avec deux chevaux d'attelage du marquis de Queensberry. Ce dernier lui en aurait offert un.

Dans le film Louis Cyr : L'Homme le plus fort du monde, Ben Weider dit que les records de Cyr demeurent « incontestés et incontestables ».

Le , Victor Delamarre a pourtant battu 4 records d'un coup avec son dévissé de 309 livres et demie (140 kg)[17].

Records mondiaux

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Tel que présentés dans le film Louis Cyr : L'Homme le plus fort du monde

  • Croix de Fer : 97 3/4 livres (44 kg) de la main gauche et 88 livres (40 kg) de la main droite
  • Volée à une main : 188 1/2 livres (85 kg)
  • Développé à une main : 273 livres (124 kg)
  • Back Lift : 3635 livres (1649 kg)
  • Levée à deux mains : 1897 livres (861 kg)

Distinctions

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Monument à Louis Cyr par Robert Pelletier

Un district de Montréal est nommé Louis-Cyr en son honneur ; il se trouve dans le quartier Saint-Henri, qu'il a patrouillé en tant que policier. Le parc Louis-Cyr et le parc des Hommes-Forts sont tous deux érigés en sa mémoire, le dernier étant décoré de sa statue[18].

L'École Louis-Cyr est une école secondaire située à Napierville, ville natale de Louis Cyr.

Le , la municipalité de Saint-Cyprien-de-Napierville l'a identifié comme personnage historique[19].

Références culturelles

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En 2013, Antoine Bertrand interprète l'homme fort dans le film Louis Cyr : L'Homme le plus fort du monde, réalisé par Daniel Roby.

L'album illustré de Nicolas Debon, The Strongest Man in the World : Louis Cyr, publié en 2007, relate également son histoire.

Postérité

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En 2014, dans l'ancienne maison de Cyr, un musée est créé par la fondation des Compagnons de Louis Cyr. Ces derniers ont acheté la maison situé au 215 rue Sainte-Louise à Saint-Jean-de-Matha en 2011. Transformée en duplex durant les 100 dernières années, la fondation a travaillé à remettre la maison en l'état d'origine grâce à des photos d'époques. Le musée, la Maison Louis-Cyr, présente aujourd'hui une reconstitution du mode de vie de l'homme fort ainsi qu'une exposition bibliographie sur sa vie[20]. La Maison propose également une visite virtuelle à l'aide de casque de réalité virtuelle dans 4 salles du musée[21]. En 2024, le musée devient une institution muséale agréée[22].

Anecdotes

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  • Louis Cyr est à l'origine de la Loi du Square Chaboillez.
  • Louis Cyr est d'ascendance acadienne. Son ancêtre Jean Sire, de la région de Flandre en France, s'établit à Grand-Pré, en Acadie. C'est le petit-fils de Jean, Paul Sire, qui s'établira à l'Acadie, Haut-Richelieu, dans la tourmente du Grand Dérangement. Louis Cyr est de la huitième génération de cette famille en Amérique du Nord.

Notes et références

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  1. http://www.nosorigines.qc.ca/Genealogie_Canada_Children.aspx?genealogie=Joseph-Louis&pid=523493&lng=fr
  2. Certaines sources parlent de 1886. 1885 concorde toutefois avec la biographie de David Michaud.

Références

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  1. a b et c Louis Cyr sur L'Encyclopédie canadienne
  2. a et b « Louis Cyr : le Hercule québécois », sur Le Journal de Montréal, (consulté le )
  3. La Presse, Les mémoires de Louis Cyr, op. cit. et Paul Ohl, Louis Cyr : Une épopée Légendaire, édition Libre Expression, p. 59
  4. a b c et d « Biographie – CYR, LOUIS (baptisé Cyprien-Noë) (Cyprien-Noé) – Volume XIV (1911-1920) – Dictionnaire biographique du Canada », sur www.biographi.ca (consulté le )
  5. Ohl, Paul, Louis Cyr : Une épopée légendaire, p. 80
  6. a et b La Presse, op. cit., édition du samedi 22 mars 1908
  7. Ohl, Paul, Louis Cyr : Une épopée légendaire, p. 80
  8. Ohl, Paul, Louis Cyr : Une épopée légendaire, p. 94
  9. « L'homme », sur Fortissimus
  10. Paul E. Ohl, Louis Cyr : biographie, (ISBN 978-2-7648-0872-6 et 2-7648-0872-0, OCLC 826436787, lire en ligne), p. 106
  11. Paul E. Ohl, Louis Cyr : biographie, (ISBN 978-2-7648-0872-6 et 2-7648-0872-0, OCLC 826436787, lire en ligne), p. 197
  12. Paul E. Ohl, Louis Cyr : biographie, (ISBN 978-2-7648-0872-6 et 2-7648-0872-0, OCLC 826436787, lire en ligne), p.342
  13. « Mort du champion Louis Cyr », La Presse,‎ , p. 1,3 (ISSN 0317-9249, lire en ligne)
  14. « Louis Cyr est mort », Le Devoir,‎ , p. 4 (lire en ligne)
  15. « L'ex-champion de (sic) hommes forts du monde entre dans la légende », La Patrie,‎ , p. 11 (lire en ligne)
  16. (en) « Louiscyr-lefilm - Kumpulan Informasi Tentang Situs Taruhan Online », sur Louiscyr-lefilm (consulté le ).
  17. Blais, Simon, « Victor Delamarre et les secrets d'Hercule », Cap-aux-Diamants,‎ , p. 25-27 (ISSN 0829-7983, lire en ligne)
  18. Robert Pelletier, sculpteur, Louis Cyr, vers la création d'un monument, Entretion avec Anne-Marie Sigouin, par Serge Fisette
  19. Ministère de la Culture et des Communications, « Cyr, Louis », sur Répertoire du patrimoine culturel du Québec (consulté le )
  20. Jean-Christophe Laurence, « Un musée à la mesure de Louis Cyr », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le )
  21. Geneviève Quessy, « Découvrir le quotidien de l'homme fort Louis Cyr grâce à une visite virtuelle », sur Le Journal de Montréal, (consulté le )
  22. Steven Lafortune, « La Maison Louis-Cyr désormais une institution muséale agréée », sur Mon Joliette, (consulté le )

Sources

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  • Ben Weider, Louis Cyr, l'homme le plus fort du monde, 1976.
  • Paul Ohl, Louis Cyr : Une épopée légendaire, Montréal, Libre Expression, 2005, 632p

Annexes

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Articles connexes

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Liens externes

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