Les Katangais sont une bande de jeunes loubards faisant office de service d'ordre ou de milice éphémère au moment de l'occupation de la Sorbonne en Mai 68.

Un Katangais occupant la Sorbonne armé d'un fusil.

Origine du nom modifier

Les Katangais trouvent leur nom dans celui des mercenaires blancs engagés en 1960 pour soutenir l'indépendance d'une province sécessionniste au sud du Congo-Kinshasa sous domination belge[1]. Le chef de la bande « Jacky » prétend en avoir été membre, pourtant aucun des voyous n'est un ancien mercenaire[2].

Occupation de la Sorbonne modifier

 
Réunion des Katangais à la Sorbonne le 11 juin 1968 sous un portrait de Fidel Castro.

Ex-blousons noirs[3], les Katangais sont fédérés autour de « Jacky », vingt-huit ans, grand gaillard moustachu, et Lucien dit « Lulu »[4]. La trentaine de membres de la bande arpente la Sorbonne armée de chaînes de vélo et de poings américains[5]. Ils s'autoproclament « défenseurs de la révolte »[1]. « Jacky » fonde le Comité d'intervention rapide, capable de récupérer les blessés dans les bras des CRS et de tenir tête aux forces de police à la Sorbonne, à Censier ou encore à l'Odéon[1]. De plus, ils forment des « commandos anti-ratonnades » regroupant sept ou huit Katangais qui parcourent au petit matin les rues du Quartier latin et s'en prennent directement aux policiers[4]. Ils sont payés par le Comité d'occupation de la Sorbonne contre le gîte et le couvert mais le groupe devient rapidement hors de contrôle[6],[7].

Consommateurs de morphine, hachisch et LSD[3], les étudiants grévistes voient d'un mauvais œil leurs comportements violents exacerbés par l'alcool et la drogue[7]. Les étudiants finissent par se désolidariser d'eux lorsqu'il dérivent vers « une certaine forme de terreur »[8],[9]. Les étudiants grévistes les déprécient comme du Lumpenprolétariat[10]. Dans la nuit du 11 au 12 juin, ils occupent une partie des bureaux du rectorat, le service du personnel administratif et le service ronéo. Les étudiants grévistes décident alors de les expulser[9].

Après leur expulsion, ils sont arrêtés par la police le 14 juin 1968[11]. Ils sont défendus par Christian Hennion, futur journaliste de Libération et activiste de mai 68[12].

Historiographiquement, les Katangais sont hissés comme un mythe de Mai 68[13].

Règlement de comptes modifier

Peu après l'expulsion, certains Katangais se constituent « en maquis » dans les bois de Vernon, dans l'Eure. Durant cette période, le Katangais Jean-Claude Lemire dit « Jimmy » est assassiné par plusieurs autres membres de la bande, dont une fille de dix-neuf ans et huit jeunes gens de seize à vingt-quatre ans, au motif qu'il menaçait la survie du groupe[7],[14].

Notes et références modifier

  1. a b et c Nicolas Charbonneau et Laurent Guimier, Histoire de la Vème république pour les Nuls, édition poche, edi8, (ISBN 978-2-7540-8170-2, lire en ligne)
  2. François de la Bretèque, « Le langage de Mai 68 dans la mémoire du cinéma de fiction. Milou en Mai, de Louis Malle », Mots. Les langages du politique, no 86,‎ , p. 85–98 (ISSN 0243-6450, DOI 10.4000/mots.13802, lire en ligne, consulté le )
  3. a et b « Le bateau ivre », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. a et b René Backmann et Lucien Rioux, L'explosion de mai, 11 mai 1968: Histoire complète des événements, (Robert Laffont) réédition numérique FeniXX, (ISBN 978-2-221-23139-5, lire en ligne)
  5. Catherine Clément, Mémoire, Stock, (ISBN 978-2-234-06288-7, lire en ligne)
  6. Stéphane Encel, Matrix - En quête de nos futurs, Le Passeur, (ISBN 978-2-36890-922-5, lire en ligne)
  7. a b et c ROUSSEAU Sabine, Françoise Vandermeersch. L'émancipation d'une religieuse, KARTHALA Editions, (ISBN 978-2-8111-0679-9, lire en ligne)
  8. Axelle Choffat, « "Les Katangais" à l'intérieur de la Sorbonne », sur www.linternaute.com (consulté le )
  9. a et b Christian Charrière, Le printemps des enragés, (Fayard) réédition numérique FeniXX, (ISBN 978-2-7062-1381-6, lire en ligne)
  10. Meyer Drahi, Les bonnes portes: Il me fallait vous le dire..., BoD - Books on Demand, (ISBN 978-2-322-07617-8, lire en ligne)
  11. « Déroulement des événements de Mai 1968 : chronologie (s. d.). État des poursuites à l'égard des personnes arrêtées à la suite des troubles à la Sorbonne : note (4 mai 1968). État des personnes détenues à la suite des incidents provoqués par les étudiants : note (10 mai 1968). Arrestation des manifestants au cours de la nuit du 10 au 11 mai : note (11 mai 1968). Exercice du droit de grâce et mise en liberté provisoire de condamnés ayant formé appel : note (11 mai 1968). Projet de loi d'amnistie pour les infractions commises entre le 1 février et le 15 mai 1968 : notes (16-18 mai 1968). Événements de Mai 1968 : note (18 mai 1968) et lettre collective adressée au général de Gaulle (18 mai 1968). Poursuites judiciaires contre les manifestants : note (25 mai 1968). Poursuites judiciaires contre les responsables des mouvements extrémistes étudiants : note (27 mai 1968). Grève dans les services judiciaires : note (27 mai 1968). Arrestations et poursuites pour port d'arme : notes (28 mai 1968). Manifestation gaulliste à Lyon : dépêche de l'Agence France-Presse [AFP] (31 mai 1968). Audience de René Capitant, ministre de la Justice : note (2 juin 1968). Situation sociale le 3 juin 1968 : note (s. d.). Situation judiciaire des personnes ayant manifesté à Paris dans la nuit du 10 au 11 juin et du 11 au 12 juin : note (12 juin 1968). Procédures judiciaires contre les manifestants et leurs meneurs : note (12 juin 1968). Ouverture d'information contre X sur la base de l'article 97 du code pénal : note (12 juin 1968). Suites judiciaires des événements : note (13 juin 1968). Poursuites contre les Katangais : note (15 juin 1968). Poursuites devant la Cour de sûreté de l'État : note (18 juin 1968). Ouverture d'une information devant la Cour de sûreté de l'État : note (24 juin 1968). Incidents survenus au lycée de Saint-Nazaire : rapport du procureur général près la cour d'appel de Rennes, procès-verbaux d'interrogatoires et notes (12 juin-4 juillet 1968). Arrestations à la suite des manifestations des nuits du 13 au 14 juillet et du 14 au 15 juillet : note (15 juillet 1968). Mesures destinées à prévenir l'occupation irrégulière de locaux publics : projet de loi et note (17 juillet 1968). Forclusions encourues du fait des grèves survenues en mai 1968 : projet de loi (14 juin 1968), rapport de la commission des lois du Sénat (11 juillet 1968) et rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale (18 juillet 1968). Dégradations commises à la Sorbonne et au lycée Colbert au cours des événements de mai et juin : note (2 août 1968). État des poursuites suivies contre les manifestants : note (18 septembre 1968). Modification de la législation sur les manifestations : lettre de Bernard Ducamin, conseiller technique, à Pierre Somveille, directeur de cabinet de Raymond Marcellin, ministre de l'Intérieur (4 octobre 1968). Renforcement des moyens d'action de la police nationale : lettre de Bernard Ducamin à Paul Cousseran, directeur de cabinet du secrétaire général pour la police (4 octobre 1968). État des procédures devant les tribunaux correctionnels relatives aux événements de Mai-Juin 1968 : notes et listes (21 novembre-3 décembre 1968). Poursuites contre les manifestants de Mai et Juin : note (27 novembre 1968). Répression des manifestants du mois de mai : note (6 décembre 1968). Poursuites engagées contre des personnes ou des organisations à la suite des événements de Mai 1968 : notes et rapports du procureur général près la Cour de sûreté de l'État (24 juin-23 décembre 1968). Informations ouvertes devant la Cour de sûreté de l'État à la suite des événements de Mai 1968 : notes et tableau récapitulatif (10 décembre 1968-22 janvier 1969). Poursuites contre les étudiants à la suite des événements de Mai et Juin 1968 : note (7 mars 1969). er 1 », sur FranceArchives (consulté le )
  12. Serge July, Dictionnaire amoureux du journalisme, Place des éditeurs, (ISBN 978-2-259-22966-1, lire en ligne)
  13. Patrick Combes, La Littérature et le mouvement de mai 68: Écriture, mythes, critique, écrivains (1968-1981), Seghers (réédition numérique FeniXX), (ISBN 978-2-232-12644-4, lire en ligne)
  14. « Le procès des " Katangais " débutera lundi à Évreux », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).