L'Affaire Bernard Natan

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L'Affaire Bernard Natan est un livre de l’historienne Dominique Missika, publié en 2023 chez Denoël, retraçant une partie de la vie du producteur et réalisateur de cinéma Bernard Natan. Tout en réhabilitant la carrière de Bernard Natan face aux persécutions et à la propagande nazies, l’ouvrage, réalisé à la demande de ses descendants, passe sous silence ses débuts de pornographe, qui ont fait l’objet de plusieurs travaux de recherche.

Contenu

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Né Natan Tannenzapf en Roumanie d’une famille juive, acquéreur de Pathé dans les années 1930, Bernard Natan a fait l’objet de campagnes de diffamation et de persécution dans les années 1930. Il a été déporté et est mort en camp d’extermination à Auschwitz.

L’ouvrage de Dominique Missika, qui puise ses sources essentiellement dans les archives des descendants de Natan et dans les films et ouvrages que celles-ci ont inspirées[1], retrace la chute du producteur, les persécutions, calomnies et injustices dont il est l’objet alors que les campagnes antisémites se multiplient dans la France des années 1930. Il évoque également les faits d’armes de Natan pendant la Première Guerre mondiale, où il est blessé et décoré.

Débuts pornographiques

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L’ouvrage passe sous silence une partie des débuts de Bernard Natan, notamment son activité de producteur d’œuvres pornographiques. En 1911, Natan est condamné à 1 000 francs d'amende et quatre mois de prison pour « outrages aux bonnes mœurs ». Selon deux articles de presse du Nouvel Observateur et de Play Boy, cette condamnation judiciaire est prononcée pour avoir produit un film intitulé Chevalier Vaselinus[2],[3]. La société Grognet & Cie en assurait la diffusion dans un réseau de salles clandestines et de maisons closes. Nombre de producteurs de cinéma se livraient à cette activité et Charles Pathé lui-même en était fortement soupçonné[2],[source insuffisante]. L’ouvrage de Missika n’évoque qu'un « film grivois de fête foraine » (le titre permet de supposer qu’il dépassait les limites de la grivoiserie).

 
La couverture du numéro de de la revue Positif.

Les activités de pornographe de Bernard Natan ont fait l’objet de travaux de recherche depuis les années 1960 mais sont controversées[4]. En 1964, la revue de référence Positif, sous la plume d'Ado Kyrou, résistant, réalisateur et écrivain, consacre un article à ce type de film dans le numéro de [5]. Un catalogue cite une demi douzaine de films pornographiques attribués à Nathan (avec un « h ») datant des années 1920, allant de La Maitresse du Capitaine de Meydeux à Un fameux champignon. Ces travaux ne figurent pas dans l’ouvrage de Dominique Missika, ni même dans sa bibliographie[6][source secondaire souhaitée].

De même, en 1993, le chercheur américain spécialiste des médias Joseph W. Slade publie ses travaux sur Bernard Natan dans la revue scientifique Journal of Film and Video, dans un article fouillé et figurant de nombreuses sources[7]. Dominique Missika ne fait pas non plus figurer cet article dans sa bibliographie, pourtant émanant d’un chercheur spécialisé dans l’érotisme et la représentation du sexe à l’écran, et cite Slade comme « ennemi irréductible » de Bernard Natan, sans justifier ce qualificatif à propos du chercheur, qui n’a publié qu’une seule fois à ce sujet[8].

Ces affirmations, reprises par The Journal of Film and Video[9], ont mené André Rossel-Kirschen à demander un droit de réponse à Joseph W. Slade, refusé par le périodique. André Rossel-Kirschen remet aussi en cause des attributions de films à Bernard Natan par la revue Positif de 1964[4].

Notes et références

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  1. Missika, Dominique, L’Affaire Bernard Natan, Paris, Denoël, , p. 235-243.
  2. a et b « Des premières photos aux magnétos : l'incroyable essor de l'image porno », Le Nouvel Obs, (consulté le ).
  3. (en) « The History of Sex in Cinema », Playboy (US), no avril 1965,‎ (lire en ligne  ).
  4. a et b André Rossel-Kirschen, « Mise au point sur le grand producteur Bernard Natan, Réponse de André Rossel-Kirschen au Docteur Slade », sur lips.org, .
  5. Ado Kyrou, « D’un certain cinéma clandestin », Positif, vol. 61-62-63,‎ , p. 20 5.
  6. Dominique Missika, L’Affaire Bernard Natan, Paris, Denoël, , p. 251.
  7. (en) Joseph W. Slade, « France’s legendary pornographer », Journal of Film and Video, vol. 45,‎ (lire en ligne  ).
  8. Dominique Missika, L’Affaire Bernard Natan, Paris, Denoël, , p. 241.
  9. The Journal of Film and Video, numéro 2-3, été automne 1993.[réf. incomplète]

Liens externes

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