Albert Lejeune

journaliste français

Albert Lejeune, né le à Savigny-sur-Orge et mort fusillé le à Marseille, est un journaliste, patron de presse, homme d'affaires et collaborateur français.

Albert Lejeune
Albert Lejeune dans Le Petit Journal du 22 septembre 1933.
Biographie
Naissance
Décès
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Nationalité
Activité

Biographie

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Jeunesse et carrière dans la presse de l'Entre-deux-guerres

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Né orphelin de père, Albert Lejeune devient clerc de notaire à l'âge de 14 ans puis passe employé, de 1901 à 1910, au service du contentieux de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans. Son entrée dans le journalisme se fait durant cette période, où il écrit des piges pour L'Auto-Vélo.

Autodidacte, réformé du service militaire pour raisons de santé, il entre en 1909 au service du député républicain Jean Argeliès (1862-1914). C'est sans doute avec son soutien qu'il fonde l'année suivante un hebdomadaire, L'Avenir de la Seine et Oise, qui fait cependant faillite en quelques mois. Il épouse en 1910 Georgette Charpentier, avec laquelle il a deux enfants. Elle est la fille du directeur du journal La Gazette d'Arpajon, Jules-Honoré Charpentier[1]. En 1911, il prend la direction du journal de son beau-père et le nomme La Gazette de la Seine et Oise puis en devient le propriétaire. En 1913, il fait l'acquisition d'une imprimerie pour son journal. De 1914 à 1919, il est mobilisé mais ne prend pas part aux combats. Après la guerre, il fonde une société anonyme qui regroupe tous ses actifs : La Gazette, l'imprimerie et une société de gestion immobilière qui semble lui avoir beaucoup rapporté.

C'est sans doute à la fin des années 1920, ou au début des années 1930 qu'il rencontre Raymond Patenôtre (1900-1951), patron de presse influent, qui dirige le groupe Omnium républicain de presse, spécialisé dans la presse quotidienne régionale. Albert céda la majorité de son capital à Patenôtre et devint son bras-droit. Ce dernier lui confia d'abord la direction de quelques journaux locaux puis, en 1930, il le nomme directeur du Petit Niçois. Cette même année, il est fait chevalier de la Légion d'honneur.

En 1935, il est pratiquement à tous les postes de directeur général et administrateur de la plupart des titres du groupe de Patenôtre (Le Petit Niçois, Le Petit Var, Lyon républicain)[2],[3]. Il accède surtout à la direction générale d'un quotidien parisien, Le Petit Journal racheté par Patenôtre et ses alliés en 1932[4]. Il occupe cette fonction de 1932 ou 1933 à 1937[5]. À l'instigation de Patenôtre, ce quotidien soutient Pierre Laval en 1934-1935 puis se rapproche du Front populaire[6]. En août 1936, Lejeune participe à un meeting du Front populaire à Nice, en tant que directeur du Petit Niçois[7]. Il devient aussi président du conseil d'administration d'un quotidien d'Épinal, L'Express de l'Est, racheté par Patenôtre en 1936 à Paul Lederlin[8].

Lejeune est promu officier de la Légion d'honneur en 1935[9]. Il est alors vice-président de l'association professionnelle de la presse républicaine[10].

S'il perd son poste au Petit Journal, que Patenôtre vend en 1937, il prend le contrôle de l’hebdomadaire parisien Marianne cette même année[11],[12]. Des industriels vosgiens menés par Georges Laederich prennent le contrôle de L'Express de l'Est en 1937 mais ils maintiennent Lejeune à son poste en raison de ses compétences en matière d’administration de journaux et parce qu’il s’agissait de maintenir le secret sur le rachat. Il conserve cette fonction jusqu'en 1944[13].

Patenôtre le place à la tête de la société L’Auto-Sports, qui publie L'Auto, premier quotidien sportif français alors en pleine déconfiture, qui deviendra après guerre L’Équipe[14]. Gestionnaire redoutable et opportuniste, Lejeune débarque Henri Desgrange et Jacques Goddet, avant de réintégrer ce dernier car il était le seul à pouvoir gérer et organiser le Tour de France, course créée et organisée par L'Auto.

Collaboration sous l'Occupation

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Patenôtre, résolument antinazi, confie les clefs de son groupe à Lejeune et disparaît, rejoignant New York en 1941. Durant l'Occupation, Lejeune demeure directeur général du Petit niçois, du Régional de l’Ouest et de la Sarthe, directeur du Lyon républicain et du Soir de Lyon. En juillet 1941, Lejeune est désigné P-DG du journal L'Auto. Pendant l'Occupation, certaines rubriques du journal se signalèrent par des communiqués hostiles à la Résistance dont les membres sont désignés comme des « terroristes ». Entre-temps, le capital de l'Omnium dont le délégué était Albert Lejeune passa pour l'essentiel entre les mains de l'Occupant. Celui-ci obtint mandat de la Propaganda Abteilung in Frankreich, instrument de contrôle de la presse. Lejeune commença très tôt son travail de collaboration, fermement convaincu qu'une cohabitation avec les Allemands était possible[15].

Lejeune ne s'arrêta pas là. Il frappa fort aussi dans l'édition. En , il achète 700 parts (sur 2 000) de Nathan[16]. Entre mars et , il prend le contrôle des éditions Calmann-Lévy par le biais de l'une de ses sociétés, les Éditions Balzac[17]. Il participa activement à ce que l'on appelait alors « l'aryanisation des sociétés juives », prenant des parts financières à bas prix, ce qui revenait à de la spoliation.

 
Le Petit Marseillais.

Condamnation et exécution à la Libération

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Après la Libération, Albert Lejeune est arrêté à Nice, où il résidait[18], ses biens sont confisqués, et son procès s'ouvre le devant la cour d'assises de Marseille. L'accusation ne porte que sur son implication dans une tentative de rachat du quotidien Le Petit Marseillais, à laquelle furent mêlés les Allemands et Pierre Laval[19]. Au cours du procès fut révélée sa fortune, soit près de 40 millions de francs de l'époque ; il est qualifié de « rapace » et de « profiteur »[20]. Il est condamné à mort au terme de trente minutes de délibération de la Cour de justice[21]. Il fut un des seuls patrons de presse, avec Jean Luchaire, à être exécuté durant l'épuration en France. Peu avant de mourir, il tenta de se disculper en accusant Patenôtre, son exécution est alors retardée[22]. Il est passé finalement par les armes le [23].

Bibliographie

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  • Jacques Lablaine, L'Auto-Vélo, journal précurseur du Tour de France, L'Harmattan, 2010, p. 229–238 (ISBN 978-2-296-13605-2)
  • Claude Bellanger, Histoire générale de la presse française, Tome III (1871-1940), PUF, 1972
  • Pascal Fouché, L’Édition française sous l'Occupation : 1940-44, 2 vol., Imec Édition, 1987
  1. La Liberté, 5 juin 1910, Le Journal, 7 octobre 1934
  2. Pierre-Marie Dioudonnat, L’argent nazi à la conquête de la presse française, 1940-1944, Paris, Ed. Jean Picollec, 1981, p. 71-85
  3. Le Petit Provençal, 23 octobre 1935
  4. Fred Kupferman, Philippe Machefer, Presse et politique dans les années Trente. Le cas du Petit Journal, dans la Revue d'histoire moderne et contemporaine, janvier-mars 1975 (Lire en ligne)
  5. Le Petit Journal, 9 mars 1937, L'Illustré du Petit journal, 1er novembre 1936 (photographie), Le Petit Journal, 22 octobre 1936 (photographie), Ibid., 31 mars 1936 (photographie), Ibid., 23 octobre 1935, Ibid., 21 mars 1933
  6. Fred Kupferman, Philippe Machefer, op. cit.
  7. La République, 3 août 1936
  8. Claude Ferry, L'Express de l'Est (1921-1944), in L'Est républicain 1889-1989. Le quotidien dévoilé, Éditions de l'Est, 1990
  9. Le Petit Journal, 19 février 1935, Le Petit Journal, 17 avril 1935, Le Petit Courrier, 21 février 1935 (photographie)
  10. Le Petit Provençal, 20 février 1935
  11. Pierre-Marie Dioudonnat, op. cit.
  12. L’Événement, 14 février 1937
  13. Jean-François Colas, Georges Laederich (1898-1969) : le combat d'un industriel vosgien contre le Front populaire et le communisme, 1934-1939, dans les Annales de la Société d'émulation du département des Vosges, 2018, p. 74, Jacques Lablaine, L’Auto-Vélo, L’Harmattan, 2010. L’auteur cite sans précisions l’achat de L’Express de l’Est au sénateur « Leverdin » (sic) par Lejeune (en fait Patenôtre), qu’il date faussement de 1937, et ne mentionne pas sa vente à Laederich et ses collègues.
  14. Jacques Lablaine, L’Auto-Vélo, L’Harmattan, 2010
  15. Lire l'interview par Lejeune d'un "témoin" de l'Occupation dans Paris en juillet 1940, intitulé « À travers la France occupée ».
  16. Fouché (1987), op. cit., § Nathan et suiv.
  17. Calmann-Lévy sera rebaptisée Éditions Balzac jusqu’en août 1944.
  18. L'Aurore, 28 septembre 1944
  19. Combat, 21 octobre 1944
  20. Pierre-Marie Dioudonnat, L'argent nazi à la conquête de la presse française, 1940-1944, Jean Picollec, 1981, pp. 278-279.
  21. Combat, 22 octobre 1944, Ce soir, 21 octobre 1944
  22. Le Monde, 29 décembre 1944, Ibid., 5 janvier 1945
  23. Le Monde, 4 janvier 1945

Liens externes

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