Un extrait sur Zombi

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'Cet article me fut inspiré par une conversation que j'ai eue avec une étudiante infirmière. En effet, cette dernière croyait dur comme fer que les bokos avaient le pouvoir de ressusciter les morts. Grande croyante devant l'éternel, la zombification est pour elle un pouvoir que Satan donne à ses sbires tels que les prêtres vaudous, car « le mal existe, oui Doc, » martèle-t-elle ! Je n'ai jamais compris cette envie que prennent les chrétiens, en particulier ceux des cultes réformés, à vouloir détruire le vaudou. Mais cela m'est d'autant inexplicable qu'ils ne deviennent pas des adeptes des hougans, car ces derniers semblent posséder le secret de la vie éternelle : ils peuvent ressusciter les morts. Ils auraient ainsi un pouvoir identique à Dieu lui-même ! J'expliquai à ma gentille ingénue que les zombis n'ont rien de mystiques et que le sujet est sans doute traité sur le Web. Nous fîmes donc des recherches. Devant la foison d'informations recueillies, je me dis que je devrais vous en faire profiter. Après cela, si vous voulez continuer à vous accrocher à vos superstitions, libre à vous. Pour ma part, je ne vois aucune différence entre croire en un loa serpent nommé Dambalah et offrir dévotion à un bout de pain qui serait de la chair... Le phénomène zombi fut révélé à la face du monde suite à deux évènements.

Premier évènement : Celui par qui le scandale arriva ! Le 30 avril 1962, Clairvius Narcisse est admis à l'hôpital de Deschappelles. Le jeune homme crache une quantité impressionnante de sang et souffre de violentes montées de fièvre. Sa condition se détériore si rapidement que ses médecins le déclareront mort quelques heures après sa première série d'examens. Le personnel médical, parmi lequel un praticien américain, signera son certificat de décès le lendemain et toute sa famille assistera à ses obsèques une semaine après son admission aux soins intensifs. Il sera enterré dans son village près de L'Estère. En 1980, près de dix-huit ans après qu'on l'eut enterré, un homme accoste la soeur de Clairvius Narcisse et prétend être son frère. Clairvius Narcisse raconte alors avoir été victime de zombification de la part d'un houngan, et vraisemblablement sur commande de son propre frère suite à une affaire d'héritage. Il raconte qu'après avoir été frotté par une « poudre de zombi », il a assisté impuissant à son propre enterrement, déclarant pouvoir voir et entendre, mais sans pourvoir parler ni ressentir quoi que ce soit. Après son enterrement, on le déterra, puis on le força à travailler en tant qu'esclave dans une plantation avec d'autres zombis. Dans le but de garder leurs esclaves, les exploitants les droguaient afin de les conserver dans cet état de « mort-vivant ». Clairvius Narcisse devrait sa reprise de conscience deux ans plus tard à un surveillant qui aurait oublié de lui donner sa dose de drogue journalière. Il commença alors à errer dans le pays, craignant de croiser son frère, et ce n'est qu'à la mort de ce dernier qu'il se décida à retrouver sa soeur pour lui révéler son identité.

Deuxième évènement : décision de faire une recherche scientifique sur le phénomène Cette nouvelle ébranle toute la communauté scientifique. Convaincu que ce cas lui permettra de réfuter, une bonne fois pour toutes, le mythe de la potion de zombification haïtienne, le Dr Lamarque Douyon, directeur du centre psychiatrique de Port-au-Prince, engage un ethnobotaniste fraîchement diplômé de l'université Harvard afin que ce dernier enquête sur le terrain. Muni de la seule hypothèse que l'état de mort apparente soit dû à une intoxication quelconque, Wade Davis se rend ainsi dans la ville de Deschappelles à Haïti. Il y rencontre Clairvius Narcisse de même qu'un prêtre vaudou à qui il tentera de soutirer la recette de la fameuse « poudre à zombie ». À la suite de pénibles négociations, le prêtre accepte de fournir des échantillons à Davis pour une somme que ce dernier refuse encore de dévoiler aujourd'hui. La substance que le chercheur rapporte au laboratoire a l'apparence d'un mélange de poussière et de cendre. Sur les cinq échantillons obtenus, tous contiennent des quantités variables de vers séchés, de peau de grenouille, d'os humains, d'écailles de poisson et de diverses plantes. D'apparence anodine, ces substances suffisent néanmoins à mettre la puce à l'oreille de Davis. En effet, de nombreux documents scientifiques font mention de cas d'empoisonnement à la tétrodotoxine contenue dans certaines espèces de poissons. La mieux connue d'entre elles, le tétrodon ou poisson ballon, figure parmi la liste des éléments relevés lors de l'analyse du mélange. L'intoxication à la tétrodotoxine peut entraîner de nombreux troubles tels que l'incoordination motrice, de puissantes céphalées ou même l'installation dans un coma réversible. Ces effets correspondent évidemment à une partie des symptômes éprouvés par Narcisse avant d'être déclaré mort, mais ils n'expliquent en rien l'état de zombification. « Les victimes d'empoisonnement alimentaire de ce genre ne deviennent pas zombies pour autant, » explique Davis. La présence de Datura stramoine dans la poudre examinée constitue peut-être la réponse à cette problématique. Ce végétal fortement toxique contient en effet des alcaloïdes tropaniques, des molécules aux propriétés à la fois euphoriques et hallucinogènes. Les molécules d'alcaloïdes tropaniques contenues dans plusieurs variétés de ces végétaux contiennent des éléments de la famille des récepteurs muscariniques. Largement utilisés dans le domaine médical, ces agents provoquent la dilatation des pupilles, la vasodilatation, une importante diminution du rythme cardiaque de même qu'une surproduction de sécrétions. En prenant en compte cette liste de symptômes, Davis se rapproche de plus en plus d'une explication générale du phénomène zombie. Un problème persiste pourtant : comment expliquer qu'on ait maintenu le sujet dans un tel état aussi longtemps? Le chercheur pense qu'on administrait sur une base régulière des doses de tryptamine à Narcisse. Contenue dans la peau et le venin de plusieurs espèces de crapauds, cette substance jouissait d'une grande popularité à l'époque où ont eu lieu les phénomènes. Absorbée par voie orale, cette toxine aux propriétés psychédéliques aurait facilement pu être incorporée à l'alimentation du sujet. Ses effets, s'apparentant à ceux du LSD consommé en forte dose, se rapprochent encore plus d'une expérience de mort éveillée que ceux du datura. Deux mg suffiraient pour altérer de façon significative l'état de conscience et les capacités intellectuelles d'une personne intoxiquée.

La vérité scientifique Les observations de Wade Davis, grâce aux démarches du docteur Lamarque Douyon, j'insiste sur ce point, ont sans nul doute contribué à l'élaboration d'une réfutation plausible du mythe du retour à la vie. La zombification est un cas simple d'empoisonnement : le poison est versé le plus souvent dans la chaussure ou sur le dos de la personne visée afin qu'il imprègne la peau. Les fameux koudpoud n'ont donc rien de mystique. Je doute cependant de l'utilité de pareilles affirmations. En effet, pas mal de pasteurs vivent de la peur que le vaudou inspire, et je suis sûr qu'ils trouveront les mots nécessaires pour convaincre leurs ouailles du contraire de mon écrit ! Mais j'ai fait une autre découverte : le mythe du zombi, ce mort vivant qui inspirera bien de films d'horreur, le monde le doit à Haïti ! C'est lors de l'occupation d'Haïti par les États-Unis de 1915 à 1934 que le personnage du zombi a été introduit dans le patrimoine culturel américain. Dans l'imagination populaire et les oeuvres fantastiques (notamment les romans, les productions cinématographiques et les jeux vidéo), le zombi est considéré comme une créature fantastique morte-vivante ressucitée par des magiciens dotés d'un savoir dans les arcanes de la nécromancie. En effet, la croyance haïtienne concède aux sorciers un vrai pouvoir de ressusciter les morts pour les rendre esclaves. Selon cette même croyance, le zombi est censé se reconnaître par les caractéristiques suivantes : •il a le teint livide; •il ne parle pas, mais émet des gémissements; •il se nourrit de chair humaine; •il boite fréquemment d'une jambe (dans les films).

C'est quand même un étrange revirement des choses. Je me souviens qu'une fois un type eut à dire qu'Haïti était le seul pays ayant subi une occupation américaine et où on ne joue pas au baseball. Mais, nous, on leur a donné le mythe du zombi, c'est qui les superstitieux alors ? 'Texte gras'[[Titre du lien[[Titre du lienTexte gras]]]]

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