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(pour rappel, Q111011715)

Le Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs, publié en 1648, détaille l'expérience réalisée au puy de Dôme suivant les plans de Blaise Pascal ainsi que les reproductions visant à confirmer les résultats. Elles s'inscrivent dans la continuité de ses recherches sur la pression atmosphérique et font suite aux Expériences nouvelles touchant le vuide, faites dans des tuyaux, syringues, soufflets, & siphons de plusieurs longueurs & figures : avec diverses liqueurs, comme vif-argent, eau, vin, huyle, air, &c. (1647), menées à Rouen. Si les précédentes publications de Pascal exposent déjà ses hypothèses sur la pression atmosphérique, celles-ci lui permettent d'infirmer le concept d'horreur du vide : le principal argument tiré de ces expériences est qu'il n'y a pas de raison que l'horreur du vide varie en fonction de l'altitude ; c'est donc bien la pression atmosphérique qui est responsable du niveau de liquide dans les tubes.

Le Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs représente un ouvrage fondamental pour l'histoire de la physique puisque Blaise Pascal y réaffirme l'importance de l'expérience dans la construction des connaissances. D'autres publications de Blaise Pascal traitent de physique, notamment le Traitez de l'équilibre des liqueurs, et de la pesanteur de la masse de l'air. Contenant l'explication des causes de divers effets de la nature qui n'avaient point été bien connus jusqu'ici, & particulièrement de ceux que l'on avait attribués à l'horreur du vuide qui paraît en 1663, après la mort de Pascal, mais aurait été composé vers 1654.

Historique modifier

Histoire du concept d'horreur du vide modifier

Dans l'Antiquité, la physique d'Aristote, exposée dans le livre IV de la Physique et développée par Ptolémée, décrit un cosmos fermé et plein, dans lequel le vide n'a pas sa place et tout est ordonné suivant une hiérarchie de valeurs (Michon, 2002). Dans la conception de ces auteurs, la nature a horreur du vide, par ailleurs assimilé au Non-être : son existence est donc tout simplement impossible[1].

Cette idée d'horreur du vide perdure pendant plus de deux mille ans, notamment par sa récupération par la scholastique chrétienne. Il existe en effet un lien entre la religion chrétienne et l'attachement à la physique des anciens dans la mesure où raison et Révélation proviennent de Dieu et ne peuvent être contredites[2]. Malgré les travaux de Copernic, Kepler et Galilée, qui dès le XIVe siècle entraînent un détachement vis-à-vis de la physique d'Aristote, le concept d'horror vacui influencent encore les scientifiques du XVIe siècle[3]. Si une partie des savants admet que l'horreur du vide puisse être surmontée par une grande force et n'est donc pas inévitable, la grande majorité d'entre eux ne remet pas en cause son existence. Par ailleurs, l'existence du vide opère également une véritable coupure d'avec la physique d'Aristote dans la mesure où la différence de pression suppose un mouvement des gaz qui s'oppose au dualisme immobilité/passivité des objets inanimés[4].

Le débat sur l'existence du vide reprend une place importante dans le monde scientifique en 1645 quand Marin Mersenne, spécialiste de Galilée[5], popularise les travaux du savant Florentin connus sous le nom « d'expériences d'Italie ».

L'introduction du Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs (1648) souligne le tournant que représentent les travaux de Pascal en physique :

« Il ne s'est encore trouvé personne pour avancer [...] que la Nature n'a aucune répugnance pour le Vuide, qu'elle ne fait aucun effort pour l'éviter, et qu'elle l'admet sans peine et sans résistance[6]. »

Le passage de la physique aristotélo-scolastique à la physique mécaniste est une grande révolution du XVIIe siècle[7].

Chronologie des expériences modifier

En Italie : Galilée et Torricelli modifier

Galilée publie en 1638 le Discours et démonstrations mathématiques au sujet de deux sciences nouvelles, relatives à la mécanique et aux mouvements locaux, dans lequel il relate une expérience fondamentale dans le débat sur l'existence du vide, un grand changement conceptuel[a].

Galilée est amené à travailler sur l'existence du vide par un problème que lui soumettent les fontainiers de Florence : l'eau ne s'élève pas dans les pompes à plus de trente-deux pieds, soit une dizaine de mètres. Galilée rend compte de ce phénomène par l'horreur du vide et l'appel d'air dans le piston des pompes, mais cette explication ne le satisfait pas totalement. Par ailleurs, il l'eau remontant partiellement dans les pompes suggérerait que la nature n'aurait que partiellement horreur du vide[9].

Les travaux de Galilée amènent son disciple Torricelli, qui n'accepte pas non plus une horreur partielle du vide comme explication, à concevoir une expérience avec le mercure, en 1643[10]. Il utilise comme dispositif une cuve remplie d'une couche d'eau et d'une couche de mercure ainsi qu'un tube de verre rempli à ras bord de mercure, hermétiquement fermé, dont l'extrémité est plongée dans la couche de mercure avant d'être débouchée. Le mercure contenu dans le tube descend partiellement en laissant un espace apparemment vide en haut du tube. Ce résultat est totalement inattendu pour les savants de l'époque : selon eux, le mercure aurait soit dû descendre entièrement dans la cuve, soit rester entièrement dans le tube. Torricelli en conclut déjà que la hauteur de ce vide est un équilibre entre le poids du mercure et celui de l'air au-dessus du tube[11]. Développe ensuite le concept du baromètre[12],[13], alors qu'il envisage déjà la pression de l'air comme cause de la remontée seulement partielle de l'eau dans les pompes.

Torricelli réitère l'expérience en plongeant cette fois le tube dans la couche d'eau : le mercure du tube descend totalement dans la cuve, est progressivement remplacé par de l'eau, qui cette fois remonte jusqu'en haut du tube.

Explication : dans la première partie de l'expérience où seul le mercure est utilisé, le mercure retombe en partie dans la cuve sous l'action de la gravité mais remonte en partie à cause de la pression atmosphérique. Dans la seconde partie, le mercure descend totalement dans la cuve et est remplacé par l'eau, quatorze fois moins dense, qui peut donc remonter jusqu'en haut du tube. Autre argument en faveur de l'existence du vide : l'eau a pu remonter jusqu'en haut du tube[14].

Deux conclusions possibles à l'expérience de Torricelli : pour les tenants du concept d'horreur du vide, quelque chose se tient nécessairement dans l'espace au sommet du tube ; pour les opposants à ce concept, les physiciens "modernes", c'est bien du vide qu'il y a au sommet du tube et le niveau de mercure s'explique par un phénomène mécanique[12].

"Nous vivons submergés au fond d’un océan d’air, et nous savons par des expériences indubitables que l’air est pesant et même que cet air épais qui est près de la surface de la terre pèse environ le quatre centième du poids de l’eau (nombre donné par Galilée). D’autre part, les auteurs qui ont parlé du crépuscule ont observé que l’air visible et chargé de vapeurs s’élève au-dessus de nous à près de cinquante ou cinquante- quatre milles, ce que je crois exagéré parce que je pourrais montrer que le vide devrait faire beaucoup plus de résistance qu’il ne fait ; mais ils ont une échappatoire, ils peuvent dire que le poids dont parle Galilée doit s’entendre de la région la plus basse de l’air où vivent les hommes et les animaux, mais que, sur la cime des hautes montagnes, l’air commence à être très pur et pèse beaucoup moins que les quatre centièmes de l’eau." -> suppose déjà des différences de pression atmosphérique[13].

Importance dans l'histoire des sciences pour la méthode expérimentale des "variations" : en faisant varier les paramètres extérieurs - ici, la pression de l'air - on peut en déduire si la pression est bien la cause du niveau de mercure. Torricelli s'attend donc à ce que le niveau de mercure varie en fonction de la "pesanteur" de l'air -> Blaise Pascal propose de réaliser cette expérience au sommet d'une montagne où la pression sera plus faible[12].

En France modifier

Les expériences de Rouen modifier

Dans les travaux de Blaise Pascal (renvoyer vers la section de l'article sur Blaise Pascal concernant ses travaux en sciences physiques) Expérience des liqueurs

Pascal apprend les travaux de Galilée et Torricelli par Pierre Petit[15], en 1646.

1646 : en janvier 1646, son père, Étienne Pascal, se démet la jambe suite à une chute. Deux médecins, les frères Deschamps, sieurs des Landes et de la Bouteillerie, viennent le soigner, tout en apportant des ouvrages jansénistes caractéristiques du mouvement.

  • ouvrage de Jansénius traduit en 1644 faisait peut-être partie des lectures proposées (d'après Jean Mesnard) (Carsin, 2011, p43) : Discours sur la réformation de l'homme intérieur.

Cette longue visite des deux médecins jansénistes est l'occasion pour la famille Pascal (en particulier Étienne, Blaise et Jacqueline) de se convertir au jansénisme.

Sa sœur, Gilberte Périer, dans sa Vie de Monsieur Pascal, évoque souvent cette conversion comme si totale qu'elle amène Blaise à mettre fin à toutes ses recherches, y compris scientifiques. Or, ce n'est absolument pas le cas, puisque Pascal travaille encore sur le vide, la cycloïde, et continue même de perfectionner la machine arithmétique[16].

Visite de Pierre Petit en octobre 1646 : il évoque les travaux de Torricelli (1643) devant Étienne et Blaise Pascal.

Travaux de 1646 à 1648[17]

Traité sur la mécanique des fluides, rédigé à Clermont-Ferrand, dans lequel il postule déjà l'existence d'une pression atmosphérique.

Expériences nouvelles touchant le vide (octobre 1647) :

  • Il explique qu'il publie une version abrégée de ses hypothèses et conclusions dans l'attente de pouvoir rédiger et publier un ouvrage plus complet[18]. Huit expériences décrites au total, celles réalisées à Rouen en faisant varier le dispositif de Torricelli.

N'affirme pas tout de suite l'existence du vide.

Outre cette publication, il rédige également des lettres à ses détracteurs :

  • Père Étienne Noël : 29 octobre 1647. Jésuite ancien professeur de Descartes.

Mais également à Le Pailleur, proche de son père : février 1648 -> elle contient aussi des arguments à destination du P. Noël[19].

Blaise Pascal ne réfute pas immédiatement le concept d'horreur du vide et attend le résultat de l'expérience du puy de Dôme avant d'affirmer que les effets sont bien dus à la pression atmosphérique : « J'incline bien plus à imputer tous ces effets à la pesanteur & pression de l'air, parce que je ne les considère, que comme des cas particuliers d'une proposition universelle de l'Équilibre des Liqueurs, qui doit faire la grande partie du traité que j'ai promis[20] », quant bien même il n'adhérait déjà pas à cette hypothèse.

Jacques Piérius modifier

Il réalise à partir du mois d'octobre 1646 des expériences sur le vide, relatées dans son ouvrage An detur vacuum in rerum natura. Déjà grand admirateur de Pascal d'après ses premiers travaux de Rouen, il est résolu à accepter l'existence du vide après les résultats de l'expérience du vide dans le vide de Pascal.

Pierre Guiffart modifier

Discours du vide, sur les expériences de M. Pascal et le traité de M. Pierius (1647)

Mersenne modifier

  • Travaux de Mersenne sur le vide[21]

Marin Mersenne fonde son Academia Parisiensis dans laquelle il tente de réunir les plus grands scientifiques de son temps : des savants tels qu'Étienne Pascal, Gassendi, Roberval, Carcavy comptent parmi les premiers membres. Malgré son nom, cette Académie ne se veut pourtant pas seulement parisienne et Mersenne veut même l'étendre hors des frontières de la France. Ainsi Descartes, alors en Hollande, fait partie des correspondants réguliers[22].

Mersenne popularise les travaux de Torricelli et tente de les reproduire, mais la mauvaise qualité des tubes employés pour l'expérience la fait échouer.

Pierre Michon Bourdelot modifier

L'abbé Bourdelot (1610-1685), médecin et anatomiste

Roberval modifier

Gilles Personne de Roberval (1602-1675), mathématicien et physicien

  • Première narration de Roberval sur le vide
    • l'attraction universelle, la cohésion des éléments du monde qui opposait au vide le poids total de l'univers[23]

Roberval fait originellement partie des scientifiques

Blaise Pascal modifier

Il affiche dans ses écrits relatifs aux travaux sur le "vide" sa perception de la connaissance scientifique et insiste sur le fait que le respect du aux anciens scientifiques ne doit pas être un obstacle à la remise en cause des faits jusqu'alors établis au fur et à mesure que les connaissances évoluent. « l'évidence des expériences me force de quitter les opinions, où le respect de l'Antiquité m'avait retenu[24]. »

« Il faut relever le courage de ces gens timides qui n’osent rien inventer en physique, et confondre l’insolence de ces téméraires qui produisent des nouveautés en théologie[25]. »

Importance aussi de la méthode scientifique pour Pascal qui souligne que les expériences visant à prouver l'horreur du vide ne sont pas viables : « le peu de fondement que je voyois à la maxime si receüe, que la Nature ne souffre point le vuide, qui n’est appuyée que sur des expériences dont la pluspart sont tres fausses, quoy que tenuës pour tres-constantes[26] »

Expérience du vide dans le vide : vide autour du tube barométrique : aucune pression de l'air, donc le mercure tombe entièrement[27].

Expérience du vide dans le vide précède celle du puy de Dôme : il peut démontrer que le niveau de mercure dans les tuyaux est proportionnel à la pression de l'air et que le mercure descend entièrement dans le vide = c'est bien la pression atmosphérique qui joue sur le niveau de mercure[28]. Il estime cependant que cette expérience ne réfute pas de manière satisfaisante l'hypothèse d'horreur du vide, tandis que celle du puy de Dôme apporte des résultats plus probants par la comparaison du niveau de mercure à deux altitudes différentes. La différence de pression atmosphérique déjà démontrée montre bien selon lui que l'horreur du vide" ne peut être en cause puisqu'elle n'est pas supposée varier en fonction de l'altitude[29].

Travaux de 1646 à 1648

Auzoult, Roberval, Rohault

À Rouen en 1646, réplication de l'expérience de Torricelli sur le vide par Pascal et Pierre Petit : ils trouvent exactement les mêmes résultats[15]

Expérience du puy de Dôme : Pierre Petit, de l'académie de Mersenne -> Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs (1648)

Expérience de Paris (tour Saint-Jacques)

Rapide remise dans le contexte des autres publications de Blaise Pascal

Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs (1648)

Préface pour un Traité du vide divisée en

Traité de l'Équilibre des liqueurs et Traité de la Pesanteur de la masse de l'air : les deux sont parus en 1663 mais auraient été composés[30] vers 1654 et leur publication annoncée à l'académie de Mersenne. Un premier traité sur le vide aurait même été écrit par Pascal vers 1651[31] qui soit est perdu soit ne subsiste que sous la forme des deux traités publiés en 1664[30]. Les deux traités se complètent et abordent des notions de physique complémentaires

« Que tous les disciples d’Aristote assemblent tout ce qu’il y a de fort dans les écrits de leur maître, et de ses commentateurs, pour rendre raison de ces choses par l’horreur du vide, s’ils le peuvent ; sinon qu’ils reconnaissent que les expériences sont les véritables maîtres qu’il faut suivre dans la physique ; que celle qui a été faite sur les montagnes a renversé cette créance universelle du monde, que la nature abhorre le vide, et ouvert cette connaissance qui ne saurait plus jamais périr, que la nature n’a aucune horreur pour le vide qu’elle ne fait aucune chose pour l’éviter, et que la pesanteur de l’air est la véritable cause de tous les effets qu’on avait jusqu’ici attribués à cette cause imaginaire ». Conclusion du Traité sur la pesanteur et la masse de l'air.

Fragment de préface sur le Traité du vide

Fragments de Traité du vide -> fait partie des Traités publiés à titre posthume

L'expérience modifier

Blaise Pascal, alors loin de l'Auvergne, confie la réalisation de l'expérience à son beau-frère Florin Périer, époux de Gilberte. Elle se déroule le en présence à la fois de scientifiques et de religieux.

  • Choix du puy de Dôme en partie parce que remplissait les conditions nécessaires : pas trop éloigné de la ville de Clermont pour pouvoir transporter le matériel d'expérience + BP a une personne à Clermont-Ferrand susceptible de réaliser l'expérience, Florin Périer[32].
  • 19 septembre 1648
  • Accompagnateurs et témoins : à la fois des religieux et des laïcs choisis par Florin Périer :
  • Expérience en deux parties ; d'abord dans le jardin des Pères Minimes, "le lieu le plus bas de la ville", puis au puy de Dôme
    • 1) verse dans un récipient "seize liures" de mercure, + deux tuyaux en verre de diamètre et longueur similaire (4 pieds), fermés à une extrémité et ouverts à l'autre : le mercure remonte de la même manière dans les deux tuyaux. Réalise l'expérience trois fois de suite avec le même matériel. Relève ensuite le niveau de mercure sur l'un des tuyaux, soit 26 pouces trois lignes et demie, puis laisse le second au Père Chastin avec pour consigne d'observer tout changement éventuel dans le niveau de mercure au cours de la journée et de refaire régulièrement la comparaison avec le second tuyau[33].
    • 2) au sommet du puy de Dôme, le niveau de mercure qui était à 26 pouces (0,076 2 m) aux Minimes descend à 23 pouces. Répète l'expérience cinq fois de plus en variant les emplacements et les conditions (endroit couvert, dehors, soleil, pluie avec brouillard) mais en restant au sommet du puy de Dôme, et obtient les mêmes résultats[34].
    • 3) en redescendant du puy de Dôme, répète l'expérience à "Lafon de l'arbre" où il trouve 25 pouces ; expérience répétée une seconde fois par Périer puis au même endroit par Mosnier[35].
    • 4) Retour aux Minimes : le Père Chastin rapporte n'avoir relevé aucune variation dans le niveau de mercure malgré les changements de temps. Périer répète l'expérience de la toute première partie avec le matériel qui a servi pour le puy de Dôme et retrouve les mêmes résultats[35].
  • Père de la Mare qui a assisté à l'expérience de la veille au jardin des Minimes et connaît également les résultats du puy de Dôme suggère dès le lendemain à Périer de refaire l'expérience en partant d'une des tours de la cathédrale de Clermont[36]
    • Expérience faite dès le jour de la demande : "en une maison particulière, qui est au plus au lieu de la ville, élevé par dessus le jardin des Minimes de six ou sept toises (soit entre 11,7 et 13,7 mètres environ), et au pied de la tour" -> 26 pouces 3 lignes, donc un niveau de mercure plus bas que celui mesuré au jardin des Minimes d'une demi ligne[36]
    • Puis expérience au sommet de la tour [TCY: quelle tour ?], haute de 20 toises (environ 39 mètres) et plus haute que le jardin des Minimes de 26 ou 27 toises (entre 50,7 et 52,6 mètres environ) -> 26 pouces 2 lignes, donc niveau de mercure plus bas d'environ deux lignes que le niveau mesuré au pied de la tour, et deux lignes et demie plus bas qu'au niveau du jardin des Minimes[36].
  • Il précise une limite : que si le niveau de mercure a chaque fois été relevé avec précision, les calculs qu'il en tire sur le rapport entre l'élévation/l'altitude et le niveau de mercure ne sont pas parfaitement exacts parce que la hauteur des différents lieux d'expérience n'est pas connue avec précision -> il suggère de répliquer en variant chaque fois l'altitude de 100 toises (environ 195 mètres)[37].

Conformément aux prédictions de Pascal, le niveau de mercure dans le tube diminue bien au fur et à mesure de l'ascension.

Après avoir reçu les résultats des expériences menées au puy de Dôme et à Clermont-Ferrand, Pascal décide de mener une expérience à partir de la tour Saint-Jacques à Paris[b] Deux lignes de différences entre le pied et le sommet de la tour (haute d'environ 26 à 27 toises) -> la reproduction de l'expérience est un succès qui confirme les résultats déjà probants de son beau-frère.

Conclusion : puisqu'il n'y a aucune raison que l'"horreur du vide" varie en fonction de l'altitude, c'est bien la pression atmosphérique qui joue sur la hauteur de la colonne de mercure.

Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs paraît en 1648 : contient la lettre de Pascal de 1647 + la réponse de Florin Périer de 1648.

"l'évidence de l'expérience me force de quitter les opinions où le respect de l'antiquité m'avait tenu" -> Pascal fonctionne par l'expérience, et l'érige en seule possibilité d'acquérir des connaissances. + contrairement à Aristote, Pascal va de la nature à la raison[38].

« Que tous les disciples d’Aristote assemblent tout ce qu’il y a de fort dans les écrits de leur maître, et de ses commentateurs, pour rendre raison de ces choses par l’horreur du vide, s’ils le peuvent ; sinon qu’ils reconnaissent que les expériences sont les véritables maîtres qu’il faut suivre dans la physique ; que celle qui a été faite sur les montagnes a renversé cette créance universelle du monde, que la nature abhorre le vide, et ouvert cette connaissance qui ne saurait plus jamais périr, que la nature n’a aucune horreur pour le vide qu’elle ne fait aucune chose pour l’éviter, et que la pesanteur de l’air est la véritable cause de tous les effets qu’on avait jusqu’ici attribués à cette cause imaginaire »OC II, éd. J. Mesnard, p. 1101., Dominique Descotes et Gilles Proust, Pensées de Pascal, Blaise Pascal, conclusion des Traités de l'équilibre des liqueurs et de la pesanteur de la masse de l'air.

Réception/conséquences/applications modifier

Applications des résultats de l'expérience modifier

Pascal voit très vite les applications possibles de ces résultats :

  • Possibilité de comparer les altitudes de différents lieux peu importe la distance entre eux
  • Le principe du thermomètre est à améliorer
  • Démonstration des différences de pression atmosphérique même à température égale

Pascal décrit les lois de l'hydrostatique (Carsin, 2011, p48)

Les travaux de Pascal, en ce qu'ils permettent de prouver l'existence du vide, constituent une véritable révolution copernicienne.

Contestations modifier

Non seulement les conclusions de l'expérience sont contestées - les savants du XVIIe siècle n'acceptent pas tous la notion de pression atmosphérique[39] - mais les publications de Pascal ne closent pas le débat sur l'existence du vide[40].

Opposants : Hobbes; abbé Noël, Linus[40]. Pour Linus, le poids de l'air ne peut contrebalancer celui du mercure dans le tube[40]. Les savants ne contestent pas la masse de l'air mais une partie d'entre eux attribue le niveau du mercure à une autre substance présente dans l'espace entre le mercure et le sommet du tube (espace torricellien/chambre barométrique)[41].

Les défenseurs de l'horreur du vide, ou plénistes, ne sont pas pour autant réfractaires à l'explication de la pression atmosphérique, de la même manière que certains partisans de l'existence du vide, ou vacuistes, peuvent soutenir l'hypothèse de la colonne d'air qui s'opposerait à celle de mercure, tels que Blaise Pascal.

Dans le contexte de la "querelle du vide" : le biographe de Descartes Adrien Baillet affirme que c'est Descartes qui a en premier eu l'idée de l'expérience du puy de Dôme[c],[43],[44],[45]

Conflits religieux : la position des jésuites sur les travaux de Torricelli : pour eux, le baromètre ne peut contenir du vide.

Pascal, qui s'est momentanément retiré du débat sur l'existence du vide, le reprend de nouveau en 1651[46].

Prolongations de l'expérience par des physiciens des XVIIe ou XVIIIe siècles :

  • Robert Boyle dans New experiences physico-mechanical touching the spring of air (1660) : une expérience du "vide dans le vide" grâce à un dispositif de pompage.
  • Edme Mariotte : Discours sur la nature de l'air (1676)

Après ces travaux, l'existence de la pression atmosphérique finit par être admise[41].

Félix Mathieu, auquel répond notamment Léon Brunschvicq

+ Abel Le Franc défend Pascal dans "Pascal est-il un faussaire?"

Alexandre Koyré (1892-1964), historien des sciences et philosophe, accuse Pascal de ne pas avoir réalisé l'expérience de Rouen[47]. (colloque "Pascal savant", tenu à Royaumont en 1954 auquel a notamment participé Louis Lafuma)

Un des arguments de Koyré : Pascal n'a pas décrit le bouillonnement de l'eau lors d'une des expériences de Rouen, + extrême difficulté de fabriquer, à l'époque, un tuyau de verre de près de quinze mètres de haut.

(attention critique exp de pensées: Expériences nouvelles touchant le vide (1647). Des chercheurs comme Kimiyo Koyanagi postulent qu'aucune des expériences décrites dans cet ouvrage n'a eu lieu et qu'il s'agit d'expériences de pensée[48].

Kimiyo Koyanagi :

En 2001, la chercheuse japonaise rédige un chapitre dans l'ouvrage : Les Pascal à Rouen : 1640-1648 dans lequel elle reprend la question qu'Alexandre Koyré avait posée lors du colloque Pascal savant (1954) et, contrairement à Koyré, elle affirme que Pascal n'a réalisé aucune des expériences décrites dans les Expériences nouvelles touchant le vide (1647) (Koyanagi, 2001, p137).

Elle insiste en revanche en disant que le fait que les expériences n'aient pas été réalisées rendent Pascal encore plus "génial" à ses yeux : "je soutiens qu'elles sont effectivement fictives mais en admirant l'auteur de ces "expériences en pensées", géniales, merveilleuses (Koyanagi, 2001, p. 138)

Son équipe avait déjà travaillé en 1978 et en 1982 à reconstituer les expériences de Pascal.

Pierre Duhem  : Traité de l'équilibre des liqueurs uniquement théorique, c'est à dire qu'aucune des expériences décrites n'a été réalisée (Koyanagi, 2001, p140). Koyagani rejoint cet aspect décrit par Duhem pour le Traité de la pesanteur de la masse de l'air après avoir reproduit les expériences décrites en 1989.

Elle reproduit l'expérience du ballon au puy de Dôme en 1993, plus tard au Japon sur une montagne d'altitude bien plus élevée que le puy de Dôme et Dominique Descotes dans les Pyrénées en 1994 (Koyanagi, 2001, p140). Dans tous les cas, le ballon ne gonfle pas du tout, contrairement à ce qui est décrit par Pascal. En se penchant sur d'autres éléments comme le récit de Gassendi et les détails de l'expérience, Koyanagi en déduit que l'expérience du ballon était également une expérience de pensée (Koyanagi, 2001, p140).

Postérité modifier

Musées modifier

Le museum d'histoire naturelle Henri-Lecoq de Clermont-Ferrand a une salle consacrée à Blaise Pascal, dans laquelle sont détaillés les travaux scientifiques concernant le vide.

Enseignement modifier

Pour son importance dans l'histoire des sciences, l'expérience du Puy-de-Dôme est utilisée dans les manuels de physique pour les chapitres consacrées à l'étude de la pression atmosphérique[49].

Reproductions de l'expérience modifier

Réplication des expériences de Pascal, Roberval, Auzoult, Rohault par l'équipe de Kimiyo Koyanagi, Akira Kurobé et Masao Uchida[50].

D'autres reproductions de l'expérience.

L'expérience des liqueurs (Rouen) a également été reproduite à l'Institut universitaire de technologie d'Orsay[51].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. « Bref, pour fonder l’hydrostatique et la pneumatique sur le vide, la pesanteur des éléments, la transmission de la pression à l’intérieur des fluides, la force élastique des gaz, il fallait mettre à bas toute l’ontologie et la physique de l’École. »[8].
  2. Une statue de Pascal se trouve aujourd'hui au bas de la tour Saint-Jacques.
  3. « M. Descartes qui étoit à La Haye lorsqu'il reçut la lettre de M. Carcavi, fut ravi du succès de l'expérience de M. Pascal concernant le vif-argent. [...] Il réécrivit à M. Carcavi qu'il avait intérêt de le sçavoir, non seulement parce qu'il s'en était avisé avant Torricelli, & qu'il avait prié M. Pascal de la vouloir faire, lorsqu'il le vid à Paris en 1647 ; mais parce qu'elle étoit entièrement conforme à ses principes, auxquels M. Pascal sembloit avoir été contraire jusques-là ».[42].

Références modifier

  1. (Louis Rougier 2010, p. 45)
  2. (Louis Rougier 2010, p. 36)
  3. (Louis Rougier 2010, p. 47)
  4. (Louis Rougier 2010, p. 38)
  5. (Taton 1966)
  6. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 18)
  7. (Simone Mazauric 1999, p. 14)
  8. Louis Rougier 2010, p. 48-49.
  9. (Louis Rougier 2010, p. 42)
  10. (Emmanuel Carsin 2011, p. 45)
  11. (Cécile de Hosson et al. 2009, p. 108)
  12. a b et c (Cécile de Hosson et al. 2009, p. 109)
  13. a et b (Louis Rougier 2010, p. 54)
  14. (Emmanuel Carsin 2011, p. 46)
  15. a et b (Brunschvicg 1923, p. 58)
  16. (Emmanuel Carsin 2011, p. 44)
  17. (Simone Mazauric 2010)
  18. (Léon Brunschvicg 1923, p. 56)
  19. (Emmanuel Carsin 2011, p. 47)
  20. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 4)
  21. (Armand Beaulieu 2022)
  22. (Armand Beaulieu 2022, p. 43-53)
  23. (Léon Brunschvicg 1923, p. 44)
  24. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 19)
  25. (Ernest Havet 1852, p. 592)
  26. (Brunschvicg 1923, p. 58)
  27. (Dominique Descotes 1989, p. 1)
  28. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 5)
  29. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 6)
  30. a et b (Brunschvicg 1923, p. 145)
  31. (Blaise Pascal et al. 1923, p. 143)
  32. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 7)
  33. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 11)
  34. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 12)
  35. a et b (Blaise Pascal et al. 1648, p. 13)
  36. a b et c (Blaise Pascal et al. 1648, p. 14)
  37. (Blaise Pascal et al. 1648, p. 16)
  38. (Hélène Michon 2002)
  39. (Cécile de Hosson et al. 2009)
  40. a b et c (Cécile de Hosson et al. 2009, p. 110)
  41. a et b (Cécile de Hosson et al. 2009, p. 111)
  42. Adrien Baillet 1691, p. 380.
  43. (Simone Mazauric 1999)
  44. (Simone Mazauric 1999)
  45. (Adrien Baillet 1691, p. 330;374;378;380)
  46. (Simone Mazauric 1999)
  47. (Armand le Noxaïc 2015, p. 5)
  48. (Kimiyo Koyanagi 2001, p. 137-157)
  49. (Cécile de Hosson et al. 2009, p. 106)
  50. (Dominique Descotes 1989, p. 2-3)
  51. (Armand Le Noxaïc et al. 2010, p. 2)

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

Publications des XVIe - XVIIe - XVIIe siècles modifier

  • Adrien Baillet, La vie de Monsieur Descartes, vol. 2, Paris, Daniel Horthemels, (lire en ligne)
  • Evangelista Torricelli, Opera geometrica… De solidis sphaeralibus. De motu. De dimensione parabolae. De solido hyper bolico. Cum appendicibus de cycloide, & cochlea, Florentiæ, A. Masse e L. de Landis, (lire en ligne)
  • Galileo Galilei, Discorsi e dimostrazioni matematiche intorno a due nuove scienze attenenti alla mecanica e i movimenti locali..., Leyde, Elsevier, (lire en ligne)
  • Blaise Pascal, Expériences nouvelles touchant le vuide, faites dans des tuyaux, syringues, soufflets, & siphons de plusieurs longueurs & figures : avec diverses liqueurs, comme vif-argent, eau, vin, huyle, air, &c., Paris, Pierre Margat, (lire en ligne)
  • Blaise Pascal et Florin Périer, Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs, projectée par le sieur B. P. [Blaise Pascal] pour l'accomplissement du traicté qu'il a promis dans son abbrégé touchant le vuide, et faite par le sieur F. P. [Florent Perier] en une des plus hautes montagnes d'Auvergne, Paris, (lire en ligne)

Publications modernes modifier

  • Léon Brunschvicg et Pierre Boutroux, Œuvres de Blaise Pascal, Paris, Hachette, , 2e éd. (lire sur Wikisource)
  • Blaise Pascal, Léon Brunschvicg (éditeur scientifique) et Pierre Boutroux (éditeur scientifique), « Traités de l’équilibre des liqueurs et de la pesanteur de la masse de l’air », dans Œuvres complètes de Blaise Pascal, Paris, Hachette, (lire en ligne)
  • Ernest Havet, Pensées de Pascal, Paris, Dezobry et E. Magdeleine, (lire en ligne)
  • Armand Beaulieu, « Les idées galiléennes chez les membres de l’Academia Parisiensis après Mersenne », dans Géométrie, atomisme et vide dans l’école de Galilée, ENS Éditions, coll. « Theoria », (ISBN 979-10-362-0366-4, lire en ligne), p. 43–53
  • Emmanuel Carsin, Pascal pas à pas, Paris, Ellipses, (ISBN 978-2-7298-6283-1)
  • Dominique Descotes, « La reconstitution de l’expérience du vide dans le vide », Courrier du Centre International Blaise-Pascal, no 11,‎ (ISSN 0249-6674, DOI 10.4000/ccibp.467, lire en ligne, consulté le )
  • Bernard Grasset, Sur les pas de Blaise Pascal. Voyageur de l'infini : Essai de biographie, Paris, Kimé,
  • Cécile de Hosson et Bénédicte Caillarec, « L’expérience de Blaise Pascal au puy de Dôme : analyse des difficultés des étudiants de premier cycle universitaire et confrontation historique », Didaskalia, vol. 34, no 1,‎ , p. 105–130 (DOI 10.4267/2042/30431, lire en ligne, consulté le )
  • Kimiyo Koyanagi, « Cet effrayant petit livret… Expériences nouvelles touchant le vide de Blaise Pascal », dans Les Pascal à Rouen, 1640-1648, Presses universitaires de Rouen et du Havre, coll. « Hors collection », (ISBN 979-10-240-1094-6, lire en ligne), p. 137–157
  • Simone Mazauric, « Crise de la physique au XVIIe siècle et la querelle du vide », Raison présente, vol. 131, no 1,‎ , p. 13–30 (DOI 10.3406/raipr.1999.3552, lire en ligne, consulté le )
  • Simone Mazauric, « De Torricelli à Pascal », Philosophia Scientiæ. Travaux d'histoire et de philosophie des sciences, nos 14-2,‎ , p. 1–44 (ISSN 1281-2463, DOI 10.4000/philosophiascientiae.172, lire en ligne, consulté le )
  • Hélène Michon, « Aristote et Pascal », Courrier du Centre International Blaise-Pascal, no 24,‎ , p. 8–25 (ISSN 0249-6674, DOI 10.4000/ccibp.533, lire en ligne, consulté le )
  • Louis Rougier, « De Torricelli à Pascal », Philosophia Scientae, nos 14-2,‎ (ISSN 1281-2463, lire en ligne, consulté le )
  • Armand le Noxaïc, « Comment Blaise Pascal a pu envisager et réaliser l’expérience des liqueurs de Rouen », Revue d'histoire des hciences, nos 68-1,‎ , p. 5-22 (lire en ligne)
  • Armand Le Noxaïc et Pierre Lauginie, « Reconstitution de l'expérience des liqueurs de Pascal », Courrier du Centre International Blaise Pascal, no 32,‎ (lire en ligne)
  • René Taton, « « Les Mechaniques » de Galilée, Mathématicien & Ingénieur du Duc de Florence, avec plusieurs additions rares et nouvelles, utiles aux Architectes, Ingénieurs, Fonteniers, Philosophes & Artisans. Traduites de l'italien par le P. Marin Mersenne, éd. critique par Bernard Rochot (coll. «Le mouvement des idées au XVIIe siècle») », Revue d'histoire des sciences, vol. 19, no 4,‎ , p. 398–399 (lire en ligne, consulté le )

Références externes modifier

http://www.penseesdepascal.fr/General/Aristote.php