Théorème de Stewart

En géométrie euclidienne, le théorème de Stewart fournit une relation algébrique entre les distances mutuelles de quatre points dont trois sont alignés. Il est dû au mathématicien Matthew Stewart en 1746 [1].

Énoncé modifier

Étant donné un point   et une droite orientée comportant trois points  , la "relation de Stewart" s'écrit [2],[3],[4],[5]:

 

Si, par exemple,   se trouve entre   et   , on peut ôter les barres de mesure algébrique :

 

Démonstrations modifier

Première démonstration (produit scalaire) modifier

 

Cette démonstration repose sur le calcul de produits scalaires[3].

Notons   le projeté de   sur la droite portant  .

En utilisant le produit scalaire, on obtient les deux égalités:

 
 

En multipliant la première égalité par   et la deuxième par  , puis, en en faisant la somme, on élimine   :

 

soit

 

D'où la relation demandée.

Deuxième démonstration (fonctions de Leibniz) modifier

Montrons que la relation de coplanarité des vecteurs   s'écrit

 .

En effet la fonction   est une fonction vectorielle de Leibniz dont les coefficients ont une somme nulle ; elle est donc constante. En faisant  , on obtient que la constante est nulle.

Dans ce cas, on sait que la fonction scalaire de Leibniz associée   est constante elle aussi. En faisant  , on obtient la valeur de cette constante, puis la relation de Stewart[6].

Troisième démonstration (coordonnées) modifier

Dans un repère orthonormé d'origine H, le premier vecteur de la base dirigeant la droite (ABC) , les points ont pour coordonnées :  [4].

La relation de Stewart s'écrit alors   qui se démontre par développement.

Quatrième démonstration (volume du tétraèdre) modifier

Le carré du volume du tétraèdre   est égal, en utilisant le déterminant de Cayley-Menger, à[7]:

 

Si l'on remplace   par  , on obtient  , soit  . Le volume étant nul, on obtient la relation de Stewart.

Application au triangle modifier

Énoncé modifier

Théorème — 
 

Soit d la longueur du segment [AD] d'une cévienne d'un triangle ABC divisant le côté [BC] en deux parties de longueurs x et y. On a alors la "relation de Stewart" :

 

Écrite sous la forme  , elle permet d'obtenir la distance du sommet au pied de la cévienne.

Démonstrations modifier

  • Il s'agit d'une traduction de la relation ci-dessus.
  • On peut aussi la démontrer en écrivant que   exprimés par le théorème d'Al-Kashi [8],[9].

En effet, le pied D de la cévienne est le barycentre de B et C affectés des coefficients y et x. La fonction scalaire de Leibniz dans ce cas précis est   avec  . La réduction de la fonction scalaire de Leibniz en A en utilisant le barycentre D s'écrit :   Or   et  , d'où la relation.

Cas particuliers modifier

Si la cévienne est une médiane,   et l'on retrouve la formule de la médiane :  .

Si la cévienne est une bissectrice, d'après le théorème de la bissectrice intérieure du triangle,  , et  p est le demi-périmètre [8],[6].

Si la cévienne est une hauteur, l'élimination de x et y entre la relation de Stewart  , et les relations   et   permet d'obtenir la formule :  .

Sachant  , on retrouve la formule de Héron donnant l'aire S du triangle.

 
 .

Application à un sangaku modifier

Avec les notations précédentes, on cherche la longueur de la cévienne lorsque les disques inscrits dans   et   ont même rayon.

La condition d'égalité des rayons s'écrit   et l'on obtient  .

Le sangaku est mentionné sur une tablette datée de 1897 et localisée dans la préfecture de Chiba[11].

Autre application modifier

La relation de Stewart est à la base de la démonstration de l'existence d'un troisième foyer pour un ovale de Descartes.

Plus précisément, l'ovale de Descartes d'équation :  , avec  ,

a pour troisième foyer le barycentre   de   et   affectés des coefficients   et  , et les deux autres équations de l'ovale sont :

 .

Cas du quadrilatère convexe modifier

Soit   un quadrilatère convexe,   le point d'intersection des diagonales. On a la relation de Stewart pour le quadrilatère[8]:

 

Elle se démontre à partir de la formule d'Al-Kashi dans les triangles OAB, OBC, OCD, ODA.

Dans le cas où   est un parallélogramme, elle donne l'égalité du parallélogramme.

Voir aussi modifier

Le théorème de Holditch, qui en constitue une généralisation.

Lien externe modifier

(en) Eric W. Weisstein, « Stewart's Theorem », sur MathWorld

Références modifier

  1. (en) Matthew Stewart, « Some General Theorems of Considerable Use in the Higher Parts of Mathematics », Edinburgh: Sands, Murray and Cochran,‎ , Proposition II (lire en ligne)
  2. F. Brachet et J. Dumarqué, Précis de géométrie : Compléments, Transformations, Coniques, Librairie Delagrave, , Révisions et compléments, chap. V (« Relations métriques »).
  3. a et b C. Lebossé, C. Hémery, Géométrie, Classe de Mathématiques, Fernand Nathan, , p. 63, n° 85
  4. a et b Clément Thiry, Applications remarquables du théorème de Stewart et théorie du barycentre, Gand, Revue de l'instruction publique, , p. 6-7
  5. Georges Papelier, Exercices de géométrie moderne précédés de l'exposé élémentaire des principales théories. Géométrie dirigée., vol. 1, Vuibert, (lire en ligne  ), p. 27-33
  6. a et b Yves Ladegaillerie, Géométrie, affine, projective, euclidienne, et anallagmatique, Ellipses, , p. 329,330
  7. Christoph Soland, « Géométrie plane : Une axiomatique centrée sur la distance. », Elemente der Mathematik, vol. 63,‎ , p. 178 (lire en ligne)
  8. a b et c Mohammed AASSILA, 1000 challenges mathématiques, géométrie, Ellipses, , p. 14, 361 et 425
  9. Jean-Pierre Boudine, L'appel des maths, t. 2, Cassini, p. 188, 234
  10. Lucienne Félix, Un aperçu des méthodes en géométrie élémentaire : deux textes de réflexions didactiques, IREM de Bordeaux, , p. 46
  11. Géry Huvent, « Deux cercles égaux dans un triangle. »