Ammonium quaternaire

cations polyatomiques
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Les ammoniums quaternaires sont des cations polyatomiques de structure générale NR4+. Leur structure contient au moins une chaîne hydrocarbonée hydrophobe liée à un atome d'azote chargé positivement, et d'autres groupes alkyle qui sont pour la plupart des substituants à chaîne courte tels que des groupes méthyle ou benzyle. Contrairement aux ions ammonium (NH4+) et aux cations ammonium primaires, secondaires ou tertiaires, les ammoniums quaternaires sont chargés de façon permanente, indépendamment du pH de leur solution. Les sels d'ammonium quaternaires ou composés ammonium quaternaires (aussi appelés amines quaternaires dans le jargon pétrolier) sont des sels de cations ammonium quaternaires avec un anion.

Ammonium quaternaire. Les groupes R peuvent être les mêmes ou différents groupes alkyle ou aryle.

Actuellement, les composés d'ammonium quaternaire (CAQ) sont la principale classe de tensioactifs cationiques utilisés comme ingrédients dans des produits assouplissants, des agents antistatiques, des désinfectants, des biocides, détergents, agents de transfert de phase et de nombreux produits de soins personnels, tels que les produits de soins capillaires (Ding et Tsai, 2003 ; Lara-Martin et al., 2010 ; Tsai et Ding 2004). Les trois CAQ les plus fréquemment détectés dans les environnements naturels sont les composés de diméthyle dialkyle ammonium (DADMAC) (ayant des longueurs de chaîne alkyle de C8 à C18), de triméthyle alkyle ammonium (ATMAC) (C12-C18) et d'alkyle diméthyl benzyle ammonium (ADBAC) (C12-C18)[1]

Synthèse modifier

Les sels d'ammonium quaternaires sont préparés par alkylation d'amines, dans un processus appelé quaternisation[2]. En général, un des groupes alkyle de l'amine est plus grand que les autres[3]. Une synthèse typique pour le chlorure de benzalkonium est la réaction entre une alkyldiméthylamine à chaîne longue et le chlorure de benzyle :

CH3(CH2)nN(CH3)2 + ClCH2C6H5 → [CH3(CH2)nN(CH3)2CH2C6H5]+Cl.

Réactivité modifier

Les sels d'ammonium quaternaires ne sont en général pas très réactifs. Ils peuvent cependant subir le réarrangement de Sommelet-Hauser[4] et le réarrangement de Stevens[5], ainsi que subir une désalkylation dans des conditions dures. Les cations ammonium quaternaires peuvent aussi subir une élimination de Hofmann en cas de présence d'hydrogènes en bêta de l'azote.

Applications modifier

Les sels d'ammonium quaternaires sont utilisés comme désinfectants, tensioactifs, adoucissants et agents antistatiques (par exemple dans les shampooings). Dans les adoucissants liquides, on utilise souvent des chlorures d'ammonium. Dans les bandes antistatiques utilisées dans les sèche-linges, on utilise plutôt des sulfates d'ammonium. Les gels spermicides contiennent aussi des sels d'ammonium quaternaires.

Antimicrobiens modifier

Les composés d'ammoniums quaternaires ont également une activité antimicrobienne[6]. Certains, spécialement ceux à longue chaîne alkyle, sont utilisés comme antimicrobiens et désinfectants. On peut notamment citer le chlorure de benzalkonium, le chlorure de benzéthonium, le chlorure de méthylbenzéthonium, le chlorure de cétalkonium, le chlorure de cétylpyridinium, le cétrimonium, le cétrimide, le chlorure de dofanium, le bromure de tétraéthylammonium, le chlorure de didécyldiméthylammonium et le bromure de domiphène. Ils sont aussi efficaces contre les champignons, les amibes et les virus enveloppés[7] en provoquant la rupture de la membrane cellulaire[réf. nécessaire]. Les ammoniums quaternaires sont létaux pour une grande variété d'organismes, à l'exception des endospores, Mycobacterium tuberculosis et des virus non-enveloppés[réf. nécessaire].

Contrairement aux composés phénoliques, les ammoniums quaternaires ne sont pas très efficaces en présence de composés organiques. Cependant, ils sont très efficaces en association avec les phénols. Les ammoniums quaternaires sont désactivés par les savons et autres détergents anioniques, ainsi que les fibres de coton[7]. De plus, il n'est pas recommandé de les utiliser dans une eau dure. On estime les niveaux efficaces à 200 ppm[8]. Ils sont efficaces à des températures allant jusqu'à 100 °C.

Catalyseurs de transfert de phase modifier

En synthèse organique, les sels d'ammonium quaternaires sont utilisés comme catalyseurs de transfert de phase. De tels catalyseurs accélèrent les réactions entre réactifs dissous dans des solvants non miscibles. Le dichlorocarbène, un composé hautement réactif, est produit grâce à ces catalyseurs par réaction entre le chloroforme et l'hydroxyde de sodium.

Osmolytes modifier

Certains composés d'ammonium quaternaires sont présents dans les osmolytes, en particulier la glycine bétaïne (triméthylglycine), qui stabilise la pression osmotique dans les cellules[9].

Retardateurs de croissance modifier

Le Cycocel (chlorure de chlorméquat) réduit la taille des plantes en inhibant la production de gibbérellines, les principales hormones de plantes responsables de l'élongation des cellules. Ainsi, leurs effets se produisent avant tout sur les tissus de la tige, du pétiole et du pédoncule. À moindre niveau, il agit aussi sur l'expansion des feuilles, ce qui entraîne des feuilles plus épaisses avec une couleur verte plus foncée[10].

Toxicité et risques liés aux CAQ modifier

Les CAQ sont toxiques pour les organismes aquatiques tels que les poissons, les algues et les protozoaires en plus d'un grand nombre de micro-organismes [11],[12],[13],[14]

Notes et références modifier

  1. Chang Zhang, Fang Cui, Guang-ming Zeng et Min Jiang, « Quaternary ammonium compounds (QACs): A review on occurrence, fate and toxicity in the environment », Science of The Total Environment, vol. 518–519,‎ , p. 352–362 (DOI 10.1016/j.scitotenv.2015.03.007, lire en ligne, consulté le )
  2. Smith, Michael B. ; March, Jerry (2001), Advanced Organic Chemistry: Reactions, Mechanisms, and Structure (5e éd.), New York, Wiley-Interscience, (ISBN 0-471-58589-0)
  3. Kosswig, K., Surfactants, Ullmann’s Encyclopedia of Industrial Chemistry, 2002, Wiley-VCH, Weinheim. DOI 10.1002/14356007.a25_747.
  4. [1], Organic Syntheses, Coll. vol. 4, p. 585 (1963) ; vol. 34, p. 61 (1954).
  5. Stanley H. Pine, The Base-Promoted Rearrangements of Quaternary Ammonium Salts, Organic Reactions
  6. Zhishen Jia, Dongfeng shen, Weiliang Xu, Synthesis and antibacterial activities of quaternary ammonium salt of chitosan, Carbohydrate Research, vol. 333, issue 1, 22 juin 2001, p. 1-6, (ISSN 0008-6215)
  7. a et b Specific Antimicrobials, résumé de conférence de Stephen T. Abedon, Ohio, URL accédé en décembre 2008.
  8. Mark G. Ladd, The Use of Disinfectants In the Swine Industry, North Carolina State Univ., URL accédé en décembre 2008.
  9. Sleator, Roy D., Wouters, Jeroen, Gahan, Cormac G. M., Abee, Tjakko, Hill, Colin, Analysis of the Role of OpuC, an Osmolyte Transport System, in Salt Tolerance and Virulence Potential of Listeria monocytogenes, Appl. Environ. Microbiol., 2001 67: 2692-2698
  10. http://users.in.gr/dimpet/thesis/growth_retardants.htm Wageningen Agricultural University, The Netherlands
  11. (en) Yi Chen, Marc Geurts, Sascha B. Sjollema et Nynke I. Kramer, « Acute toxicity of the cationic surfactant C12-benzalkonium in different bioassays: How test design affects bioavailability and effect concentrations », Environmental Toxicology and Chemistry, vol. 33,‎ , p. 606–615 (ISSN 1552-8618, DOI 10.1002/etc.2465, lire en ligne, consulté le )
  12. Guohua Jing, Zuoming Zhou et Jing Zhuo, « Quantitative structure–activity relationship (QSAR) study of toxicity of quaternary ammonium compounds on Chlorella pyrenoidosa and Scenedesmus quadricauda », Chemosphere, vol. 86,‎ , p. 76–82 (DOI 10.1016/j.chemosphere.2011.09.021, lire en ligne, consulté le )
  13. Norbert Kreuzinger, Maria Fuerhacker, Sigrid Scharf et Maria Uhl, « Methodological approach towards the environmental significance of uncharacterized substances — quaternary ammonium compounds as an example », Desalination, mEDAWATER International Conference on Sustainable Water Management, Rational Water Use, Wastewater Treatment and ReuseJune 8–10, 2006, Marrakech, Morocco, vol. 215,‎ , p. 209–222 (DOI 10.1016/j.desal.2006.10.036, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) S. Sánchez-Fortún, F. Marvá, A. D’ors et E. Costas, « Inhibition of growth and photosynthesis of selected green microalgae as tools to evaluate toxicity of dodecylethyldimethyl-ammonium bromide », Ecotoxicology, vol. 17,‎ , p. 229–234 (ISSN 0963-9292 et 1573-3017, DOI 10.1007/s10646-007-0189-2, lire en ligne, consulté le )

Lien externe modifier