Roger Motz

personnalité politique belge

Roger Jean Henri Motz, né à Schaerbeek le et mort à Bruxelles le , est un homme politique libéral belge, ingénieur des mines et gestionnaire d'entreprises. Il est conseiller communal à Bruxelles et député à la Chambre des représentants, ensuite Sénateur à partir de 1946. Après la libération en 1945 et jusqu'en 1953, il est président du Parti libéral et à nouveau de 1958 à 1961, à la suite de la réforme du Parti libéral en PLP. De 1952 à 1958 il est président de l'Internationale libérale. Il siège également dès 1952 à l'Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Du au , il est Ministre des Affaires économiques sous le gouvernement Van Acker IV. En 1958, Roger Motz est nommé ministre d'État. Il est également président de la Ligue belge de la coopération européenne.

Roger Motz
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Schaerbeek, Bruxelles
Date de décès (à 59 ans)
Lieu de décès Bruxelles
Nationalité Belge
Parti politique Mouvement libéral


Origine et jeunesse modifier

Roger Jean Henri Motz est né le à Schaerbeek[1]. Son père est originaire de la province du Luxembourg et sa mère de Bruxelles. Roger Motz a grandi dans la capitale, il a été à l’Athénée communal de Schaerbeek. Il a continué ses études à l’Université Libre de Bruxelles et a obtenu son diplôme d’ingénieur civil des mines en .

Activité dans les mouvements estudiantins modifier

C’est en 1924 qu’il s’engage la première fois dans un mouvement estudiantin, le Cercle des Étudiants libéraux[2]. Au deuxième quadrimestre de la même année, il devient président de l'Association générale des Étudiants de l'Université libre de Bruxelles[3]. Roger Motz continue en prenant la présidence du bureau exécutif de l'Union nationale des Étudiants de Belgique en .

De jusqu’en 1930, il est président du conseil d'administration de l'Union nationale des Étudiants de Belgique où l’équivalence des diplômes et les avantages sociaux pour les étudiants de milieux défavorisés constituaient deux centres d’intérêts[1].

Carrière Politique modifier

Mouvements de jeunesse modifier

De 1928 à 1938 il est président de la Jeune Garde Libérale de Schaerbeek[4]. En 1932, il en sera le président pour tout l’arrondissement de Bruxelles.

Avec la grande dépression, de nouvelles idées émergent dans le mouvement libéral et en particulier chez ses mouvements de jeunesse. Ainsi, lors du 26ème Congrès de la Fédération nationale des Jeunes Gardes Libérales de Belgique, certaines nouvelles idées sont évoquées comme la défense des classes moyennes ou encore l’instauration des congés payés[5]. Roger Motz a contribué à ces travaux.

Début en politique modifier

En 1932, en tant que vice-président de la Fédération nationale des Jeunes Gardes libérales, il pouvait participer aux réunions du comité permanent du Conseil national du Parti libéral et à celles du comité directeur de la Fédération libérale de l'arrondissement de Bruxelles. C’est ce qui lui permet d’être élu comme conseiller communal à Schaerbeek.

Roger Motz s’implique aussi dans les médias en étant un correspondant du journal « Le Progrès » et devenant le directeur politique du journal « La Liberté »[2].

En il devient secrétaire général de la Fédération libérale de l'arrondissement de Bruxelles et, durant la campagne électorale de la même année, il contribue à l’échec politique de Léon Degrelle[2].

Le , il devient vice-président du Conseil national du Parti libéral. Durant la même année, il sort « Libéralisme 1937 » contribuant à clarifier la position du Parti libéral dans les domaines sociaux, politiques et économiques. Motz définit une nouvelle organisation de l’économie, un nouveau mode d’intervention de l’Etat ainsi qu’un plan de lutte contre le chômage tout en réaffirmant la liberté d’entreprendre et la liberté économique.

Le , il est élu député de l’arrondissement de Bruxelles.

Durant la Seconde Guerre mondiale modifier

En , traversant le Portugal et le Maroc, Roger Motz rejoint l’Angleterre alors que la Belgique est occupée par l’Allemagne nazie. Depuis le , il était président de la Société libérale de Radio-diffusion ce qui lui permet d’encourager les Belges réfugiés à diffuser des messages radiophoniques en territoire occupé. En , il devient vice-président de l'Office d'Information et de Documentation ce qui lui donne le contrôle de la propagande belge depuis l’Angleterre.

En , il rédige « Essai sur une doctrine libérale nouvelle ». Dans cet essai, il estime que la Belgique devra, après la guerre, changer de forme. S’inspirant de la doctrine de sécurité sociale de sir William Beveridge, Motz plaide pour l’introduction dans la Constitution belge de deux nouveaux articles : le droit des Belges à jouir d’une sécurité sociale et le droit au travail[6].

Du jusqu’en 1952, il devient président du Conseil national du Parti Libéral, c’est ainsi qu’il devient président du Parti Libéral pour la première fois et, en , il fait son entrée au Sénat en tant que sénateur coopté.

Question Royale et orientation à l’international modifier

Le , le Parti Libéral envisageait la question du retour du Roi[7] et procéda donc à un vote. Le résultat fut de 88 voix pour, 3 voix contre et 3 abstentions. Pour les libéraux, Léopold III devait partir mais la monarchie devait continuer.

10 jours plus tôt, le , le Comité permanent du Parti libéral s’était réuni pour discuter du problème. Roger Motz a plusieurs inquiétudes sur la suite des événements. Tout d’abord, il redoute que le Roi, en revenant, révoque l’ensemble du gouvernement créant un nouveau composé de libéraux, catholiques ou socialistes et que ce gouvernement n’obtienne pas la majorité ce qui entraînerait une dissolution de la chambre. Les élections provoquées à la suite de cela seraient organisées dans des « conditions affreuses » selon lui[8].

Ensuite, le Premier Ministre avait demandé une trêve dans le conflit entre libéraux et catholiques sur la question royale. Selon Roger Motz, cette trêve n’était pas respectée par les catholiques. Il accusera l’Eglise, en utilisant le parti catholique, de s’immiscer délibérément dans les affaires de l’Etat afin de servir son propre intérêt.

Enfin, il appréhende une division grave du pays à cause de cette problématique. Il estime que ce clivage oppose d’une part les libéraux aux catholiques mais aussi les wallons aux flamands[9].

Avant le vote du , Roger Motz constate deux courants dans son parti ; le premier est modéré et le deuxième va jusqu’à demander l’abdication du Roi. Pour l’instant, il ne voulait pas que le parti prenne de décision et préféra procéder à des débats pour par la suite proposer un vote.

Concernant Roger Motz lui-même, il est fermement opposé au retour du Roi et demande son abdication pour que son fils, Baudouin, prenne le relais. Cette prise de position lui a valu quelques critiques au sein de son propre parti, ce qui ne lui pas empêché d’être réélu à la présidence de ce dernier en [6].

Depuis quelques années et durant cette nouvelle présidence, Motz est plus tourné vers les affaires internationales. En 1947, il participera à la création et sera vice-président de la Ligue Indépendante de Coopération Européenne[2]. Cette vice-présidence lui permettra par ailleurs de participer au Congrès de l’Europe en [2]. En 1949, il sera désigné pour siéger avec d’autres au sein de la première délégation belge dans l’assemblée consultative du Conseil de l’Europe[2]. En , Roger Motz devient président de l’Internationale libérale jusqu’en 1958. Il annoncera l’abandon de la présidence du parti libéral belge en 1952[10].

Retour à la présidence du parti libéral modifier

Du au Motz fut Ministre des Affaires économiques sous le gouvernement Van Acker IV[11]. Il faisait partie de la délégation libérale chargée de discuter de la question scolaire en commission nationale. C’est ainsi qu’il fera partie des signataires du Pacte Scolaire de qui réunit les 3 grandes familles politiques (sociaux chrétiens, socialistes et libéraux) apaisant ainsi le clivage entre cléricaux et anti-cléricaux[2].

En l’ancien ministre devient député au Parlement européen[10].

Le Motz retourne présider le parti libéral belge jusqu’au . Le parti libéral qui deviendra le parti de la liberté et du progrès en 1961 et opérera des changements économiques et politiques. . Roger Motz aura la présidence d’honneur du PLP et il gardera un poids conséquent dans le fonctionnement du parti : il siègera au comité de direction du PLP (organe permettant d’imposer une ligne politique à l’ensemble du parti), il a influencé la préparation du Congrès du parti d’[2].

Politiquement, les libéraux sous Motz et Vanaudenhove (le président du PLP), abandonneront leur position anticléricale pour s’ouvrir aussi bien aux croyants qu’aux non-croyants[12]. Leurs premiers candidats chrétiens se présenteront en 1961. Ce premier changement est amorcé lors du congrès libéral doctrinaire de où la tolérance religieuse sera un axe majeur. Durant les élections de 1961 Motz rappellera le pacte scolaire comme élément déclencheur dans le revirement du PLP sur la tolérance religieuse : « Grâce à lui, nous pouvons proclamer que la religion n'est plus, pour nous, un fait que nous constatons mais un droit que nous respectons »[13]

Ces changements politiques impacteront aussi la problématique linguistique. Motz cherchait l’apaisement des deux communautés nationales (wallonne et flamande) et la paix linguistique[14]. Durant ces mêmes élections de 1961, Motz déclarait : « le Parti libéral n'est pas seulement le Parti de la tolérance spirituelle, religieuse mais aussi de la tolérance linguistique »[15]. Motz et Vanaudenhove sont sensibles au clivage communautaire car ils sont opposés à l’instauration du fédéralisme et tentent de développer des forces centripètes. Ils considèrent que le maintien de l’unité de la Belgique doit constituer un élément central du libéralisme belge[16].

Économiquement, durant le congrès libéral doctrinaire de des débats sur l’économie de marché libre ont déjà lieu. Le libre marché et l’encouragement prioritaire à l’initiative privée se sont vu fermement réaffirmés[17]. L’objectif politique de Motz et Vanaudenhove étaient de, par le PLP, représenter l’alternative pour tous les citoyens n’adhérant pas aux partis socialistes et aux partis sociaux-chrétiens.

En mars 2023, l'historien de la KU Leuven Idesbald Goddeeris a découvert par ses recherches dans les archives des services de renseignements polonais accessibles aux chercheurs que Roger Motz, dit shérif, a été payé par les communistes pendant les années 1950 pour vanter les mérites de la Pologne, et transmettre à ce pays des rapports secrets, photographiés sur microfilms ; Il percevait pour ces services une rétribution deux fois supérieure à son salaire de sénateur[18].

Fin de vie modifier

Roger Motz meurt le alors qu’il est encore sénateur coopté, membre du Parlement européen et président du Conseil d’administration du Crédit communal de Belgique[1].

Notes et références modifier

  1. a b et c Tordoir 2007, p. 271.
  2. a b c d e f g et h Tordoir 2007.
  3. Jeunes MR, Des jeunes gardes libérales aux jeunes MR, 140 ans de jeunesse libérales.[1], p.17.
  4. Jeunes MR, op. cit., p. 10.
  5. Tordoir 2007, p. 272.
  6. a et b Tordoir 2007, p. 273.
  7. Jules Gérard-Libois et José Gotovitch, « Léopold III: le non-retour. Textes et documents, sélection et présentation. », Courrier hebdomadaire du CRISP 1983/35-36 (n°1020-1021),‎ , p. 1 à 37 (lire en ligne)
  8. Delwit, Pascal., Du parti libéral au MR : 170 ans de libéralisme en Belgique, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles, 261 p. (ISBN 978-2-8004-1615-1 et 2800416157, OCLC 982170145, lire en ligne)
  9. Paul Wynants, « Le libéralisme franchopone du PLP au MR. I. 1961-1999 », Courrier hebdomadaire du CRISP 2011/7-8 (n° 2092-2093),‎ , p. 10 (lire en ligne)
  10. a et b Tordoir 2007, p. 274.
  11. Paul Wynants, op. cit., p. 11.
  12. Jacques Brassinne de La Buissière, « Les libéraux et les problèmes bruxellois 1945-1962 », Courrier hebdomadaire du CRISP 1988/34 (n°1219),‎ , p. 60 (lire en ligne)
  13. Jacques Brassinne, op. cit., p. 118.
  14. « Souvenirs d’un militant libéral – Jacques Van Uffelen », sur cjg.be (consulté le ).
  15. Jacques Brassinne, op. cit., p. 119.
  16. Paul Wynants, op. cit., p. 12.
  17. Paul Wynants, op. cit., p. 57.
  18. « Deux libéraux belges étaient des espions pour le compte de la Pologne, dans les années 50 », sur le site web de lalibre.be, quotidien belge, 2 mars 2023.

Bibliographie modifier

  • Joseph Tordoir, « MOTZ, Roger, Jean, Henri, ingénieur, homme politique libéral, Ministre d'Etat né à Schaerbeek (Bruxelles) le 8 juillet 1904, décédé à Bruxelles le 27 mars 1964 », Nouvelle biographie nationale, Bruxelles, Académie Royale De Belgique, vol. 9,‎ , p. 271–275 (lire en ligne).
  • Jacques Brassinne, Les libéraux et les problèmes bruxellois 1945-1962, CRISP 1988/34 no 1219, , p. 3 à 40. [lire en ligne (page consultée le 28 novembre 2018)]
  • Jeunes MR, Des jeunes gardes libérales aux jeunes MR,140 ans de jeunesse libérale. [lire en ligne (page consultée le 28/11/2018)]
  • Jules Gérard-Libois et José Gotovitch, Léopold III: le non-retour. Textes et documents, sélection et présentation, CRISP 1983/35-36 (n°1020-1021), , p. 1 à 37.[lire en ligne (page consultée le 28/11/2018)]
  • Pascal Delwit, Du parti libéral au MR. 170 ans de libéralisme en Belgique, chez l'auteur, Pascal Delwit, coll. « Science politique », 2017 (ISBN 978-2-8004-1615-1)
  • Paul Wynants, « Le libéralisme francophone du PLP au MR. I. 1961-1999 », CRISP 2011/7-8 (n° 2092-2093), , p. 5 à 77. [lire en ligne (page consultée le 28/11/2018)]

Liens externes modifier