Lyctocoridae

famille d'insectes

Les Lyctocoridae sont une famille d'insectes hémiptères hétéroptères (punaises) cimicimorphes, principalement prédateurs, et surtout rencontrés dans l'hémisphère nord.

Depuis la révision de Schuh et Štys en 1991, elle ne comprend de manière certaine qu'un seul genre, Lyctocoris avec 25 espèces décrites, et peut-être également le genre Astemmocoris, avec une espèce décrite.

Description modifier

Les Lyctocoridae ressemblent aux Anthocoridae et aux Lasiochilidae et seule une analyse microscopique permet de les en distinguer. Ils ont des antennes bien visibles, de quatre articles, les deux derniers plus minces que le deuxième, avec des soies antennaires. Elles ont des ocelles sur le vertex, en arrière des yeux. Le rostre est long, atteignant l'abdomen, avec un article III très long. les hémélytres comportent un cunéus, la corie présente une fracture costale distincte. La membrane a une ébauche vers Les tarses médians et postérieurs ont 3 segments. Le paramère gauche du mâle est plat, en feuille simple, sans sillon médian. Le phallus (édéage) se prolonge par une pointe en forme d'aiguille à injection, l'acus. Les femelles ont une apophyse génitale au milieu de septième sternite. Les œufs n'ont pas de micropyles. Elles mesurent entre 2 et 6 mm[2],[3].

Répartition et habitat modifier

Les Lyctocoridae se rencontrent principalement dans l'hémisphère nord, avec la plupart des espèces dans le Paléarctique. Lyctocoris campestris est holarctique, et introduit à Hawaï. La majorité vivent dans les zones tempérées chaudes à froide. Une seule espèce est subtropicale, L. hasegawai, endémique de Taïwan[4].

Les Lyctocoris vivent dans des débris végétaux et sous l'écorce d'arbres pourrissant. On en a trouvé également dans des nids d'oiseaux et de rongeurs[5].

Biologie modifier

Les Lyctocoris sont essentiellement prédateurs de petits arthropodes, tels que des coléoptères du bois (Scolytidae) ou des Pyraloidea. Au point que certains sont utilisés comme auxiliaires: Lyctocoris campestris pour la protection de stocks de graines, et Lyctocoris beneficus pour la protection des rizières, car c'est un ennemi naturel de Chilo suppressalis, une des pyrales du riz, dont la punaise mange les larves qui hivernent et les adultes émergeant.

Mais certaines espèces sont des hématophages facultatifs, et peut-être obligés. On a notamment observé Lyctocoris campestris se nourrir de sang d'animaux domestiques ou d'humains.

Enfin, une espèce, Lyctocoris ichikawai Yamada & Yasunaga 2012 a été observée en train de se nourrir d'exsudat de sève d'un chêne, Quercus acutissima[4].

La fécondation se fait par copulation traumatique, l'acus (apex du phallus) pénétrant la membrane intersegmentale de l'abdomen de la femelle[3],[6]. La fécondation a lieu dans un vitellarium[7].

Systématique modifier

La famille des Lyctocoridae est actuellement limitée à un genre, Lyctocoris, avec une attribution incertaine pour un second, Astemmocoris. Elle fait partie de la super-famille des Cimicoidea.

Historique de la définition modifier

Le genre modifier

Le premier Lyctocoris est décrit en 1794 par Fabricius, sous le nom d'Acanthia campestris. Le genre est défini par Hahn en 1836. Suivent une espèce décrite par Spinola en 1837, et quatre par O. M. Reuter en 1871 et 1884. Aujourd'hui, le genre Lyctocoris compte 26 espèces[2].

La sous-famille modifier

Reuter crée en 1884 trois divisions au sein des Anthocoridae: les Anthocoraria (qui deviendront les Anthocorinae), les « Xylocoraria » (pour les genres Dufouriellus, Cardiastethus, Scoloposcelis etc.), et les « Lyctocoraria », plus tard Lyctocorinae, pour Lyctocoris et six autres genres, tels que Lasiochilus, Piezostethus (aujourd'hui Xylocoris), Calliodis, etc[8]. En 1909, Poppius reprend ce regroupement des Lyctocoraria mais la fusionne avec les Xylocoraria de Reuter, y ajoutant donc de nombreux genres, tels que Brachysteles, Cardiastethus, Plochiocoris, etc., un total de 30 genres[9].

Les cinq tribus modifier

Cette subdivision est gardée par Carayon, qui , en 1972, crée au sein de la sous-famille des Lyctocorinae cinq tribus distinctives: les Almeidini, les Lyctocorini, avec Lyctocoris, et Astemmocoris comme incertain, les Xylocorini, avec Xylocoris, les Scolopini, avec Calliopis etc., et les Dufouriellini (aujourd'hui Cardiastethini), avec Dufouriellus, Cardiastethus, etc. Il déplace par contre les Lasiochilini (avec Lasiochilus) dans une nouvelle sous-famille séparée, les Lasiochilinae[10].

La famille modifier

Dès 1958, Leston avait estimé que les Anthocoridae n'étaient pas monophylétiques. En 1991, dans leur tentative de reconstituer la phylogénie des Cimicomorpha, Schuh et Štys, qualifient la définition des Lyctocorinae de Carayon "d'assemblage omnibus paraphylétique", soit un fourre-tout incohérent. D'une part, ils séparent alors les Lyctocorini de toutes les autres tribus qu'ils replacent dans les Anthocorinae. D'autre part, ils élèvent les Lyctocorinae ainsi restreints au rang de famille, les Lyctocoridae (ils font de même avec les Lasiochilinae) sur la base de différences significatives avec les Anthocoridae: le paramère gauche du mâle ne servant pas d'organe copulateur pour la pénétration du corps de la femelle, comme chez les Polyctenidae, les Cimicidae et la plupart des Anthocoridae; la présence d'une apophyse génitale sur le septième sternite de la femelle, et de réceptacles séminaux formés par l'épithélium du conduit génital[7]. Cette conception phylogénétique des Lyctocoridae, bien qu'elle ne soit pas reprise par tous les auteurs, semble devoir se confirmer au fil des analyses plus récentes, de même que sa place au sein des Cimicoidea[11],[12].

Liste des tribus et genres modifier

Selon BioLib (22 avril 2022)[1] :

  • tribu Lyctocorini Reuter, 1884
    • genre Lyctocoris Hahn, 1836, 26 espèces, dont une espèce fossile,
  • genre Astemmocoris Carayon & Usinger, 1965, 1 espèce, Astemmocoris cimicoides

Espèces par régions modifier

Espèces européennes modifier

Selon Fauna Europaea (24 avril 2022)[13], on rencontre cinq espèces de Lyctocoridae en Europe:

  • Lyctocoris (Lyctocoris) campestris (Fabricius, 1794), dans toute l'Europe (espèce holarctique à cosmopolite)
  • Lyctocoris (Lyctocoris) dimidiatus (Spinola, 1837), dans presque toute l'Europe
  • Lyctocoris (Lyctocoris) nidicola Wagner, 1955, dans le N-E de l'Europe
  • Lyctocoris (Lyctocoris) uyttenboogaarti Blote, 1929, aux Canaries
  • Lyctocoris (Paralyctocoris) menieri Carayon, 1971, aux Canaries[14]

Autres régions modifier

On rencontre dans les autres régions les espèces suivantes:

  • Amérique du Nord: L. campestris (également au Mexique), L.canadensis, L. doris, L. elongatus, L. okanaganus, L. rostratus, L. stalii, L. tuberosus (ITIS (22 avril 2022)[15])
  • Zone néotropicale: Astemmocoris cimicoides, Lyctocoris campestris, L. latus, L. mexicanus, L. signoreti, L. spanbergii
  • Océanie: L. hawaïensis
  • Asie du S-E: L. beneficus, L. hasegawai, L. ichikawai, L. kurentzovi, L. obscurus, L. variegatus, L. zhangi[4]

Fossiles modifier

On connaît une espèce fossile, †Lyctocoris terreus Scudder 1878, du Bridgérien, ou limite Yprésien-Lutétien (env. -48 millions d'années, Éocène), dans le Wyoming[16].

Auxiliaires modifier

Lyctocoris campestris est utilisée dans la protection des stocks de récoltes. Sa prédation sur la teigne de la pomme de terre, sur Orgyia vetusta et sur le dermeste du grain Trogoderma granarium a été observée.

Lyctocoris elungatus a été vu se nourrir aux dépens de Dendroctonus frontalis, pouvant endommager les pins en Amérique du Nord et en Amérique centrale.

Lyctocoris beneficius est un prédateur polyphage ennemi naturel d'une Pyrale du riz, Chilo suppressalis, ainsi que d'autres arthropodes se développant dans la paille de riz: le ciron de la farine, la pyrale de la farine Pyralis farinalis, Chlorops oryza ou encore Tribolium castaneum, le petit ver de farine[17].

Liens externes modifier

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Notes et références modifier

  1. a et b BioLib, consulté le 22 avril 2022
  2. a et b Henri-Pierre Aberlenc (coordination), Les insectes du monde : biodiversité, classification, clés de détermination des familles, Museo Éditions & Éditions Quae, (ISBN 978-2-37375-101-7 et 2-37375-101-1, OCLC 1250021162, lire en ligne), tome 1, p. 513, tome 2 pp. 210 et 245
  3. a et b « Lyctocoridae », sur ihs.myspecies.info (consulté le )
  4. a b et c Kazutaka Yamada, Tomohide Yasunaga et Toshihide Ichikawa, « A new species of Lyctocoridae (Hemiptera: Heteroptera: Cimicoidea) feeding on the exuded sap of Sawtooth Oak, Quercus acutissima, in Japan », Zootaxa, vol. 3525, no 1,‎ , p. 65 (ISSN 1175-5334 et 1175-5326, DOI 10.11646/zootaxa.3525.1.5, lire en ligne, consulté le )
  5. Sunghoon Jung, Junggon Kim, Hodan Lee et Marcos Roca-Cusachs, « Taxonomic review of Lyctocoridae (Hemiptera: Heteroptera: Cimicomorpha) from the Korean Peninsula », 농업과학연구, vol. 46, no 1,‎ , p. 79–84 (DOI 10.7744/KJOAS.20180087, lire en ligne, consulté le )
  6. (en) Nikolai J Tatarnic, Gerasimos Cassis et Dieter F Hochuli, « Traumatic insemination in the plant bug genus Coridromius Signoret (Heteroptera: Miridae) », Biology Letters, vol. 2, no 1,‎ , p. 58–61 (ISSN 1744-9561 et 1744-957X, PMID 17148326, PMCID PMC1617170, DOI 10.1098/rsbl.2005.0394, lire en ligne, consulté le )
  7. a et b (en) Randall T. Schuh et Pavel Štys, « Phylogenetic Analysis of Cimicomorphan Family Relationships (Heteroptera) », Journal of the New York Entomological Society, vol. 99,‎ , p. 298-350, en particulier 307 (lire en ligne [PDF])
  8. Odo M. Reuter, Monographia Anthocoridarum orbis terrestris, Helsingforsiae, , 204 p. (lire en ligne), pp. 4 et ss.
  9. B. R. Poppius, Beiträge zur Kenntnis der Anthocoriden, Helsingfors, Druckerei der Finnischen Litteratur-Gesellschaft, , 44 p. (lire en ligne)
  10. Jean Péricart, Faune de l’Europe et du bassin méditerranéen: Hémiptères, Anthocoridae, Cimicidae et Microphysidae, de l’ouest-paléarctique, Paris, Masson et Cie Éditeurs, , 402 p. (lire en ligne), pp. 59, 74
  11. (en) Randall T. Schuh, Christiane Weirauch et Ward C. Wheeler, « Phylogenetic relationships within the Cimicomorpha (Hemiptera: Heteroptera): a total-evidence analysis », Systematic Entomology, vol. 34, no 1,‎ , p. 15–48 (DOI 10.1111/j.1365-3113.2008.00436.x, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Sunghoon Jung, Hyojoong Kim, Kazutaka Yamada et Seunghwan Lee, « Molecular phylogeny and evolutionary habitat transition of the flower bugs (Heteroptera: Anthocoridae) », Molecular Phylogenetics and Evolution, vol. 57, no 3,‎ , p. 1173–1183 (DOI 10.1016/j.ympev.2010.09.013, lire en ligne, consulté le )
  13. Fauna Europaea, consulté le 24 avril 2022
  14. « Atlantis - Lyctocoris menieri Carayon, 1971 », sur www.biodiversidadcanarias.es (consulté le )
  15. Integrated Taxonomic Information System (ITIS), www.itis.gov, CC0 https://doi.org/10.5066/F7KH0KBK, consulté le 22 avril 2022
  16. « Lyctocoris terreus », sur paleobiodb.org (consulté le )
  17. (en) Yau-i Chu, « On the bionomics of Lyctocoris beneficus (Hiura) and Xylocoris galactinus (Fieber) (Anthocoridae, Heteroptera) », Journal of the Faculty of Agriculture, Kyushu University, vol. 15, no 1,‎ , p. 1–136 (ISSN 0023-6152, DOI 10.5109/22783, lire en ligne [PDF], consulté le )