Inkin (印金?) est un mot japonais désignant une technique de décor textile qui consiste à imprimer des motifs à travers un pochoir avec un adhésif, et à y apposer de l’or.

La technique est originaire de Chine où on la nomme shôkin (銷金?), mais elle a connu une postérité particulière au Japon où on la nomme inkin, un terme formé des deux idéogrammes « impression » et « or[1] ». Selon l’encyclopédie numérique Heibonsha, les inkin sont des « tissus imprimés par l’intermédiaire d’un pochoir, employant de la colle animale, de la laque, de la colle d'amidon, etc., en apposant de la feuille d’or, ou bien employant de la poudre d’or mélangée à de la colle animale, pour créer des motifs[2] ».

Histoire modifier

Les techniques d’impression à l’or et à l’argent sur textile ont une histoire très ancienne sur le continent chinois, et l’on considère qu'elles remontent à l’époque Han[3]. Trois grands groupes de techniques ont pu être employés en Chine : l’or en poudre dans un liant est passé au pinceau directement sur le tissu ; l’or est posé sur l’adhésif passé à travers un pochoir ; l’or est directement passé à travers le pochoir. Il semblerait aussi que l’or ait pu être imprimé par des matrices. Des témoins de cette technique ont été mis au jour par les fouilles réalisées dans la tombe de Mawangdui () à Changsha dans la province du Hunan. Les techniques de peinture et d’impression à l’or dans le domaine de l’habillement ont connu un essor entre les XIIe et XIIIe siècles, et l’on en trouve de nombreux témoins issus des tombes des dynasties Jin, des Song du Sud (1127-1279), puis des Yuan. La production de tissus inkin se poursuit au début de l’époque Ming (1368-1644). Leurs techniques traditionnelles de fabrication auraient ensuite disparu. Les tissus imprimés au pochoir, essentiellement des gazes de soie, étaient entre autres employés comme vêtements et manteaux de moines.

L’importation des tissus inkin chinois au Japon semble avoir eu principalement lieu à partir de l’époque Muromachi (1333-1573) et jusqu’au début de l’ère contemporaine[4].

Il existe également des imitations japonaises, anciennes et récentes[5]. On ne doit pas les confondre avec le surihaku, une technique d’impression à la feuille d’or ou d’argent propre au costume japonais.

Au Japon, l’usage principal des inkin est le montage des œuvres graphiques (kakejiku). Les textes relatant des cérémonies de thé de l’époque Momoyama mentionnent fréquemment des œuvres montées avec des tissus inkin, mais on pense que cette pratique remonte même à l’époque de Muromachi[6].

Dans la cérémonie du thé, les inkin sont présentés comme une catégorie technique à l’intérieur des meibutsugire, les tissus fameux[7]. Les plus prisés sont les inkin sur fond de gaze complexe ra", de couleur violette.

Parmi les œuvres en inkin les plus célèbres conservées au Japon, on peut citer deux manteaux de moines (kesa) désignés trésors nationaux et conservés au Musée national de Kyoto. L'un, nommé Omu-i (応夢衣?), serait originaire de Corée et daté de la dynastie Goryeo (IXe – XIVe siècle). L'autre serait une production chinoise Yuan, datée du XIVe siècle[8].

Notes et références modifier

  1. (ja) Hyobu Nishimura, Meibutsugire, Tokyo, Nihon no bijutsu, , 104 p., p. 92-94.
  2. Sekai daihyakka jiten, 日立デジタル平凡社,‎ (ISBN 978-4-582-04002-9, OCLC 959677144, lire en ligne).
  3. Zhao, Feng, 1961- et 赵丰, 1961-, Zhongguo si chou tong shi : The general history of Chinese silk, Suzhou da xue chu ban she,‎ (ISBN 978-7-81090-571-8, OCLC 64586070, lire en ligne).
  4. (ja) Hyobu Nishimura, Orimono, Tokyo, Nihon no bijutsu, , 114 p., p. 64-66.
  5. (fr + ja) « Observation d'un corpus d'inkin », sur www.inkin-project.com, .
  6. (ja) Meibutsugire, catalogue de l'exposition, Tokyo, Musée Gotoh, , 252 p.
  7. Hajime Suzuki 1925- et 鈴木, 一, 1925-, Meibutsugire jiten, Suzuki Jidaigire Kenkyūjo,‎ , 1180 p. (ISBN 978-4-9903867-0-2, OCLC 675518778, lire en ligne).
  8. Yamakawa, Aki et Kyōto Kokuritsu Hakubutsukan, Transmitting robes, linking minds : the world of Buddhist kaṣāya. (ISBN 978-988-8083-95-4 et 988-8083-95-3, OCLC 776343883, lire en ligne).

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • Yamakawa Aki, Transmitting Robes, Linking Mind: the world of buddhist Kasaya, catalogue de l'exposition, Kyoto, Kyoto national museum, 2010 (en japonais et anglais).
  • Cha no yu, catalogue de l'exposition, Musée national de Tokyo, Tokyo, 2017 (en japonais).
  • Collectif, Genshoku sadô daijiten (Grand dictionnaire de la cérémonie du thé Genshoku), Kyoto, Tankôsha, 1984 (en japonais).
  • Collectif, Heibonsha daihyakka jiten (Grande encyclopédie Heibonsha), Tokyo, Hitachi Digital Heibonsha, 1998 (en japonais).
  • Collectif, Histoire générale de la soie chinoise (en chinois), Suzhou, Presses universitaires de Suzhou, 2005 (en chinois).
  • Suzuki Hajime, Kodai inkin (Les inkin anciens), in Inkin, surihaku, kinkarakawa, série Senshoku to seikatsu, no 12, Kyoto, 1976, p. 10-35 (en japonais).
  • Suzuki Hajime, Meibutsugire Jiten (Dictionnaire des tissus fameux), Kyoto, Suzuki jidaigire kenkyûjo, 2007 (en japonais).
  • Nishimura Hyobu, Orimono, série Nihon no bijutsu, no 12, Tokyo, 1968 (en japonais).
  • Nishimura Hyobu, Meibutsugire, série Nihon no bijutsu, no 90, Tokyo, 1974 (en japonais).
  • Uda Kimio, Meibutsugire, Kyoto, Tankôshinsha, 1967 (en japonais).
  • Meibutsugire, catalogue de l'exposition, Tokyo, musée Gotoh, 2001 (en japonais).

Liens externes modifier