Captation des données informatiques

La captation des données informatiques est une technique spéciale d'enquête prévue en droit pénal français qui permet aux enquêteurs de police d'accéder à des données informatiques stockées par un individu ou une organisation sans leur consentement.

Cadre légal modifier

Créée par la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure du 14 mars 2011, elle est codifiée dans les articles 706-102-1 et suivants du code de procédure pénale. Elle prévoit la possibilité de recourir à « la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, d'accéder, en tous lieux, à des données informatiques, de les enregistrer, de les conserver et de les transmettre, telles qu'elles sont stockées dans un système informatique, telles qu'elles s'affichent sur un écran pour l'utilisateur d'un système de traitement automatisé de données, telles qu'il les y introduit par saisie de caractères ou telles qu'elles sont reçues et émises par des périphériques »[1].

Elle a ensuite fait l'objet de plusieurs évolutions législatives[2].

Description modifier

Contrairement à d'autres techniques d'enquêtes numériques, il s'agit ici d'accéder au cœur des appareils ciblés et non plus, par exemple, d'intercepter des correspondances sur un réseau de communications électroniques. Il ne s'agit donc pas d'écoutes téléphoniques.

Elle va notamment permettre, dans la plus grande discrétion, de récupérer des éléments de preuve numérique en contournant le chiffrement et ce, de manière totalement invisible pour l'utilisateur. Sa mise en œuvre peut être rapprochée de l'utilisation d'un cheval de Troie[3] mais ici légalement[4].

Particulièrement intrusive, sa mise en œuvre fait l'objet d'un encadrement juridique spécifique[5] afin de concilier d'une part la nécessité de rechercher les auteurs d'infraction et d'autre part la protection du droit au respect de la vie privée.

Affaire Encrochat modifier

Cette technique spéciale d'enquête a fait l'objet d'une certaine médiatisation[6] à la suite de l'annonce du démantèlement du réseau de communications chiffrées Encrochat par la gendarmerie nationale[7].

Depuis, de nombreux recours ont été initiés contre les procédures menées par les services d'enquête[8] mais également s'agissant de la constitutionnalité de cette technique[9]. Dans une décision rendue le 8 avril 2022, le Conseil constitutionnel déclare conforme à la Constitution le recours aux moyens de l'Etat protégés par le secret de la défense nationale pour réaliser le dispositif technique de captation[10].

Références modifier

  1. Code de procédure pénale, « De la captation des données informatiques »
  2. Marc Rees, « La procédure de captation des données informatiques aiguisée au Journal officiel », sur www.nextinpact.com, (consulté le )
  3. « EncroChat : comprendre le hack des smartphones de criminels par les gendarmes français en 5 questions », sur Numerama, (consulté le )
  4. Matthieu Audibert, « La pénétration du droit pénal dans l’espace privé. La captation de données informatiques », Archives de politique criminelle, vol. 43, no. 1, 2021, pp. 91-103.
  5. Alexis Deprau, Le droit face à la terreur, Paris, éditions du Cerf, , 380 p. (ISBN 9782204138482)
  6. Jean-Marc Manach, « La gendarmerie a (de nouveau) cassé des messages chiffrés », sur www.nextinpact.com, (consulté le )
  7. « Comment la Gendarmerie Nationale a fait tomber EncroChat - Le Monde Informatique », sur LeMondeInformatique (consulté le )
  8. « Piratage d’EncroChat : les recours se multiplient contre la justice française », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. Marc Rees, « Au Conseil constitutionnel, le secret défense dans la captation des données informatiques », sur www.nextinpact.com, (consulté le )
  10. Marc Rees, « EncroChat : le Conseil constitutionnel valide le secret défense sur les outils de captation », sur www.nextinpact.com, (consulté le )