Alvéographe

outil de mesure de la qualité de la farine

Un alvéographe ou extensimètre est un appareil permettant de déterminer en boulangerie le comportement mécanique d'une pâte de farine, sa « force boulangère »[1]. Il utilise pour cela leur déformation par pression d'air.

Histoire modifier

Inventé par Marcel Chopin à la fin des années 1920, il est utilisé en boulangerie dans le monde entier. Le « test alvéographique » permet de mesurer la ténacité, l’extensibilité, l’élasticité d'un pâton de farine (mélange normalisé de farine et d'eau). Cette mesure de la « force » des farines est considérée comme un bon indice de la qualité boulangère des farines panifiables et constitue en France pour la minoterie un critère pour la composition des farines destinées à la panification des pains de type « français ».

L'agronome Norman Borlaug a utilisé cette invention afin de sélectionner des variétés de blé pour les milieux tropicaux.

Alvéogramme modifier

L'alvéogramme dans le domaine de la rhéologie détermine les caractéristiques et la qualité d'une farine pour la panification et la fabrication de pâtes en mesurant la pression d'air nécessaire pour étaler la pâte, en déterminant sa force et son extensibilité ; en fait, l'instrument enregistre l'expansion d'une bulle de farine soufflée à l'air jusqu'à ce qu'elle se brise, ce qui permet d'enregistrer la mesure sur un graphique appelé alvéogramme.

Il mesure quatre paramètres fondamentaux[2],[3] :

  • P : indice de la ténacité de la pâte, une valeur de pression exprimée en mm H2O [4]. Plus les valeurs sont élevées, plus la quantité d'eau requise pour avoir la bonne consistance et le bon rendement pour la cuisson est élevée ;
  • L : indice d'extensibilité de la pâte, exprimé en mm[4], qui indique la capacité à avoir une porosité (alvéoles) dans un pain ;
  • W : indûment appelé indice de force, étant une énergie. Elle s'exprime en joules et est l'énergie nécessaire pour gonfler une bulle de pâte jusqu'à sa rupture [4],[5]. Elle est proportionnelle à la zone sous-tendue par la courbe de l'alvéogramme[5]. Plus sa valeur est élevée, plus le réseau protéique d'une farine est élevé et par conséquent la capacité d'obtenir un produit très levé ;
  • G : indice de gonflement donné par la racine carrée du volume d'air nécessaire pour briser une bulle de pâte[4], il représente la capacité à briser la bulle de la pâte ;

Les farines utilisées en panification ont de préférence des valeurs P/L allant de 0,4 à 0,7 avec un indice de résistance W égal à au moins 100-120 ; dans les produits à levure élevée, comme par exemple dans le pandoro, des farines avec W qui dépassent fréquemment la valeur de 300 sont nécessaires.

Rapport P/L modifier

Le rapport P/L indique le degré d'extensibilité de la farine. Avec des rapports < 0,5 de P/L, il existe des farines très extensibles de pâte molle, extensible et probablement collante; au contraire, avec des rapports > 0,5, il existe de plus en plus de farines rigides typiques des pâtes difficiles à travailler, des miettes de pain de faible volume.

Valeur W modifier

La principale caractéristique des farines fortes est de contenir une grande quantité de protéines insolubles (gluténine et gliadine) qui, au contact d'un liquide en phase de mélange, produisent du gluten. Les farines fortes sont des farines riches en gluten et pauvres en amidon. Le gluten forme un filet tenace qui retient les gaz levants dans les pâtes levées, permettant un développement considérable du produit pendant la cuisson. Plus le levain d'un produit de boulangerie doit être long, plus une farine avec un W élevé est nécessaire, ceci pour mieux retenir le dioxyde de carbone qui est libéré par les levures pendant la fermentation.

Le gluten, qui est la partie d'une farine de protéines, est capable d'absorber l'eau pour une fois et demie son poids. Plus la farine est forte et plus la concentration en protéines sera élevée et donc son hydratation. L'hydratation varie de moins de 50 % pour la farine pour les biscuits à des pourcentages de plus de 70 % pour la farine forte.

  • Farines de faible qualité avec W < 90, non adaptées à la panification.
  • Farines faibles avec W entre 90 et 160, adaptées aux biscuits et crackers ; ils ont une faible teneur en protéines, généralement autour de 9 %.
  • Farines de force moyenne avec W entre 160 et 250, adaptées aux pâtes molles ; Pain français, ferrarais et des Pouilles ; en outre, ils sont utilisés pour rafraîchir la levure ainsi que pour faire des pâtes directes ou pour des levures de courte durée comme les pizzas et les focaccias.
  • Farines fortes avec un W compris entre 250 et 310, adaptées aux pains durs et aux rosettes, baguettes et biove ; produit avec des grains nationaux et étrangers.
  • Farines à levain avec W entre 310 et 370, adaptées aux pâtes à levure longue avec la méthode biga, adaptées aux pandoro, panettone, colombes de Pâques, brioches et croissants.

Les farines du Manitoba avec W supérieur à 400, provenant de la région éponyme du Canada, sont maintenant également cultivées en Europe ; elles sont utilisées pour les produits au levain et pour renforcer d'autres farines en augmentant leur résistance.

Point G modifier

La valeur optimale pour la cuisson est comprise entre 20 et 25. La valeur est déterminée par le point de rupture de la bulle de pâte ; l'indice est calculé comme la racine carrée du volume d'air nécessaire pour briser la bulle et indique la capacité d'extension de la pâte et donc le volume final que le pain atteindra. Cette valeur permet d'évaluer le rendement d'une farine à la boulangerie.

Description modifier

L'alvéographe se compose de deux éléments indissociables :

  • un pétrin muni d’un passage d’extraction qui permet la formation de la pâte et l’extraction de celle-ci pour la préparation des pâtons en vue du test alvéographique.
  • l’alvéographe lui-même qui mesure l’extension tridimensionnelle d’une éprouvette de pâte qui sous l’action d’une pression d’air se déforme en une bulle. Ce mode d’extension reproduit la déformation de la pâte sous l’influence de la poussée gazeuse.

Toujours en usage de nos jours, l'alvéographe est fabriqué par Chopin Technologies filiale de la société KPM Analytics.

Protocole d'utilisation modifier

Étalonnage modifier

  1. Appuyer sur le bouton 60/92
  2. Poser l'étalonneur et bien serrer la vis
  3. Ouvrir la valve au maximum
  4. Lancer l'air à l'aide de la touche 92/60
  5. Régler la pression haute sur 92 à l'aide des flèches puis appuyer sur ok
  6. Régler la pression basse sur 60 à l'aide de la valve

Expérience modifier

0 → 1 min 30 1 min 30 → 3 min 3 min → 8 min
Huiler le plateau de sortie et les plaquettes Remplir la burette et peser les 250 g pour la prochaine expérience Indiquer les données du prochain échantillon
  1. Appuyer sur la courbe verte
  2. Sélectionner la petite note en haut à droite pour entrer les paramètres
  3. Verser 250 g de l'échantillon
  4. Remplir la burette d'eau salée à 2,5 % selon l'humidité de la farine
  5. Pour lancer le chronomètre appuyer sur la touche verte
  6. Ouvrir au maximum la burette au-dessus du petit trou de la cuve
  7. À la fin des deux premiers temps, stopper le bras au fond de la cuve en appuyant sur la touche rouge et racler la farine
  8. À 8 min, appuyer sur la flèche
  9. Enlever le premier centimètre de pâte qui sort
  10. Quand la pâte arrive au niveau des encoches couper le pâton, l'aplatir au laminoir
  11. Rehuiler la plaque entre chaque pâton
  12. Faire un rond à l'aide de l'emporte pièce et le mettre à l'étuve
  13. Au dernier pâton, appuyer sur la touche rouge puis sur la flèche
  14. Nettoyer la cuve de pâte
  15. À 28 min, appuyer longtemps sur le 1 pour remettre le chronomètre à 0
  16. Centrer le pâton, poser les deux couvercles, serrer la vis puis retirer les deux couvercles
  17. Appuyer sur le bouton rouge/vert puis réappuyer dessus quand la bulle se perce
 
Alvéogramme obtenu à la fin de l'expérience

Notes et références modifier

  1. Emilie Guilleman et Stéphane de Tourdonnet, « Version interactive du poly de phytotechnie--Blé tendre--Rendement Qualité », sur tice.agroparistech.fr, (consulté le ).
  2. Profumi dal Forno - Reologia, Parametri delle Farine.
  3. Cereal Grains: Laboratory Reference and Procedures Manual Sergio O. Serna-Saldivar, CRC Press, 16 février 2012.
  4. a b c et d (en) Tamara Dapčević Hadnađev, Milica Pojić, Miroslav Hadnađev et Aleksandra Torbica, « The Role of Empirical Rheology in Flour Quality Control », Wide Spectra of Quality Control,‎ (DOI 10.5772/24148, lire en ligne, consulté le ).
  5. a et b 14:00-17:00, « ISO 27971:2015 », sur ISO (consulté le ).

Bibliographie modifier

  • Marcel Chopin, Cinquante années de recherches relatives aux blés et à leur utilisation industrielle, Boulogne, , 195 p. (OCLC 463088833)