Affaire des disparues de Pontcharra

affaire criminelle française

L'affaire des disparues de Pontcharra est une affaire criminelle française. Elle concerne la disparition de trois jeunes femmes, entre 1981 et 1986, dans la seule ville de Pontcharra en Isère. Une seule affaire de meurtre a été résolue, celle de Marie-Thérèse Bonfanti, plus de 35 ans après les faits.

Chronologie

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Trois jeunes femmes disparaissent entre 1981 et 1986, près de la gare de Pontcharra :

  • Liliane Chevènement, secrétaire de 41 ans, disparaît le , lorsqu'elle effectue sa pause déjeuner. Elle est retrouvée morte, le , étranglée avec un fil de fer plus de deux mois après sa disparition dans la ville de Pontcharra[1].
  • Marie-Ange Billoud, 19 ans, disparaît le , alors qu'elle s'apprête à quitter Pontcharra pour se rendre à Chambéry en auto-stop[2]. Elle travaille alors comme tuciste à la Maison de la culture de Chambéry et s'y rend régulièrement en stop depuis son domicile de Pontcharra[3]
  • Marie-Thérèse Bonfanti, 25 ans, disparaît le , alors qu'elle distribue des journaux dans la ville de Pontcharra[4]. En , l'affaire est classée sans suite et un non-lieu est prononcé en [5].

Enquête de gendarmerie

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Yves Chatain est très vite considéré comme suspect dans les trois disparitions car il habite à quelques mètres de là où les trois jeunes femmes ont été aperçues pour la dernière fois[6]. Âgé de 21 ans après la disparition de Marie-Thérèse Bonfanti, il est placé en garde à vue puis relâché 24 heures plus tard[6],[7]. L'enquête de gendarmerie est au point mort quelques mois plus tard et toutes les disparitions sont classées sans suite.

Profil du suspect

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Le profil d'Yves Chatain attire la curiosité des enquêteurs en raison de son passé violent : en 1979, alors qu'il avait 14 ans, il agresse sexuellement une femme qui circulait à vélo et la frappe quelques mois plus tard car elle témoigne contre lui[8]. En , il tente d'étrangler une automobiliste, expliquant qu'il a des pulsions et écope de huit mois de prison avec sursis[8],[9].

Enquête des familles

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En , la maison d'Yves Chatain, que l'on aperçoit dans tous les reportages à la télévision comme dernier endroit où les trois jeunes femmes ont été aperçues est démolie à la demande du maire et avec l'accord du procureur. Les familles de Marie-Ange Billoud et Marie-Thérèse Bonfanti organisent sur place des manifestations demandant à ce que des fouilles soient effectuées notamment dans le vide sanitaire[10]. La mère de Marie-Ange Billoud, décide alors de fouiller elle-même les décombres et affirme détenir des restes humains, des fragments de hanches et de tibias qu'elle demande à faire analyser par la gendarmerie[11]. Malgré ces découvertes, aucune enquête n'est ouverte[12].

En , la mère de Marie-Ange Billoud écrit dans une lettre qu'elle placarde dans plusieurs endroits de Pontcharra qu'elle est persuadée que l'un de ses voisins, Yves Chatain, a tué sa fille, celle-ci ayant l'habitude de faire du stop devant sa maison mais ce dernier l'attaque en diffamation et gagne[13]. Elle écope alors de quinze jours de prison en première instance, une peine réduite à une amende de 6 000 francs en appel[14].

Au début des années 2000, un ancien enquêteur de la Gendarmerie est sollicité par les familles des victimes et affirme que les trois disparitions sont liées à un tueur en série, sans toutefois apporter de preuves concrètes, en raison notamment de la proximité entre la maison d'Yves Chatain et le dernier endroit où ont été vues les jeunes femmes[13],[15],[16].

Relances des enquêtes

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Réouverture de l'enquête sur la disparition de Marie-Thérèse Bonfanti et aveux

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À la suite d'une demande de la famille, le procureur de la République de Grenoble annonce en mai 2020 la réouverture de l’enquête sur la disparition de Marie-Thérèse Bonfanti. En juin 2021, une information judiciaire contre X est ouverte pour « enlèvement et séquestration ». Yves Chatain, désormais âgé de 57 ans, est interrogé, en mai 2022, et avoue le meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti. Il est incarcéré quelques jours plus tard[4],[9],[17]. En novembre 2022, Yves Chatain demande sa remise en liberté, qui est refusée par la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Grenoble qui estime que le meurtre était non prescrit [18]. En janvier 2023, Yves Chatain saisit la Cour de cassation, qui annule, en novembre 2023, la décision de la Cour d’appel de Grenoble et estime que le meurtre est prescrit. Il est libéré, le , en attendant que la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon à qui le dossier a été renvoyé l’examine[19],[20]. Lors de l'audience, le , une « question prioritaire de constitutionnalité » est posée afin de déterminer s'il y a réellement prescription[21],[22],[23]. Concernant le mobile du meurtre, Yves Chatain indique seulement que la voiture de Marie-Thérèse Bonfanti le gênait pour se garer[24].

Découverte des ossements

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Durant sa garde à vue, Yves Chatain donne des indications sur le lieu où le corps de Marie-Thérèse Bonfanti se trouve. Le , un crâne est retrouvé ainsi qu'un bouton pression et un bout de tissu[24]. Les expertises ADN effectuées démontrent bien qu'il s'agit du crâne de Marie-Thérèse Bonfanti[25].

Réouverture de l'enquête sur la disparition de Marie-Ange Billoud

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Le , dans la foulée des aveux d'Yves Chatain, le procureur de la République de Grenoble annonce la réouverture de l’enquête dans l’affaire de la disparition de Marie-Ange Billoud[11] ainsi que la recherche du dossier judiciaire concernant le meurtre de Liliane Chevènement[26].

Autres disparitions non élucidées

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De nombreuses zones d'ombre planent sur le suspect, étant donné le nombre conséquent de disparitions non élucidées à Pontcharra, mais également dans les alentours de jeunes femmes faisant notamment du stop[13],[9],[27],[3]. La profession du suspect, chauffeur-routier, pourrait correspondre avec les enquêtes de police et de gendarmerie[8].

Notes et références

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  1. « Isère : découverte de restes humains dans une affaire de disparition en 1986 », sur LEFIGARO, (consulté le )
  2. « Pontcharra. Isère : la justice rouvre le dossier d'une mystérieuse disparition en 1985 », sur www.ledauphine.com (consulté le )
  3. a et b « Depuis août 1984 dans le Sud-Est Trois ans d'enquête sans résultat pour une succession de disparitions », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. a et b « Isère/Savoie. Meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti : 36 ans après, l'incroyable dénouement », sur www.ledauphine.com (consulté le )
  5. « Isère : 35 ans après, les recherches reprennent dans le cadre d'une enquête pour enlèvement », sur ici, par France Bleu et France 3, (consulté le )
  6. a et b « Disparitions en Isère : Yves Chatain a-t-il tout avoué sur son passé criminel ? », sur Franceinfo, (consulté le )
  7. Par Le Parisien avec AFP Le 29 novembre 2022 à 07h42, « Cold case en Isère : le crâne retrouvé est bien celui de Marie-Thérèse Bonfanti », sur leparisien.fr, (consulté le )
  8. a b et c Par Serge Pueyo et correspondant à Grenobleet Damien Delseny Le 9 novembre 2022 à 08h22, « Meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti : les aveux d’Yves Chatain cachent-ils d’autres crimes ? », sur leparisien.fr, (consulté le )
  9. a b et c « Cold case élucidé en Isère : une association demande la réouverture de plusieurs dossiers de disparitions dans le même secteur », sur Franceinfo, (consulté le )
  10. « La découverte d'ossements à Pontcharra | INA » (consulté le )
  11. a et b « La persévérance des familles pour que les disparues de Pontcharra ne demeurent pas un «cold case» | INA », sur ina.fr (consulté le )
  12. « L'affaire des disparues de Pontcharra | INA » (consulté le )
  13. a b et c Par Serge Pueyo et correspondant à GrenobleLe 23 mai 2022 à 17h57, « Cold case en Isère : pourquoi la famille de Marie-Ange Billoud, disparue en 1985, veut relancer l’enquête », sur leparisien.fr, (consulté le )
  14. « Une plainte contre X déposée pour relancer l'enquête sur la disparition de Marie-Ange Billoud en 1985 », sur ici, par France Bleu et France 3, (consulté le )
  15. Maxime FETTWEIS, « RÉCIT. Affaire Bonfanti : comment le combat de la famille a mené aux aveux du meurtrier 36 ans après », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  16. Par Serge Pueyo et correspondant à GrenobleLe 12 mai 2022 à 21h43, « «Enfin, nous avons une réponse» : le meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti élucidé grâce au combat de toute une famille », sur leparisien.fr, (consulté le )
  17. « Disparition de Marie-Thérèse Bonfanti en Isère : un homme mis en examen et placé en détention 36 ans après les faits », sur Franceinfo, (consulté le )
  18. « Affaire Bonfanti : le meurtrier présumé reste en prison, sa demande de remise en liberté a été rejetée », sur ici, par France Bleu et France 3, (consulté le )
  19. « Meurtre de Marie-Thérèse Bonfanti : le principal suspect, mis en examen, est remis en liberté », sur Franceinfo, (consulté le )
  20. « Affaire Bonfanti : Yves Chatain, qui a reconnu l'avoir tuée, a été libéré - France Bleu », sur ici, par France Bleu et France 3, (consulté le )
  21. « Isère. Affaire Bonfanti : la loi sur la prescription en question », sur www.ledauphine.com (consulté le )
  22. « Affaire Bonfanti : une QPC, question prioritaire de constitutionnalité, posée par la cour d'appel de Lyon - France Bleu », sur ici par France Bleu et France 3, (consulté le )
  23. « Isère. Affaire Bonfanti : nouvelle audience sur l’éventuelle prescription du crime le 24 mai », sur www.ledauphine.com (consulté le )
  24. a et b « Cold Case : le crâne retrouvé fin octobre en Isère est bien celui de Marie-Thérèse Bonfanti, tuée en 1986 », sur TF1 INFO, (consulté le )
  25. « Cold case en Isère : le crâne humain découvert il y a un mois est bien celui de Marie-Thérèse Bonfanti, disparue il y a 36 ans », sur Franceinfo, (consulté le )
  26. « Cold case résolu en Isère : "La famille a toujours eu la conviction qu'il était lié à la disparition de Madame Bonfanti" », sur TF1 INFO, (consulté le )
  27. « LES DEUX JEUNES LIEGEOISES DISPARUES EN 1984 : UNE PISTE A CHAMBERY ? », sur Le Soir (consulté le )

Article connexe

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