Vieux-Port de Bastia

port à Bastia en Corse, France

Le Vieux-Port de Bastia, en corse U Vechju Portu est un quartier historique de la ville de Bastia. Il était aussi appelé Terra Vechja, en opposition à Terra Nova, c'est-à-dire la Citadelle, dont la construction est plus tardive que le Vieux-Port.

Carte
Carte interactive du Vieux-Port de Bastia
Vue panoramique du Vieux-Port de Bastia
Vue aérienne du Vieux-Port de Bastia

Ancien quartier populaire de la ville, il est aujourd'hui devenu un endroit convoité par les touristes, les patrons de bars et de restaurants. Il a malgré tout gardé certains côtés pittoresques.

Géographie modifier

 
La rive sud du Vieux-Port : les maisons du Puntettu

Le Vieux-Port de Bastia est situé dans une petite anse naturelle, au pied du promontoire du Tragone, où est située la Citadelle.

La rive sud du Vieux-Port porte le nom de U Puntettu. Ce quartier fait le lien entre la ville haute et la ville basse de Bastia.

Histoire modifier

Il est difficile de déterminer avec précision la date de création du Vieux-Port. Les seules données existantes relatent le moment où les Génois fondent le Castello della Bastia, en 1380 ; le Vieux-Port est alors une petite marine de pêcheurs, appelée Portu Cardu[1].

 
Maquette de la ville, au musée de Bastia

A Marina di Portu Cardu modifier

 
A Marina

Pour les Bastiais, A Marina est le nom de l'espace situé devant l'église Saint-Jean. Aujourd'hui parking, il est resté longtemps une plage de sable où les pêcheurs avaient leurs bateaux.

C'est autour de cet endroit que se trouvait Portu Cardu. On y trouvait quelques entrepôts et cabanes de pêcheurs. Ce n'était pas à proprement parler un village, mais une marine pour les habitants du village de Cardu, sur les hauteurs de Bastia.

Du côté sud du promontoire de la citadelle se trouvait une autre marine, appelée Portu Vechju, qui était celle d'un autre village situé sur les hauteurs de Bastia, appelé Belgudè. Ce village se trouvait autour de l'actuel fort de Monserratu, toujours visible aujourd'hui[1].

Après l'implantation génoise : Terra Vechja et Terra Nova modifier

 
Dessin génois de la Citadelle de Bastia, vers 1600-1668
 
Le phare rouge à la sortie du Vieux-Port

Avec l'implantation génoise à la Citadelle en 1380, le Vieux-Port prend de l'ampleur. Un siècle après la fondation du premier château (appelé Il Fortino ou Castello della Bastia) la ville haute, Terra Nova se développe : une vingtaine de maisons y sont construites. La ville basse, Terra Vechja, en profite également. Bastia devient le lieu de résidence des gouverneurs génois, précédemment installés au château de Biguglia[2].

Les Génois avaient besoin d'une fortification proche de la mer où ils pouvaient contrôler le commerce maritime et bénéficier des renforts militaires rapidement en cas de besoin.

C'est alors que la nature de la petite marine de Portu Cardu change pour devenir un vrai port pouvant accueillir des bateaux de plus grande dimension.

Le quai nord, appelé A Sanità, est le premier aménagé.

Et la marine devient un port : le môle génois modifier

 
U molu à A Madunnetta, ou Mole génois

Ce n'est qu'à la fin du XVIIe siècle que la petite marine de Portu Cardu devient un véritable port. En 1670, les Génois entreprennent la construction d'une jetée permettant d'accueillir davantage de bateaux.

Elle porte le nom de Mole génois, ou de Molu à a Madunnetta, du nom de la statue de la Vierge qui est entreposée dans un pan de mur de la jetée[3].

Construction de la jetée sud modifier

 
La jetée sud : U Molu di u Tragone ou mole du Dragon

La jetée sud du Vieux-Port est construite bien après le mole génois. Elle est achevée en 1863. C'est également à ce moment-là qu'est rasé le gros rocher du Lion, qui se trouvait au pied du jardin Romieu et qui entravait la circulation des bateaux dans le port[2].

De cette époque date l'aménagement du quai sud, aujourd'hui quai Albert Gillio. Jusqu'alors il n'était qu'un amoncellement de rochers.

La jetée du Dragon tient son nom de la déformation du nom corse tragone, signifiant ravin.

U Tragone était le nom du promontoire rocheux dominant le Vieux-Port, sur lequel ont été bâtis les remparts de la Citadelle.

Points d'intérêt modifier

Plusieurs lieux d'intérêts sont localisés dans le quartier du Vieux-Port :

Édifices religieux modifier

L'église Saint-Jean Baptiste (San Ghjuvà) modifier

 
Saint-Jean avec ses deux clochers

C'est l'église du quartier de Terra Vechja. Elle a été construite entre 1636 et 1666 sur le site d'une ancienne église. Elle est de style baroque. Ses deux clochers ont été construits postérieurement : celui de gauche en 1810, celui de droite en 1864. L'édifice est classé au titre des monuments historiques en 2000. Son intérieur est richement décoré.

Maisons historiques modifier

La maison Castagnola modifier

La maison appartenait à l'origine à la famille Castagnola, originaire de Ligurie. Elle a été construite à la fin du XVIe siècle. Elle est célèbre pour l'inscription « Col tempo », sur sa façade, au-dessus de l'entrée du côté de l'actuelle rue des Terrasses.

La tradition orale dit que cette devise était une réponse à la famille Cardi, famille rivale des Castagnola dont l'immeuble, plus haut, est situé juste en face.

Dans l'une de ses entrées on peut y voir des fresques datées du XVIIe siècle[4].

Sur la façade nord on peut y voir un bas-relief représentant Saint-Roch, protecteur des épidémies. Il est le souvenir d'une épidémie de peste qui a frappé la ville en 1569. La légende dit que la peste aurait épargné la ville et que l'épidémie se serait arrêtée à cet endroit.

La maison Cardi-Sansonetti modifier

Cette autre maison patricienne appartenait à la famille Cardi, riche famille de marchands et banquiers bastiais. Elle date du XVIe siècle.

On peut voir sur sa façade les armoiries en ardoise de Lavagna de la famille Cardi[3].

L'immeuble Pouillon modifier

 
Immeuble Pouillon

Le Vieux-Port de Bastia ayant durement été touché par les bombardements américains en 1943, une partie de ses immeubles sont à reconstruire. Ce sera le cas de l'immeuble appelé « Pouillon », qui est conçu après guerre par les architectes Fernand Pouillon et Louis de Casabianca[5].

Casa Varese modifier

 
Casa Varese

La casa Varese était la maison d'une importante famille de Bastia, les Varese, originaires de Ligurie.

La maison Romieu modifier

 
La maison Romieu, ancien Palazzu Rinesi

Appelé aussi « Palazzu Rinesi ». C'est la plus grande maison située dans le quartier du Vieux-Port. Cette bâtisse immense a été construite par la famille Rinesi, une ancienne et importante famille de Bastia. Elle est appelée par la suite « Romieu » après le mariage, au début du XIXe siècle, d'une Rinesi avec un certain Romieu[3].

La maison Spinola modifier

 
Casa Spinola

Au 12 rue Spinola se trouve une maison ayant appartenu à la famille Spinola. Une façade de l'immeuble donne sur le quai de A Sanità.

Les Spinola venaient de Gênes où ils étaient une importante famille patricienne. Ils ont donné à la Corse dix-neuf gouverneurs et commissaires généraux.

Il y eut également un doge, Domenico Maria, né en Corse et surnommé Il Corsetto.

La maison Spinola, construite sur le quai nord du Vieux-Port, servait d'entrepôt pour les marchandises qui circulaient entre la Corse et Gênes[3].


La maison Figarelli modifier

La maison Figarelli, ou Figarella, est située entre la rue de la marine et la rue Saint-Jean. Les Figarelli étaient une importante famille qui a donné à la ville deux podestats et un maire[3].

 
Casa Figarelli

Rue Carbuccia modifier

Au numéro 23 on peut découvrir un immeuble avec un portail à bossages qui date du XVIIe siècle. Une plaque rappelle qu'elle a accueilli Honoré de Balzac en 1838.

On peut également découvrir, dans la même rue, d'autres maisons historiques : la Casa Barbaggi-Rivarola (au numéro 7), la Casa Lota (au numéro 9), la Casa Carbuccia (au 12), la Casa Sisco (au n°1).

 
Portail à bossage du XVIIe siècle

Casa Barbaggi-Rivarola modifier

La Casa Barbaggi-Rivarola (ou maison Barbaggi-Rivarola) se trouve au numéro 7 de la rue Carbuccia. Elle a été aménagée au XVIIIe siècle par Giuseppe Barbaggi, un riche et puissant personnage bastiais, oncle par alliance de Pascal Paoli. C'est ici que Paoli séjournait lorsqu'il se rendait à Bastia. La maison communique avec le couvent des Ursulines. C'est ainsi que Paoli rencontrait Maria Domenica Rivarola, considérée comme son agent secret. Le comte Domenio Rivarola, petit-fils de Giuseppe Barbaggi, hérite de la maison[2].

Casa Lota modifier

La Casa Lota, ou maison Lota, est située au numéro 9 de la rue Carbuccia. Elle a été construite à la fin du XVIIe siècle ou au début du XVIIIe siècle. Elle a d'abord porté le nom de « Casa Morati », puis de « Casa de Gentile ». Elle a ensuite été rachetée par la famille Lota, une riche famille de commerçants bastiais, dont deux membres ont été maires de Bastia : Antoine-Hyacinthe de 1828 à 1831 et son neveu François de 1851 à 1854. Ils occupèrent également la fonction de consuls du pape. Cette maison a donc fait office de consulat des États pontificaux au XIXe siècle[3].

Casa Carbuccia modifier

La Casa Carbuccia (ou maison Carbuccia) est située au 12 de la rue Carbuccia. Le blason de la famille Carbuccia figure sur la porte d'entrée. Cette famille, originaire du village de Carbuccia en Corse-du-Sud, s'est installée à Bastia au XVIe siècle[2].

Casa Sisco modifier

La Casa Sisco (ou maison Sisco) est située au numéro 1 de la rue Carbuccia. La maison a été édifiée au XVIIe siècle par Micheletto Sisco, un notable bastiais. Elle se caractérise par un portail architecturé.

 

Monuments modifier

L'escalier Rinesi-Romieu et le jardin Romieu modifier

À côté du Palazzu Rinesi se trouve un escalier monumental, construit entre 1871 et 1873, qui relie le quartier du Vieux-Port à la ville haute. ll a été conçu et aménagé selon les plans de l’architecte bastiais Paul-Augustin Viale. L'ensemble de l'escalier et de la rampe est inscrit aux monuments historiques[6].

Le jardin est aménagé entre 1874 et 1875[3].

A Sanità, le plus ancien quai du Vieux-Port modifier

Le quai nord est le plus ancien du Vieux-Port de Bastia. Il s'appelait A Sanità, la santé, en raison du bureau de l'Ufficio della Sanità qui se trouvait installé dans un des bâtiments à l'époque génoise. Cet organisme fut instauré pour contrôler les navires qui accostaient dans le Vieux-Port pour s'assurer de l'absence de maladies parmi les équipages de marins, à la suite des épidémies de peste[7].

 
Le quai nord du Vieux-Port, appelé A Sanità

Les jetées nord et sud modifier

La jetée nord : le mole génois modifier

Le Môle génois, ou Mole à a Madunnetta modifier

 
U Molu à A Madunetta

C'est la jetée nord, construite à l'époque génoise. La Sérénissime République de Gênes entreprend sa construction à la fin du XVIIe siècle. Sa réalisation a permis à l'ancienne petite marine de pêcheurs de Portu Cardu de devenir un véritable port. Dès lors, le trafic maritime ne cessera d'augmenter[2].

Les plots d'amarrage modifier

À noter que les plots d'amarrage en fonte de fer de la jetée de la Madunnetta sont les anciens canons des remparts de la citadelle, immergés dans la maçonnerie du quai[2].

 
Un plot d'amarrage, ancien canon de la citadelle réutilisé au mole génois

A Madunnetta modifier

 
A Madunnetta

« A Madunnetta » est le nom d'une statue de la Vierge, placée dans une niche de la jetée. Selon la tradition elle apporte sa protection aux marins et aux pêcheurs de Bastia. Son installation date de 1671. La sculpture originale est entreposée au Musée de Bastia. Cette représentation de la Vierge est appelée Notre-Dame de Savone, ville de la région de Gênes où la Vierge serait apparue[3].

Le quai sud et la jetée du Dragon modifier

U Molu di u Tragone modifier

 
La jetée nord (U Molu à A Madunnetta) et la jetée sud (U Molu di u Tragone)

Située face à la jetée nord, de l'autre côté du port, la jetée sud a été construite bien après le mole génois.

Achevée en 1863, elle est appelée U Molu di u Tragone ou en français jetée du Dragon.

Le mot « Dragon » est une mauvaise interprétation du mot corse « Tragone », signifiant « ravin », « falaise ». À Bastia « U Tragone » était le nom donné au promontoire surplombant le Vieux-Port, où a été bâtie la citadelle.

La promenade le long du quai Sud se prolonge avec la passerelle de l'Aldilonda, construite sur les rochers, au pied des remparts de la citadelle.

La grotte du Christ Noir modifier

D'après la tradition, en 1428, deux pêcheurs d'anchois bastiais auraient trouvé un crucifix en mer, qu'ils auraient entreposé dans une grotte située entre le Vieux-Port et la Citadelle. Le crucifix aurait ensuite été miraculeusement retrouvé dans l'oratoire Sainte-Croix, à la Citadelle.

Appelé Crucifix des Miracles, il est fêté chaque année, le 3 mai[8].

L'Aldilonda modifier

 
L'Aldilonda

C'est le nom donné à une promenade qui part du Vieux-Port de Bastia, qui contourne la Citadelle pour rejoindre l'anse de Portu Vechju et de Ficaghjola, au Sud de la ville.

L'Aldilonda a été inaugurée en décembre 2020.

Noms de lieux du Vieux-Port modifier

  • A Marina
  • U Mulettu
  • U Puntettu
  • U Molu à a Madunnetta
  • U Molu di u Tragone
  • A Sanità
  • U Mughjò
     
    U Mulettu avec le quartier du Puntettu en arrière-plan

Le Vieux-Port dans la peinture modifier

Le Vieux-Port de Bastia a inspiré de nombreux artistes.

Articles connexes modifier

Bibliographie modifier

  • Janine Serafini-Costoli, Bastia, regards sur son passé, Berger-Levrault, 1983 (ISBN 2-7013-0515-2 et 978-2-7013-0515-8)
  • Pierre-Louis Alessandri, Serena De Mari, Ghjermana De Zerbi et Jean-Baptiste Raffalli, Almanach bastiais : tradizione viva di Bastia è di u so circondu, Comité des fêtes et de l'animation du patrimoine, 2006 (ISBN 2-9525608-0-3 et 978-2-9525608-0-1)
  • Jean-Baptiste Raffalli, Fernande Maestracci et Max Boulmer, Bastia : le guide, musées, monuments, promenades, Monum - Ed. du patrimoine, 2003 (ISBN 2-85822-697-0 et 978-2-85822-697-9)

Notes et références modifier

  1. a et b Janine Serafini-Costoli et Bastia, Bastia, regards sur son passé, Berger-Levrault, (ISBN 2-7013-0515-2 et 978-2-7013-0515-8, OCLC 10499346, lire en ligne)
  2. a b c d e et f Jean-Baptiste Raffalli, Fernande Maestracci et Max Boulmer, Bastia : musées, monuments, promenades, Monum - Ed. du patrimoine, (ISBN 2-85822-697-0 et 978-2-85822-697-9, OCLC 717275677, lire en ligne)
  3. a b c d e f g et h Pierre-Louis Alessandri, Serena De Mari, Ghjermana De Zerbi et Jean-Baptiste Raffalli, Almanach : tradizione viva di Bastia è di u so circondu : histoire, religion, littérature, arts et architectures, vieux métiers, jardins, maisons historiques, tradition orale, musique, Comité des fêtes et de l'animation du patrimoine, (ISBN 2-9525608-0-3 et 978-2-9525608-0-1, OCLC 67609495, lire en ligne)
  4. « Les fresques de la maison Castagnola », sur Corse Matin, (consulté le )
  5. Odile AURACARIA, « Bastia : Au musée, Louis de Casabianca (1904-1976) , une modernité corse », sur Corse Net Infos - Pure player corse (consulté le )
  6. « Ensemble constitué de la rampe Saint-Charles, de l'escalier et du jardin Romieu », sur www.pop.culture.gouv.fr (consulté le )
  7. Antoine-Marie Graziani et Impr. SEPEC), Seize études sur la Corse génoise, Éditions Alain Piazzola, dl 2020 (ISBN 978-2-36479-116-9 et 2-36479-116-2, OCLC 1194550552, lire en ligne)
  8. « "U Cristu Negru": célébration du Christ Noir à Bastia », sur France 3 Corse ViaStella (consulté le )