Utilisateur:Leonard Fibonacci/La délégation chargée de démettre Flavius Josèphe

Livre II de la guerre des juifs modifier

XXI, 7

7. [620] Cependant ses soldats, saisissant rapidement leurs armes, coururent contre les conjurés. Alors Josèphe, craignant de soulever une guerre civile et de perdre la ville par la faute de quelques envieux, envoya dire à ses hommes de se borner à veiller à leur propre sûreté, de ne tuer personne, de ne rechercher aucun coupable[308]. Ils se conformèrent à ses ordres et se tinrent en repos, mais les habitants des alentours, ayant appris le guet-apens et le nom du conspirateur, s'ameutèrent contre Jean, qui se hâta de regagner Gischala, sa patrie. Les Galiléens accoururent se ranger auprès de Josèphe, ville par ville ; de nombreux milliers de soldats, armés de toutes pièces, protestaient qu'ils étaient là pour punir Jean, l'ennemi public ; qu'ils brûleraient avec lui sa ville natale qui lui avait donné asile. Josèphe les remercia de leur sympathie, mais contint leur élan, préférant vaincre ses ennemis par la raison plutôt que de les tuer. Il se contenta donc de faire dresser la liste nominative des Juifs des diverses villes qui avaient suivi Jean dans sa défection - leurs concitoyens mirent le plus grand zèle à les lui dénoncer - puis fit proclamer par le héraut que tous ceux qui dans les cinq jours[309] n'auraient pas quitté Jean verraient piller leurs biens et brûler leurs maisons avec leurs familles. Par ce moyen il obtint aussitôt la défection de trois mille[310] hommes qui vinrent jeter leurs armes à ses pieds ; avec le reste, environ deux mille Tyriens[311] fugitifs, Jean,  renonçant aux hostilités ouvertes, revint à des complots plus dissimulés[312]. Il envoya donc secrètement[313] des émissaires à Jérusalem pour dénoncer Josèphe, alléguant les grandes forces que celui-ci avait réunies, et prétendant qu’il ne tarderait pas à venir s'établir tyran de la capitale, si on ne le prévenait. Le peuple, qui prévoyait ces calomnies, n'y attacha pas d'importance ; il en fut autrement des principaux citoyens et de quelques magistrats : animés par l'envie, ils envoyèrent sous main à Jean les sommes nécessaires pour lever des mercenaires et faire la guerre à Josèphe. Ils décrétèrent aussi entre eux de le révoquer de ses fonctions de gouverneur. Cependant, comme ils ne pensaient pas qu'un décret suffirait, ils envoyèrent deux mille cinq cents hommes armés (900 d'après Vita)[314] avec quatre personnages de marque : Ioesdron (Νομικοῦ Ἰωεσδρον) Jo(a)zar[315] fils de Nomicos (cherchant à concilier le texte avec celui de la Vita le traducteur "corrige" ce qu'il pense être une erreur en remplaçant Ἰωεσδρον des manuscrits de BJ par Ἰώζαρον que l'on trouve dans la Vita, comme cela résulte de la note [315]), Ananias fils de Sadoc, Simon et Judas, fils de Jonathas[1] (Vita donne directement Jonathas au lieu de Judas fils de Jonathas)[316], tous beaux parleurs ; ils étaient chargés de détourner de Josèphe la faveur du peuple ; si le gouverneur se présentait spontanément, ils avaient ordre de lui laisser rendre ses comptes ; s’il voulait se maintenir de force, de le traiter comme un ennemi public. Les amis de Josèphe lui mandèrent que des troupes marchaient vers la Galilée, mais ils ne purent lui en indiquer les motifs, car ses adversaires avaient délibéré à huis clos. Aussi, comme il n’avait pu se mettre sur ses gardes, quatre villes firent cause commune avec ses ennemis, dés qu’ils apparurent : Sepphoris, Gabara [317a], Gischala et Tibériade (le texte grec n'a pas Gabara, mais Gamala, c'est le traducteur qui "corrige"  [sic] pour mettre BJ en accord à ce qu'écrit (faussement) Josèphe dans sa Vita écrite 30 ans plus tard, comme contre-feu à ce que vient d'écrire Justus de Tibériade. Dans la Vita Josèphe dit que Sepphoris, Gabara et Tibériade étaient les 3 plus grandes villes de Galilée, mais c'est pour rendre non-identifiable la ville où se trouvait la maison de Jésus en forme de tour). Cependant, même ces villes[317], il les ramena promptement, sans recourir aux armes ; puis, par ses habiles manœuvres, il mit la main sur les quatre commissaires et sur leurs principaux soldats et les renvoya à Jérusalem. Le peuple s’irrita fortement contre eux, et les aurait massacrés, eux et leurs mandants. s'ils ne s'étaient hâtés de prendre la fuite.

8[318]. [632] Jean, dans sa crainte de Josèphe, se tint désormais enfermé dans l'enceinte des murs de Gischala. Peu de jours après, Tibériade fit de nouveau défection.

La délégation dans la Guerre des Juifs modifier

  • Ioesdron de Nomicos (Νομικοῦ Ἰωεσδρον), (dans la Vita il y a un Gosor, ce qui est différent de Ioesdron)
  • Ananias fils de Sadoc, (dans la Vita il y a un Ananias, pharisien, sans plus de précision, est-ce le même ?)
  • Simon et Judas, fils de Jonathas (directement Jonathas dans la Vita)
    • Dans la Vita pas de Simon (et Judas), fils de Jonathas, mais Simon fils de Gamaliel personnage très connu de la famille de qui Josèphe fait l'éloge et Jonathas lui-même au lieu de ses fils. Jonathas est probablement mort au moment où Josèphe écrit (vers 95), ce n'est peut-être pas le cas de ses fils. L'éloge de Joseph à la famille de Simon fils de Gamaliel (Ier) n'est probablement pas étrangère au fait que l'homme fort du judaïsme au moment où Josèphe écrit est le fils de ce Simon et donc un membre de la famille Gamaliel, il s'appelle d'ailleurs lui aussi Gamaliel II.

La délégation dans la Vita modifier

Le texte modifier

[XXXVIII] [189] Cependant Jean, fils de Lévi, dont la haine s'augmentait toujours de plus en plus, ne pouvant souffrir ma prospérité, résolut de me perdre à quelque prix que ce fût. Ainsi après avoir fait enfermer de murailles Gischala, qui était le lieu de sa naissance, [190] il envoya Simon, son frère (Simon ben Lévi), et Jonathas, fils de Sisenna, accompagné de cent hommes de guerre vers Simon fils de Gamaliel, pour le prier de faire en sorte, auprès de ceux de Jérusalem, qu'on révoquât le pouvoir qui m'avait été donné, et qu'on l'établit gouverneur en ma place par le consentement de tout le peuple. [191] Ce Simon de Jérusalem (Simon de Gamaliel) était d'une naissance fort illustre, Pharisien de secte, et par conséquent attaché a l'observation de nos lois, [192] homme fort sage et fort prudent, capable de conduire de grandes affaires, ancien ami de Jean, et qui alors me haïssait. [193] Ainsi touché des prières de son ami, il représenta aux grands sacrificateurs Ananus (Ἄνανον Anan ou Ananias ?), et Jésus fils de Gamala (Ἰησοῦν τὸν τοῦ Γαμαλᾶ), et aux autres qui étaient de son parti, qu'il leur importait de m'ôter le gouvernement de la Galilée, avant que je m'élevasse à un plus haut degré de puissance ; mais qu'il n'y avait point de temps à perdre, parce que si j'en avais envie, je pourrais venir attaquer la ville avec une armée.  [194] Ananas (Ἄνανος) lui répondit, que ce qu'il proposait n'était pas facile à exécuter, parce que plusieurs des sacrificateurs et des principaux d'entre le peuple rendaient des témoignages de moi fort avantageux, et qu'ainsi il n'était pas raisonnable d'accuser un homme à qui on ne pouvait rien reprocher.

[XXXIX] [195] Simon (ben Gamaliel) les pria de tenir au moins la chose secrète, et dit qu'il se chargeait de l'exécution. Il manda ensuite le frère de Jean (Simon ben Lévi), et le chargea de rapporter à son frère que, pour venir à bout de son dessein, il envoyât des présents à Ananus (Ἀνάνου). [196] Ce moyen lui réussit ; car Ananus (Ἄνανος) et les autres s'étant laissé corrompre par de l'argent, résolurent de m'ôter mon gouvernement, sans que nul autres de Jérusalem que ceux de leur faction en eussent connaissance. Ils envoyèrent pour cet effet quatre personnes, qui, bien que de diverse naissance, étaient savants et habiles ; [197] savoir, d'entre le peuple, Jonathas et Ananias pharisiens ; et de la race sacerdotale, Gosor (Joazar) aussi pharisien ; auxquels on joignit Simon (ben Gamaliel), qui était le plus jeune de tous, et descendant des grands sacrificateurs[2]. [198] L'ordre qu'ils leur donnèrent fut d'assembler les Galiléens, et de leur demander d'où venait cette grande affection qu'ils avaient pour moi ; que s'ils disaient que c'était parce que j'étais de Jérusalem, ils leur répondissent qu'eux quatre en étaient aussi : que s'ils disaient que c'était à cause que j'étais fort savant dans la loi, ils leur repartissent qu'ils n'en étaient pas moins instruits que moi ; et que s'ils disaient que j'étais parce que j'étais sacrificateur, ils répliquassent que deux d'entre eux l'étaient aussi.

[XL] [199] Jonathas et ses collègues partirent avec ces instructions, et avec quarante mille deniers d'argent qu'on leur donna du trésor public. [200] Un nommé Jésus, qui était de Galilée, étant en ce même temps venu à Jérusalem, avec six cents hommes de guerre, qu'il commandait, ils le payèrent pour trois mois ainsi que tous ses gens, et l'engagèrent ainsi à les suivre pour exécuter tout ce qu'ils lui ordonneraient ; ils joignirent encore à lui trois cents habitants de Jérusalem qu'ils payèrent aussi. [201] Ils partirent en cet état, ayant encore avec eux Simon, frère de Jean (ben Lévi), et cent soldats qu'ils avaient amenés. [202] Ils avaient de plus un ordre secret de me mener à Jérusalem si je quittais volontairement les armes ; et de me tuer si je faisais résistance, sans craindre d'en être punis, comme ne l'ayant fait qu'en vertu de leur pouvoir. [203] Ils avaient aussi des lettres adressées à Jean, pour l'exhorter à me faire la guerre, et d'autres (pour les ?) habitants de Séphoris, de Gabara et de Tibériade, pour les porter à lui donner du secours.

[XLI] [204] Jésus, fils de Gamala (Ἰησοῦς ὁ τοῦ Γαμαλᾶ = Jésus de Gamala), qui avait eu part à tous ces conseils, et qui était fort mon ami, en donna avis à mon père, qui me l'écrivit fort au long....

Analyse modifier

Le texte grec (J. A. C. Buchon)

« Ἰωνάθης καὶ Ἀνανίας Φαρισαῖοι τὴν αἵρεσιν, ὁ δὲ τρίτος Γόζορος ἱερατικοῦ γένους, Φαρισαῖος καὶ αὐτός· Σίμων δ᾽ ἐξ ἀρχιερέων νεώτατος ἐκείνων. »

Traduction de Buchon

« Jonathas et Ananias pharisiens ; et de la race sacerdotale, Gosor (Joazar) aussi pharisien ; auxquels on joignit Simon, qui était le plus jeune de tous, et descendant des grands sacrificateurs. »

Les quatre noms
  • Ἰωνάθης -> Jonathas (Ionatès)
  • Ἀνανίας -> Ananias (Ananias)
  • Γόζορος -> Gozoros (et pas Joazar comme traduit par Buchon et d'autres pour tenter d'harmoniser avec la Vita, lorsque Buchon parle d'un Joazar le texte grec est Ἰώζαρον)
  • Σίμων -> Simon (dont on comprend avec le contexte que c'est Simon fils de Gamaliel)
Traduction de Pelletier

« Elle comprenait deux hommes du peuple : Jonathas et Ananias, Pharisiens ; le troisième, Josar, de famille sacerdotale, pharisien lui aussi, et Simon, le plus jeune, descendant des grands prêtres. »

Ou comment Gozoros devient Josar pour tenter d'harmoniser avec la Guerre des Juifs qui parle d'un Joazar.

Conclusions
  • Dans la Vita c'est directement Jonathas et pas ses fils qui fait partie de la délégation ;
  • Il y a un Gozoros (Γόζορος) qui ne figure pas dans BJ ;
  • Un des quatre est Simon fils de Gamaliel qui ne faisait pas partie de la délégation 30 ans plus tôt, mais dont entretemps le fils (Gamaliel II) est devenu l'homme fort de Yabneh, obligatoirement avec l'aval des Romains, sinon ils n'auraient jamais accepté que se reconstitue une telle académie avec un sanhédrin et qui ne peut rien refuser aux Romains. "Josèphe" et ses commanditaires ont donc probablement l'assurance que Gamaliel (II) confirmera leur version. D'où l'éloge dithyrambique que Josèphe fait de cette famille dans sa Vita, alors qu'il n'avait pas dit un seul mot de Hillel et de Gamaliel Ier dans ses 27 livres précédents, alors qu'il est certain que ce sont des personnages incontournables du judaïsme de l'époque !

Joazar dans la Vita modifier

sachant que la Galilée ne s'était point encore toute soulevée contre les Romains, mais qu'une partie était demeuré dans le devoir, [29] ils m'y envoyèrent avec deux autres sacrificateurs, Joasar et Judas, pour persuader aux mutins de quitter les armes et de les remettre entre les mains des principaux de la nation avec assurance de les leur conserver, mais ajoutant qu'avant de s'en servir, il faudrait savoir quelle serait l'intention des Romains.

Disparition de la délégation dans la version slavonne modifier

Dans la version en vieux slave, Jean après s'être enfui à Gischala se contente d'envoyer des lettres à Jérusalem et pas des délégués dont son frère Simon. En retour les "magistrats de Jérusalem" lui envoient de l'or "pour réunir des troupes et combattre Josèphe". (p. 203)

Pas de passage à Jérusalem, pas d'envoi de cadeaux à Ananias pour le corrompre selon le conseil de Simon ben Gamaliel. Pas de délégation composée de 3 pharisiens dont 2 hauts prêtres. Pas de force de 100 hommes données à Simon le frère de Jean, pas d'adjonction "d'un certain Jésus de Galilée" avec les 600 hommes qui étaient venus avec lui à Jérusalem, pas de paiement de leurs soldes pour 3 mois, pas d'ordre de destituer Josèphe, pas de discret message passé par Jésus de Gamala au père de Josèphe, pas de manœuvres des deux parties en Galilée, pas de membres de la délégation fait prisonnier par Josèphe, pas d'envoi d'une délégation de notables à Jérusalem pour retourner la situation, pas de message de confirmation de Josèphe dans ses fonctions, pas de libération de la délégation avec l'ordre de quitter la Galilée,...

  1. Νομικοῦ Ἰώεσδρον καὶ Ἀνανίαν Σαδούκι καὶ Σίμωνα καὶ Ἰούδην Ἰωνάθου
  2. Ἰωνάθης καὶ Ἀνανίας Φαρισαῖοι τὴν αἵρεσιν, ὁ δὲ τρίτος Γόζορος ἱερατικοῦ γένους, Φαρισαῖος καὶ αὐτός· Σίμων δ᾽ ἐξ ἀρχιερέων νεώτατος ἐκείνων.