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James Meek - Sibérie 1919
Il deviendrait l'ami de Balashov. Ses ennemis étaient Matula et Samarin, les deux piliers jumeaux de la démence qui s'étaient emparée de Jazyk. Rien ne bougerait tant que Matula empêcheraient les Tchèques de rentrer au pays et qu'Anna serait entichée de Samarin. Il semblait inconcevable qu'une femme dont le mari s'était émasculé au nom de Dieu pût tolérer un amant qui avait assassiné et dévoré l'un de ses compagnons de bagne. Mutz se rendit compte qu'il souriait. Ceux qui perpétraient les actes les plus extrêmes s'exposaient non seulement aux châtiments les plus radicaux, mais également au plus haut point au ridicule. La guerre venait à peine de prendre fin en Europe (...).
James Meek - Un acte d'amour (page 306) - (Éditions Métaillé, 2007)
s:mai 2008 Invitation 1François Coppée - Invocation Enfant blonde aux doux yeux, ô rose de Norvége, François Coppée (1842 - 23/05/1908 ) - L’Exilée (1877) |
s:mai 2008 Invitation 2James Meek - Sibérie 1919 Il deviendrait l'ami de Balashov. Ses ennemis étaient Matula et Samarin, les deux piliers jumeaux de la démence qui s'étaient emparée de Jazyk. Rien ne bougerait tant que Matula empêcheraient les Tchèques de rentrer au pays et qu'Anna serait entichée de Samarin. Il semblait inconcevable qu'une femme dont le mari s'était émasculé au nom de Dieu pût tolérer un amant qui avait assassiné et dévoré l'un de ses compagnons de bagne. Mutz se rendit compte qu'il souriait. Ceux qui perpétraient les actes les plus extrêmes s'exposaient non seulement aux châtiments les plus radicaux, mais également au plus haut point au ridicule. La guerre venait à peine de prendre fin en Europe (...). James Meek - Un acte d'amour (page 306) - (Éditions Métaillé, 2007) |
s:mai 2008 Invitation 3Gérard de Nerval - El Desdichado Je suis le ténébreux, — le veuf, — l’inconsolé, Gérard de Nerval (22 /05/1808 - 1855) - Les Chimères (1854) |
s:mai 2008 Invitation 4Voltaire – L'aurore de la raison J’ai vu ensuite pour quelles sottises inintelligibles les hommes s’étaient chargés les uns les autres d’imprécations, s’étaient détestés, persécutés, égorgés, pendus, roués, et brûlés ; et j’ai dit s’il y avait eu un sage dans ces abominables temps, il aurait donc fallu que ce sage vécut et mourût dans les déserts. Je vois qu’aujourd’hui, dans ce siècle qui est l’aurore de la raison, quelques têtes de cette hydre du fanatisme renaissent encore. Il paraît que leur poison est moins mortel, et leurs gueules moins dévorantes. Le sang n’a pas coulé pour la grâce versatile, comme il coula si longtemps pour les indulgences plénières qu’on vendait au marché ; mais le monstre subsiste encore : quiconque recherchera la vérité risquera d’être persécuté. Faut-il rester oisif dans les ténèbres ? ou faut-il allumer un flambeau auquel l’envie et la calomnie rallumeront leurs torches ? Pour moi, je crois que la vérité ne doit pas plus se cacher devant ces monstres que l’on ne doit s’abstenir de prendre de la nourriture dans la crainte d’être empoisonné. Voltaire (1694 - 30/05/1778) - Le philosophe ignorant (1766) (dernières sections LV et LVI) |
s:mai 2008 Invitation 5Cormac McCarthy - Bivouac Cette nuit-là depuis l'orée de la prairie où il avait établi son bivouac il aperçut des lueurs jaunes aux fenêtres des maisons d'un hameau sur les bords du Bavispe à une dizaine de miles au loin. La prairie était pleine de fleurs qui se fermaient au crépuscule pour se rouvrir à l'apparition de la lune. Il ne fit pas de feu. Ils étaient assis côte à côte lui et la louve dans l'obscurité et regardaient les ombres des choses surgir sur la prairie et courir et disparaître et revenir. La louve était assise les oreilles en avant avec son nez qui effectuait continuellement de menues corrections dans l'air. Comme pour adresser des signes de connivence à la vie dans l'univers. Il était assis avec la couverture sur les épaules et regardait bouger les ombres tandis que la lune grimpait au dessus des montagnes derrière lui et que les lueurs lointaines sur le Bavispe s'éteignaient l'une après l'autre et bientôt il y en eut plus du tout. Cormac McCarthy - Le grand passage (page 99) -(Éditions de l'olivier, 1997) |