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Saint-Amant - Assis sur un fagot, une pipe à la main
- Assis sur un fagot, une pipe à la main,
- Tristement accoudé contre une cheminée,
- Les yeux fixés vers terre, et l'âme mutinée,
- Je songe aux cruautés de mon sort inhumain.
- L'espoir qui me remet du jour au lendemain,
- Essaye à gagner temps sur ma peine obstinée,
- Et me venant promettre une autre destinée,
- Me fait monter plus haut qu'un Empereur Romain.
- Mais à peine cette herbe est-elle mise en cendre,
- Qu'en mon premier état il me convient descendre,
- Et passer mes ennuis à redire souvent :
- Non, je ne trouve point beaucoup de différence
- De prendre du tabac à vivre d'espérance,
- Car l'un n'est que fumée, et l'autre n'est que vent.
Marc-Antoine Girard de Saint-Amant (30/9/1594-29/12/1661) - Œuvres poétiques (1649)
s:décembre 2011 Invitation 1Flaubert - Et ce fut tout. Onze heures sonnèrent. — Déjà ! dit-elle ; au quart, je m’en irai. Elle se rassit ; mais elle observait la pendule, et il continuait à marcher en fumant. Tous les deux ne trouvaient plus rien à se dire. Il y a un moment, dans les séparations, où la personne aimée n’est déjà plus avec nous. Enfin, l’aiguille ayant dépassé les vingt-cinq minutes, elle prit son chapeau par les brides, lentement. — Adieu, mon ami, mon cher ami ! Je ne vous reverrai jamais ! C’était ma dernière démarche de femme. Mon âme ne vous quittera pas. Que toutes les bénédictions du ciel soient sur vous ! Et elle le baisa au front comme une mère. Mais elle parut chercher quelque chose, et lui demanda des ciseaux. Elle défit son peigne ; tous ses cheveux blancs tombèrent. Elle s’en coupa, brutalement, à la racine, une longue mèche. — Gardez-les ! adieu ! Quand elle fut sortie, Frédéric ouvrit sa fenêtre, Mme Arnoux, sur le trottoir, fit signe d’avancer à un fiacre qui passait. Elle monta dedans. La voiture disparut. Et ce fut tout. Gustave Flaubert (12/12/1821-8/55/1880) - L’Éducation sentimentale (1869) (Troisième partie, fin du ch. VI). |
s:décembre 2011 Invitation 2Max Elskamp - À mon père
Max Elskamp ( 5/5/1862-10/12/1931)- La chanson de la rue Saint-Paul (1922) |
s:décembre 2011 Invitation 3Jean Pierre Chabrol - La crève du vieux pays C’est long de mourir. C’est insupportable, une langueur ! Y aurait de quoi se flinguer un bon coup. Surtout quand il ne s’agit pas que de sa propre mort, quand se mourir soi-même ne suffit plus, quand il faut bien, se mourant, mourir aussi son pays. Crever sa mort dans la mort de sa terre. On ne peut que rester le soir au coin de sa cheminée, quand on en a encore une, à regarder flamber les dernières bougnes des derniers mûriers. Mais il y a pire, mais il est des soirs, des nuits, l’hiver surtout, par des temps à ne pas mettre un assureur dehors, où personne ne passe, où personne ne vient s’accroupir dans l’autre coin, outre-flammes. Alors on se résout à sortir, à chercher un toit, un autre feu, un autre coin, un autre agonisant, un mourant veinard qui voit, lui guilleret, quelqu’un venir mourir avec lui dans la crève du vieux pays. Les feuilles mortes ont un tel poids qu’elles font crier le sol. Jean-Pierre Chabrol (11/6/1925-01/12/2001) - Le crève Cévenne (1972, éd. Plon) |
s:décembre 2011 Invitation 4Léopold Sédar Senghor - La Nuit de Sine
Léopold Sédar Senghor (9/10/1906-20/12/2001) - Chants d’ombre (Éditions du Seuil, 1945) |
s:décembre 2011 Invitation 5Saint-Amant - Assis sur un fagot, une pipe à la main
Marc-Antoine Girard de Saint-Amant (30/9/1594-29/12/1661) - Œuvres poétiques (1649) |