Mohamed Iguerbouchène

compositeur
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Mohamed Iguerbouchène
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 58 ans)
HydraVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom dans la langue maternelle
محمد اقربوشن ou Muḥend IgerbucenVoir et modifier les données sur Wikidata
Surnom
Georges IguerbouchenVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activité
signature de Mohamed Iguerbouchène
Signature

Mohamed Iguerbouchène (en kabyle : Muḥend Igerbucen, en arabe : محمد اقربوشن, en français: Georges Iguerbouchène) est un compositeur algérien né le à Aït Ouchène[1] (commune d’Aghribs chez les Aït Djennad dans la wilaya de Tizi-Ouzou, Kabylie), en Algérie.

Biographie modifier

Mohamed Iguerbouchène était l'aîné des onze enfants nés de Saïd ben Ali et de Sik Fatma Bent Areski. Ses premiers pas dans l’instruction, Iguerbouchène les effectuera à l’âge de 6 ans à l’école de Sarrouy, située au quartier de Soustara, à Alger.

À l’âge de 12 ans, il se met à s’intéresser à la musique et à suivre des cours de solfège. Un jour, Iguerbouchène rencontre un riche écossais Bernard Fraser Ross qui, séduit par le potentiel du jeune algérien alors âgé de 15 ans, décidae de l’aider dans sa formation artistique. Grâce à l’aide (financière) de Ross, Mohamed Iguerbouchène rejoint la ville de  Manchester, en  Angleterre, où il intégre le Royal Northern College of Music en 1922. Grâce à ses nouvelles relations en Angleterre, Mohamed  Iguerbouchène intègre la Royal Academy of Music où le professeur Livingston l’aida à se perfectionner sa musique. En 1924, et toujours grâce au soutien de Bernard Fraser Ross, il se rend  à Vienne, en Autriche, parfaire son art auprès d’Alfred Grünfeld[2].

Ses premières œuvres comprennent, entre autres, Kabylia Rapsodie n. 9 et Arabe rapsodie n. sept. Une année plus tard, à l’âge de 18 ans à peine, il donne son premier concert à Bregenz, sur le Lac de Constance, en Autriche. Il y joue les œuvres de son propre répertoire Il remporta même le premier prix de composition d’harmonie et contrepoint ainsi que le premier prix d’instrumentation et de piano[2].

A la mort de Bernard Fraser Ross en 1929, Iguerbouchène hérite de tous ses biens en Algérie. Fraser Ross lui légua également 1 500 livres supplémentaires à condition "qu’il n’épouse pas une européenne"[3]. Cependant, Iguerbouchène a épousera une citoyenne française d'Algérie, Louise Gomez. Leur union échouera, mais ils ne divorceront pas[4].

Au début des années 1930, Iguerbouchène compose la musique de plusieurs documentaires algériens et du court métrage Dzaïr. À Paris, à l'Institut national des langues et civilisations orientales, il étudie les dialectes Berbères Tamasheq, le Chaoui et le Tashelhit[5]. Dans les années 1930, il devient également copropriétaire du célèbre cabaret, « El Djazaïr » (Alger en arabe), rue de la Huchette dans le Quartier latin de Paris. En 1934, Iguerbouchène devient sociétaire de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) en tant qu'auteur-compositeur, et cette même année il devient également sociétaire de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)[6]. Julien Duvivier lui demande de concevoir avec Vincent Scotto la bande originale du long métrage de 1937 Pépé le Moko avec Jean Gabin. Il a été crédité sous le nom Mohamed Ygerbuchen. Le remake film fut refait en 1938 à Hollywood par John Cromwell sous le nom de Algiers (En), Casbah (Fr), sa musique sera à nouveau utilisée : cette fois il fut crédité sous le nom de Mohammed Igarbouchen[2].

En 1938, il rencontre à Paris le chanteur juif algérien Salim Halali, avec qui il compose une cinquantaine de chansons, principalement dans un style flamenco arabe. La collaboration a été couronnée de succès dans les clubs parisiens, et ils ont également tourné dans le reste de l'Europe. Ils étaient particulièrement populaires en Afrique du Nord. En 1937, il écrira notamment la partition du film Terre Idéale en Tunisie.

La BBC diffusa en 1939 son œuvre orchestrale Moorish Rhapsody, dirigée par Charles Brill[7].

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il entame une relation avec une germano-belge, Iwane Vom Dorp, avec qui il aura eu cinq enfants, elle finira par le quitter[8]. Iguerbouchène gère la direction musicale des émissions de Paris-Mondial ciblants l'Afrique du Nord[9],[10],[11]. Le 10 mai 1940, la Wehrmacht engage la bataille de France et pénètre sur le territoire français. Le 20 mai 1940, en pleine attaque allemande sur la France, toutes les émissions artistiques, de variétés ou de divertissement sont interdites sur toutes les ondes françaises. Seules restent les émissions d'informations dans toutes les langues, les déclarations du Gouvernement et les communiqués de l'armée. Le 9 juin 1940, Paris-Mondial diffuse ses dernières émissions depuis Paris et le personnel étranger de la Radiodiffusion nationale est invité à partir pour Tours, d'où sont réalisées les émissions le lendemain. Au fur et à mesure de l'avancée allemande, le personnel de Paris-Mondial se replie à Poitiers, puis Toulouse et Bordeaux d'où reprennent les émissions. Le 17 juin 1940, Paris-Mondial relaie le discours du maréchal Pétain, nommé la veille Président du Conseil, qui annonce la cessation des combats et la demande d'armistice, puis suspend ses émissions juste après la diffusion de celui-ci, comme tous les postes d'État. La suspension devient définitive à la signature de la convention d’armistice et le service de Pascal Copeau est démantelé. À la fin de la guerre, les équipes de Paris-Mondial, ne seront pas poursuivies pour collaboration par le gouvernement français[12].

 
Le Théâtre National Algérien (1910)

Au début de 1945, Iguerbouchène compose une centaine de chansons basées sur des poèmes de Rabindranath Tagore. En 1946, il compose la musique de Les Plongeurs du Désert de Tahar Hannache[13]. Iguerbouchène a également composé pour le court métrage français de 1962 Le Songe De Chevaux Sauvages, réalisé par Albert Lamorisse.

«Père du métissage musical en Algérie, Mohamed Iguerbouchène a synthétisé, voire assimilé différentes cultures musicales : maghrébine, européenne, orientale et africaine. Ces influences mutuelles se déclinent dans ses compositions ; La Rhapsodie Concertante, Blue Dream, La Féérie Orientale sont quelques exemples qui illustrent bien cette démarche» (page 6). (…) «Le métissage musical dont il est question se rapporte aux confrontations de styles, de rythmes et d’instruments de musique pour, en fait, tomber dans un cadre d’interprétation de genres. Le but étant de vivifier les créations musicales par les différents trocs d’esthétique» Mohamed Iguerbouchène : Une Oeuvre Intemporelle de Mouloud Ounnoughène (2015) [14].

En 1957, Mohamed Iguerbouchène retourne en Algérie, où il travaille pour la radio algérienne, compose et dirige l'orchestre du Théâtre National Algérien. Cependant, il s'est retrouvé marginalisé dans les années qui suivront. Ignoré et et affaibli, il est meurt du diabète à Alger dans l'anonymat en 1968, à l'âge de 58 ans[4].

Mohamed Iguerbouchène laisse une œuvre considérable : près de 900 compositions dont 86 musiques de films archivées pour la plupart à l'Institut national de l'audiovisuel et à la Bibliothèque nationale de France (département Musique)[15]. En 2014, sort le documentaire de Abdelkrim Bouguerra Qui êtes vous Mr. Iguerbouchène ? [16]. En 2015, Mouloud Ounnoughène publie la biographie Mohamed Iguerbouchène : Une Oeuvre Intemporelle aux éditions Dar Khettab (Alger), qui souligne «Son œuvre musicale, incommensurable et unique, ennoblie par une technicité exceptionnelle, une qualité harmonique étonnante et une variabilité stylistique déroutante, brille tel un diamant»[14].».

Bibliographie modifier

  • Mouloud Ounnoughène, Mohamed Iguerbouchène : Une œuvre intemporelle, Dar Khettab, Algiers, 2015.
  • Ethan B. Katz, The Burdens of Brotherhood: Jews and Muslims from North African to France, Harvard University Press, , 2015.

Notes et références modifier

  1. [1]Liberté, 4 décembre 2013, Proposition de classement de la maison du compositeur Mohamed Iguerbouchène
  2. a b et c Kader Bakou, « Mohamed Iguerbouchène, cet illustre oublié », (consulté le )
  3. Arab Forbidden To Marry White Girl, Falkirk Herald , 31 mai 1930, p12.
  4. a et b Jordaan 2022, p. 584-67.
  5. (en) Jill Jarvis, Décoloniser la mémoire : l'Algérie et la politique du témoignage , 52., Duke University Press, (ISBN 978-1-4780-2141-4).
  6. SACEM, « SACEM, Mohamed Iguerbouchène, Auteur, compositeur » (consulté le )
  7. « Charles Brill et son orchestre », sur Radio Times.
  8. Jordaan, Peter 'Rhapsody in the Dark', Van Magazine, 12 mai 2022 [2]
  9. Jordaan, Peter, A Secret Between Gentlemen: Lord Battersea's hidden scandal and the lives it changed forever., Alchemie Books, 2022, pp623-629
  10. Jacques Cantier, Algeria Under The Vichy Regime, Odile Jacob, Paris 2002, p114
  11. « Pétition Reconnaissance posthume du Compositeur Mohamed Iguerbouchen », sur petitionpublique.fr (consulté le )
  12. Mohammed Aïssaoui, L’Étoile jaune et le croissant, Gallimard, Paris 2012, p. 72.
  13. La Rédaction, « Portrait Mohand Iguerbouchène / Itineraire d'un artiste complet », sur La Dépêche de Kabylie, (consulté le )
  14. a et b Kamel Bousmala, « Note de lecture, Mohamed Iguerbouchene, une œuvre intemporelle, du Dr Mouloud Ounnoughene : Un monument de la musique algérienne », (consulté le )
  15. « Mohamed Iguerbouchen (1907-1966) », sur data.bnf.fr (consulté le )
  16. Institut National de l'Audiovisuel- Medmem.eu, « Qui êtes vous Mr. Iguerbouchène ? », sur medmem.eu (consulté le )

Liens externes modifier