Marguerite Czarnecki Rogivue

personnalité suisse et française de la Seconde Guerre mondiale
Marguerite Czarnecki
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 82 ans)
Nom de naissance
RogivueVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activité
Déléguée du Centre Quaker International de Paris pendant la Seconde Guerre Mondiale
Conjoint
Stéphane Czarnecki (1880 ? - 1941)
Autres informations
Conflit

Marguerite Czarnecki (née le à Lausanne et morte le ) est une travailleuse sociale d’origine suisse qui a vécu essentiellement en France. Elle a assisté Henry van Etten au Centre quaker international de Paris, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a agi sans déroger à des principes de neutralité et de pacifisme.

Jeunesse et famille modifier

Marguerite Adrienne Rogivue est née le à Lausanne en Suisse[1]. Elle est la cadette d'une sœur et de deux frères. Son père Adrien Rogivue (1852-1923) était médecin à Lausanne, fils de médecin, engagé dans les œuvres de bienfaisance et dans l’Église protestante, aussi sociologue en relation avec le mouvement pacifiste dont Paul Passy du christianisme social français. Il a épousé Anna Élisa Curchod (1868-1920). Marguerite perd sa mère à l’âge de quinze ans et son père trois ans plus tard[2].

Elle étudie à l'École Vinet de Lausanne, à une époque où Hélène Monastier y est enseignante. À l’âge de dix-sept ans, elle effectue un séjour en Angleterre. Puis elle poursuit sa formation à Paris, à l’École des missions protestantes[2]. Elle travaille un temps dans le domaine de l'import-export[3].

Alors qu’elle est prête à partir en mission en Afrique, elle fait la rencontre de Stéphane Czarnecki. Il lui fait connaître le quakerisme et deviendra son époux[2]. Il meurt le , des suites d'une longue maladie[4],[5].

Seconde guerre mondiale modifier

American Friends Service Committee modifier

Durant la guerre, Marguerite Czarnecki est le point de contact en zone occupée pour l'organisme de secours quaker américain (American Friends Service Committee)[6].

En juillet 1940, Marguerite Czarnecki est chargée du Centre quaker de Paris[7] pendant l'absence de son directeur, Henry van Etten, qui a dû quitter Paris avec sa famille[8].

Elle offre l'aide du Secours Quaker à des familles de réfugiés juifs en provenance d'Allemagne et d'Autriche et alerte ses homologues de Philadelphie et de Bordeaux sur l'urgence de la situation [9].

En janvier-février 1941, Marguerite Czarnecki rend visite à des prisonniers britanniques du camp de Drancy, transférés depuis la prison du Fort de Romainville[10]

Le , Marguerite Czarnecki est la cosignataire avec Marius Grout et deux autres quakers français (Joseph Kreutz, Le Roy), d'une lettre envoyée à Xavier Vallat, commissaire général aux questions juives, pour demander une réunion afin de protester contre le traitement infligé aux Juifs par le gouvernement de Vichy[11].

Le Secours Quaker sous la coupe du Secours national vichyste modifier

L'édition du du journal antisémite Je suis partout consacre une demi-page au Secours national et dénonce le fait qu'en son sein le Secours Quaker puisse être financé par l’État[6]. Marguerite Czarnecki et plusieurs de ses collègues, dont Henry van Etten, sont désignés nommément et à plusieurs reprises comme étrangers (Suisse et Néerlandais) et en communication avec l'Angleterre, ce qui va à l'encontre de la politique du Maréchal Pétain. Le journal dénonce aussi les aides de première nécessité que le Secours Quaker apporte aux réfugiés espagnols, aux exilés et détenus juifs Allemands et Français ainsi qu'aux prisonniers gaullistes de Paris et de la région parisienne[12].

Le , Marguerite Czarnecki écrit à sa hiérarchie basée à Marseille pour demander quelle aide le Secours Quaker pourrait apporter aux victimes de la rafle du Vel d'Hiv., notamment aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. Elle s’enquiert des demandes d'émigrations qui pourraient être faites. Elle renouvelle plusieurs fois ses requêtes, notamment en 1944 au sujet des internés du camp de Drancy, mais sans obtenir de moyens ni d'informations[13].

Le retour des anglo-américains modifier

A partir d'août 1945, Marguerite Czarnecki participe avec le nouvel administrateur des secours quakers pour la France. William Howard Wriggins (en), à la coordination des équipes quakers américaines, britanniques et françaises, tout en poursuivant son activité au Secours Quaker de Paris (dont des bureaux supplémentaires ont été ouverts au 17, rue Notre Dame des Champs, Paris 6ème)[14],[6].

Elle voyage à l'automne 1945 avec H. Wriggins, Margaret Frawley (précédent administrateur pour la France) et Bill Fraser (du Friends Relief Service, le secours quaker britannique), vers les centres quakers de Toulouse, de Montauban et de Perpignan (où avait œuvré Mary Elmes), qui avaient été durement éprouvés pendant toute la durée du conflit[15].

À partir de 1946, Marguerite Czarnecki se range à l'idée que les moyens alloués à la France par les quakers anglo-américains vont désormais devoir être orientés vers les pays du Centre et de l'Est de l'Europe[16].

Après-guerre modifier

Le , Marguerite Czarnecki, en tant que directrice du service éducation au Centre Quaker international, se voit autorisée par le directeur du cabinet du ministre, P. Escoube, à poursuivre son travail d'appariement entre des écoles françaises et américaines[17].

Dans le numéro du du Friends Journal (en), Marguerite Czarnecki écrit que le S.A.S. (School Affiliation Service) a mis en relation une soixantaine d'établissements scolaires des deux côtés de l'Atlantique. Elle souligne l'esprit de coopération internationale que le S.A.S. permet de nourrir, ainsi que la précoce mise en œuvre qui y a été faite de méthodes pédagogiques en phase avec les demandes exprimées par les étudiants au cours du mois de mai 1968[18].

Elle est décédée à l'âge de quatre-vingt-deux ans, le 16 février 1988[19].

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Hommage à Marguerite Czarnecki (née en 1905) : témoignages sur ce que peut "être" et "faire" une femme quaker, Paris, Association de France et Centre Quaker International de la Société Religieuse des Amis (Quakers), , 33 p. (lire en ligne)

Archives modifier

Articles connexes modifier

Notes et références modifier

  1. « État civil de Lausanne », Gazette de Lausanne,‎ , p. 3 (lire en ligne)
  2. a b et c Hommage…, 1988, p. 1.
  3. Wriggins 2004, p. 131.
  4. « Faire-part de décès », Gazette de Lausanne,‎ , p. 4 (lire en ligne)
  5. L’avis de décès de Stéphane Czarnecki n’indique pas son âge. Il mentionne une sœur, « Mademoiselle Wanda Czarnecki, en France ». Un Fonds Czarnecki-Maret existe aux Archives départementales du Val-de-Marne, avec une esquisse de généalogie, qui pourrait concerner ce Stéphane : Ignace Félix Czarnecki (né en Pologne, mort à Paris) a épousé à Paris Pauline Octavie Constant. Ignace a deux enfants : Wanda et Stéphane. Stéphane a deux fils : Jan Stéphane et Serge Emmanuel. Voir [1], p. 450.
  6. a b et c AFSC records relating to humanitarian work in France.
  7. Centre quaker de Paris, situé alors au 12 rue Guy de la Brosse, Paris 5ème.
  8. AFSC records relating to humanitarian work in France, p. 166, boîte 72, dossier 10.
  9. (en) David Lees et Lindsey Dodd, Vichy France and everyday life confronting the challenges of wartime, 1939-1945, London Bloomsbury Academic, , 240 p. (ISBN 978-1-350-01162-5 et 1-350-01162-2, OCLC 1080351251, lire en ligne), p. 107-123, note n°11 du chapitre
  10. AFSC records relating to humanitarian work in France, p. 167, boîte 72, dossier 14.
  11. AFSC records relating to humanitarian work in France, p. 50, boîte 25, dossier 8.
  12. Robert Brasillach (rédacteur en chef), « Où va le Secours National ? Au service d'Albion », Je suis partout,‎ , p. 8/8 (lire en ligne)
  13. (en) Kelly D. Palmer, Humanitarian relief and rescue networks in France, 1940-1945, Michigan State University. Department of History, , 203 p. (ISBN 978-1-124-33731-9 et 1-124-33731-8, OCLC 783827337, lire en ligne), p. 108
  14. Wriggins 2004, p. 131,149.
  15. Wriggins 2004, p. 139.
  16. Wriggins 2004, p. 162.
  17. Les Langues modernes, bulletin mensuel de la Société des professeurs de langues vivantes de l'enseignement public, novembre 1960, page 478, « Textes officiels » M/C n° 781 du 8 oct. 1959 [lire en ligne]
  18. (en) Marguerite Czarnecki, « En passant par Philadelphie », Friends Journal,‎ , p. 123 (lire en ligne)
  19. « Décès : Mme Marguerite CZARNECKI, née ROGIVUE, ~1906 -- 1988-02-16 », Le Figaro nº 13523,‎ , p. 32