Alexis Yolou, né vers 1950[1] et mort le [2] est un homme politique néo-hébridais.

Alexis Yolou
Fonctions
Député à l'Assemblée représentative des Nouvelles-Hébrides

(6 mois et 28 jours)
Prédécesseur ?
Successeur Jean-Marie Léyé
Biographie
Date de naissance v.
Date de décès (à 30 ans)
Nature du décès homicide
Nationalité néo-hébridaise
Parti politique Union des communautés des Nouvelles-Hébrides ;
Mouvement John Frum

Biographie

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Il naît dans ce qui est alors le condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides, actuel Vanuatu. Scolarisé à l'École des pères catholiques de Montmartre à Port-Vila, « parfait francophone », il poursuit ensuite son enseignement supérieur en France[3]. De retour aux Nouvelles-Hébrides, il devient membre de l'Union des communautés des Nouvelles-Hébrides (UCNH), mouvement autochtone francophone constitué en réponse au Vanua'aku Pati, mouvement nationaliste dominé par les anglophones. Tandis que le Parti national, sous la direction de Walter Lini, milite pour un accès rapide des Nouvelles-Hébrides à l'indépendance, l'UCNH prône un transfert de pouvoirs plus progressif de la part des autorités coloniales, « afin de préparer cette transition dans de meilleures conditions »[4]. En 1977 il est nommé à la tête de la branche du parti à Tanna, et y travaille en coopération avec le mouvement millénariste John Frum, également opposé à une indépendance qui placerait toutes les îles du pays sous le contrôle du Vanua'aku Pati[3].

C'est comme représentant du mouvement John Frum qu'il est élu député de Tanna à l'Assemblée représentative aux élections législatives de novembre 1979, mais il demeure associé dans le même temps au Parti modéré, nouveau nom de l'UCNH[5],[6]. Comme les autres membres du Parti modéré, il boycotte l'Assemblée dominée par le Vanua'aku Pati, affirmant que les élections ont été truquées[6]. Début 1980, les membres du mouvement John Frum refusent l'indépendance programmée d'un État unitaire néo-hébridais, et proclament l'indépendance séparée de Tanna et des îles avoisinantes dans le sud de l'archipel, l'appelant « nation Taféa ».

À la demande du gouvernement de Walter Lini, les forces britanniques procèdent à l'arrestation de bon nombre de militants tannais. Le 11 juin à 3 heures du matin, des membres du Parti modéré, menés par Alexis Yolou, s'approchent du poste de police où ils sont détenus. Les ayant vu venir, des membres du Vanua'aku Pati les attendent aux côtés de policiers autochtones et du ministre des Affaires sociales, Willie Korisa. Yolou et Korisa se saluent et discutent, Yolou demandant la libération des prisonniers et Korisa refusant. Yolou retourne à ses camarades et leur enjoint de quitter les lieux au moins provisoirement. Des hommes armés du Vanua'aku Pati ouvrent alors le feu sur les hommes du Parti modéré, blessant treize d'entre eux, dont Yolou. Les circonstances exactes de la mort de ce dernier sont imprécises, mais son cadavre examiné quelques heures plus tard porte plusieurs traces de balles de fusil à pompe ainsi qu'une blessure à l'arme contondante, amenant le médecin légiste à conclure qu'il a été frappé alors qu'il gisait à terre après avoir été abattu. Il est le seul mort de cet événement, malgré des blessures graves parmi ses camarades[7].

Le procureur général de la colonie, Graeme McKay, fait interdire le numéro du journal francophone Jeune Mélanésie qui accuse des militants du Vanua'aku Pati d'avoir assassiné le jeune homme de 30 ans, puis publie son rapport. Il estime qu'Alexis Yolou a soit été assassiné, soit été victime de coups et blessures, mortellement atteint puis abandonné à son sort. Il reconnaît la présence illégale d'hommes en armes membres du Vanua'aku Pati sur les lieux du drame mais sans pouvoir accuser qui que ce soit précisément de cet homicide. Personne n'est arrêté. Jean-Jacques Robert, alors haut-commissaire français aux Nouvelles-Hébrides, dira par la suite qu'il est certain qu'Alexis Yolou a été assassiné par un membre du Vanua'aku Pati. Avec la mort de Yolou, le mouvement sécessionniste de Tanna s'estompe[7],[3],[8].

Les Nouvelles-Hébrides deviennent indépendantes en juillet 1980, devenant la république de Vanuatu. Le siège d'Alexis Yolou au Parlement demeure vacant jusqu'à la tenue en d'une élection partielle, remportée par le candidat de l'Union des partis modérés, Jean-Marie Léyé[9],[10].

En 2017, le président de la République, Tallis Obed Moses, visite sa sépulture dans le village de Lowanatom sur l'île de Tanna et qualifie étrangement Alexis Yolou de « pionnier de la lutte pour l'indépendance » du Vanuatu[11].

Références

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  1. Jean-Marc Tabani, Une pirogue pour le paradis : Le cube de John Frum à Tanna (Vanuatu), Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2008, (ISBN 9782735111930), chapitre 5
  2. « L'indépendance des Nouvelles-Hébrides pourrait être retardée », Le Monde, 13 juin 1980
  3. a b et c Jean-Marc Tabani, Une pirogue pour le paradis, op. cit.
  4. Vanuatu: Décès de l’ancien Président francophone Jean-Marie Léyé », Tahiti Infos, 10 décembre 2014
  5. (en) Joël Bonnemaison, The Tree and the Canoe: History and Ethnogeography of Tanna, University of Hawaii Press, 1994, p.279
  6. a et b (en) "New Hebrides: High hopes are haunted by high dangers", Pacific Islands Monthly, janvier 1980, pp.14-15
  7. a et b (en) Joël Bonnemaison, The Tree and the Canoe, op. cit., pp.297-299
  8. (en) "A close look at Port Vila's 'Four O'Clock Follies'", Pacific Islands Monthly, août 1980, p.18
  9. « Conseil des élections », Journal officiel de la république de Vanuatu, 13 septembre 1982, p.10
  10. (en) "Pacific Report", Pacific Islands Monthly, octobre 1982, p.5
  11. (en) "Teach country’s struggle", The Vanuatu Daily Post, 30 octobre 2017